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11/07/2024

"L’étau se resserre sur les écoutes, l’abus de pouvoir est aboli."

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Italie. Revue de presse. 

Le sommet de l’OTAN, et notamment l’engagement à livrer des avions F-16 à l’Ukraine, domine les unes : « L’OTAN envoie les F-16 à Kiev » (Corriere della Sera, La Stampa)« OTAN : plus d’armes et plus d’endettement » (Avvenire), « OTAN, le message à Poutine : « les F-16 sont prêts » » (Giornale), « OTAN et Biden, la stratégie anti-Trump » (Domani). L’adoption de la réforme de la justice et notamment du décret abolissant le délit d’abus de pouvoir et limitant les conditions de recours aux écoutes dans les enquêtes fait aussi la une « Justice, un grand coup d’éponge » (Repubblica), « L’étau se resserre sur les écoutes, l’abus de pouvoir est aboli » (Il Messaggero), « Le cadeau de Nordio (Frères d’Italie) aux politiques et aux corrompus » (Domani). Enfin, les sujets économiques sont cités par certains quotidiens : « Le coup de frein de la voiture électrique : les prévisions de vente sont revues à la baisse » (Sole 24 Ore), « Voitures électriques, l’Etat devra renoncer à encaisser 3,8 milliards d’euros provenant de la taxe sur l’essence » (Stampa). 

Les JT couvrent essentiellement le sommet de l’OTAN à Washington, où Giorgia Meloni a confirmé vouloir atteindre l’objectif des 2% du PIB consacrés à la défense, la guerre en Ukraine, où des fosses communes avec des personnes apparemment torturées ont été mises à jour, la politique intérieure avec le décret porté par le garde des Sceaux Carlo Nordio (Frères d’Italie) sur les écoutes et l’abolition du délit d’abus de pouvoir dans l’administration, ainsi que la vague de chaleur qui s’abat sur l’Italie. 

Sur X ,aucun sujet majeur ne semble s’imposer. A signaler toutefois le hashtag #Vannacci après les propos de Marine Le Pen qualifiant le député léguiste Roberto Vannacci d’« inadapté » au rôle de vice-président du groupe des « Patriotes européens » en raison de son positionnement sur la Russie. 

