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17/07/2023

"Le protocole d'accord entre l'UE et la Tunisie a été signé, engageant le pays nord-africain à coopérer pour empêcher le départ des migrants vers Lampedusa."

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Italie. Revue de presse.

Les gros titres se partagent ce matin entre le «Mémorandum d’accord signé entre l’UE et la Tunisie à hauteur de 255 millions d’euros, portant notamment sur les migrants – Meloni, von der Leyen et Rutte signent un accord avec Saied également sur l’énergie et le commerce » (Corriere, Repubblica, Stampa, Messaggero) ; le « Coup d’arrêt de Meloni à Nordio : ‘’complicité externe avec la mafia : sur la justice, je me concentrerais plutôt sur d’autres priorités’’ » (Corriere, Stampa) ;  et le « Fisc », avec le « stop de Fratelli d’Italia et du ministère de l’Economie  à la proposition de Salvini d’une grande amnistie fiscale » (Repubblica, Stampa). La disparition de Jane Birkin, « Icône de style et de séduction » (Corriere) est par ailleurs partout en Une avec photos.

Les JT couvrent essentiellement le débarquement de 347 migrants à Lampedusa, la signature de l'entente sur les migrants en Tunisie, l'incendie à l'aéroport de Catane, l'explosion survenue sur le pont de Crimée et la troisième vague de chaleur touchant le centre et le sud de l'Italie.

ARTCILE, I. Lombardo, Stampa, « Mafia et complicité, Meloni désavoue Nordio (Frères d’Italie) : ‘’D'autres priorités en matière de justice’’. Elle prend ses distances avec le ministre et il s'aligne : ‘’pas à l'ordre du jour’’. Après la polémique, G. Meloni pourrait assister aux commémorations de la Via D'Amelio à Palerme » [ndr : attentat du 19/07/1992 ayant provoqué la mort du magistrat antimafia Paolo Borsellino et de cinq membres de son escorte] » :  « Le gouvernement ne touchera pas au délit complicité mafieuse sans participation directe.  Giorgia Meloni l'a assuré à l'issue d'une visite des fouilles archéologiques, le jour de l'inauguration de la voie rapide Rome-Pompéi, et le ministre de la Justice Carlo Nordio s'est aligné.  Et il ne pouvait sans doute pas en être autrement à quelques jours de la commémoration du massacre de la Via D'Amelio à Palerme. C'est lui, l'ancien magistrat, référence des ‘’ultra-garantistes’’ italiens, qui avait déclenché la polémique en proposant de revenir sur un chef d’accusation que les anti-mafia considèrent comme crucial pour combattre la ceinture protectrice des complices et des délinquants en col blanc à la solde du crime organisé. ‘’Je comprends très bien les considérations du ministre Nordio, qui est toujours très précis, et les critiques qui peuvent en découler’’, a expliqué la Présidente du Conseil, ‘’mais je me concentre sur d'autres priorités’’ . Meloni avait tenté de freiner les intentions du ministre de la Justice, alors que les réactions scandalisées des victimes de la mafia et des parents des juges Giovanni Falcone et Paolo Borsellino, massacrés par Cosa Nostra en 1992, arrivaient de Sicile. Nordio avait continué à imaginer comment changer le code pénal et notamment ce délit. Jusqu'à hier. Après que Meloni l'ait publiquement désavoué, le ministre, en un peu plus d'une heure, a rectifié le tir dans un communiqué : ‘’ nous sommes et avons toujours été en parfait accord. La question de la complicité externe est essentiellement technique et vise, le cas échéant, à renforcer la lutte contre la criminalité organisée. Mais sa révision ne fait pas partie du programme du gouvernement’’.  Le Palais Chigi jure que le ministre a été préparé : des appels téléphoniques avec Meloni ont eu lieu. Elle appréhende depuis des jours l'anniversaire de la mort de Borsellino et des hommes de son escorte. Le 19 juillet est une date fondatrice dans la biographie de Meloni. Elle a toujours dit que c'est ce jour-là, devant les images télévisées de Palerme, qu'elle a décidé que sa vie aurait été un engagement politique. Cette année, cependant, elle n'avait pas prévu de se rendre aux célébrations. Elle pourrait finalement y participer »

