08/08/2022
"La décision du parti centriste Azione de Carlo Calenda de rompre l’alliance avec le PD."
Italie. Revue de presse.
La décision du parti centriste Azione de Carlo Calenda de rompre l’alliance avec le PD en vue des élections législatives du 25 septembre fait les gros titres de la presse italienne. Les observateurs relèvent dans l’ensemble le « choc » (Corriere) au sein du parti démocrate et de la coalition de centre gauche ainsi que la possibilité que Matteo Renzi (Italia Viva) et Carlo Calenda puissent créer un pôle de centre, pouvant modifier sensiblement les intentions de vote des électeurs modérés. « Le cyclone Calenda s’abat sur le centre gauche » - Le pacte avec le PD est rompu. Calenda s’explique : c’est une décision difficile mais cette coalition a été créée pour perdre. La déception d’Enrico Letta et les convoitises de Renzi pour un troisième pôle (Corriere della Sera), « La rupture » - Calenda décide de rompre l’alliance avec le PD, Bonino quitte Azione et reste dans l’alliance de centre gauche. L’hypothèse d’un troisième pôle avec Renzi se concrétise (La Repubblica), « Letta : Calenda et Renzi font un cadeau au centre droit » - Selon le dirigeant du PD, si Meloni et Salvini devaient l’emporter, la Constitution pourrait subir des changements désastreux (La Stampa), « Calenda repart du troisième pôle » - Le dialogue avec Renzi a commencé. Irene Tinagli (PD) assure « il n’y aura pas un déséquilibre à gauche » (Il Messaggero), « Calenda change d’avis et laisse Letta les mains vides » (Fatto Quotidiano), « Calenda récuse Letta » (Il Giornale). Les tensions dans la Bande de Gaza et la reprise des bombardements russes près de la centrale nucléaire de Zaporijjia sont également évoquées en Unes et dans les pages intérieures.
Les JT couvrent essentiellement la rupture de l’accord entre Azione et le PD, le cessez-le-feu déclaré hier entre Israel et le Jihad Islamique avec la médiation de l’Egypte, et les hautes tensions entre l’Ukraine et la Russie au sujet de la centrale nucléaire Zaporijjia alors que l’ONU appelle à cesser les attaques.
COMMENTAIRE, La Repubblica, « L'année zéro du centre-gauche » par Stefano Folli : « La journée d'hier mérite de rester dans les mémoires comme l'une des plus intenses, pour ne pas dire dramatiques, de l'histoire du centre-gauche et en particulier de son parti phare, le PD. La rupture brutale, annoncée à la télévision, de l'accord qui venait d'être conclu avec Letta prive le PD de tout soutien venant des modérés. En effet, pour que cette combinaison fonctionne, il aurait fallu qu'elle embrasse avec conviction un projet politique de type libéral-démocratique. En outre, l'opération « enlevons des voix à la droite » était la même que celle conçue par Renzi avec la suggestion du « troisième pôle ». Letta, en revanche, a choisi une autre voie : d'une part, il a fermé la porte à Conte et aux M5S car ils sont les adversaires de Draghi ; d'autre part, il a exclu Renzi. Il s'agissait de donner, à la fois une suite logique à la rupture avec les M5S mais aussi de faire de l'appel au rassemblement autour de Draghi un programme concret du centre-gauche. Néanmoins, L'opération a échoué lorsque le PD a voulu occuper une position médiane au centre d'une alliance électorale caractérisée par une forte présence non seulement de la gauche traditionnelle, mais aussi de Sinistra Italiana et Europa Verde, dont on sait qu'ils travaillent à renouer des relations avec les 5 Étoiles. Peut-être que Letta ne pouvait pas agir autrement. Azione devra essayer de reprendre ses relations avec Renzi pour vérifier si le fameux troisième pôle est réalisable et tout porte à croire qu'il l'est. Letta doit se préparer à une campagne encore plus difficile, centrée intégralement sur le PD et ses propositions. Letta sait pertinemment que l'espace disponible existe, mais que le virage à gauche, typique d'un parti travailliste qui risque de perdre son ancrage au centre, est accentué. »
