02/07/2019
"Salvini mène une diplomatie parallèle et silencieuse."
Italie. Revue de presse.
L’adoption, lundi soir, de mesures économiques afin d’éviter une procédure d’infraction pour dette excessive fait les gros titres des médias transalpins. La presse écrite souligne notamment l’absence du vice-président du Conseil L. Di Maio et le départ rapide de M. Salvini à la réunion, les frictions entre Ligue et M5S sur la concession de la gestion des autoroutes par la société Autostrade (groupe Benetton, impliqué dans l’écroulement du pont Morandi de Gênes, en août 2018). « Division sur Ilva et Autostrade » - ‘’Di Maio déplore les ‘’silences’’ de la Ligue’’ (Corriere della Sera), « Décret ‘’sauve-comptes publics’’ adopté » - ‘’Mesures à hauteur d’ 1,5 mld’’ (Sole 24 Ore) « Le décret pour sauver les comptes publics adopté »- ‘’Bras de fer sur les impôts et la société Autostrade’’ (Il Messaggero), « Feu vert du gouvernement au décret ‘’sauve-comptes publics’’ » (Il Mattino), « L’analyse du ministère prouve les responsabilités d’ Autostrade » (Fatto Quotidiano).
Les nominations européennes sont aussi largement commentées. Les observateurs soulignent « l’impasse » (Corriere, Repubblica, Stampa) et les « divisions » (Sole) de l’UE après le rejet du « front des souverainistes », où figure aussi l’Italie, des nominations proposées par l’axe franco-allemand : « UE, Conte choisit le camp des rebelles » - ‘’La proposition de Merkel et Macron saute, l’Italie s’allie avec les pays de Visegrad’’ (La Stampa), « Axe franco-allemand en crise mais l’Italie demeure isolée » (Il Messaggero), « Match avec l’UE » - ‘’L’Italie se met de travers et bloque les nominations’’ (Avvenire).
ANALYSE La Repubblica A. D’Argenio « UE enlisée, stop à Timmermans de la part de Conte et des souverainistes de l’Est » : « Maintenant la situation apparait encore plus compliquée. Le paquet en Conseil doit être accepté par 21 leaders représentant au moins 65% de la population et puis par le Parlement européen. Dommage que les gouvernements et Strasbourg soient divisés entre plusieurs familles politiques. Il sera difficile de trouver une combinaison pouvant satisfaire tout le monde. En cas d’énième échec, on évoque déjà la possibilité d’une réunion extraordinaire le 15 juillet ».
ARTICLE La Repubblica C. Lopapa, « Mais c’est Salvini qui négocie. Appel téléphonique avec Orban pendant la réunion » : « Une chose est certaine : pendant que G. conte continuait ses bilatérales avec Merkel, Macron et les autres collègues, Salvini a commencé ses consultations par téléphone (Pologne, Slovaquie, République Tchèque). L’appel le plus long a été celui avec Orban. Dimanche soir, les deux ont décidé de s’opposer ‘’coûte que coûte’’ à l’axe franco-allemand. Salvini mène une diplomatie parallèle et silencieuse en tant que ‘’Président du Conseil-ombre’’. Il planifie à court terme et ne regarde que ses amis à l’Est pour s’élever contre ‘’les bureaucrates de Bruxelles’’ ».
EDITORIAL Il Messaggero A. Campi, « L’axe franco-allemand en crise mais l’Italie reste toujours en dehors de l’échiquier » : « L’impasse sur la nomination du nouveau Président de la Commission nous montre que l’Union, bien qu’affaiblie aux yeux de ses citoyens, est un organisme politique vital. C’est aussi le début d’un nouveau cycle historique et politique, caractérisé par un double déclin : celui de l’axe franco-allemand et celui du duopole socialistes-populaires. L’Europe s’est élargie, il y a aussi un ‘’groupe de Visegrad’’, qui ne représente pas la population de l’Italie ni la moitié de son PIB. Il est légitime de se demander, avec une pointe de regret, si nous ne sommes pas en train de perdre la possibilité de nous insérer dans un match politique qui n’a jamais été aussi incertain et plein d’opportunités. L’excentricité du gouvernement Ligue-5 Etoiles rend difficile les convergences et les ententes stables, à qui fait défaut l’union et donc une voix unique - outre la difficile position d’un pays sous la menace d’une procédure d’infraction. La vérité est que la politique de décision invoquée par Macron ne peut pas légitimer le fait qu’un petit groupe d’états dicte les règles que tous devraient suivre. Voici l’enjeu de la bataille en cours en Europe. Cela se décidera dans les prochaines heures et l’Italie doit tenter de combattre, forte de son rôle de pays fondateur ».