ARTICLE, La Stampa, « De la possibilité de faire appel au trafic d’influence, voici la réforme signée par [le ministre italien de la Justice Carlo] Nordio » : « La suppression du délit d’abus de pouvoir, fortement voulue par le ministre de la Justice Carlo Nordio contre l’avis initial de la Ligue et de Fratelli d’Italia, est désormais acté dans la loi. Voici les principaux points de la nouvelle loi qui modifie différents aspects du procès pénal. La suppression du délit d’abus de pouvoir est sans aucun doute la mesure la plus contestée. Le ministre Nordio explique que ‘’la situation était désormais intolérable, des milliers et des milliers d’enquêtes visant des maires et des agents du service public étaient ouvertes, les plaçant pendant des années sous le couperet judiciaire, les poussant parfois à démissionner avant d’être finalement blanchis ou que l’affaire soit classée sans suites’’. Le secrétaire général de l’Association nationale de la magistrature, Salvatore Casciaro, répond que ‘’c’est une donnée trompeuse qui ne tient du reste pas compte de l’abrogation partielle de ce délit en 2020 et des modifications apportées par la réforme Cartabia. Tout cela se traduit par un dénigrement injuste et sommaire de la magistrature devant l’opinion publique’’. En revanche, le ministre a réintroduit une peine pour les abus d’usage de fonds ou de biens de la part d’agents de la fonction publique qui en auraient la responsabilité dans le cadre de leurs fonctions. Ce délit était compris parmi les cas d’abus de pouvoir mais la suppression de ce dernier aurait donc laissé un vide juridique. Dans ces cas, une peine de 6 mois à 3 ans [de prison] a donc été prévue. La sénatrice léghiste Giulia Bongionro déclare que ‘’la norme sur l’abus de pouvoir était très problématique, il était juste d’intervenir. La Commission que je préside au Sénat examine en ce moment de nouvelles formes de protection pour les citoyens contre d’éventuels comportements préjudiciables de la part de fonctionnaires’’. La réforme intervient également sur le trafic d’influence, dont la définition était jugée trop vague par les critiques, selon lesquels les procureurs avaient trop de marge d’interprétation. Le domaine d’application a donc été restreint : l’intervention est jugée illégale lorsqu’elle conduit à faire commettre un délit à un agent de la fonction publique. La peine minimale passe d’un an et six mois à 4 ans et six mois. Concernant les écoutes, les conversations et les informations concernant des individus non impliqués dans les enquêtes ne devront plus être transcrites dans les rapports et actes publics, à moins qu’elles ne soient jugées ‘’pertinentes’’ pour l’enquête et le juge devra supprimer les écoutes concernées. Les données personnelles des individus tiers (autres que les parties impliquées) ne devront pas apparaitre sauf lorsque cela sera indispensable pour exposer des éléments essentiels. Des normes garantissant le respect de la vie privée des prévenus ont été introduite (discrétion lors de la transmission des actes etc). ‘’Ce qui ne revient pas à ‘’bâillonner’’ la presse mais à maintenir le secret de l’instruction selon le code pénal déjà en vigueur’’ observe le ministre. Le prévenu et la défense devront pouvoir prendre connaissance des actes déposés avant l’interrogatoire et une éventuelle sentence, sauf dans les cas de délits mafieux ou terroristes. Les avocats saluent cette mesure. Le procureur ne pourra plus proposer de faire appel contre les sentences d’acquittement de premier degré. La mesure exclut toutefois les délits les plus graves. Il faudra voir à présent si la Cour constitutionnelle approuve la formulation voulue par Carlo Nordio (après avoir rejeté celle proposée dans la réforme de 2006). »

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Carlo Nordio

COMMENTAIRE, Corriere della Sera, M. Franco « Les retombées sur le gouvernement de l’isolement du souverainisme [en Europe] » : « Après les élections européennes et les législatives en France, on constate avant tout l’isolement des groupes extrémistes, notamment à droite, et la volonté [des électeurs] de renforcer la majorité formée par les populaires, socialistes et libéraux en misant sur une politique étrangère en faveur de l’Ukraine et de l’Otan. Dans ce contexte, la vocation des Conservateurs de Giorgia Meloni serait d’être inclus dans ce schéma européen mais ‘’sans une alliance structurelle avec eux’’ a souligné Ursula von der Leyen. Cela s’explique par les prises de distances avec ECR des socialistes et des libéraux (outre certains courants du PPE) et le fait que certains partis des Conservateurs aient rallié les « Patriotes » pro-russes de Marine Le Pen, de Matteo Salvini et de Viktor Orban. La création de ce groupe et ces transferts de partis confirment qu’il y avait bien une ambiguïté de fond, dont on a obtenu la clarification de la manière la plus embarrassante possible. Et le ton ne risque pas de se faire plus apaisant entre groupes. Là aussi, la Présidente du Conseil devra faire face d’une part aux extrémistes de droite dans l’UE et d’autre part à son allié Salvini en Italie. Le bras-de-fer à distance entre le dirigeant de la Ligue et le chef de FI Tajani a atteint des sommets : cela n’impactera pas la tenue du gouvernement mais en ternira sans doute l’image. Tajani a confirmé, comme on pouvait s'y attendre, que "Forza Italia votera pour von der Leyen" à la présidence de la Commission, ce que la Ligue et les Patriotes considèrent précisément comme une provocation. Quant aux médiations douteuses du dirigeant hongrois Orbán, président tournant de l'UE, M. Tajani répète qu'il ne peut le faire qu'en tant que chef de son pays. Si la « démission » d’Orban de la présidence tournante de l’UE est exclue, les tensions avec les « Patriotes » et leurs penchants en politique étrangère sont toutefois confirmées. Là aussi, la distance entre les alliés du gouvernement italien est évidente. Tajani prévient : ‘’Orban est libre de faire des voyages mais attention à ne pas affaiblir l’unité de l’Occident’’. La Ligue de Salvini, au contraire, salue explicitement l’initiative hongroise. Ces derniers jours, Salvini a fait des déclarations demandant d’arrêter l’envoi d’autres armes à l’Ukraine. Meloni, depuis Washington, a rappelé pour sa part que le gouvernement est fermement arrimé à l’Otan et donc attaché à la défense de l’Ukraine. » 

