02/01/2023
Giorgia Meloni : "Le plus dur commence."
Italie. Revue de presse.
Tous les médias italiens (les quotidiens ne sont pas parus le 1er janvier) se concentrent sur le décès du Pape émérite Benoît XVI – « Le dernier conservateur » (Repubblica), « Un professeur devenu Pape » (Foglio) - et sur les implications de la « cohabitation » avec le Pape François, qui a duré 10 ans, pour l’église catholique - « L’adieu à Benoît a changé l’Eglise » pour le Corriere. Selon le Messaggero « l’idée d’un adieu effleure le Pape François ».
Tous ont également repris « l’appel de Mattarella » (Corriere) dans son discours de fin d’année, insistant sur la « Constitution qui doit rester la boussole » de l’Italie, les réformes et les impôts, entre autres thèmes abordés. La Stampa évoque une « insolite cohabitation entre le Quirinal et le Palais Chigi ».
Les JT couvrent essentiellement la mort du Pape émérite Benoît XVI dont l’inhumation aura lieu jeudi, 60.000 fidèles étant attendus, les déclarations du Pape François à l’angélus du 1er janvier à cet égard, la visite du Président Mattarella à la chapelle ardente ce matin. Ils évoquent aussi les attaques russes en Ukraine et le décès en Iran de Mehdi Zare Ashkari, après 20 jours de torture.
ANALYSE, S. Cappellini, Repubblica, « L’enjeu des réformes mis en avant par Mattarella » : « Les messages de Sergio Mattarella sont toujours aussi fins. Ils contiennent toujours un lien concret avec le débat public et une orientation politique visant toujours l'intérêt général. Dans le cas du discours du Nouvel An, l'incipit consacré à la politique a éclairé en moins de deux minutes une question fondamentale : les règles du jeu et leur fondement naturel, la Constitution. Mattarella s'est exprimé à ce sujet immédiatement après s'être félicité du changement avec la première femme chef du gouvernement et des élections ayant donné un ‘’résultat clair’’. Il ainsi rappelé qu'il existe un gouvernement pleinement légitimé et qui bénéficie en outre de l'impulsion d'une femme leader. Mattarella, en rappelant qu'en l'espace de quelques années toutes les forces parlementaires ont fait l'expérience de la majorité gouvernementale, a voulu exprimer clairement ce que signifie passer de l'opposition à la lourde charge de diriger: ‘’Reconnaître la complexité, exercer la responsabilité des choix, affronter les limites imposées par une réalité de plus en plus caractérisée par des phénomènes globaux’’. Et faire tout ce qui est prévu par la Constitution. Mattarella a été lapidaire en évoquant le ‘’respect dans le langage entre majorité et opposition, qui conduit à une vision commune de notre système démocratique, au respect des règles incontournable, du rôle de chacun dans la vie politique de la République., ce qui correspond à l'esprit de la Constitution’’. ‘’La Constitution est notre boussole’’ a-t-il conclu. Et Mattarella ne dit jamais un mot de trop. La Constitution, dont le soixante-quinzième anniversaire de l'entrée en vigueur est tombé hier, est la boussole de tous parce qu'elle a été écrite par un très large éventail de forces politiques et culturelles, comme un héritage de valeurs communes après les ravages de la guerre et du fascisme. Et pas seulement par ceux qui regrettaient le régime mussolinien, comme le Mouvement social italien, dont l'anniversaire de la fondation vient d'être célébré par le président du Sénat Ignazio La Russa (Frères d'Italie). Une leçon, le partage des règles, que Giorgia Meloni devrait bien garder à l'esprit. Personne ne lui reproche ses sympathies présidentialistes. Ce qui n’est logique, par rapport aux propos de Mattarella, c'est l'idée d'aller de l'avant en dépit des avis du Parlement et de l'opposition. »
COULISSES, Corriere della Sera, M. Guerzoni : « L’appel au Quirinal et la stratégie du Palais Chigi pour une ‘’nouvelle’’ relation » : « La nouvelle année de Giorgia Meloni débute avec un appel de remerciement au chef de l’Etat et avec ses vœux aux Italiens, diffusés en vidéo sur les réseaux sociaux, ‘’pour une année d’orgueil et d’optimisme’’. Meloni a apprécié le message de fin d’année du Président Mattarella et l’a appelé pour le remercier. Et si plusieurs membres de la majorité gouvernementale, qui a introduit dans la loi de finances des amnisties fiscales, ont dû se sentir concernés quand le Président a rappelé que ‘’ la République s’exprime à travers le sens civique de ceux qui payent les impôts ’’, au Palais Chigi l’avis sur ce discours est essentiellement positif. ‘’Mattarella ne nous a adressé aucune critique, même indirectement’’ affirme Lucio Malan, président