18/09/2023
"Le duel à distance : Meloni invite l’Europe à Lampedusa, Salvini soude son alliance avec Marine Le Pen."
Italie. Revue de presse.
La visite conjointe à Lampedusa de la Présidente de la Commission Européenne U. von der Leyen et de la Présidente du Conseil G. Meloni, à la suite de débarquements record de migrants sur l’île, fait les gros titres « Migrants, voici les 10 points de l’Europe » (Corriere della Sera), « Migrants, l’Europe bouge » (Il Messaggero) « « Arrêtons les passerelles sur les migrants » », von der Leyen et Meloni critiquées [par les habitants] (La Stampa). Le meeting annuel de la Ligue à Pontida, qui a vu notamment la présence de Marine Le Pen parmi les participants, est aussi cité « Le manifeste souverainiste » (La Repubblica), « Le duel à distance : Meloni invite l’Europe à Lampedusa, Salvini soude son alliance avec Marine Le Pen » (Il Giornale).
Les JT couvrent notamment la secousse sismique qui a touché la Toscane ce matin, la question migratoire avec la visite des présidentes U. von der Leyen et G. Meloni à Lampedusa, le conseil des ministres devant se réunir aujourd’hui et les suites de l’enquête sur l’avion de la patrouille italienne « Frecce Tricolore » qui s’est écrasé à Le Torrette (Turin) samedi dernier et ayant fait une victime et plusieurs blessés.
ENTRETIEN, Corriere della Sera, d’Antonio Tajani (Forza Italia), vice-Président du Conseil et ministre des Affaires étrangères, « Il faut un plan pour l’Afrique, nous avons besoin de solutions, pas de discours de campagne » : « Q : À Lampedusa, Meloni et von der Leyen ont-elles tenté de contrer Matteo Salvini et Marine Le Pen, qui progressent dans les sondages et tentent de doubler les gouvernements français et italien par la droite ? Le Pen progresse dans les sondages, Salvini je ne sais pas. Mais essayer de jouer la stratégie serait une erreur, nous devons trouver des solutions, pas lancer une bataille électorale à qui fera les plus grosses annonces. Pour ma part, cela fait dix ans, depuis que j’ai été commissaire européen, que je parle d’un plan pour l’Afrique. Nous pourrions demander à l'ONU de créer des centres d’accueil des migrants le long des routes migratoires, sur le modèle des centres du HCR au Niger, mais en plus grand. La pression est énorme. Il faut prendre le phénomène dans sa globalité, pas seulement lorsqu’il arrive jusqu’à nous. Même si vous bloquez les départs depuis la Libye ou la Tunisie, demain ils arriveront du Maroc, d'Algérie ou d'Egypte. Une nouvelle mission Sophia [comme évoquée par Giorgia Meloni] serait utile sur le plan de la dissuasion des départs, mais c’est tout. La seule solution est diplomatique : la priorité est de conclure des accords et d'investir en Afrique, dans les pays de provenance des migrants. On peut toujours mettre en place des centres de rétention les migrants irréguliers mais sans accords, on ne résout pas le problème. [Contrairement à ce que prétend la Ligue] la voie diplomatique n'a pas échoué. Autrement, au lieu de 10 000 migrants, on en aurait 50 000 qui arriveraient. Mais la situation est explosive, Khartoum est une ville sinistrée, le Niger, le Tchad et le Burkina Faso connaissent des situations extrêmement instables. La Tunisie est désormais un entonnoir plein. De la Corne de l'Afrique à la Guinée, la situation est ingérable. Il faut ajouter à cela la Libye et le Maroc, la Syrie et l'Afghanistan… Tout cela explique la gravité de la situation. Même la France et l'Allemagne commencent à avoir peur. Mais je pense que l'Europe a compris qu'il ne s'agit pas du problème de Lampedusa ou de l'Italie. La France a compris que nous risquons un exode d’envergure inédite. Concernant la lettre du commissaire Borrell qui a tenté de bloquer l'accord entre l'UE et la Tunisie, malheureusement, les socialistes européens bloquent l'accord pour des raisons politiques. Q : Lors de l’appel téléphonique avec Meloni, Macron s'est-il montré