17/12/2019
"Budget, le coup de matraque est servi."
Italie. Revue de presse.
L’adoption de la loi de finances au Sénat fait les gros titres des médias transalpins. La presse évoque notamment l’invitation faite par le Président du Conseil G. Conte aux leaders des partis de majorité de surmonter leurs vétos croisés sur les différents sujets (Banque d’Italie, taxes, autonomie régionale) pouvant paralyser l’exécutif : « Budget, adoption entre les frictions » - ‘’Conte, irrité, entame une vérification de majorité. Polémiques sur la Banque d’Italie’’ (Corriere della Sera), « L’appel de Conte : ‘’arrêtons les disputes’’ » - ‘’Une réunion de majorité sans leaders. Le budget adopté au Sénat’’ (La Repubblica), « La Banque d’Italie s’oppose aux attaques de la politique » - ‘’Bras-de-fer entre M5S et Italia Viva’’ (La Stampa), « Dernières modifications, voici le budget » - ‘’Adopté par 166 voix contre 128, le texte passe à la Chambre’’ (Sole 24 Ore), « Budget adopté entre les craintes d’une crise » - ‘’Réunion nocturne, les thématiques épineuses reportées’’ (Il Messaggero), « Feu vert au budget qui n’aide pas les jeunes » (Il Mattino), « Budget, le coup de matraque est servi » - ‘’Renzi vote la confiance, le texte approuvé après 70 modifications’’ (Il Giornale), « Budget verrouillé sans le cannabis » (Avvenire).
La visite de L. Di Maio à Tripoli et à Bengazi, fait aussi l’objet des Unes avec une large couverture photographique.
Twitter : C’est le sujet #razzismo (racisme) qui est le plus commenté, suite à la campagne de la Ligue de football italienne lancée aujourd’hui.
RETROSCENA, Corriere della Sera, M. Guerzoni : « L’irritation de Conte qui convoque les alliés » : « Maintenant, le problème pour le Palais Chigi s’appelle Matteo Renzi. L’ancien président du Conseil donne son feu vert à la motion de confiance sur la loi de finances mais ironise sur un gouvernement qui ‘’doit décider quoi faire une fois devenu majeur’’, qui plaide pour un changement de vitesse et qui fait un clin d’œil à Salvini. Bref, Renzi est un facteur de forte instabilité pour le gouvernement. La querelle sur les moyens de sauver la banque de Bari avec Di Maio en est la preuve. Hier soir, les ‘’renziens’’ ont mis leur véto lors de la réunion nocturne de majorité sur les autonomies régionales. Personne, au Palais Chigi, ne sait ce que le leader d’Italia Viva a en tête, ni comment désamorcer la prochaine mèche avant que tout n’explose. Du coup, Conte reporte en janvier la discussion de l’agenda 2023, un passage crucial pour l’avenir de la majorité. Conte serait prêt à prononcer, le moment venu, sa phrase ‘’si la vérification fait échec, on rentre tous à la maison’’. Les parlementaires discutent beaucoup sur la possible tentation de Renzi d’aller à des élections anticipées avec le système électoral en vigueur, qui prévoit un seuil de barrage à sa portée, à hauteur de 3%. Le ‘’front gouvernemental’’ estime que Renzi est ‘’fou de colère’’ car les sondages Ipsos ne lui sont pas très flatteurs (14% de popularité, soit la lanterne rouge du peloton et 4,2% pour son parti Italia Viva, qui perd 1,3 points) alors que Conte, le PD et le M5S seraient en hausse ».
