21/08/2019
"Conte accuse Salvini et démissionne."
Italie. Revue de presse.
La démission du Président du Conseil G. Conte domine les gros titres des médias transalpins. La presse écrite souligne notamment les courts délais imposés par le Quirinal pour trouver un éventuel accord (qui s’orienterait plutôt vers un accord M5S-PD) et éviter des élections anticipées rapides, qui seraient inévitables en cas d’enlisement : « Conte accuse Salvini et démissionne » (Corriere della Sera), « Le dernier baiser » - ‘’Di Maio appelle Zingaretti pour un Conte-bis’’ (La Repubblica), « L’adieu envenimé de Conte » - ‘’Le Quirinal : entente M5S-PD ou élections’’ (La Stampa), « Conte démissionne, de courts délais pour la crise » (Sole 24 Ore), « Conte démissionne, gouvernement politique ou élections » (Il Messaggero), « Conte démissionne, M5S et PD négocient » (Il Mattino), « Le retour de la gauche » - ‘’Conte démissionne et appelle le PD’’ (Il Giornale).
Journaux télévisés : La démission du Président du Conseil, le placement sous séquestre du navire Open Arms à Lampedusa, ainsi que les tensions au Cachemire font l’ouverture des JT ce matin.
Réseaux sociaux : Sur Twitter, après l’habituel hashtag du jour, 21agosto (21août, sur des thèmes très variés), c’est #consultazioni (consultations) qui domine (suite à la démission du Président du Conseil G. Conte et à l’ouverture des consultations, cet après-midi, par le Président de la République italienne).
ARTICLE, La Repubblica, F. Merlo : « C’est fini » - « Conte démissionne et attaque Salvini : ‘’irresponsable et dangereux. Sur le Russiagate, il n’a pas éclairci les choses’’ » : « L’acte final du gouvernement Ligue-M5S a été interprété par le président du Conseil Giuseppe Conte : il a démissionné hier, devant le Sénat italien où il avait été convié à s'exprimer après la motion de défiance présentée par la Ligue, parti d'extrême droite, de Matteo Salvini, afin de renverser le gouvernement auquel ce dernier appartient. Son adieu a été venimeux : il a accusé Salvini d’avoir déclenché cette crise politique au plein milieu de l'été, à un moment charnière dans le fonctionnement des institutions italiennes ; il a déclaré que Salvini a obéi à des intérêts personnels et partisans et qu’il a été irresponsable, déloyal, opportuniste, autoritaire et sans aucune culture institutionnelle. La journée d’hier a montré la fragilité du succès de Salvini, le néant désespéré sur lequel sa requête de pleins pouvoirs se basait et, de fait, les sondages sont déjà en baisse. Hier, Salvini n’était pas du tout ce type louche, symbole du racisme créatif, qui était apparu en couverture du Time. Après avoir été secoué par Conte, il a même proposé, dans un discours décousu, de continuer, comme si rien ne s’était passé, pour faire ensemble les réformes déjà prévues, la coupe des parlementaires et la loi de finances. Mais Conte a rejeté ce dernier volte-face et lui a reproché de ne pas avoir le courage d’assumer ses responsabilités, en ajoutant que lui, il l’avait, ce courage, et qu’il allait présenter sa démission au Président de la République. Quand, hors du Sénat, sans la foule habituelle qui attend toujours Salvini, les membres du M5S ont demandé à Giorgetti, collaborateur malin et très fidèle du leader de la Ligue, de l’abandonner, il a répondu : ‘’ En famille, on ne s’aime pas mais on s’aide‘’. Salvini est parti en dénonçant une magouille déjà existante, ‘’un accord entre le Mouvement et le PD déjà convenu’’. En vérité, les applaudissements de la gauche ne sont pas allés aux reproches de Conte à Salvini mais plutôt à la phrase précise : ‘’ Le gouvernement s’arrête ici ‘’. Enfin, si Renzi a vu juste quant à la situation, sur Salvini, sur lui-même et sur l’Italie, le ‘’capitaine‘’ pourrait ne pas remporter les prochaines élections et continuer de tomber et tomber encore. Nous verrons si les louanges passé, il sera hué. »
COMMENTAIRE Corriere della Sera M. Franco « Des marges de manœuvres étroites » : « La crise est ouverte et il faudra des jours, voire des semaines, pour comprendre quelle sera son issue : élections anticipées en automne avec un gouvernement assurant les affaires courantes ou bien une relance de la législature sur de nouvelles bases en termes d’alliances et de programme. La seule chose hautement improbable serait une réédition du gouvernement M5S-Ligue dirigé par G. Conte. Maintenant on entre dans une terre inconnue aux horizons inédits. Aux différences entre les différents partis s’ajoutent les contrastes à l’intérieur de ceux-ci. Mattarella veut éviter de tenir l’Italie en suspens. Deux scénarios sont alors possibles : un gouvernement marquant une rupture, pour arriver jusqu’à l’élection du Chef de l’Etat en 2022, ou un exécutif qui conduise à des élections anticipées s’il y a impossibilité de trouver une majorité qui dure ».