ouvert à l'opération navale ? Les mesures-tampons sont inutiles face aux guerres, à la croissance démographique, au réchauffement climatique et au terrorisme. Ces personnes fuient pour ne pas mourir. En Afrique, en 2050, il y aura 2,5 milliards de personnes, un ordre de grandeur bien supérieur aux dix mille de Lampedusa. Le cas de l’Italie n'est que la partie émergée de l'iceberg, nous le dirons à l'ONU. La fermeté du gouvernement doit servir dans l’immédiat à arrêter les trafiquants à Lampedusa, mais pour résoudre le problème de manière structurelle, nous avons besoin d'une vision stratégique. La Présidente du Conseil fera une intervention précise à ce sujet à l'ONU. »
PREMIER PLAN, La Repubblica, de C. Tito, « Flottes et militaires européens pour la surveillance [en Méditerranée] ; le rétablissement de [la mission] ‘’Sophia’’ prendra du temps » : « Le cinquième point du plan présenté par Ursula von der Leyen hier à Lampedusa porte sur une ‘’surveillance navale et aérienne’’. C’est le véritable enjeu des négociations entre la Présidente de la Commission européenne et la Présidente du Conseil italien, à savoir le rétablissement de ‘’l’opération Sophia’’. Il s’agit de la première tentative de déployer une flotte et des militaires européens pour faire face à l’immigration clandestine, écartée par Matteo Salvini alors qu’il était vice-Président du Conseil sous le premier gouvernement de Giuseppe Conte. Une bonne partie des 10 questions soulevées hier par Ursula von der Leyen avait déjà fait l’objet d’annonces, notamment lors du dernier conseil européen de 2022 auquel avait participé Mario Draghi. Autant d’intentions et de mesures, pour certaines déjà en vigueur, qui se sont heurtées à la réalité ces dernières années. On constate surtout que sans collaboration des pays de départ, rien ne peut être fait. Derrière ces discours, il y a la volonté de faire revivre l’opération Sophia qui, du reste, ne pourra pas être relancée si simplement et rapidement. La décision ne relève pas en effet de la Commission mais de chaque gouvernement. Ce n’est pas un hasard si Giorgia Meloni a demandé à Charles Michel d’inscrire le dossier migratoire à l’ordre du jour du prochain sommet d’octobre. Mais à huit mois des élections européennes, le sujet risque d’être peu rassembleur. Par ailleurs, une bonne partie des ressources militaires de l’UE est déjà mobilisée pour l’aide à l’Ukraine. Il faudrait au moins six mois pour reconstituer la flotte qui, il y a trois ans, était chargée de ‘’neutraliser les embarcations et les structures logistiques des passeurs’’. Mais l’opération Sophia avait été suspendue car elle s’était transformée en une simple mission de secours. Pour surveiller et bloquer les départs, la flotte militaire européenne aurait dû avoir accès aux eaux territoriales libyennes et tunisiennes. Une autorisation qui ne sera pas accordée facilement et en échange de laquelle il faudrait offrir une somme conséquente, plus d’un milliard d’euros. Il n’y a qu’avec des financements qu’il sera possible de convaincre les deux interlocuteurs potentiels. C’est du reste ce qui retarde l’application de l’accord avec la Tunisie, le président tunisien Said pressant l’UE pour recevoir les fonds prévus sans avoir présenté les projets qui seront ainsi financés. Il n’y a donc pas grand-chose de concret pour l’instant dans la visite à Lampedusa de la Présidente de la Commission européenne. Pour Meloni, le risque est que – comme cela s’est vérifié jusqu’à présent - cela ne débouche sur aucune solution pratique. Cela implique un investissement massif pour des aides aux pays africains. La critique la plus fréquente faite par Bruxelles à la Présidence du Conseil italien, est le manque de proposition concrète au-delà des slogans de campagne et les nombreuses querelles avec les partenaires qui pourraient apporter leur aide, comme la France. »