PREMIER PLAN, Messaggero, de F. Malfetano, « Régions, une alliance politique transversale, ‘’non au diktat sur la gestion migratoire’’ » : « Stop aux ordres unilatéraux venus d’au-dessus, c’est-à-dire de Rome, décidant pour l’ensemble des territoires. Alors que les arrivées clandestines de migrants mettent sérieusement en difficulté les régions concernées par les débarquements, les régions italiennes haussent la voix contre le gouvernement. Les présidents de régions interpellent Giorgia Meloni avant son arrivée à Tunis, appelant à une collaboration et à des décisions de commun accord sur la redistribution des migrants. Il s’agit surtout du fameux système d’accueil diffus sur l’ensemble du territoire que tentent de faire fonctionner le ministre de l’Intérieur Matteo Piantedosi et le commissaire chargé de la crise migratoire Valerio Valenti. D’une part les présidents de région de gauche demandent davantage d’autonomie dans la gestion de la répartition, les élus de droite et en particulier de la Ligue déplorent surtout les dysfonctionnements de ce système tout en ayant déjà passé des accords avec les préfets. Dans le réseau dédié à l’accueil des migrants, ce n’est pas tant le ‘’système d’accueil et intégration’’, dédié aux demandeurs d’asile, qui pose problème, que les ‘’centres d’accueil extraordinaire’’. Un dispositif d’urgence qui, d’après les présidents de régions et les maires, créent des situations difficiles sur le territoire. Le gouvernement a une approche plus pragmatique. Il faut dépasser les divisions politiques gauche/droite et pour le ministère de l’Intérieur, la priorité est de décongestionner les zones d’arrivée. Un communiqué du ministère soulignait toutefois la ‘’disponibilité au dialogue’’ de Matteo Piantedosi. Une rencontre avec les Présidents de régions dès cette semaine est envisagée. Le commissaire Valenti a quant à lui déclaré travailler à la création de structure de ‘’tout premier accueil’’ ailleurs en Calabre et en Sicile, comme cela avait été fait à Lampedusa. Le but étant d’éviter la création de nouvelles ‘’mégastructures’’ et de répartir les lieux dédiés aux premières procédures d’identification afin notamment d’accélérer le rapatriement des personnes non éligibles à la protection internationale. Ce qui représente la majorité des cas, souligne le ministère de l’Intérieur, considérés comme migrants économiques et non comme demandeurs d’asile. »

ARTICLE, L. Martinelli, Repubblica, « Saied tire sur la corde - Jeu de poker avec le FMI alors que la nourriture manque » : « Ces derniers mois, Giorgia Meloni et Antonio Tajani ont appelé à plusieurs reprises le FMI à débloquer le prêt de 1,9 milliard de dollars dont la Tunisie a besoin pour éviter le déficit. Est-ce Washington qui bloque ? En réalité, c'est Kais Saied, le président tunisien, qui bloque le prêt (également nécessaire pour activer l'essentiel des financements européens lancés aujourd'hui avec la signature du Memorandum of Understanding et d'autres fonds prévus au niveau international) : il refuse le programme de réformes que son pays doit engager pour obtenir le prêt (et qui ont été élaborées au préalable par son gouvernement à Tunis, une situation kafkaïenne).  Saied ne cède pas. Et il mise sur le fait que les réserves en devises étrangères, fruits de la saison touristique (cet été meilleure que prévu) et les contributions de la diaspora tunisienne à l'étranger, sans oublier la récente baisse des tarifs internationaux de l'énergie. Bref, le pays peut ‘’vivre’’ encore un peu et tirer sur la corde, sans se préoccuper de commencer à résoudre ses problèmes structurels par des mesures à haut risque social. Cependant, les pénuries de produits de base qui manquent déjà dans les magasins, comme le sucre, la farine et l'huile végétale, risquent de s’aggraver. Ces dernières heures, on peut même voir de longues files d'attente devant certaines boulangeries : la pénurie de pain, à l'origine de tant de révoltes, est historiquement dangereuse en Tunisie. Pour un prêt du Fonds monétaire international, les négociations durent en moyenne trois mois. L'organisation est en discussion avec la Tunisie depuis deux ans et trois mois. Il faut savoir que dans deux cas (en 2013 et 2016), le pays avait déjà demandé et obtenu un prêt, sur la base d'un programme de réformes qui s'est toutefois perdu en route dans les deux cas, au point que le FMI avait cessé de verser les fonds (pour le prêt de 2016, il avait annulé 1,2 milliard de dollars sur les 2,9 prévus). Le programme de réforme présenté au FMI prévoit entre autres une réduction progressive des subventions, compensée par une aide directe aux familles les plus démunies. Mais Saied refuse. Et il bloque également une autre réforme importante, la restructuration des 104 entreprises publiques, qui sont plus ou moins en faillite. Le jeu entre Saied et le FMI se transforme en une dangereuse partie de poker. »

