22/01/2021
"Le centre droit réclame des élections auprès du Quirinal."
Italie. Revue de presse.
L'enquête judiciaire visant le secrétaire du parti centriste et catholique UDC, Lorenzo Cesa, parti sur lequel le gouvernement comptait s’appuyer pour élargir le périmètre de la majorité après la défection d'Italia Viva, fait les gros titres des médias italiens. Les observateurs relèvent la possibilité d'un enlisement pouvant favoriser un gouvernement Conte III ou des élections anticipées: « Une enquête entrave les tractations » - Di Maio et Di Battista (M5S) veulent cesser le dialogue avec les centristes (Corriere della Sera), « UDC, Cesa poursuivi en justice » - Enquête sur les rapports entre la politique et la mafia calabraise (La Repubblica), « Enquête sur Cesa, l'embarras du M5S, Conte perd des alliées potentiels» (Il Messaggero), « Enquête sur Cesa, les élections anticipées plus proches » (Il Fatto Quotidiano), « Les juges s'invitent dans la politique » (Il Giornale).
ARTICLE, Corriere della Sera, « Opération éclair contre la ‘Ndrangheta, enquête sur Cesa, qui démissionne » : « L’organisation criminelle qui contrôlait des parlementaires, des politiciens régionaux, des notables, des commerçants, des entrepreneurs et des chefs de la ‘ndrangheta avait pour objectif de rester discrète sur les opérations financières, afin de ne pas attirer les soupçons sur les suspects. Mais le parquet de Catanzaro a réussi à identifier un « modèle criminalo-politico-financier » conduisant à l’arrestation de 13 personnes et ouvrant une enquête et des perquisitions à l’encontre de 35 autres, pour association criminelle mafieuse. Lorenzo Cesa, le secrétaire national de l’UDC, est aussi visé par une enquête : il est accusé d’association de malfaiteurs aggravée pour collaboration avec la mafia. Même s’il a démissionné de ses fonctions, il nie les faits. Les réactions politiques ne se sont pas faites attendre : « jamais le mouvement 5 étoiles ne pourra entamer une discussion avec des personnes condamnées ou faisant l’objet d’enquêtes pour des faits de mafia ou d’une particulière gravité » a dit le ministre des affaires étrangères Luigi di Maio. Alessandro Di Battista est sur le même ligne. Cesa a obtenu tout le soutien de son parti, et même le vice-président de Forza Italia, Tajani, lui a rendu visite pour lui faire part de sa solidarité : « il s’agit d’un ami » déclare-t-il. On reproche notamment à Cesa un déjeuner en 2017 à Rome avec Antonio Gallo, dit « le petit prince », entrepreneur de Catanzaro, ayant des liens avec les mafias de Grande Aracri et d’Arena de Isola Capo Rizzuto et Cutro. Cesa, parlementaires européen depuis 2017, aurait été identifié par Gallo comme ‘l’homme politique » auquel faire confiance. »
ANALYSE, La Repubblica, de T. Ciriaco « Adieu à l’UDC, l’opération des responsables se complique et Conte craint le croche-pied» : « C’est une véritable tornade, celle qui s'abat sur le château de cartes de l’opération des ‘’responsables’’. C’est l’effet de l'enquête en cours sur Lorenzo Cesa. C’est du moins ce que l’on craint au Palais Chigi. Le recrutement des « responsables » ralentit et l’objectif d'arriver à 161 sénateurs d’ici mercredi se complique. Si l’UDC implose, la possibilité de sauver le ministre de la Justice Bonafede lors du vote au Sénat semble compromise. Il manquerait encore 2 voix à trouver ou bien 4 abstentions. La journée d’hier a été vraiment sous tensions. Le conseil des ministres nocturne marque un tournant : Conte cède la délégation aux Services secrets et choisit Piero Benassi, son conseiller diplomatique, pour montrer que rien n’est complètement bloqué. Certes, l'enquête sur Cesa pousse inévitablement Di Maio et Di Battista du M5S à fermer tout dialogue avec secrétaire de l’UDC. Toujours hier, M. Renzi a lancé son offre à Conte et à sa majorité ‘’nous avons encore le temps pour nous arrêter. Voici mon appel : arrêter de faire du troc [avec les partis centristes], et revenons à la politique’’. Or, Conte ne veut pas se plier aux conditions du sénateur florentin. Il ne se rendrait qu’après avoir constaté l’échec de l’opération, début février. Il demanderait alors des élections anticipées. Une solution que personne ne souhaite vraiment. »
PREMIER PLAN, Fatto Quotidiano, F. D’Esposito « Le retour du spectre des élections anticipées » : « Hier, les trois dirigeants du centre droit ont dit clairement à Sergio Mattarella que si Conte n’était pas en condition de survivre, il n’y aurait aucune solution à part celle des élections anticipées. C’est un paradoxe, mais les propos du centre droit concordent avec ceux de l’idéologue démocrate G. Bettini, conseiller du Président du Conseil. Certes, pour la coalition jaune-rouge, le fait d’évoquer les élections anticipées a aussi une valeur tactique afin de faire plier les potentiel « bâtisseurs » encore indécis. Toutefois, les difficultés que le Président du Conseil et son gouvernement sont en train de rencontrer pendant ces jours de tractations, font paraître à l’horizon le spectre des élections. Cette conviction est en train de murir auprès de tous les acteurs de la crise. Zingaretti et Di Maio l’ont déjà dit récemment et Conte, pourtant sceptique à l’idée d’appeler les électeurs aux urnes pendant la pandémie, pourrait finalement capitaliser sur sa popularité : une impression que plusieurs interlocuteurs institutionnels ont eue. »
