13/06/2023
"L’Italie sans Berlusconi." et "Meloni est consciente qu'après le deuil viendra l'instabilité."
Italie. Revue de presse.
Le décès de Silvio Berlusconi monopolise les Unes - « L’Italie sans Berlusconi » (Corriere della Sera), « Le premier populiste » (La Repubblica), « Le rêve italien. Demain funérailles d’Etat à Milan » (Il Messaggero), « Adieu à Berlusconi, télévision, politique, justice : 40 ans sur le devant de la scène » (Sole 24 Ore), « Berlusconi et la République des bananes : condamné pour fraude fiscale et soupçonné d’avoir financé la mafia, les télévisions maintenant le béatifient » (Fatto Quotidiano).
COMMENTAIRE, Corriere della Sera, M. Franco « Le populisme et l’adhésion aux valeurs occidentales » : « Le fait que Silvio Berlusconi ait forgé non seulement le centre droit mais aussi, indirectement, l’opposition de gauche, fait peser l’incertitude sur le futur. Non seulement celles de Forza Italia –dont il était à la fois le dirigeant et le patron – mais aussi celles de toute la majorité et, en général, du système politique. La rapidité avec laquelle les plus fidèles ont déclaré vouloir incarner la continuité en son nom reflète cette incertitude. Cela renforce l’impression d’un électorat qui se sent orphelin. Le fait d’avoir su fédérer la galaxie anticommuniste a sans doute fait de Berlusconi le précurseur du populisme : un phénomène qui a été copié un peu partout, pas seulement en Italie. Toutefois, malgré la rhétorique antisystème, Berlusconi a gardé une adhésion ferme aux valeurs occidentales. Il est vrai aussi que son rôle dans le PPE et sa posture modérée sont des éléments que ni Meloni ni Salvini ne parviennent à récupérer pleinement. C’est donc un électorat stratégique qui se retrouve aujourd’hui sans leader et qui sera difficilement récupéré automatiquement par ses alliés. Berlusconi représentait cet élément de stabilité et de garantie d’unité d’une coalition axée à droite. A partir d’aujourd’hui, la compétition entre Meloni et Salvini ne pourra plus compter sur la médiation du leader de Forza Italia mais uniquement celle de la famille et du ministre Tajani (Forza Italia). Pour le reste, la majorité se retrouvera avec un parti objectivement instable. Cela implique que Meloni et Salvini devront recalibrer leur propre identité. C’est là une opération qui sera conditionnée par les élections européennes. Ces dernières nous diront à quel point l’héritage berlusconien parvient à survivre ou s’il se dispersera dans les luttes intestines. »
ANALYSE, Repubblica, T. Ciriaco « Des craintes pour le gouvernement et Meloni est tenté par le parti unique » - « Elle se donne deux mois pour voir si Tajani est capable de tenir Forza Italia. La relation décisive avec Marina Berlusconi » : « Giorgia Meloni est littéralement sous le choc. Désemparée et amère. La mort de Silvio Berlusconi ne peut être qualifiée d'inattendue, mais elle n'en est pas moins soudaine. Et elle se transforme en un énorme problème pour l'exécutif. Forza Italia est en proie à un traumatisme destructeur. La présidente du Conseil choisit donc de gérer ces heures complexes dans un double registre. Elle vise la continuité, pour le côté officiel : pas de parti unique avant les élections européennes, c'est la ligne, avec Antonio Tajani à la tête de Forza Italia. L'option, en revanche, qu'elle évalue déjà confidentiellement envisage un accord entre les deux symboles et une liste unique pour 2024. Une sorte de nouveau PDL, embryon de cette fusion entre conservateurs et populaires qu'elle entend exporter de l'Italie à Bruxelles. Le seul moyen - surtout - d'éviter que l'éclatement de Forza Italia ne mette en péril le gouvernement. Meloni est consciente qu'après le deuil viendra