ARTICLE, A. Logroscino, Corriere, « Migrants, le mémorandum entre la Tunisie et l'UE. 105 millions d’euros dévolus à la lutte contre les passeurs » - « La mission de von der Leyen, Meloni et Rutte. Le président Saied attaque les ONG » : « La troisième fois est la bonne. Hier, en Tunisie, où G. Meloni s’est une fois de plus rendue, le protocole d'accord entre l'Union européenne et la Tunisie a été signé, engageant le pays nord-africain à coopérer pour empêcher le départ des migrants vers Lampedusa, en échange d'une aide financière. L'Europe soutiendra l'arrêt des départs à hauteur de 105 millions, chiffre déjà annoncé en juin mais sur lequel une négociation avait surgi, entraînant le report de la signature. Cette fois, les parties sont toutes réunies : d'un côté l'équipe européenne composée de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, de Giorgia Meloni et de Mark Rutte, et de l'autre le président tunisien Kais Saied, qui se garde bien de faire des déclarations à la presse. Les États membres doivent maintenant le ratifier. Madame Meloni, au palais présidentiel de Carthage où a eu lieu la signature, a remercié en particulier Mme von der Leyen pour un accord ‘’impensable il y a encore quelques mois’’. Elle explique ensuite la stratégie : ‘’Le mémorandum est un pas important vers la création d'un véritable partenariat entre la Tunisie et l'UE, qui peut aborder la crise migratoire et le développement des deux rives de la Méditerranée d'une manière intégrée’’. C'est-à-dire qu'avant de prévoir une redistribution obligatoire en Europe des personnes qui débarquent, on s'efforce de freiner les départs vers l'Italie. Ce partenariat, poursuit-elle, doit être considéré comme un modèle pour la construction de nouvelles relations avec l'Afrique. En somme, il pourrait ‘’ouvrir la voie à d'autres accords ultérieurs et similaires’’. En attendant, le mémorandum signé hier devra être suivi d'autres accords afin de ‘’concrétiser les objectifs que nous nous sommes fixés’’, souligne-t-elle. ‘’En matière d'immigration’’, souligne von der Leyen, ‘’nous avons plus que jamais besoin d'une coopération efficace. Le tragique naufrage d'il y a quelques semaines, qui a fait de nombreuses victimes, est un autre appel à l'action. Nous devons lutter contre les activités de ceux qui exploitent le désespoir à travers un modèle commercial inadmissible. Nous travaillerons avec la Tunisie, nous renforcerons la coordination des opérations de recherche et de sauvetage, des contrôles aux frontières et des rapatriements dans le plein respect du droit international. C'est un bon paquet de mesures, il faut maintenant le mettre en œuvre’’. Des mots qui galvanisent la majorité soutenant le gouvernement : ‘’il était impensable il y a peu d'avoir un partenariat stratégique qui permette d'éviter un exode entraînant de lourdes répercussions pour l'Italie’’, affirme Tommaso Foti, chef du groupe FdI à la Chambre des députés, de Meloni. Le ministre des affaires européennes, Raffaele Fitto, a quant à lui exprimé sa ‘’grande satisfaction’’. M. Saied, qui reçoit également 150 millions d'euros de l'Europe pour soutenir les finances tunisiennes en difficulté, a rejoint les autres signataires sur la nécessité de lutter ‘’ensemble contre le réseau criminel des trafiquants’’. Il a également rejeté les préoccupations, exprimées par les pays européens, concernant le respect des droits des migrants dans son pays, en s'en prenant aux ONG. ‘’Le peuple tunisien a fait preuve d'une hospitalité totale et d'une générosité sans limite à l'égard des migrants expulsés de leur pays, alors que de nombreuses ONG se contentent de déclarer. Comme pour protéger les victimes de la faim et de la soif. Sans parler des fake news avec lesquelles elles nuisent à la Tunisie’’. La question des migrations sera débattue dimanche 23 juillet à Rome avec la conférence internationale où seront présents le président Saied et les chefs d'État et de gouvernement de la Méditerranée ».

