15/05/2024
Giorgia Meloni : "La réforme de la justice sera au conseil des ministres dans quelques jours."
Italie. Revue de presse.
Les suites de l’enquête pour corruption visant le président de la région Ligurie Giovanni Toti font toujours la une de plusieurs quotidiens : « Toti à un pas de la démission » (Repubblica), « Spinelli avoue au juge que Toti lui demandait de l’argent » (Stampa), « Meloni donne du temps à Toti » (Il Giornale). Les nouvelles mesures fiscales adoptées en conseil des ministres sont aussi largement citées « Feu vert aux restrictions concernant le bonus pour la rénovation des bâtiments » (Sole 24 Ore), « Bonus bâtiment : un accord trouvé malgré les tensions » (Corriere della Sera, Repubblica).
ENTRETIEN, La Verità, de Giorgia Meloni, présidente du Conseil italien, « La réforme de la justice sera au conseil des ministres dans quelques jours » par Maurizio Belpietro (extraits) : « Sur l’enquête de Gênes, tout ce que je vois c’est que le président de la région Ligurie a dit qu’il regarderait les éléments et donnerait sa version des faits. Je pense que le minimum syndical du respect pour un homme qui gouverne bien depuis plusieurs années est d’attendre ses déclarations. Je n’ai rien à ajouter sur ce sujet car je n’ai pas les éléments pour le faire. Sur le débat avec Elly Schlein, le principe me plait, c’est le sel de la démocratie, surtout en campagne électorale. Je pense qu’il est normal de dire aux Italiens qu’il y a deux modèles d’Europe : d’une part une proposition socialiste et de l’autre, celle des conservateurs, et mettre en regard les recettes et la vision de chacun est une manière d’aider les citoyens à choisir. Et puis je ne suis pas quelqu’un qui a peur du débat, car j’ai été pendant des années à l’opposition. Donc cela me fait sourire quand je vois aujourd’hui ceux qui s’énervent en disant qu’il ne faut pas faire ce débat, qu’il faut le faire avec tous [les candidats]. Je ne me souviens pas d’avoir entendu la même chose du temps où j’étais de l’autre côté. Si les autres veulent organiser des débats différents, ils sont libres de le faire. Mais s’ils veulent empêcher ce débat, cela me parait excessif. (…) Je suis fière qu’un an et demi après être devenue présidente du Conseil, la plupart des gens qui me rencontrent dans la rue m’appellent encore Giorgia. J’avais peur que la fonction puisse créer une distance, mais je suis fière que les gens me tutoient encore. Les adversaires qui m’appellent la « borgatara » (personne qui réside dans une commune isolée, ndlr) pensent qu’il peut s’agir de la pire insulte qu’on puisse me faire, sans comprendre que pour moi ça ne l’est pas. Si je suis devenue premier ministre, cela veut dire que le destin n’est pas déterminé par sa condition d’origine. Carlo Cottarelli dit « ne m’appelez pas Carlo, appelez-moi docteur ». Très bien, bravo. Mais il y a en Italie tant de personnes qui n’ont pas pu faire d’études supérieures, et à ces personnes, je veux dire que le destin n’est pas scellé. Ce qui compte, c’est la disposition à faire des sacrifices, la capacité à démontrer ce que l’on vaut. C’est ainsi que je vois les choses, et c’est ce qui nous différencie de la gauche. Mon objectif, c’est de confirmer le soutien [dans les urnes] que j’avais quand j’ai été nommée premier ministre. C’est important car pendant cette année et demie, nous avons du prendre des décisions difficiles, courageuses. Je ne suis pas au gouvernement pour moi, mais pour les citoyens italiens. Les cinq étoiles me critiquent en disant que la candidature des membres du gouvernement est une supercherie. Ce qui est une supercherie, c’est de nommer premier ministre un monsieur qui n’avait jamais fait campagne et que les Italiens ne connaissaient même pas. Je n’ai jamais songé à faire un remaniement [après les européennes]. Au contraire, j’aimerais