COMMENTAIRE, La Repubblica, E. Mauro « Le véritable défi d'Enrico Letta et de Giorgia Meloni » : « Calenda se sentait pris entre le PD et la gauche radicale, et en a profité pour radicaliser l'identité de son mouvement. La rupture était dans l'air, aujourd'hui elle est consommée, reproduisant l'éternelle damnation de la gauche italienne qui, après un siècle, continue à se diviser entre radicaux et modérés. L'impact politique est considérable, car il témoigne de la double difficulté du centre-gauche, à la fois à avoir une notion complète de lui-même aujourd'hui mais aussi une conscience claire de la droite italienne. Calenda a préféré le renforcement de son parti au détriment de l'affaiblissement de la coalition mais même si l'accord avait été conclu, il aurait été fragile, peu coopératif et à peine convaincant. Après cette déchirure, le PD n'a plus d'excuses. Il peut enfin libérer son identité : un véritable esprit de centre-gauche, comme le sentiment politique qui a conduit des personnalités telles que Moro, Nenni, Saragat et La Malfa à franchir un tournant en lançant une saison de réformes et de modernisation. Ce retard pèse lourdement sur la gauche, mais affecte également la droite. Sous la surface des sondages, rien ou presque, n'est plus indéfini que cette coalition. En théorie, les conservateurs de Giorgia Meloni, les souverainistes de Salvini, les modérés autoproclamés de Berlusconi en font partie, mais en réalité les modérés, avec les derniers transfuges de Forza Italia ont abandonné le terrain, désormais complètement à la merci de deux extrémismes alliés mais concurrents, l'un en déclin et l'autre en progression. Une pensée politique unificatrice fait totalement défaut. »
ARTICLE, Corriere della Sera, G.A. Falci « Les électeurs sont désorientés, seul un sur trois a décidé qui voter » : « Quel sera l’impact de la dernière rupture de Carlo Calenda qui a dit adieu à l’alliance avec le PD et le centre gauche ? Selon Antonio Noto de Noto sondaggi l’alliance PD-gauche italienne-verts et +Europa est accréditée à 26% des intentions de voix, restant ainsi loin du centre droit. D’après Lorenzo Pregliasco de You Trend, il s’agit d’une ‘’alliance hétérogène avec des différences dans leurs programmes et qui a un périmètre restreint’’. Toutefois, Carlo Buttaroni de Tecné explique que ‘’la coalition de centre gauche assume un périmètre de type socialiste sur lequel tout l’électorat de centre gauche peut se reconnaitre’’ et rappelle que ‘’seuls 31,8% de l’électorat a déjà pris une décision. Le reste demeure un océan ouvert où tout peut arriver.’’. Toujours A. Noto explique que le parti de Calenda, Azione, pourrait arriver à 10% et séduire une grande partie de l’électorat de Forza Italia. Buttaroni lui aussi est d’accord ‘’l’alliance Calenda et Renzi, soit Azione-Italia Viva, pourrait dépasser facilement la barre des 10%’’. »
ARTICLE, Repubblica, I. Diamanti « Le périmètre incertain du centre gauche : un électeur sur quatre décidera le jour même des élections » : « La décision de Carlo Calenda de se présenter seul aux élections rouvre les jeux et rend vétustes tous les sondages faits jusque-là. Plusieurs choses peuvent changer d’ici le 25 septembre, et cela pas uniquement en raison de l’incertitude de la situation. C’est surtout le fait que le chiffre des électeurs indécis reste encore très élevé. Un électeur sur quatre décidera sept jours avant et environ 10% décidera le jour même des élections. Par ailleurs, les électeurs du PD se sentent proches de ceux des autres partis de gauche. En revanche, les électeurs d’Azione semblent plutôt s’identifier avec ceux du parti Italexit de Paragone. »
ENTRETIEN, Corriere della Sera, de Carlo Calenda, dirigeant d’Azione « Ils ont voulu faire une alliance qui est une mêlée et ils sont destinés à perdre » : « ‘’J’avais déjà prévenu Enrico Letta la veille, en lui disant que je n’aurais jamais accepté une alliance avec Frattoianni, Bonelli et Di Maio, soit un pacte qui prévoyait une mêlée. C’est le PD qui se trouve devant un tournant : celui entre un choix réformateur ou une alliance avec toutes les incohérences possibles. Ils ont choisi la dernière, c’est l’erreur fatale de Letta. Le PD n’a pas eu le courage de représenter les sociaux-démocratiques et a préféré les populistes de la gauche. Je rappelle que Frattoianni a voté contre l’élargissement de l’Otan et que son parti n’a pas voté la confiance à Draghi à 54 reprises, soit bien plus que le M5S. Je vais rencontrer prochainement Matteo Renzi et lui parler. Il est clair qu’avec lui nous avons plus de points en commun qu’avec Frattoianni.’’ »