ARTICLE, Corriere della Sera, « Le centre droit réclame des élections auprès du Quirinal : « le parlement n’avance plus ». « Il est impossible de travailler avec ce parlement » : unis, rassemblés, décidés à garder leur position, les dirigeants du centre droit, au cours d’une heure d’entretien « très cordial », ont expliqué à Mattarella que la seule solution pour sortir de la crise est d’aller aux élections. Salvini, Meloni, Tajani, avec le plein soutien de Berlusconi, après s’être entendus aussi avec Lupi et Lorenzo Cesa avant que la tempête judiciaire ne l’emporte, ne voient pas d’autre issue. Refus catégorique d’un « gouvernement transitoire et technique », ou de l’élargissement de la majorité à des centristes ou à Forza Italia, car le centre droit « ne se divisera jamais » (Tajani), et même refus d’un gouvernement de centre droit car, comme l’explique Meloni depuis un certain temps, le nombre de sièges (au parlement) n’est pas assez important pour le rendre suffisamment solide. Berlusconi aurait dit que ces derniers temps, il n’y a eu aucun signe de la part du gouvernement répondant à la main tendue de Forza Italia : pour la première fois, il semble tenir la même position que ses alliés. La stratégie désormais est de montrer que dans les commission et à la chambre, ce gouvernement est condamné à l’immobilisme ».
SONDAGES, Il Messaggero, de G. Diamanti, « Conte choisit ses soutiens parmi les indécis mais les partis de droite sont toujours donnés gagnants » : « Selon le sondage EMG, 58% des Italiens estiment que le gouvernement est de fait affaibli après la défection d’Italia Viva. 42% des sondés expliquent ne pas avoir compris les raisons de cette crise. Le nouveau « parti de Conte », s’il était créé, est crédité, selon EMG, de 9,1% des intentions de vote. Selon SWG, il serait plutôt à 15 à 17% et composé respectivement de 5,3% indécis, de 5% d’électeurs du M5S, de 4% de sympathisants PD, 1% d’autres partis et enfin 0,7% du centre droit. Ce qui veut dire que la naissance de ce nouveau parti nuirait surtout aux partis alliés mais renforcerait paradoxalement la coalition. Concernant les autres partis, la Ligue est créditée de 22,3% des voix (-1 pt), Fratelli d’Italia de 16,5% (-0,7 pts), Forza Italia de 6,5% (0,5 pts), le PD de 20,1% (+ 1 pt) et le M5S de 15,8% (+ 1,1 pts). »
ENTRETIEN, La Stampa, de Riccardo Fraccaro (M5S) Secrétaire d’Etat à la Présidence du Conseil « Jamais un gouvernement sans Conte. L'alternative serait seulement des élections » : « L’appel du Président du Conseil a été transparent : nous nous adressons à toutes les forces modérées et populaires qui veulent contribuer à la réalisation des tâches qui nous attendent. Un gouvernement d’unité nationale ? Ce n’est pas à moi de décider quel serait le parcours à suivre mais je crois que nous irions alors vers des élections. C’est toutefois un scénario que je ne souhaite pas pour le pays, en ce moment délicat où il faut gérer la pandémie et les ressources du Plan de Relance. Nous avons l‘opportunité de financer les secteurs cruciaux de l’Italie. J’estime que la défiance constructive est nécessaire pour rationaliser les rapports entre le Parlement et le gouvernement. De cette manière, l’action de l’exécutif ne sera plus excessivement conditionnée par l’instabilité politique et bénéficiera de plus de fermeté et cela aussi dans le contexte international ».
ENTRETIEN, Corriere della Sera, d’Antonio Tajani, Vice-président de Forza Italia, « Le gouvernement d’unité nationale est une hypothèse qui n’existe pas ; je ne prévois pas d’autres défections au sein de Forza Italia » : « Nous, le centre-droit, nous sommes entretenus avec Mattarella et avons manifesté notre vive inquiétude vis-à-vis de la situation économique et sanitaire. Or, pour résoudre les difficultés qui s’annoncent, Conte n’a pas l’avantage du nombre ni de réelle majorité sur laquelle s’appuyer. Nous avons donc réaffirmé notre disponibilité à une collaboration institutionnelle. Nous avons toujours répondu par la positive aux appels à l’unité du gouvernement ou du Quirinal, y compris concernant le Plan de relance, mais nous n’avons pas trouvé d’écho de la part de la majorité. Ce gouvernement n’est pas en mesure de gouverner ni d’affronter les crises actuelles. Je considère que les trois parlementaires ayant voté en faveur du gouvernement ne font plus partie de Forza Italia, je leur souhaite bonne chance. Je n’ai aucune information allant dans le sens de nouvelles défections dans les rangs de Forza Italia. L’hypothèse d’un gouvernement d’unité nationale est quant à elle de fait inexistante, puisque les partis de la majorité eux-mêmes l’ont déjà exclue. Quant au rapport de Bonafede sur la justice, il va à l’encontre de nos convictions et valeurs, il nous est impossible de voter pour. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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