faire la différence en arrivant au terme des cinq ans avec le gouvernement que j’ai nommé. Ce n’est jamais arrivé dans l’histoire de l’Italie. Sur le futur commissaire européen [italien], l’un des portefeuilles les plus importants selon moi est celui qui permet de défendre l’intérêt national italien. Je pense à l’économie, sans l’affaiblir -à l’inverse de ce qui s’est passé la dernière fois-, mais aussi la compétitivité, le marché intérieur, la cohésion, le green deal, la célèbre transition verte. On peut dire que ce qui a été fait dans ce domaine n’a pas marché et qu’il faut corriger le tir. Il faut réconcilier protection de l’environnement et défense de la compétitivité européenne. L’Italie sur certains dossiers a su être tête de file, des moteurs aux emballages, en passant par les produits phytosanitaires. Nous avons eu des résultats bien meilleurs que ce que nous aurions pu avoir autrement. (…). [Sur la RAI], cela fait des semaines que j’entends parler de « TeleMeloni ». Et comme je ne veux rien de tout cela, je suis allée voir les données des observateurs indépendants. L’observatoire de Pavie montre que durant les premiers 14 mois de gouvernement, je suis présente 15 minutes ; pendant la même période, Draghi en comptait 19, Conte 42, Gentiloni 28 et Renzi 37. Où se trouvaient alors les belles âmes qui défendent le pluralisme ? Je me souviens quand j’étais dans l’opposition, quand mon parti FDI avait été exclu du CA de la Rai. La réalité est que dans les statistiques, je suis bien derrière les autres. L’agacement ne tient pas au fait qu’il y aurait une « TeleMeloni », mais plutôt au fait qu’il n’y a plus de « TelePD ». (…) [Sur les manifestations et blocages d’université]. Après l’attaque du 7 octobre, nous avons décidé de ne pas interdire les manifestations. D’autres ont fait différemment. La liberté de manifester devait être défendue. Mais il y a aussi des règles à respecter. Est-ce que l’attaque de la CGIL (syndicat italien, ndlr) relevait de la liberté de manifester ? Les forces de l’ordre cherchent à trouver un équilibre et je ne pense pas qu’elles méritent cette absence de solidarité que l’on a trop souvent vue. (..) Donc il faut défendre le droit de manifester mais dans le respect des règles. (…) Sur l’immigration, les accords avec les pays d’Afrique du nord sont nécessaires et c’est une des grandes questions que l’Italie a remise dans les discussions européennes. Ce n’est pas un hasard si vous citez la Hongrie, un pays qui s’oppose à la redistribution de migrants. Je rajouterais que d’autres pays, même beaucoup plus pro-européens, s’y opposent aussi. Donc je n’ai pas vu que tous ces migrants aient été redistribués en France, en Allemagne, dans les grands pays européens. Le seul débat qui peut réunir tout le monde est le suivant : comment pouvons-nous arrêter l’immigration illégale ? Et le seul moyen de le faire est de coopérer avec les pays de départ et de transit. Je vois que toute réponse que je propose est critiquée, on dit que l’accord avec la Tunisie ne va pas, que l’accord avec l’Egypte ne va pas, qu’il ne faut pas parler à la Libye, qu’avec l’Albanie nous sommes en dehors de l’état de droit, et si tu fais le décret Cutro, les juges le démantèlent. Malgré toutes ces critiques, les résultats arrivent progressivement. Aujourd’hui les migrants illégaux sur la route de la méditerranée centrale ont diminué de 60% par rapport aux chiffres de la même période l’an dernier. On continue à travailler sur des propositions, comment dire, « créatives », comme celle avec l’Albanie. La vérité c’est que cet accord n’est pas contraire à l’état de droit. Le premier ministre tchèque l’a trouvé intéressant, donc il est évident que le débat change, donc le vote des citoyens sera essentiel pout renforcer cette ligne. Il faut renforcer notre position, déclarer la guerre aux