ARTICLE, la Repubblica, T. Ciriaco et P. Mastrolilli : « Les émissaires de Donald Trump rencontrent des représentants européens, mais l’Italie s’y refuse » : « Il y a un fantôme qui hante les couloirs du sommet de l’OTAN : celui de la future administration Trump. Divers conseillers de l’ancien président, qui espèrent en son retour à la Maison Blanche, rencontrent de façon plus ou moins officielle les délégations européennes. En ce qui concerne l’Italie, l’approche n’a pas remporté un franc succès : la proposition a été déclinée. Si l’agenda chargé des ministres a été invoqué, ces rencontres ont été refusées surtout par égard pour le maître des lieux, Joe Biden, et aussi car la question trumpienne est au cœur des tensions entre la présidence du conseil et Matteo Salvini. Si la manœuvre de rapprochement a échoué, c’est aussi pour des raisons tactiques, car le véritable lien entre l’exécutif italien et l’équipe de Trump réside dans la personne de Mike Pompeo, ancien secrétaire d’Etat d’origine italienne qui souhaiterait devenir secrétaire d’Etat à la Défense, un futur poste qui aurait pu susciter l’intérêt de Crosetto et Tajani. Mais alors qui sont les deux ‘’ambassadeurs’’ qui tentent de préparer le terrain auprès des Européens ? Le premier est l’ancien général Keith Kellogg, qui avait été chef de cabinet dans le Conseil pour la sécurité nationale lors du mandat de Donald Trump. Il a confié à Reuters avoir rencontré plusieurs ministres des Affaires étrangères, ainsi que le président du parlement ukrainien, Ruslan Stefanchuk. C’est cet homme qui est à l’origine du plan de paix entre la Russie et l’Ukraine qui constitue désormais la ligne de Donald Trump sur le sujet. Le deuxième homme s’appelle Richard Grenell, il fut ancien ambassadeur des Etats-Unis en Allemagne et président par intérim des services de renseignement. Très proche de Melania Trump, caution LGBTQ de l’équipe de campagne, il ambitionne de devenir secrétaire d’Etat. La présidence du conseil est très attentive au dossier américain, comme le démontre leur prudence face à ces émissaires. Matteo Salvini utilise en effet la figure de Donald Trump pour tenter de déstabiliser la majorité, tandis que le chef du groupe de la Ligue au Sénat, Massimiliano Romeo, a approuvé la ligne de Viktor Orban en déclarant qu’il fallait ‘’se réjouir de l’initiative de médiation’’ du dirigeant hongrois. Une preuve, pour les proches de Giorgia Meloni, que la Ligue veut mettre en difficulté la première ministre. D’où les termes très durs employés par Tajani : ‘’Les forces extrémistes sont isolées, sans pouvoir, et elles ne joueront aucun rôle. Je le dis : les Patriotes ne comptent pas’’. Malgré ces intrigues, Giorgia Meloni tente de rapporter chez elle un résultat : la nomination d’un Italien comme envoyé de l’OTAN sur le flanc Sud. Un poste que l’Espagne convoite aussi. » 