COMMENTAIRE, La Repubblica, S. Folli : « La fausse trêve de Noël » : « Ce n’est pas le moment des surprises à la fin de l’année. La loi de finances est parvenue au but après un débat qui a mortifié le parlement, l’affaire de la Banque Populaire de Bari a été gérée avec les mêmes instruments que Renzi avait utilisé pour la Banque Etrurie et les banques populaires de la Vénétie. A l’époque, les Cinq Etoiles étaient dans l’opposition, aujourd’hui ils sont au gouvernement et adoptent des recettes analogues pour sauver l’institut bancaire de Bari. Ainsi l’année se termine, avec l’impression que la majorité est inexistante et le gouvernement s’en remet à l’astuce (le chrono programme…) pour survivre d’une semaine à l’autre. Entretemps, Salvini s’est découvert « sauveur de la patrie » et continue de suggérer une majorité d’unité nationale pour faire face à certaines ‘’urgences ‘’ et puis aller voter. Le leader de la Ligue veut probablement montrer un visage responsable et, surtout, il ne veut pas du tout répéter l’imbroglio de l’été dernier ».
COMMENTAIRE Sole 24 Ore L. Palmerini « Salvini bipartisan et Renzi qui change de vitesse » : « L’objectif de Salvini et de Giorgetti est de tendre la main à un exécutif mis à mal et proposer d’écrire ensemble les nouvelles règles électorales, en échange d’une date pour les élections. L’idée de l’ancien secrétaire d’Etat est dictée par un choix pragmatique. Il y a la certitude que si le gouvernement Conte II devait tomber, la Ligue aurait une victoire facile mais un gouvernement difficile (une économie enlisée, de nouvelles clauses anti-TVA à hauteur de 20 milliards à éviter et plusieurs dossiers épineux). Par ailleurs, maintenant que les flux migratoires ne font plus les gros titres, il manque à Salvini un thème alors que le Nord demeure le noyau électoral de la Ligue. Du coup, l’idée de proposer un terrain de confrontation commun devient un début de solution. La discussion de la loi électorale ne fait pas de consensus mais c’est ce que tous regardent après la réduction du nombre de parlementaires. Du coup, il y a le système proportionnel dans l’appât lancé par Salvini à Di Maio, il y a l’intention de dialoguer avec le PD (qui ne lui a pas fermé la porte) et le soutien offert par Renzi, qui a demandé hier un ‘’changement de vitesse’’ au gouvernement en évoquant le problème de la croissance zéro, pouvant devenir un point partagé avec la Ligue. Par ailleurs, le leader de la Ligue ne veut pas être pris de court par l’action des ‘’responsables’’ de Forza Italia, disposés à soutenir le gouvernement en compensant le départ des parlementaires 5 Etoiles vers l’opposition ».
Matteo Salvini et Giancarlo Giorgetti
COULISSE, La Stampa, F. Martini : « Gouvernement de grande coalition avec la Ligue : Renzi jette l’appât à Salvini» : « Définir les parlementaires de la Ligue de la part de Renzi comme ‘sérieux et responsables’, au moins potentiellement, est inusuel dans une majorité qui considère Salvini comme un croque-mitaine et comme le mal absolu. Une petite gentillesse et un appât qui laisse présager des accords futurs entre les deux Matteo ? À la buvette du Palais Madama, Renzi et Marcucci, président des sénateurs du Pd, parlent avec insistance de Salvini, de son étrange proposition de gouverner tous ensemble, de s’unir, entre ennemis historiques et ex alliés. Renzi pourrait être intéressé ? ‘’Nous reparlons de politique après les élections en Émilie-Romagne‘’. Pourtant selon lui, Salvini est le symbole d’une politique qui est trop émotive : ‘’ Il est passé, en quelques mois, du Papeete à Draghi président du Conseil. ‘’ »
ARTICLE Il Fatto Quotidiano L. De Carolis « Le retour de Grillo à Rome pour freiner l’hémorragie des 5 Etoiles » : « Beppe Grillo se rend dans la Capitale pour tenter de tenir debout les 5 Etoiles qui sont en train de tomber en morceaux. La semaine passée, trois sénateurs sont passés dans les rangs de la Ligue et hier, 5 n’ont pas voté la motion de confiance sur la loi de finances. Des chiffres qui font comprendre la fragilité du M5S. Les sénateurs espèrent pouvoir l’avoir avec eux en assemblée au Palais Madama, dans l’après-midi. Alors qu’hier s’était rendu au Sénat Davide Casaleggio. L’axe entre ce dernier et Di Maio semble l’une des rares certitudes du mouvement. L’autre est le fait que le groupe parlementaire 5 Etoiles est hors de contrôle. Dans cette situation, Grillo est invoqué par beaucoup. Mardi dernier il s’était rendu à Rome en cachette, pendant quelques heures. Une visite gardée secrète mais qui confirme sa volonté de revenir sur la scène à côté des siens, de ses parlementaires. Grillo restera à Rome pendant quelques jours. Il pourrait ainsi rencontrer Di Maio, actuellement en mission en Libye. Certains vétérans qui ont rencontré le fondateur assurent ‘’Grillo est convaincu que le M5S peut se rétablir et qu’à ce stade le seul chef possible est Di Maio’’ ».