trafiquants d’êtres humains, un thème que je porterai lors du sommet du G7. Sur la lutte contre ces trafiquants, qui sont devenus les plus lucratifs au monde, on peut même apprendre de la leçon de Falcone et Borsellino sur la mafia, « follow the money ». On fera aussi la réforme de la justice. Ce pays en a besoin. Je pense que dans quelques jours elle arrivera en conseil des ministres. Sur la réforme du « premierato », on cherche à personnaliser ce débat sur un referendum, en espérant que ce qu’a connu Renzi se répète. J’espère que nous pourrons trouver des convergences sur cette réforme. Si on n’en trouve pas, je pense que la réforme est nécessaire et je devrai demander aux citoyens ce qu’ils en pensent, mais que ce n’est pas un référendum sur moi. Ce n’est pas non plus un référendum sur le Quirinal. Je vois qu’on pousse beaucoup le président de la République sur ce sujet, mais la réforme entrera en vigueur en 2028. Donc pas une réforme qui concerne le présent, mais le futur. Ce qu’elle aura de bon, c’est que les citoyens pourront choisir directement qui est le président du Conseil. Quand on dit la souveraineté appartient au peuple, excusez-moi, mais [actuellement] je ne choisis pas le président du Conseil, je ne choisis pas la majorité, ni un programme, ni mon parlementaire. En 75 ans, nous avons eu 68 gouvernements. Parfois on me dit, mais tu es encore là ? Car nos interlocuteurs internationaux ont l’habitude de changer d’interlocuteur à chaque fois qu’il y a une nouvelle rencontre. Comment sceller des partenariats stratégiques quand on est sûr de rien ? Quand tout peut changer demain ? Demandez-vous pourquoi l’Italie est devenue tellement attractive, pourquoi tout le monde veut investir en Italie. Je voudrais pouvoir dire que c’est grâce à mon gouvernement, mais la réponse c’est la stabilité. Nous sommes considérés aujourd’hui comme l’un des pays les plus stables. Les gens se sentent sûrs en mettant leur épargne en Italie. Donc le sujet n’est pas philosophique, pas politique, pas un jeu entre partis, c’est avant tout un sujet économique. Si on veut créer de la richesse dans ce pays qui le mérite, car il a tous les atouts, tout le savoir-faire, on doit le doter d’un gouvernement qui a un mandat clair des citoyens (…) ».
ARTICLE, la Repubblica, G. Colombo, « Sur le Superbonus, la défaite de Forza Italia ; la majorité sauvée grâce aux votes d’Italia Viva » : « Dans les couloirs de la commission Finances, Maurizio Gasparri déclare : « Grâce à nous, la taxe sur les boissons sucrées est reportée d’un an, jusqu’à juillet 2025 ». Mais son visage s’assombrit quand les députés passent au sujet du superbonus pour la rénovation des bâtiments. À peine quelques minutes avant, le vote de la commission a donné raison au gouvernement, Forza Italia se retrouve isolé, obligé de céder face à Giancarlo Giorgetti (Ligue), le ministre de l’économie et des finances, qui a défendu ces mesures douze heures durant malgré les menaces de Forza Italia. Ce parti avait évoqué la possibilité d’un vote contre, ce qui mettrait le gouvernement en grande difficulté. Il avait déjà prévenu Antonio Tajani, ministre des Affaires étrangères et président du parti : la réduction des dépenses liées au Superbonus ne peut pas être repoussée pour des motifs électoraux. Toute la journée, les députés du parti fondé par Silvio Berlusconi ont brandi des menaces qui n’ont pas eu l’effet escompté, mais qui ont bel et bien agacé Giorgia Meloni, laquelle a pu compter aujourd’hui sur les voix d’Italia Viva, qui se sont révélées décisives pour la majorité. Tout s’est déroulé très vite hier soir : la sénatrice d’opposition Dafne Musolino (Italia Viva) vote « oui » à l’amendement du gouvernement, compensant l’abstention de Claudio Lotito, unique représentant de Forza Italia en commission. À neuf contre huit, c’est la majorité qui l’a emporté au terme d’une journée qui l’aura contrainte à un coup de force. Après avoir demandé le transfert d’un député de Fratelli d’Italia de la commission Justice à la commission Finance, transfert refusé par le président du parlement Ignazio La Russa (Frères d’Italie), et accepté de repousser l’entrée en vigueur de la sugar tax à juillet 2025, la majorité a fini par l’emporter puisque les amendements proposés par Forza Italia ont tous été rejetés, les contraignant à hisser le drapeau blanc. »
