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01/03/2022

"La Ligue amie de la Russie ? Il est clair qu’après une telle agression les choses changent."

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Italie. Revue de presse.

La presse italienne titre largement sur les pourparlers d’hier à Gomel entre les délégations russes et ukrainiennes, ainsi que sur les attaques russes contre les principales villes de l’Ukraine. L’adoption à l’unanimité du décret de loi autorisant la fourniture d’aides et d’armes à l’Ukraine en Conseil des ministres est aussi citée. Aujourd’hui, le Président du Conseil M. Draghi interviendra devant les Chambres en vue de la motion autorisant la cession de matériel militaire à Kiev : « Négociations sous les bombes » - La rencontre s’est tenue hier entre Russes et Ukrainiens mais Poutine dicte les conditions. Les sanctions commencent à avoir des retombées significatives sur l’économie russe. De nouvelles attaques sur Kiev (Corriere della Sera), « La pluie de feu sur les villes » - L’offensive contre les civils s’est intensifiée pendant que les délégations russes et ukrainiennes se rencontraient. Les Alliés : Poutine est isolé (La Repubblica), « L’horreur et l’espoir » (La Stampa), « Assis devant la même table » - Russes et Ukrainiens négocient ; il y a des espoirs de paix mais les attaques militaires vont de l’avant (Il Messaggero), « Le dialogue commence sous les attaques » - La devise russe s’effondre sous l’effet des sanctions (Sole 24 Ore), « Poutine négocie et bombarde » - Moscou demande la Crimée et la neutralité de l’Ukraine mais vise en fait à couper en deux le pays. L’UE et l’Italie envoient des armes à Kiev (Il Giornale).

PREMIER PLAN, Corriere della Sera, de M. Guerzoni, « L’Italie enverra de l’aide et des armes à Kiev ; Les partis se posent des questions mais Draghi y est favorable » : « C’est aujourd’hui que Mario Draghi se rendra au Parlement et expliquera au pays que ‘’l’agression brutale et injustifiée’’ menée par Poutine ne s’arrête pas aux frontières de l’Ukraine et remet en cause la sécurité du monde entier, y compris la nôtre. Pour le Président du Conseil, nous sommes face à un tournant historique et il est vital que le front européen et occidental réagisse avec la plus grande fermeté et combatte de façon unie et coordonnée. Il en va de même pour le gouvernement et l’ensemble de l’hémicycle : il faut rester unis. Les décisions prises sont aussi graves que nécessaires et comprennent notamment l’envoi de ‘’moyens, de matériel et d’équipements militaires’’ au gouvernement ukrainien. C’est le point qui divise le plus les partis. Ainsi, de Salvini à Conte, Draghi leur a tous téléphoné pour leur expliquer les raisons de ce décret dérogeant à la loi sur l’exportation des armes. Cette série d’appels semble avoir remobilisé et réunifié la majorité en vue des allocutions de Draghi aujourd’hui à 10 heures au Sénat et à 15h30 à la Chambre. Le M5S se déchire sur la question mais Conte a donné son ‘’plein soutien’’ à Draghi. Salvini invite ‘’à la prudence et à la plus grande diplomatie’’ mais confirme le soutien de la Ligue. Hier, le Conseil des ministres s’est donc finalement déroulé sans accrocs malgré les visages tendus et le silence de la Ligue, et le décret a été approuvé à l’unanimité. Mais l’aval du Parlement et de toutes les forces politiques est nécessaire, y compris Fratelli d’Italia. Ensuite, Les ministres de la Défense, des Affaires étrangères et de l’Economie définiront le détail des armes à fournir à l’Ukraine grâce au pont aérien assuré par l’OTAN. Il s’agira d’ ‘’instruments de défense’’ comme l’indique la résolution qui fera l’objet de la plus grande unité nationale, portée par les Présidences du Conseil et de la République. Et tant pis si Vito Petrocelli, membre du Mouvement 5 Etoiles et président de la commission Affaires étrangères au Sénat a l’impression que son homologue à la Chambre, l’ancien ministre démocrate Piero Fassino, s’est moqué de lui. »