des sénateurs de Forza Italia. Pas même sur le Traité du Quirinal avec la France, sur lequel Meloni a évité de s’exprimer lors de la conférence de presse de fin d’année. Le Quirinal s’en est bien sur aperçu, mais n’a pas réagi. Meloni apprécie l’attitude super partes du Président, qui exerce son mandat sans créer d’obstacles à l’action du gouvernement. L’entourage de Meloni et celui de Mattarella appartiennent à deux univers lointains, mais qui commencent à se connaître. Le secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil, Alfredo Mantovano, est l’homme du gouvernement chargé des rapports avec les conseillers du Quirinal, et il faut reconnaître que c’est grâce à sa capacité d’écoute que les premiers décrets provoquant des discussions entre le Quirinal et le Palais Chigi n’ont pas mené à un conflit. Au cours de leur appel Mattarella et Meloni n’ont pas parlé de réforme, mais reste à se demander ce qui se passerait si Meloni tentait vraiment de changer la Constitution. »
COULISSES, T. Ciriaco, Repubblica, « Présidentialisme et Conservateurs : le plan de Meloni pour résister à la crise et aux alliés » : « ‘’Le plus dur commence’’ dit depuis quelques jours Giorgia Meloni. C'est l'année ‘’où beaucoup de choses se jouent’’. ‘’Nous pouvons relever cette nation ensemble. Je voudrais que vous y croyiez avec moi’’ : tel est le message qu’elle a lancé hier sur les réseaux sociaux. Plus d'excuses, les électeurs vont demander des comptes sur les promesses électorales, les alliés vont essayer de l'affaiblir, les opposants vont se réorganiser. La présidente du Conseil donc décidé de jouer sur le terrain politique, car l'argent continue de manquer. Elle a identifié deux objectifs avec son équipe, des réformes à coût nul et à fort impact symbolique : le présidentialisme et la construction d'un grand parti Conservateur. Si elle échoue, elle aura du mal à franchir l'obstacle des élections européennes de 2024. Si elle réussit, elle tiendra le pays entre ses mains et réduira Matteo Salvini et Silvio Berlusconi au néant. Le discours de de Sergio Mattarella dans son message de fin d'année n'ont pas laissé le Palais Chigi indifférent. Les proches de Meloni apprécient manifestement la reconnaissance du passage historique d'une femme pour la première fois à la tête du gouvernement, et ils soulignent l'accord total sur la politique internationale et la position atlantique, du moins en ce qui concerne la guerre en Ukraine (sur la relation avec l'Europe, en revanche, les divergences ne manquent pas). Le chef de l'État a cependant rappelé la boussole de la Constitution, au moment même où la majorité envisage une réforme présidentielle. Il a insisté sur la valeur civique du paiement des impôts, ce qui contraste fortement avec une droite qui pense à de nouvelles amnisties et promet une flat tax. Ce sont les deux points les plus délicats. Au fond, Meloni sait bien qu'il n'y a pas trace de ressources pour une véritable "flat tax" dans le budget asphyxié de l'État. L'option de nouvelles grâces fiscales, revendiquée par Forza Italia et la Ligue, la porte sur un terrain glissant. Sans oublier l'autonomie, que réclame le Carroccio. Par ailleurs, la ‘’cour’’ de Matteo Renzi au Cavaliere semble être le prélude à l'ouverture d'un front centriste. La promesse de Renzi est : ‘’Nous ferons tomber Meloni d'ici 2024‘’. Pour toutes ces raisons, elle a décidé de tenter la voie du renouveau, en imaginant un parti Conservateur italien. La stratégie est ambitieuse, l'objectif est double. Tout d'abord, il y a la volonté d'essayer de changer l'équilibre en Europe, grâce à une alliance avec les Populaires. Mais il y a aussi un jeu interne. Meloni, avec son équipe, a l'intention de lancer une opa hostile sur ses alliés, anticipant d'éventuelles représailles sur son exécutif. Les Conservateurs constituent une assurance pour l'avenir du FdI, car ils peuvent influer sur le rapport de force à Bruxelles, point faible de Meloni. Mais c'est aussi la raison pour laquelle Berlusconi pourrait se rebeller. Elle est convaincue qu'elle peut se passer de moi", confie-t-il à des amis, ‘’mais elle devrait se rappeler qui a fondé le centre-droit et qui, le premier, l’a voulu comme ministre’’. »