ENTRETIEN, La Stampa, d’Enrico Letta, dirigeant du Parti démocrate « Calenda est en train de faire un cadeau à la droite. La campagne électorale du PD commence maintenant » : « ‘’Je n’ai pas compris les raisons de Calenda et je ne crois pas qu’elles soient compréhensibles. Je rappelle l’importance de la parole donnée, en politique comme dans la vie. Calenda raisonne comme s’il n’avait pas compris comment marche cette loi électorale qui impose de faire des alliances pour les collèges uninominaux. La droite a fait rapidement son choix : Berlusconi et Salvini ont fini par se rendre face à Meloni. Chez nous, les choses étaient bien plus compliquées et il était nécessaire de faire ces ententes. En ce qui me concerne, les accords électoraux sont terminés. Maintenant je me concentrerai sur la campagne électorale : nous avons 600 meetings prévus dans le pays, je vais participer à un maximum de rencontres. Je remercie Emma Bonino et Benedetto Dalla Vedova de +Europa : avec eux, nous ferons une très belle campagne. L’environnement, la lutte contre la précarité, le Welfare, les droits. Nous confirmons notre engagement sur la loi Zan (contre la transhomophobie) et sur le droit du sol. Nous ne voulons pas augmenter les impôts. Au contraire, nous augmenterons les salaires et aiderons les entreprises à embaucher et à faire des investissements de manière sereine’’ »
COULISSES, La Stampa, I. Lombardo : « Renzi courtise Calenda : “Construisons le Troisième Pôle” » : « Une minute après son adieu à Letta, Calenda confirme qu’il parlera sous peu à Matteo Renzi. Ce dernier laisse entrevoir sa disponibilité. Les conditions pour signer un pacte d’alliance pourraient être réunies. Mais tout n’est pas si simple. Renzi est convaincu que le Troisième Pôle puisse arriver à de 8-10% des suffrages. Chez Azione, certains vont jusqu’à pronostiquer 15%. Reste à savoir dans quelle mesure les deux partis risquent de s’entre-dévorer. On relève deux complications majeures. La première, d’ordre caractériel : Calenda et Renzi sont incompatibles. Calenda vit en direct, dit et écrit ce qu’il pense ; Renzi est plus retenu, exploite les ressorts de la ruse politique. Tous deux médiatiquement forts, ils devraient se mettre d’accord sur le leadership et leur présence dans les médias tout au long de la campagne. La seconde complication est d’ordre technique : Renzi préférerait fusionner les deux partis dans une liste commune et craint une coalition – souhaitée par Azione – avec des symboles séparés, car la perspective de ne pas atteindre les 3% l’effraie. »
PREMIER PLAN, Il Corriere della Sera, M. Cremonesi : « L’ironie de Meloni et de Salvini et la menace venant d’Azione » : « Au-delà de ses sarcasmes sur la volte-face de Calenda, le centre-droit est convaincu que Calenda, engagé dans une alliance avec Letta, aurait été moins dangereux : le troisième pôle, en tant que nouvelle entité politique à part entière, pourrait avoir une incidence sur l’électorat le plus modéré de la coalition de centre-droit. Du reste, au sein de cette dernière, tout n’est pas rose : le problème principal vient des candidatures au sein des collèges uninominaux. Les listes auraient dû être prêtes samedi mais, à en croire les partis, leur élaboration est encore loin d’être terminée. La répartition des collèges entre les partis imposera des coupes douloureuses dans les bastions mêmes des partis : en Lombardie et en Vénétie, pour la Ligue. »
ENTRETIEN, La Repubblica, de Sabino Cassese, juriste : « Le présidentialisme ? La Constitution doit être modifiée avec prudence » : « Le 4 septembre 1946, la seconde sous-commission de la Commission constituante a approuvé un ordre du jour dans lequel elle se prononce pour l’adoption d’un système parlementaire mais avec des « dispositifs constitutionnels aptes à protéger les exigences de stabilité de l’action gouvernementale et à éviter les dérives du parlementarisme ». Ces exigences sont encore vives parce que cette orientation n’a pas été suivie. L’import-export d’institutions est devenu une pratique quotidienne. Introduire l’une des nombreuses formes de présidentialisme en Italie, parmi lesquelles un régime semi-présidentiel à la française, peut être utile pour offrir une longévité à la tête de l’exécutif. Une modification de la Constitution vers un régime présidentiel devrait être réalisée avec un maximum de prudence, en respectant toutes les garanties prévues par l’article 138 de la Constitution. »
ARTICLE, Il Messaggero.it, A. Rosi : « Politiques et réseaux sociaux : ceux qui montent et ceux qui chutent » : « La campagne électorale bat son plein, y compris sur les réseaux sociaux. C’est une bataille qui se joue sur toutes les plateformes : Facebook, Twitter, TikTok et Instragram. Selon la recherche du site de professionnels du numérique, influenceritalia.it, la reine d’Instagram est Giorgia Meloni qui gagne 10 mille usagers ce dernier mois. Pour la candidate de Fratelli d’Italia l’objectif est d’arriver à 1 million de followers, avec un taux d’engagement à 1.3 qui est déjà le meilleur parmi les personnalités politiques italiennes. L’ancien président du Conseil, Giuseppe Conte, chute sur Instagram et perd environ 25 mille usagers en un mois, suite à la crise du M5S et du fait que beaucoup d’entre eux l’avaient suivi quand il était président. Matteo Salvini de son côté perd 5 mille de ses 2 millions de followers sur Instagram mais gagne 10 mille usagers en plus sur Tik Tok. »