l'instabilité. ‘’La ligne est que nous ne pensons qu'à gouverner’’, a-t-elle écrit à chaud à certains membres de son ‘’cercle magique’’. Elle attend que le fuseau horaire américain soit compatible et appelle Antonio Tajani : ‘’Vous devez envoyer un message de continuité’’. La solution idéale, qui ne prévoit aucun forcing : arriver aux élections européennes avec Tajani à la tête de Forza Italia et attendre pour construire ensuite un parti unique modéré. Cependant, Forza Italia ressemble déjà à un champ de bataille. Et il est clair que le sort de Tajani dépendra en grande partie de la mesure dans laquelle la famille Berlusconi entend l'aider à ne pas s'effondrer. Sans le soutien moral et matériel de Marina Berlusconi, l’aînée, (l'argent est un enjeu décisif pour la survie du parti), FI n'a aucune chance de survivre à son fondateur. De cela, Meloni a l'intention de discuter avec elle, immédiatement après les funérailles. Le Palais Chigi craint que ce qui reste du berlusconisme ne devienne bientôt l'objet d'autres ‘’OPA’’ hostiles, non seulement de la part de Salvini, qui négocie depuis quelque temps avec des sénateurs, mais aussi de Matteo Renzi, bien décidé à bouleverser les équilibres. Pour cela, il y a le plan B de Meloni: le nouveau parti des conservateurs et des populaires. »
PREMIER PLAN, Corriere della Sera, de S. Montefiori, « L’hommage de Macron et de l’Europe, ‘’je perds un ami sincère’’ déclare Poutine » : « Les mots les plus sincères, parmi les grands pays fondateurs de l’UE, viennent de Paris ‘’avec le Cavaliere disparaît une figure majeure de l’Italie contemporaine, qui avait occupé le devant de la scène pendant de nombreuses années (…)’’ lit-on dans un communiqué de l’Elysée qui évoque aussi les liens de Silvio Berlusconi avec la France et le cheminement européen auquel il était attaché. Marine Le Pen rend hommage à un ‘’parcours fulgurent’’ alors que Nicole Sarkozy, l’ancien président qui avait pour Berlusconi une inimitié solide et réciproque, garde le silence. A gauche, les mots sans concession de Jack Lang se distinguent ‘’Certainement, Berlusconi était un homme de tempérament et de caractère. Son énergie hors pair, son esprit combattif et son intelligence tactique sont louables. Mais la mort d’un homme ne doit pas nous faire oublier la vérité des faits. (…) Berlusconi a tué le cinéma italien.’’ Des propos qui ne font plaisir ni aux amis de Berlusconi, ni au cinéma italien qui ne semble pas mort. L’ancien ministre français de la Culture revendique s’être battu contre ‘’La Cinq’’, la télé commerciale lancée en France par Berlusconi mais freinée par l’opposition politique. Le ton des réactions internationales varie en fonction des visions politiques, mais dans la plupart des cas la dimension hors du commun de l’ancien Président du Conseil est soulignée. George W. Bush ne ‘’s’ennuyait jamais avec Silvio’’ qui a ‘’renforcé les liens entre Italie et Etats-Unis’’, pour Tony Blair il était un ‘’leader compétent, attentif et fidèle à sa parole, malgré les nombreuses controverses. Un homme protégeant fièrement les intérêts de l’Italie mais toujours à la recherche de solution pragmatique à un problème compliqué’’. Parmi les hommages qui rendus, celui de Vladimir Poutine, extrêmement affectueux (‘’une personne chère, un véritable ami, une perte irréparable y compris pour la politique mondiale’’), est embarrassant en ce moment mais rappelle qu’à une autre époque, Poutine avait serré la main du président américain Bush grâce à la médiation de Silvio Berlusconi, lors du sommet historique de Pratica di Mare en 2002. Réaction bien loin de celle de l’Ukraine, où Berlusconi était persona non grata depuis son déplacement en Crimée en 2015. Si l’Allemagne s’est limitée à une phrase du porte-parole du chancelier Scholz, le président hongrois s’est davantage étendu dans un message twitter évoquant un ‘’grand combattant’’. Mark Rutte parle d’un homme politique ‘’surprenant et passionné’’. Les Présidentes de la Commission et du Parlement européen ont également réagi à cette disparition. Enfin, Netanyahu enfin a salué un ‘’grand ami d’Israël, toujours à nos côtés’’. »