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Mark Rutte (Pays-Bas), Alexandra von der Leyen (UE), le président tunisien Saied et Giorgia Meloni (Italie)

EDITORIAL, La Repubblica, E. Mauro, « Giorgia Meloni, l’atlantiste sans l’Occident » : « L’Italie est au cœur du deuxième des trois fronts sur lesquels se déroule le conflit en Ukraine. Le premier front est le martyr des vies humaines et des villes ukrainiennes. Le troisième vient de s’ouvrir à l’intérieur de la Russie, où un Kremlin affaibli doit faire face à des morceaux de pouvoirs autonomes se soustrayant à la discipline de l’Etat. Il reste le deuxième front, c’est-à-dire les pays d’Europe plus ou moins éloignés du cœur de la guerre, et pourtant directement investis dans une opération militaire qui piétine tous les principes sur lesquels se fondent notre vie sociale, de la sécurité à la souveraineté en passant par la démocratie, le droit et les droits, la liberté. Nous avons été touchés dans nos valeurs et notre système de croyance qui a cherché à transformer un espace géopolitique en une forme de civilisation. Poutine en est bien conscient, au point qu’il l’a baptisé « Occident global ». En Italie se fait de plus en plus présent un refus de la guerre, qui depuis 17 mois renverse les responsabilités de l’agression en accusant ceux qui se défendent de prolonger le conflit. C’est la dernière incarnation de la realpolitik : un égoïsme de spectateurs, préoccupés non pas de construire une paix juste et durable, mais seulement de mettre fin à la guerre quoi qu’il en coûte, même au détriment de la vie d’autrui et de nos principes. Cette position est une capitulation morale, c’est le pacifisme populiste. Tant Mario Draghi que Giorgia Meloni ont rangé l’Italie du côté de l’Ukraine en lui garantissant la solidarité politique et le soutien matériel avec l’envoi d’armes. C’est aussi la position de l’Europe. Mais des fissures apparaissent à gauche comme à droite : une relation spéciale et personnelle avec Poutine avait mené Berlusconi ces derniers mois à des avis téméraires sur le conflit alors que Salvini a confirmé la subordination de la Ligue au Kremlin. A gauche, un antiaméricanisme rescapé de la Guerre froide a trouvé une nouvelle résonance dans une survivance idéologique mélangée au rejet du conflit et à une invocation de la paix. Giorgia Meloni a fait le choix d’un atlantisme net et sans ambiguïtés et elle a confirmé lors du sommet de Vilnius la ligne atlantiste de l’Italie, expliquant que ‘’notre liberté a un coût’’ mais ‘’sans garanties de sécurité suffisantes, nous n’arriverons jamais à un vrai processus de paix’’. En réalité Meloni s’est servie du choc universel de la guerre pour faire de l’OTAN le point de résolution des nœuds identitaires de l’extrême droite italienne, construisant en même temps à travers l’engagement atlantique une relation privilégiée avec Washington. Meloni confirmera le 27 juillet au cours de sa visite à la Maison blanche que l’Italie continuera de faire sa part. Cependant le tumulte de la guerre a permis à la Présidente du Conseil de dissimuler derrière les choix de l’Alliance atlantique ses ambiguïtés concernant l’UE, sur le plan des droits, de l’Etat de droit, du MES, du lien entre taxation, protection sociale et solidarité qui est à la base de la démocratie européenne. C’est donc un autre espace international où se place l’Italie qui attend d’être occupé et traduit en politique. Nous sommes donc face à un équilibre instable, car inédit pour l’Italie, donc dangereux : la tentative de s’affirmer fermement atlantiste sans être pleinement occidental, c’est-à-dire sans choisir avec clarté les valeurs qui donnent corps à notre civilisation et qui se basent sur la démocratie des droits et la démocratie des institutions. L’OTAN ne peut substituer à elle seule ces valeurs. Ce qui manque aujourd’hui à l’Italie c’est la conscience de l’Occident, dont le gouvernement ne parle jamais, mais dont nous voudrions continuer à faire partie. »

(Traduction : ambassade de France à Rome)

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