ARTICLE, Corriere della Sera, M. Cremonesi et C. Zapperi « Un virage à droite (mais pas sur tous les points), la Ligue lance la compétition avec Fratelli d’Italia » : « Ceux qui s’attendaient à des feux d’artifice seront peut-être restés déçus : à Pontida, dans le passé, nous avions assisté à quelque chose de bien plus sensationnel. Toutefois, l’officialisation du croisement des campagnes électorales de la Française Marine Le Pen et de l’Italien Matteo Salvini représente une nouvelle politique de premier ordre. Il n’y a rien de défini dans la « grande manifestation » annoncée par les deux dirigeants : les 13 et 14 octobre à Rome se tiendra un rendez-vous des jeunes militants « alternatifs à la gauche » sous le label d’Identité et démocratie (ID) en Europe, ainsi que des jeunes du parti Républicain américain, du Likoud israélien et de Fidesz d’Orban. Lors du meeting d’hier, plusieurs regardaient leurs téléphones pour voir ce qui se passait en même temps à Lampedusa, où von der Leyen et Meloni s’étaient données rendez-vous. La coïncidence avec le meeting a irrité plusieurs léguistes. Luca Zaia est le seul ténor à avoir commenté : ‘’D’accord si von der Leyen va à Lampedusa, mais qu’elle se rappelle qu’elle doit rentrer chez elle et résoudre le problème’’. Peut-être qu’il ne se référait pas qu’à la Présidente de la Commission. Les doutes sont légitimes, car ici à Pontida Meloni semble ne pas exister. Une chose est certaine, Salvini ne veut pas de ruptures ‘’ Moi ici à Pontida et Meloni à Lampedusa, nous avons le même objectif et le même destin commun. On ne nous divisera pas. Nous avons la volonté que ce gouvernement dure pendant toute la mandature et qu’il soit confirmé ensuite’’. Autrement, l’image de Meloni apparait juste lors d’un passage rendant hommage à Berlusconi. Enfin, Zaia (président de la région de Vénétie) a rappelé l’importance de la réforme de l’autonomie régionale, Fedriga (président de la Région de Vénétie-Frioul-Julienne) a reconnu que ‘’nous devons assumer la responsabilité de prendre des décisions impopulaires’’ se référant sans doute à l’abandon de la réforme des retraites. Enfin, loin de là, le ministre de l’économie Giorgetti a répété comme un mantra ‘’il ne sera pas possible de tout faire’’. Bref, nous avons vu une Ligue « dure et pure », avec le soutien de Marine Le Pen afin de tenter de changer l’Europe. »
COMMENTAIRE, La Repubblica, S. Cappellini « Le défi souverainiste de la majorité, unie uniquement par le pouvoir » : « La dure compétition après le crépuscule de Berlusconi a été évidente dès le début. Il n’existe pas de priorités partagées, il n’y a pas de travail de synthèse et il ne peut y a voir de programme unique. Voici comment fonctionne le gouvernement : celui qui s’est imposé dans les urnes tente d’imposer ses priorités. Entretemps, les autres tentent de faire semblant d’accepter un second rôle et s’activent pour promouvoir leur propre agenda et freiner celui des autres. A la fin, ils improvisent sur des thématiques telles que la sécurité et l’immigration. A Pontida, la Ligue relance l’introduction de l’autonomie régionale différenciée comme priorité absolue et non négociable. Depuis Rome, la ministre Casellati (Forza Italia) annonce le coup d’envoi de la réforme sur le présidentialisme ainsi que celle sur l’autonomie des régions, faisant toutefois savoir que le débat sur le premier était ‘’verrouillé’’ mais pas le second. La rivalité interne a produit une nouvelle flambée souverainiste : Salvini à Pondida avec Marine Le Pen et bientôt même avec les nationalistes allemands d’Afd ; Meloni avec Orban et Vox. Cette compétition entre Meloni et Salvini mène l’Italie au milieu d’une compétition inutile entre deux familles d’extrême droite alors qu’en Europe on négocie sur des dossiers cruciaux pour l’Italie. Le prix serait alors celui d’une majorité fortement en péril, s’il n’y avait pas une alternative politique totalement inexistante. »