COMMENTAIRE, Corriere della Sera, M. Franco « Une majorité assaillie par les tensions » : « Le ministre Lollobrigida estime, au risque d’être démenti par les faits, qu’il n’y a ‘’pratiquement aucune friction au sein du gouvernement’’. Le représentant de Fratelli d’Italia prononce ces mots le jour où son parti et la Ligue se disputent sur l’avenir de la présidence de la région Vénétie. A cela s’ajoutent les fortes critiques de la sénatrice [à vie] Liliana Segre au projet de réforme du « Premierato » voulu par Meloni. Selon la sénatrice, la « mère de toutes les réformes », comme la qualifie Meloni, réduirait au silence le Parlement et amoindrirait le rôle du Chef de l’Etat. Ce sont deux aspects qui, selon Segre, suscitent une inquiétude justifiée expliquant pourquoi elle ‘’ne pouvait pas se taire’’. A cela s’ajoute aussi la radicalisation du bras-de-fer entre le ministre de l’Economie Giorgetti (Ligue) et la direction de Forza Italia sur le bonus pour la rénovation énergétique des bâtiments. Le Palais Chigi défend son ministre qui veut étaler sur dix ans les allègements fiscaux de ceux qui ont bénéficié de ce bonus. Parler de frictions représente même un euphémisme au regard des sujets d’affrontement multiples, accentués par la compétition électorale. L’idée de Giorgetti est justifiée par la crainte des retombées concrètes sur les caisses de l’Etat, ce qui le pousse à qualifier le bonus de ‘’drogue économique dont il faut se désintoxiquer’’. Ce sont des propos très forts qui confirment la rupture entre la Ligue et Forza Italia. Giorgetti a pu aussi compter sur le soutien du Secrétaire d’Etat à la Présidence du Conseil, G. Fazzolari. Le résultat est un isolement inhabituel de Forza Italia. Et il est assez paradoxal que le parti le plus modéré de la coalition de gouvernement soit épaulé par Giuseppe Conte (M5S), « père » de ce bonus et qui défend ‘’les droits acquis’’ des citoyens ayant bénéficié du bonus. Le résultat est que le PD et le M5S peuvent facilement mettre en lumière les frictions au sein de la majorité, tout en cachant celles de leur camp. »
ARTICLE, Sole 24 Ore : « Le ministre Sangiuliano au Conseil Européen : sur l’IA il faut défendre la dignité humaine » : « Face à l'intelligence artificielle, "nous ne devons pas avoir une approche de "luddites", (ouvriers du textile anglais qui s'organisèrent pour détruire les machines au début du 19ème accusées de provoquer le chômage, ndlr) mais intelligente. Le potentiel que nous offre l'intelligence artificielle est énorme". Le ministre de la Culture, Gennaro Sangiuliano, (Indépendant, ex-MSI) a participé aux travaux du segment « Culture » du Conseil « Éducation, jeunesse, culture et sport » de l'UE à Bruxelles. Intervenant dans le débat sur l'impact de l'intelligence artificielle dans les secteurs culturel et créatif, Sangiuliano a expliqué à ses collègues les principes qui sous-tendent le projet de loi approuvé par le gouvernement le 23 avril dernier. Au-delà des extraordinaires avancées technologiques, pour M. Sangiuliano, "l'humain doit dominer les processus", et "nous devons créer des règles pérennes sans freiner l'innovation et le développement, mais en garantissant une approche éthique et la sécurité des citoyens". »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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