ARTICLE, Sole 24 Ore, de M. Perrone, « Tunisie, les pressions de l’Italie, mais les Etats-Unis et le FMI ne cèdent pas » : « Le problème autour de la Tunisie reste bloqué au niveau du bras-de-fer entre Tunis et le FMI qui demande un plan de réformes avant de débloquer les fonds, un prêt massif d’1,9 milliards de dollars. Le vice-président du Conseil et ministre des Affaires étrangères Antonio Tajani tente à son tour d’assouplir la ligne des Etats-Unis, plaidant pour une ‘’solution pragmatique’’ : il faut d’abord injecter des fonds puis faire les réformes, ‘’pour la stabilité du pays et donc de la Méditerranée’’. Pour le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, il faut d’abord que la Tunisie s’engage sur les réformes, avant de verser les fonds. Il ne montre pas les signes d’ouverture et de dialogue avec la Tunisie auxquels appelle Tajani. La visite de Tajani doit notamment servir à préparer le terrain pour la visite de Giorgia Meloni en juillet, de l’Ukraine à l’Indopacifique en passant par le climat, sur la Tunisie les points de vue restent divergents. Les fonds mis sur la table par l’UE il y a quelques jours restent conditionnés aux négociations avec le FMI. Giorgia Meloni est toutefois déterminée à travailler pour obtenir un mémorandum d’entente signée par l’UE et la Tunisie au Conseil européen prévu fin juin. Du reste, malgré une légère inflexion des arrivées clandestines, les chiffres du ministère italien de l’Intérieur restent sans appel : 54 804 depuis le début de l’année, dont presque la moitié en provenance de Tunisie. Dans le contexte de la réforme du Pacte sur la migration et l’asile, l’objectif du gouvernement italien est d’insérer la Tunisie parmi les ‘’pays tiers sûrs’’, vers lesquels il sera possible de renvoyer les migrants qui n’auront pas le droit de rester sur le territoire européen. »
ARTICLE, Sole 24 Ore, M. Gaggi, « Tajani : ‘’Kiev doit être intégré à l'OTAN’’. Le ministre des Affaires étrangères à Washington avec Blinken. La visite de la présidente du Conseil Meloni en juillet est en cours de préparation. » : « En cas de succès, la contre-offensive ukrainienne, en plus de renforcer la position de Kiev en vue des négociations, pourrait pousser Poutine à changer de cap en ouvrant la voie aux efforts diplomatiques. C'est ce qu'a déclaré le secrétaire d'État américain Antony Blinken lors d'une rencontre avec des journalistes à l'issue de la visite de notre ministre des affaires étrangères (et vice-président du Conseil) Antonio Tajani à Washington. M. Blinken a ajouté qu'entre-temps, le soutien devait être maximisé : ‘’Un soutien militaire pour donner, également à l'avenir, un fort pouvoir de dissuasion à Kiev face à la Russie. Mais aussi un soutien économique et politique, car l'Ukraine doit être capable de se projeter dans l'avenir et pas seulement de survivre’’. M. Tajani a également réitéré le soutien total de l'Italie à Kiev et son engagement à travailler au niveau militaire, économique et politique pour parvenir à une "paix juste" qui ne récompense pas l'envahisseur. Il a soutenu fermement la nécessité d'avancer vers la création d'un ‘’Conseil OTAN-Ukraine, premier pas vers l'intégration : une adhésion opérationnelle pour renforcer également l'échange d'informations et l'échange politique’’. En bref, Tajani a apporté à