ARTICLE, Il Messaggero, L. Cifoni : « Impôts, plan du gouvernement : taux réduit de l’impôt sur le revenu jusqu’à 28.000 euros » : « La prudence est de mise, d'autant plus en cette période de ralentissement économique dont on ne connaît pas encore l'ampleur exacte. Mais le gouvernement essaye d’agir sur les impôts. La confirmation de la réduction de la charge fiscale "pour toute l'année 2024", qui est l'objectif principal de la prochaine loi de finances de Giorgia Meloni, pourrait être accompagnée d'une première réduction de l’impôt sur le revenu (Irpef) : plus précisément, par l'extension à un plus grand nombre de contribuables du taux le plus favorable de 23 %, selon ce qu’a déclaré hier le vice-ministre de l'économie Maurizio Leo, qui est chargé de rédiger la réforme fiscale, à l’occasion de la fête nationale de Italia Viva. D'où l'idée d'un allègement du prélèvement, qui devrait toutefois concerner non seulement les salariés, mais l'ensemble des contribuables. Le vice-ministre de l'économie a parlé d'une "augmentation du nombre de contribuables qui auront accès au barème le plus bas ". De fait, les deux premiers taux d’imposition seraient regroupés, en incluant dans le taux de 23% les revenus jusqu’à 28 000 euros (désormais le premier taux inclut les revenus jusqu’à 15 mille). Bien entendu, comme Leo l'a lui-même souligné, la volonté du gouvernement d'aller dans cette direction doit tenir compte de la situation macroéconomique et financière réelle, qui sera définie à la fin du mois avec la Note d'actualisation du Document économique et de finances. "Nous devons voir avec le Nadef combien de ressources nous pouvons utiliser, d'autant plus que par rapport aux prévisions de croissance précédentes de 1,1 à 1,2 pour cent, la commission a déjà réduit ses chiffres ", a fait remarquer le vice-ministre. Les conséquences de l'affaire des aides à la rénovation énergétique des bâtiments, pèsent également sur les comptes. Pour les salariés, les mesures inclus dans la loi de finances devraient prévoir aussi l'exonération des cotisations et l'allégement fiscal sur les primes de treizième mois et les primes d'entreprise. Le vice-ministre a également abordé les effets de la réforme fiscale pour les entreprises : l’objectif est de baisser le taux d’imposition de façon progressive pour arriver à 15 % de prélèvement IRES, contre le taux actuel de 24 %. Ce bénéfice sera réservé aux entreprises qui investissent dans les machines et l'innovation et à celles qui augmentent leur niveau d'emploi, mais cette mesure n’entrera pas en vigueur tout de suite. »
ARTICLE, Il Messaggero, A. Bul. « La présidente du Conseil et Tajani feront pression à l’ONU pour obtenir plus d’investissements en Afrique » : « Un plan ONU pour l’Afrique afin de faire confluer les investissements sur le continent et agir en amont des causes qui poussent les migrants à partir. Voici la requête que G. Meloin et A. Tajani adresseront aux dirigeants mondiaux réunis à New York pour la 78e Assemblée Générale. Le vice-président du Conseil insistera sur la nécessité d’impliquer l’ONU et les Etats-Unis dans la définition d’un plan pour promouvoir le développement des pays africains et la stabilisation du Maghreb. Selon la Farnesina, ce projet devrait être de longue haleine car ‘’d’ici 2050 il y aura 2 voire 2,5 milliards d’Africains et si nous ne travaillons pas à un « droit à ne pas émigrer », la situation sera de plus en plus explosive’’. D’où un double objectif. D’une part insister avec l’ONU pour que les ressources disponibles soient « rationnalisées » et « ciblées » ‘’en accord avec les objectifs de développement durable’’, d’autre part de travailler côte à côte avec Washington pour promouvoir la stabilisation politique dans les pays du Sahel, aussi pour éviter que le « vide » laissé par les gouvernements locaux ne soit rempli par la milice Wagner. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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