ARTICLE, Sole 24 Ore : « Meloni annonce l’envoi à Kiev d’un autre Samp-T et réitère l’objectif des 2% du PIB consacrés à la Défense » : « L’Italie, avec d’autres pays, s’apprête à renforcer le système de défense aérienne de Kiev en lui fournissant un autre système Samp-T. Un choix qui confirme le soutien de la présidente du conseil à l’Ukraine malgré les réserves de son allié Matteo Salvini. ‘’Aider Kiev à se défendre c’est défendre les civils et les infrastructures critiques que la Russie continue à attaquer’’, selon Giorgia Meloni qui est aussi revenue sur la question épineuse des 2% du PIB. D’après elle, l’Italie ‘’tiendra ses engagements en prenant en compte la situation, et dans les délais et les possibilités qui sont les nôtres’’. Une réponse qui confirme l’engagement mais prend acte de l’impossibilité de le tenir en l’état, puisqu’il coûterait 10 milliards d’euros. Pour Crosetto, la solution consiste à demander à l’UE ‘’d’exclure les investissements pour la Défense du pacte de stabilité’’, se donnant comme objectif 2028. Meloni a aussi voulu rappeler que l’Italie reste très engagée au sein de l’OTAN, notamment sur le plan ‘’du personnel dans les missions de maintien de la paix’’. » 

COMMENTAIRE, la Repubblica, S. Folli : « Le parti américain et le parti russe » : « Existe-t-il un parti russe en Italie ? Et un parti américain ? Cette question ne concerne pas que l’Italie mais elle prend chez nous une ampleur importante à cause de la majorité de droite qui a gagné les élections en 2022. Dans de telles conditions, la politique étrangère a acquis une centralité qui était un temps considérée comme acquise mais qu’il faut en fait reconquérir pas à pas. Jusqu’à il y a quelques années, les choix de l’Italie semblaient attendus : l’UE et l’OTAN comme pierres angulaires, et les critiques vis-à-vis de ce dispositif étaient marginales. Mais la guerre en Ukraine a changé cela, une position pro-russe a réémergé, et plus que tout une position anti-américaine et anti-occidentale. La situation à Gaza a aussi joué un rôle : avec la guerre en Ukraine, elle a suscité la peur d’une partie non négligeable de la population. S’est ainsi développé un ‘’pacifisme’’ transversal, fondé sur le refus du soutien à Kiev, à coup de ‘’qu’est-ce qu’on a à faire avec Zelensky, il doit se débrouiller seul ou bien se rendre’’. Ce parti pro-russe a récemment pris forme chez les Patriotes européens, un groupe que Matteo Salvini voit comme un outil à utiliser en Italie contre Giorgia Meloni. Qui à l’inverse, lors du sommet de l’OTAN, a tenu une position extrêmement orthodoxe et claire : dans les moments les plus durs de la guerre, l’Italie veut être un facteur de cohésion pour l’OTAN. Ce que démontre l’adhésion de la présidente du conseil au programme d’augmentation des dépenses militaires voulu par les Etats-Unis. Dans son entreprise atlantiste, Giorgia Meloni a pu compter sur son autre vice-président du conseil : Antonio Tajani. Toutefois, la question n’est pas résolue et elle nécessite une clarification interne à l’exécutif. Le ‘’patriote’’ de la Ligue a tout intérêt à intensifier ses attaques pour user Giorgia Meloni sans provoquer la chute du gouvernement. Raison de plus, donc, pour qu’elle ne se laisse pas entrainer dans une position défensive. À Washington en tout cas, il semble bien que le parti américain soit réapparu. Et l’enjeu maintenant sera le vote du 18 juillet, quand il faudra voter la confiance à Ursula von der Leyen. Les pas en avant faits par Giorgia Meloni devraient conduire à un vote favorable, sinon ce sera une victoire de Matteo Salvini. »

(Traduction : ambassade de France à Rome)

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