Washington l'espoir européen que l'intégration de l'Ukraine dans l'UE soit soutenue par des garanties sécuritaires et économiques. Une préoccupation partagée par M. Blinken, même si, pour l'heure, les États-Unis visent avant tout des livraisons directes d'armes afin d'offrir à l'Ukraine de demain une sécurité fondée sur sa puissance militaire. La rencontre a eu lieu quelques heures après le décès de Silvio Berlusconi, et a contraint Tajani à écourter sa visite, sautant des réunions au Fonds monétaire et avec le Congrès et les autorités économiques. Elle a servi à préparer la visite de Meloni et à renforcer la coopération italo-américaine sur tous les fronts, à commencer par la Méditerranée, qui est cruciale pour les nombreuses crises en Afrique qui alimentent les flux migratoires. Sur la question du soutien à la Tunisie, qui risque le défaut de paiement et donc le chaos avec une nouvelle déstabilisation de l'Afrique du Nord, M. Blinken a déclaré au Corriere : ‘’Je partage les préoccupations de l'Italie et j'apprécie le travail accompli par la délégation européenne dirigée par Giorgia Meloni et Ursula von de Leyen. Nous voulons que la Tunisie se rétablisse, mais elle doit décider où elle veut aller’’. En bref, alors que le financement de 1,9 milliard de dollars du Fonds monétaire reste bloqué en attendant que le gouvernement tunisien prenne des mesures, les États-Unis demandent un signal que le président Saied n'a pas encore donné. »
ARTICLE, Sole 24 Ore, M. Valsania « La rencontre de Tajani avec Blinken : ‘’une solidarité stratégique entre l’Italie et les Etats-Unis’’» : « L'axe entre Washington et Rome est assuré par de solides relations économiques. Les États-Unis sont le premier partenaire commercial de l'Italie en dehors de l'UE, avec des échanges qui ont augmenté de 38% l'année dernière pour atteindre 90 milliards d'euros, et le troisième marché pour les exportations de produits italiens. Mais ce sont les urgences politiques qui dominent aujourd'hui. M. Tajani a réaffirmé l'"harmonie" avec Washington sur la guerre en Ukraine, pour une paix future juste et durable qui signifie "la liberté du peuple qui a souffert de l'invasion". Il a également décrit une unité de vues sur "la paix et la stabilité" dans la région indopacifique ainsi qu'en Méditerranée, à commencer par la Tunisie en crise qui est "une priorité" pour l'Italie. A. Blinken a déclaré qu'il admirait ‘’le leadership fort et fondé sur des principes" de la Présidente du Conseil Giorgia Meloni sur l'Ukraine. Meloni devrait se rendre prochainement à la Maison Blanche, peut-être en juillet, selon M. Tajani lui-même. Le secrétaire d'État américain a rappelé que l'Italie avait accueilli de nombreux réfugiés en provenance de Kiev. Il a souligné à son tour le soutien commun à la paix et à la stabilité en Afrique du Nord. En ce qui concerne la Tunisie, il a exprimé sa "préoccupation commune concernant la situation économique" et a salué le "travail accompli par l'Italie et l'UE" dans les négociations avec le pays, espérant que le gouvernement tunisien serait en mesure de parvenir à un accord sur les plans de réforme afin de recevoir l'aide nécessaire du Fonds monétaire international. A. Tajani a souligné l'engagement de l'Italie et de l'Europe à "ouvrir la voie à un accord" avec le FMI. Le dialogue s'est poursuivi. M. Blinken a rappelé que l'Italie sera à la tête du G7 en 2024, citant de nombreuses questions majeures sur la scène mondiale, de la sauvegarde de la démocratie à la sécurité climatique et alimentaire, parmi les questions qui peuvent être abordées en tant que "partenaires très proches". »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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