12/10/2022
"Salvini et Berlusconi mettent le gouvernement aux enchères."
Italie. Revue de presse.
L’agression russe en Ukraine, avec la déclaration finale du G7 extraordinaire qui s’est tenu hier et les signes « d’ouverture » du Kremlin sur une éventuelle rencontre entre les présidents russe et américain lors du G20 fait les gros titres de la presse italienne : « Le G7 contre Poutine : nous donnerons encore plus d’armes à Kiev » - Lavrov fait des concessions : nous sommes ouverts à une rencontre avec Biden. Même les « faucons » du Kremlin évoquent maintenant les négociations (Corriere della Sera), « Lavrov : Poutine est disposé à rencontrer Biden » - Lavrov laisse entrevoir un espoir lors du prochain G20. Pour la Maison Blanche, le Kremlin a fait « de mauvais calculs » (La Stampa), « La stratégie de Poutine : je pourrais rencontrer Biden » - Après les frappes sur Kiev, le Kremlin fait des concessions sur le dialogue. L’Otan prépare des exercices de dissuasion nucléaire. Berlin envoie des systèmes de défense anti-missiles à Kiev, l’Italie enverra ses formateurs (Il Messaggero), « Poutine reste sans armes et tend la main à Biden » (Il Giornale). Les prévisions de croissance du FMI, annonçant l’entrée en récession de l’Italie à hauteur de -0,2% pour 2023, sont aussi citées « FMI : l’Italie et l’Allemagne seront en récession en 2023 » (Sole 24 Ore), « PIB, Draghi démenti par le FMI : l’Italie en récession. Et Macron reconnait : Biden nous étrangle avec son gaz quatre fois plus cher » - Le ministre Le Maire dénonce le prix proposé par les Etats-Unis (Fatto Quotidiano). Enfin, les tractations pour la formation du nouveau gouvernement à la veille de la première réunion des chambres sont évoquées en Une et dans les pages intérieures « Salvini et Berlusconi mettent le gouvernement aux enchères » - Les deux leaders demandent des postes-clé à Meloni (La Repubblica).
ANALYSE, Sole 24 Ore, L. Palmerini « Le ministère de l’Economie qui fera tenir debout le gouvernement » : « Même si ces jours-ci on a beaucoup parlé des différents ministères allant du développement économique à la Santé, et de la Justice au Tourisme, Giorgia Meloni était surtout concentrée sur la seule vraie infrastructure stratégique du nouvel exécutif : le ministère de l’Economie. Déjà par le passé, les regards étaient rivés sur ce ministère, notre pays étant fortement endetté et avec une économie en difficulté. Aujourd’hui s’ajoutent les raisons liées à la crise énergétique mais aussi les préjugés en Europe sur Meloni. Pour la dirigeante de Fratelli d’Italia il s’agit donc de trouver un nom pouvant faire face au scénario complexe et qui soit crédible en Europe afin de jouer la carte qui est restée jusque-là cachée : celle d’un nouveau creusement du déficit. Il est de plus en plus clair que sans une initiative commune en Europe comme le fonds SURE, il n’y a pas de grandes marges de manœuvres pour l’Italie afin d’affronter les coûts élevés pour les ménages et les entreprises. Sans doute, l’attente de Bruxelles sur les prochaines décisions en Italie dépend aussi du nom de celui qui sera nommé au ministère de l’Economie. Ce qui compte pour les partenaires européens est de savoir avec qui ils auront affaire pendant les cinq prochaines années. On parle aussi de la nomination de Fabio Panetta pour une courte permanence, le temps de le nommer à la tête de la Banque d’Italie le moment venu, en octobre 2023. »