COMMENTAIRE, La Repubblica, S. Folli « Que reste-t-il du parti de Moscou ? » : « La tragédie ukrainienne modifie les termes de la politique européenne et italienne plus rapidement que quiconque aurait pu le prévoir. En ce qui concerne l'Italie, le fait le plus marquant est le brouillard dans lequel le "parti russe" semble se diluer, sans pour autant disparaître. Jusqu'à hier, Salvini était le point de référence de ce "parti", mais maintenant il garantit son soutien sans réserve à Draghi et à ses mesures de soutien à Zelensky. Cela n'élimine pas les ambiguïtés de sa position, qui change d'heure en heure. Dimanche, le leader de la Ligue italienne était intervenu à la télévision pour s'opposer aux sanctions : "Pas en mon nom", avait-il déclaré, reprenant un célèbre slogan du mouvement international pour la paix. En tout cas, dans la soirée, Salvini avait déjà corrigé le sens de ses propos pour ne pas heurter le gouvernement dont il est membre. Hier, après avoir approuvé l'envoi d'armes et de véhicules à Kiev, il est revenu pour faire l'éloge d'un engagement générique de Poutine (lors d'un appel téléphonique avec Macron) à mettre fin aux attaques contre des cibles civiles. Salvini en parle presque comme si c'était la fin de la guerre, se présentant toujours comme l'interprète laïc du pape François. Concrètement, la Ligue ne peut que soutenir la ligne Draghi qui est celle européenne, ou plutôt euro-américaine. Mais l'effort est évident : il n'y a pas de politique étrangère cohérente de la Ligue, alors que les liens avec la Russie ont été solides. Il s'ensuit que le revirement imposé par les circonstances est précaire et empreint de tactique. Il est clair, en revanche, qu'un retour sur le terrain du "parti russe" serait incompatible avec l'unité nationale, c'est-à-dire l'esprit qui a rendu Draghi plus fort et qui est destiné à ne pas disparaître tant que durera le conflit à l'Est. Un désaccord sur l'Ukraine, une question cruciale pour l'Occident, obligerait la Ligue à quitter le gouvernement. Et cela vaut également pour la partie du Mouvement Cinq Étoiles, notamment le courant de Conte, qui a partagé avec Salvini l'élan "poutiniste" et qui est maintenant obligée de se confronter à la réalité. Ici aussi la même prudence tactique, contredite ici et là par des voix isolées. Comme le président de la commission des affaires étrangères du Sénat, M. Petrocelli, qui s'est élevé contre les choix du gouvernement. »

ARTICLE, La Repubblica C. Vecchio « Le réseau transversal qui défend le Tzar » : « Quels sont les principaux protagonistes du monde politico-intellectuel italien qui défendent l’invasion russe en Ukraine, en vertu de motifs divers : pacifisme, poutinisme ou haine de l’OTAN ? En tête de ce "front de justification", figure Ugo Mattei, juriste de gauche, connu pour ses positions anti GreenPass, qui cherche à dédouaner Poutine (« Non, Poutine n’est pas Hitler », « Poutine a été mis là par les Américains, puis il a échappé à leur contrôle. (…) « il ne bombardera pas les civils, n’utilisera pas le nucléaire ») et appelle à l’action des casques bleus. Au Parlement, les militants d’Alternativa (anciens élus du M5S), par la voix de Pino Cabras, analyste financier, plaident pour la neutralité de l’Ukraine et font remonter les causes de l’invasion russe à « l’humiliation subie après la chute du Mur par l’ex-Union soviétique ». La formation Manifesta refuse de voter le décret et la résolution visant à envoyer des armes en Ukraine – position partagée par Vito Petrocelli (M5S), chef philo-russe de la Commission des Affaires Étrangères au Sénat. Le philosophe Diego Fusaro fait de l’expansionnisme de l’OTAN la cause de l’invasion russe. Enfin, Matteo Salvini, a exprimé de sérieux doutes sur l’opportunité de livrer des armes à Kiev avant de faire finalement volte-face et de voter la résolution ».

ENTRETIEN, Corriere della Sera, de Lorenzo Fontana, secrétaire adjoint de la Ligue et responsable des affaires étrangères du parti, « La Ligue amie de la Russie ? Il est clair qu’après une telle agression les choses changent » : « ‘’Je n’en reviens pas, Vladimir Poutine a toujours été un fin stratège mais l’agression de l’Ukraine est pour moi incompréhensible. La Ligue n’est pas particulièrement amis avec la Russie, elle a cherché à entretenir des relations normales, mais au même titre que la France ou l’Allemagne par exemple. D’ailleurs, 30% du gaz européen vient de là. Mais il est clair qu’après une telle agression les choses changent. La sécurité de toute l’Europe a été mise en danger et un tel acte porte préjudice à la Russie elle-même. Pour notre part, nous voterons en faveur des mesures prises aussi bien par Rome que par Bruxelles. Nous devons maintenant afficher l’image d’un pays uni afin d’amener la Russie à la négociation et éviter l’escalade. Mais il y aura de toute façon des dommages. Les relations du reste du monde avec la Russie vont changer, et cela rapprochera Moscou de la Chine. Et ce n’est pas le pire des scénarios. Nous devons revoir notre modèle pour ne plus nous retrouver dans de telles situations de dépendance, y compris vis-à-vis de la Chine, par exemple avec l’électronique et les micro-puces. Or sur le plan géopolitique l’UE ne compte pas beaucoup, ce sont les Etats qui comptent. Dans ces négociations, Macron compte parce qu’il est le président tournant de l’Europe, mais aussi parce qu’il est français. Il me semble peu probable que nous mettions sur pied une armée européenne. En revanche, si nous renforçons l’armée italienne, nous rendrons service à l’Europe’’. »

(Traduction : ambassade de France à Rome)

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