RETROSCENA La Stampa A. Barbera et G. Paolucci « Le prêt d’un demi-milliard qui met la Banque d’Italie dans une situation difficile » : « Dans le rapport de la Banque d’Italie où est reconstruit la déconfiture de l’institut bancaire des Pouilles, il n’y a aucune trace du prêt à hauteur de 480 millions d’euros qu’elle a injecté à la Caisse d’épargne de Teramo, ensuite remboursé après le rachat par la Banque populaire de Bari. Il n’y a aucune trace dans l’exercice budgétaire de 2013. En apparence, le prêt semble absolument régulier mais il y a un bémol : la restitution de ce prêt est imposée à une banque qui est à son tour dans une condition précaire. Et la preuve est que ce pari s’est mal passé. L’Europe non plus n’a pas aidé : en 2015 la Commission avait considéré cette intervention comme une aide d’Etat. Il n’y a que quelques mois que la Cour de justice a donné satisfaction à l’Italie en annulant la décision de la Commission. Mais le pastiche été désormais fait ».
ANALYSE, Il Foglio, C. Cerasa : « La révolte grandiose contre l’antipolitique » : « Il y a une brise agréable qui commence à souffler, grâce aux Sardines, et qui indique une direction opposée par rapport à l’air farouche de Salvini qui, en se déguisant en modéré, montre sa faiblesse imprévue. Les Sardines ont commencé à remplir les rues depuis le 14 novembre, à Bologne, et ont continué de le faire dans plusieurs villes italiennes et étrangères, étant parfois quelques milliers et parfois des dizaines de milliers. Mais, à la fin, les chiffres ne comptent pas trop, et le contenu non plus, le véritable miracle d’avoir un mouvement qui lutte contre l’antipolitique et qui lance un formidable message, tombé comme un météorite sur la tête du leader contre lequel les rues se sont mobilisées, un message qui mériterait d’être étudié avec joie et curiosité, un message symbolique qui arrive, à l’intérieur du récit de Salvini qui a eu, en quelque sorte, le monopole médiatique de l’image des rues. Aujourd’hui, ce monopole exclusif lui a été soudainement volé par un groupe de jeunes qui, depuis trois semaines, remplit les places et demande aux électeurs de faire quelque chose afin de ne pas montrer d’indifférence devant les cochonneries du chef de l’opposition. Les Sardines ont enlevé à Salvini la possession hégémonique de la rue et la coïncidence du leader de la Ligue d’essayer de montrer au pays un tournant modéré n’est pas vraiment une coïncidence. La volonté de Salvini de se présenter avec un visage plus doux et moins mauvais, en demandant au président du Conseil Conte de faire partie des négociations pour les réformes institutionnelles, est peut-être un signal de faiblesse qui a affaire à ce nouveau vent qui commence à souffler en Italie, grâce aussi aux Sardines ».
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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