COMMENTAIRE, Il Giornale, A. Minzolini (directeur) : « On ne peut pas se permettre de rater les débuts politiques de cette mandature » - La coalition de droite n’a pas encore trouvé une entente sur les présidents des Chambres mais un début caractérisé par les querelles serait impardonnable : « Déjà au lendemain des élections, ce quotidien avait souligné que le vrai problème de la coalition de droite, notamment de Meloni, n’était pas celui de former un gouvernement mais plutôt celui de durer. Car c’est là le vrai défi, d’autant plus que la conjoncture économique n’est certainement pas favorable. Le FMI et l’Istat ont fait savoir que l’Italie va vers une récession, -0,2% pour 2023. Ce qui veut dire que le prochain exécutif n’aura pas beaucoup de ressources à disposition alors qu’il aura la lourde tâche de faire sortir le pays des bas-fonds de la crise. Pour y arriver, Meloni devra agir avec prudence. L’opposition, notamment le M5S puisque le PD se leurre encore de pouvoir faire un front commun, ne fera pas de cadeaux. Et vu les précédents (où il est clair qu’il ne sera pas possible de compter sur l’aide du Quirinal ni du président du Conseil sortant), Si Meloni ne veut pas rester seule, elle devra compter sur sa source de légitimation primaire : la majorité de sa coalition au Parlement. Raison pour laquelle les soupçons, les frictions et les bras-de-fer sont la manière la moins idéale pour commencer une aventure censée durer 5 ans. Il suffit de regarder derrière nous pour voir comment se diviser et se faire la guerre pour rien a représenté le mal obscur de cette coalition. Faire trésor de ces erreurs est le seul vaccin efficace. »
COMMENTAIRE, La Stampa, M. Sorgi « Mieux vaut le retour des techniciens » : « Depuis samedi dernier, les deux réunions de coalition (l’une à la résidence milanaise de Berlusconi et l’autre à Rome où Meloni, qui prétend que les tractations se fassent dans les lieux institutionnels, ne s’est même pas présentée) ont échoué. Il serait légitime de se demander : mais comment, eux qui ont remporté avec un large écart les élections, grâce au succès de Meloni, ne parviennent pas à s’accorder ? Pourtant, nous voilà bien dans cette situation, et nous ne sommes même pas au début de la mandature. Dans ces conditions, Meloni devrait se présenter au Quirinal pour demander que Mattarella lui confie la charge de former le nouveau gouvernement. Le chef de l’Etat, avant de le faire, voudra savoir si Meloni est sûre de pouvoir compter sur une majorité. La situation au sein de la coalition de droite n’est guère idyllique. Il était naturel de croire que la victoire électorale écrasante pouvait les rapprocher et recréer cet esprit d’alliance avec le désir d’affronter ensemble les problèmes de ce pays qu’ils appellent « patrie ». A en voir les prémisses, au moment où une guerre fait rage en Europe et où une crise énergétique s’abat sur les ménages et les entreprises, il y a de quoi s’inquiéter. Si c’est là le retour de la politique, autant faire appel aux techniciens. »
PREMIER PLAN, La Repubblica, de P. Mastrolilli, « L’Italie est déjà entrée en récession et ‘’le pire est encore à venir’’ avertit le FMI » : « La récession est inévitable pour l’Italie et une bonne partie du monde. En revanche, sur les chiffres et sur les délais, les estimations du gouvernement et du FMI divergent. Une différence qui ne serait pas anodine pour la marge de manœuvre du prochain gouvernement de droite. Le rapport de l’actuel gouvernement italien prévoit en effet une récession jusqu’en mars 2023, suivie d’une reprise, alors que le FMI annonce une contraction de 0,2% du PIB sur toute l’année 2023. ‘’Le pire reste à venir’’ avertit Pierre-olivier Gourinchas, directeur du département de recherche au FMI. Ce sont la guerre en Ukraine, les pressions de l’inflation et le ralentissement de la Chine qui plombent le plus les économies. A l’échelle globale, l’inflation pourrait atteindre 9,5% et les banques centrales doivent poursuivre sur la ligne actuelle, sans accélérer davantage sur la hausse des taux qu’elles ne le font déjà. La vice-présidente de la Fed soutient également que les effets de l’augmentation des coûts de l’argent sont déjà présents bien que peu perceptibles. Le FMI prévoit pour l’Italie une hausse du PIB de 3,2% en 2022, soit 0,2 point de plus que l’estimation de juillet, mais une contraction de 0,2% pour 2023, ce qui est inférieur de 0,9 points aux estimations précédentes. En 2022, la croissance italienne est meilleure que celles