COMMENTAIRE Sole 24 Ore I. Bufacchi « Le risque que la présidence de la BCE devienne un choix résiduel » : « Hier la journée a été celle du lancement par Emmanuel Macron des candidates Christine Lagarde et Sylvie Goulard (celle-ci proche du Président), qui ne sont certainement pas considérées comme de grandes expertes de politique monétaire. La volonté de Macron demeure un mystère, dit-on dans les lieux proches de la BCE. Au début, on croyait que la Banque centrale ne l’intéressait pas tant que ça, préférant la présidence de la Commission Européenne ».
COMMENTAIRE Corriere della Sera M. Franco, « Une négociation difficile mais les alliés se disputent » : « Si le Chef de l’Etat intervient pour dire qu’une procédure d’infraction n’a pas de raison d’être, cela signifie que quelque chose est en train de bouger. Il a fait la liste des motivations pour lesquelles l’Italie devrait être promue. C’est une aide pour Conte, dans un passage crucial des négociations. Mais aussi le fait que Mattarella se présente comme garant du sérieux italien. La tentation des partis historiques de l’UE d’exclure l’Italie des choix stratégiques est évidente. Difficile de ne pas donner raison à Conte quand il refuse la méthode des noms présentés. Reste la crainte d’un accord destiné à accentuer une attitude de ‘’rigueur’’ et peu indulgent envers Rome ».
COMMENTAIRE Sole 24 Ore L. Palmerini, « Mattarella : ‘’je ne vois pas les conditions pour ouvrir une procédure d’infraction » : « La prudence a toujours été une caractéristique de la présidence de Mattarella. Or, hier il a laissé la place à un soutien convaincu de la position italienne à l’égard de Bruxelles. Il s’agit de déclarations, faites par ailleurs au-delà des frontières (ndr : à Vienne), dans un pays européen qui a parfois critiqué notre dette, qui prennent un poids politique important. Ce n’est pas seulement un soutien pour le Président du Conseil Conte et son ministre de l’Economie Tria mais aussi la tentative de placer l’Italie dans une position plus sûre en Europe et face aux marchés dans une phase où les divisions au sein du gouvernement demeurent et où l’hypothèse d’une crise – à court ou à moyen terme – n’est pas écartée ».
ENTRETIEN de Luigi Di Maio, leader du M5S, vice-président du Conseil et ministre du travail La Repubblica, « Le travail est reparti. Autoroutes, solution possible à condition que l’entreprise paye » : « ‘’Le décret Dignité est en train de produire ses effets’’ assure le ministre du Travail Luigi Di Maio. Ainsi, on constate une augmentation des emplois avec notamment ‘’200.000 transformations de CDD en CDI’’. Il a par ailleurs affirmé que la prochaine étape sera la mise en place d’une loi sur le salaire minimum en vue de garantir le respect des standards européens. Sur la ligne Lyon-Turin : ‘’notre position est connue. On nous dit que c’est urgent depuis vingt ans. Conte a le dossier en mains. Si nous devons parler d’infrastructures, parlons du Mezzogiorno et portons la haute vitesse au Sud’’. Sur Autostrade : ‘’il faut que la société (Atlantia) paye et rende justice aux victimes de l’écroulement du pont de Gênes’’ ».
RETROSCENA (Coulisses), La Stampa, A. La Mattina : « ‘’Nous ne défendons pas la famille Benetton, mais qui va gérer les autoroutes ?’’ Colère de Salvini envers Di Maio » : « Le gouvernement semble plus uni sur les questions des nominations européennes et de la procédure d’infraction plutôt que sur les questions industrielles comme Ilva, Alitalia et Benetton-Atlantia Autoroutes. Luigi Di Maio est furieux contre la Ligue, qui a mis en doute son travail pour trouver une solution au problème de l’acier ou d’Alitalia, mais surtout à cause du silence de la Ligue sur le retrait des concessions à la famille Benetton qui gère les Autoroutes. Di Salvini a souligné que la Ligue ne défend pas la famille Benetton mais qu’elle est, au contraire, préoccupée de la gestion des Autoroutes italiennes ».
COMMENTAIRE, La Stampa, F. Grignetti : « Et maintenant Sarraj parle directement avec Salvini » : « Rencontre imprévue, et théoriquement secrète, entre Matteo Salvini et le président libyen Al- Sarraj à Milan. Sarraj a, en fait, identifié Salvini comme l’homme fort du gouvernement et c’est à lui qu’il a voulu demander un tournant dans notre politique. Sarraj a également eu l’occasion de se plaindre avec Salvini de la politique de France et Egypte, les deux sponsors d’Haftar. Le président libyen a aussi promis d’améliorer la lutte contre l’immigration clandestine et contre le terrorisme de Daech. Salvini a écouté avec grande attention mais il ne s’est pas engagé, reportant toute décision au Conseil des Ministres. Ahmed Maitig, homme fort de Misrata et vice -président libyen, avec lequel Salvini a une très bonne entente, devrait probablement arriver la semaine prochaine pour demander davantage de considération dans les équilibres ».
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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