LETTRE, Il Corriere della Sera, de G. Meloni, Présidente de Fratelli d’Italia : « C’est aujourd’hui le 66e anniversaire de la tragédie de Marcinelle, au cours de laquelle 262 mineurs, parmi lesquels 136 migrants italiens, perdirent la vie. Il n’est pas difficile de remarquer combien le cadre est radicalement différent de celui de l’actuelle situation d’immigration vers l’Italie. Ici et aujourd’hui, en parallèle de l’immigration régulière de millions de millions d’étrangers qui se sont intégrés de manière positive dans la société et qui méritent notre estime, nous connaissons, depuis des années, des flux majeurs d’immigration irrégulière que les gouvernements de gauche (ou auxquels la gauche a participé) n’ont jamais su ni voulu contenir, alimentant ainsi un trafic inhumain et un business inacceptable, soutenu par certaines ONG idéologisées et des professionnels, grassement rémunérés, de l’accueil migratoire. Une part importante de ces migrants irréguliers sert de main d’œuvre à la criminalité organisée, d’autres celle de pseudo-entrepreneurs sans scrupules, qui les utilisent pour revoir à la baisse les conditions sociales et salariales des travailleurs italiens. Seule une part minime est constituée d’ayant-droits au statut de réfugiés qui, naturellement, méritent la protection prévue par les Conventions internationales. Face à ce drame quotidien, il faut établir le principe élémentaire selon lequel on n’entre et ne peut demeurer en Italie qu’en respectant les lois de notre territoire. La différence la plus importante avec la tragédie des Italiens qui émigraient en Belgique pour travailler dans les mines est que de nombreux immigrés irréguliers d’aujourd’hui, majoritairement des hommes jeunes et en âge de travailler, considèrent le fait d’être accueilli comme un droit inaliénable duquel tirer de présumés droits plus matériels, qui coûtent aux caisses de l’Etat italien, pour chaque étranger accueilli, plus ce que ce ne reçoivent de retraite nombre de nos aînés. Voilà la raison pour laquelle je pense qu’utiliser l’anniversaire de la tragédie de Marcinelle pour des comparaisons forcées et instrumentalisées n’est pas une façon correcte de se souvenir des Italiens d’autrefois ni d’affronter le problème des étrangers d’aujourd’hui. »
PREMIER PLAN, La Repubblica, A. Ziniti : « A droite, conflit sur l’immigration : à nouveau proposées les idées recalées par les juges » : « Le blocus naval en Méditerranée souhaité par Giorgia Meloni est contraire au droit international qui le considère comme « un acte de guerre unilatéral », tant et si bien que la leader de Fratelli d’Italia a essayé de se sortir de son faux pas en spécifiant qu’ ‘’arrêter le départ des embarcations, en accord avec les autorités nord-africaines, est la seule voie possible pour rétablir le respect des règles et mettre fin aux décès en mer’’. En somme, le blocus naval ne consisterait qu’en un accord avec les pays d’origine des migrants, pays avec lesquels il est déjà substantiellement impossible de signer des accords de rapatriement. Il reviendrait aux navires de la Marine nationale de mettre en œuvre le blocus, et qui, selon le droit international et les conventions signées par notre pays, doit observer une obligation de secours en mer et une interdiction de refoulement. Quant à Matteo Salvini, il a perdu d’avance quand il promet de vouloir « proposer à l’identique », d’ici deux mois, ses décrets « Sécurité ». Il oublie que ces derniers ont été démontés point par point par des mesures des magistratures civile, pénale et administrative qui ont réaffirmé l’obligation de sauver les naufragés, l’illégitimité de l’interdiction d’entrée aux navires des ONG dans les eaux italiennes, le caractère non-rétroactif de l’abolition de la protection humanitaire et le droit de tous les demandeurs d’asile de s’inscrire aux registres des communes italiennes. En outre, le recours aux amendes dissuasives, à hauteur de millions d’euros, infligées aux ONG pour la violation de l’interdiction d’accès aux eaux italiennes ne pourra plus être reproposé. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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