de l’Allemagne et de la France, grâce notamment à la reprise du tourisme et de la production industrielle, alors que le ralentissement de 2023 sera lié en grande partie à la ‘’hausse des coûts de l’énergie et à l’impact de la politique monétaire plus sévère’’. Pour le FMI, nous allons être frappés par une récession technique et conseille de soutenir les citoyens les plus vulnérables et de poursuivre la diminution de la dette. La dette publique italienne devrait reculer de 147,2% en 2022 à 147,01% en 2023. Toujours selon le FMI, le déficit devrait passer de 5,4% à ce jour à 3,9% en 2023 et 3% en 2027. Le chômage, qui avait reculé de 9,5% en 2021 à 8,8% en 2022 devrait repasser à 9,4%. Rome voit en revanche une baisse du PIB pour le premier trimestre 2023 avant d’amorcer une reprise au deuxième trimestre grâce notamment à la ‘’hausse de la demande mondiale, d’une baisse du prix du gaz naturel et des effets bénéfiques croissants du Plan de Relance’’. Les 10 milliards d’euros issus d’une réévaluation du déficit ont par ailleurs été confirmés. »
PREMIER PLAN, Corriere della Sera, de F. Verderami, « Le message de Guerini et les ambiguïtés des manifestations pour la paix” : “Le ministre italien de la Défense, Lorenzo Guerini, a appelé à ce que l’Italie conserve une position nette dans la guerre en Ukraine. Il sera aujourd’hui à Bruxelles pour participer à son dernier sommet de l’OTAN. Il plaide pour une posture bien tranchée sur le conflit et regrette avoir observé au contraire ‘’de très graves ambiguïtés’’. Un message qui s’adresse notamment à ceux qui, au sein de son parti, le PD, réfléchissent déjà à reconstruire l’alliance avec Giuseppe Conte et le Mouvement 5 Etoiles, ‘’comme si de rien n’était’’. Face à la multiplication des manifestations pour la paix, le ministre, sur la même ligne que le Président de la République italienne, éprouve le besoin de rappeler que ‘’l’Italie continuera à soutenir l’Ukraine et le peuple ukrainien’’ victimes ‘’d’actes criminels’’. Il faut ‘’rester ferme et linéaire’’, et s’en tenir à la position adoptée par le gouvernement Draghi dès le 24 février. ‘’Nous souhaitons tous la paix’’ en revanche Lorenzo Guerini n’accepte pas certains raisonnements insidieux de ‘’pacifistes à la carte’’ qui critiquent l’absence d’initiatives pour mettre fin au conflit. ‘’Jusqu’à présent, Poutine n’a jamais manifesté une réelle volonté de trouver une entente’’ et ‘’à ce jour les conditions pour des accords sur les territoires occupés ne sont pas réunies’’. D’après l’OTAN, les Russes sont au contraire en train de rassembler des forces de défense pour tenter de résister aux pressions des forces ukrainiennes dans le Donbass et le Nord de la Crimée. Le gouvernement italien n’est même pas certain que le face-à-face entre le président américain Biden et Vladimir Poutine aura bien lieu dans le cadre du G20. ‘’Mais si nous n’avions pas soutenu Kiev depuis le début, on ne parlerait même pas de table de négociations aujourd’hui’’ tient à rappeler le ministre sortant qui vient de signer le cinquième décret pour l’envoi d’armes à l’Ukraine, non sans avoir auparavant pris contact avec Giorgia Meloni pour l’en informer. Il se dit confiant quant au futur gouvernement qui poursuivra sur cette ligne ‘’bien tranchée’’. C’est également ce qu’affirme Mulè, membre de Forza Italia et actuel sous-secrétaire à la Défense, qui évoque la position de la coalition de droite ‘’nous continuerons à offrir à l’Ukraine l’aide politique, économique, humanitaire et militaire dont elle aura besoin. La théorie de l’équidistance entre Kiev et Moscou doit être rejetée, cela reviendrait à ignorer la vérité ainsi que la position atlantiste et européenne de l’Italie’’. Le démocrate Guerini rappelle enfin que ‘’ceux qui ont à cœur la démocratie et l’intérêt du pays ne peuvent attiser les peurs et l’inquiétude des gens’’. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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