ANALYSE, La Stampa, U. Magri, « Le futur selon Mattarella » : « Le chef d'Etat a fait l'éloge de la Constitution et pousse les politiques affronter la modernité. En abordant les thématiques telles que la jeunesse, l'écologie ou la santé, il a invité les Italiens à être ‘’dans notre temps, et non dans le passé’’ Nombreux sont les politiques à avoir fait l'éloge de son discours : Meloni, Letta, Shlein, Salvini, Renzi... Il a été suivi par plus de onze millions de téléspectateurs. Ce succès s'explique notamment par l'équilibre de son message de seize minutes qui a touché de nombreuses cordes. Mattarella nous invite à ‘’lire le présent avec les yeux de demain’’ : les attitudes nostalgiques sont des ennemis à combattre. Le Président dénonce la pauvreté des mineurs qui a quadruplé depuis 2008, l'évasion fiscale ou encore les sources d'énergie polluantes. Si le message a plu à G.Meloni, c'est aussi car il a souligné ‘’la grande signification sociale et culturelle’’ de l'arrivée d'une femme à la tête du pays. »
ENTRETIEN de Marina Elvira Calderone (Indépendante), ministre du Travail, La Stampa, P. Baroni : « ‘’ Il faut soutenir le pouvoir d’achat, et baisser les charges sur l’emploi de 5 % ’’ » : « ‘’ Sur le revenu de citoyenneté, il faut séparer le thème de l’assistance de celui de la recherche d’emploi ; dans le premier cas, nous allons insérer un revenu d’inclusion, renforcé par rapport au passé, dans le deuxième, il faut mettre en place un système pour que se croisent les offres et les demandes d'emploi. À’ partir du 19 janvier nous allons ouvrir une confrontation avec les partenaires sociaux pour une réforme des retraites. Aux syndicats qui ont appelé à la grève contre la loi de finances, je demande d’être ouvert au dialogue, à partir de réunions techniques. Le premier thème est celui de la sûreté du travail : nous allons y travailler avec tous les acteurs concernés à partir du 12 janvier, l’idée est aussi celle d’introduire un système de prix pour les entreprises plus attentives à la sûreté. Il ne faut pas oublier les problèmes des travailleurs indépendants, la crise a fait perdre leur activité à 500 mille d’entre eux. Le thème du pouvoir d’achat et des salaires est très important ; pour favoriser la dynamique salariale, il est nécessaire d’intervenir sur les charges fiscales et des cotisations sociales. ‘’ »
ENTRETIEN de Matteo Piantedosi (Indépendant), ministre de l’Intérieur, Repubblica du 31/12, A. Ziniti : « ‘ Nous viderons les centres de détention en Libye ’’ » : « ‘’L’Etat garantit les secours en mer. Les Ong se concentrent uniquement sur la voie de la Tripolitaine et encouragent les départs ; 93 % des personnes qu’ils secourent part de là. Le gouvernement veut mettre en œuvre une politique vers les pays d’origine et de transit des flux migratoires qui puisse mené à vider les centres en Libye. Nous avons déjà activé les contacts avec les ministres de l’Intérieur des pays concernés et nous sommes en train de programmer des rencontres. 43 % des sauvetages en mer sont réalisés par la police des douanes et les garde-côtes italiens. Je trouve étrange le raisonnement des Ong qui affirment d’avoir un rôle marginal sur les débarquements, mais qui en même temps affirme que sans eux les migrants sont destinés à mourir en mer. Les naufrages et les présences en Libye se réduisent uniquement en empêchant les départs irréguliers. Une étude sur les débarquements prouve qu’ils augmentent avec la présence des navires des Ong en Méditerranée. L’activité des Ong est déterminante pour les arrivés depuis la Tripolitaine, qui constituent environ un tiers de tous les débarquements en Italie. De là sont arrivés en 2021 27.264 personnes, dont 8.665 par les navires des Ong ( 34.76 % ), 31.860 en 2022, dont 11.076 par les navires des Ong. Cette année, les Ong ont conduit en Italie 11.892 personnes dont 93.2 % depuis la Tripolitaine ; cela prouve que l’activité des Ong est concentrée sur cette voie et a l’effet d’encourager les départs. Pour les personnes fuyant la guerre nous devons continuer avec les couloirs humanitaires et les évacuations, un engagement que l’Italie soutien avec les organisations internationales et les Ong. Au cours des deux derniers mois, nous avons déjà inversé la courbe par rapport aux chiffres de l’an dernier : une hausse de seulement + 35 % contre un + 59 % dans les dix premiers mois de l’année. Nous envoyons désormais les migrants dans tous les ports italiens et non seulement en Calabre et en Sicile où les structures d’accueil sont sous pression. La Commission européenne a annoncé un plan d’action ; j’espère que nous pourrons avancer rapidement avec des actions concrètes. Je ne suis pas le visage méchant du gouvernement ; au cours de mes 30 ans de carrière comme fonctionnaire de l’Etat j’ai toujours eu une grande attention pour l’impact social de mes décisions.’’ »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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