COMMENTAIRE La Repubblica S. Folli « Crise : des marges étroites, une solution encore loin » : « Le Sénat aurait pu vivre hier une journée mémorable de vie parlementaire, or, nous avons assisté à un spectacle plutôt médiocre. Une page controversée qui est destinée toutefois à rester dans l’histoire, surtout parce que peu de personnes croient que le populisme disparaitra en quelques mois uniquement en voyant Salvini à l’opposition. Le sort politique est entre les mains du Président de la République. Du coup, les espoirs du Président du Conseil sortant sont pendus à un fil. Et il est improbable que le Parti Démocrate, malgré la cacophonie interne, puisse accepter un Conte-bis. Personne ne croit que l’opération puisse se faire aussi facilement. Au sein du PD, il existe un sentiment croissant de froideur à l’idée d’un mariage avec le M5S. Par ailleurs, cela ne convainc pas entièrement les 5 Etoiles. Raison pour laquelle Salvini, après un discours maladroit, répétitif, et aux accents de campagne électorale, a ressenti le besoin de tendre la main au 5 Etoiles en se disant disposé à une entente brève (loi de finances et réformes) avant les élections. Opération invraisemblable. Toutefois, si la crise devait se compliquer, toutes ces bizarreries reviendront sur le tapis. Voilà pourquoi les délais accordés par Mattarella seront très courts et aucune temporisation ne sera tolérée ».
ARTICLE, La Stampa, U. Magri : « Le Quirinal à la recherche d’un gouvernement fort » : « Le président de la République Sergio Mattarella n’a pas intention de perdre du temps. On peut le comprendre étant donné le rythme serré des consultations : elles commenceront aujourd’hui et se termineront dès demain. Sergio Mattarella sollicitera de la clarté de la part des partis, en vue d’éviter le prolongement des consultations. D’après le Président de la République, deux solutions sont envisageables. En cas de manque de propositions pour sortir de la crise, Sergio Mattarella mettrait en place un gouvernement provisoire, composé de membres neutres, ayant comme finalité exclusive d’accompagner le pays aux élections au plus vite. Cependant, un autre scénario est possible. Dans le cas d’une entente entre Nicola Zingaretti et Luigi Di Maio, il est probable que le Président de la République puisse leur accorder quelques jours en vue de former une nouvelle majorité M5S-PD. De toute façon, il faut trouver une solution au plus vite pour mettre en sécurité l’Italie en cas d’élections. Plus vite l’on votera, et plus le futur gouvernement disposera de temps pour rédiger la loi de finances et bloquer l’augmentation de la TVA. De plus, un parcours rapide et ordonnée vers les urnes réduira le danger d’une spéculation financière qui pourrait arriver sur notre pays. Au Quirinal, personne ne le dit, mais certaines craintes subsistent ».
RETROSCENA (coulisses) Corriere della Sera F. Verderami « En coulisses, les négociations pour le Quirinal 2022 - La recherche d’un nom fort pour un gouvernement pouvant durer mène à Mario Draghi, et certains le voudraient au Palais Chigi » : « L’enjeu ne concerne pas seulement le gouvernement mais aussi l’élection du prochain Chef de l’Etat. Faire un gouvernement uniquement pour le faire, cela signifierait favoriser Salvini, lui permettant de transformer la défaite d’hier au Sénat en une victoire, demain, dans le pays. C’est notamment au sein du PD qu’existe la nécessité d’avoir au Palais Chigi ‘’une personnalité pouvant affronter la complexité des problèmes italiens liées également à la fragilité du système européen’’. Ce qui se traduit par le profil de Draghi ‘’dont le nom vaut à lui cent points de spread. Reste à voir si cela sera accepté par les 5 Etoiles’’. Mais il faut du temps pour qu’une hypothèse se traduise en un projet faisable. Le nom de Draghi circulait dans les dernières semaines uniquement dans les conciliabules privés des ténors des partis, mais depuis hier, il circule aussi parmi les sénateurs présents au débat, et de manière bipartisane. L’idée qui traverse le Parlement serait une réédition du ‘’schéma Ciampi’’, dans le périmètre des institutions allant de la Banque d’Italie au Palais Chigi en passant par le Quirinal. Car le véritable enjeu est le suivant : qui élira le prochain Chef de l’Etat ».
EDITORIAL du Directeur Il Messaggero V. Cusenza « La synthèse ayant échoué, il ne reste plus que l’intérêt du pays » : « A part le final pyrotechnique digne de la commedia dell’arte plus que d’une confrontation solennelle à la hauteur de l’histoire du Sénat, le résultat a été un grand équivoque, né par ruse plus que par nécessité. Le pays vivote depuis trop longtemps, et cela pas uniquement à cause du gouvernement M5S-Ligue. Et éviter les élections en pleine session budgétaire ne doit pas devenir un alibi pour la création de majorités qui ne soient pas une réédition des vieux compromis en sauce démo-sociale. Le PD, divisé, retrouvera-t-il l’unité pour affronter ce défi ? Les 5 Etoiles sont-ils assez préparés à un revirement aussi brusque ? Il faut croire que c’est difficile, voire impossible. C’est la seule consolation pour Salvini, qui est le vrai perdant ».
RETROSCENA (coulisses) Il Messaggero A. Gentili « M5S-PD, appel entre les leaders, un exécutif de législature en pente ascendante » : « Luigi Di Maio et Nicola Zingaretti se seraient parlés. Le leader 5 Etoiles aurait demandé au chef démocrate des assurances pour un gouvernement de législature, lui demandant : ‘’peux-tu m’assurer que Renzi ne débranchera pas tout d’ici quelques mois ?’’. La réponse de Zingaretti aurait été : ‘’je ne peux te donner aucune garantie, personne ne sait ce qu’il a dans la tête’’. Di Maio poserait la condition d’‘’un Conte-bis ou rien’’. Mais Zingaretti s’y oppose, voulant une forte ‘’discontinuité’’ ».
ARTICLE Sole 24 Ore « Zingaretti freine sur l’hypothèse d’un Conte-bis, hypothèse Enrico Letta comme Commissaire européen » : « Zingaretti pose la condition d’une rupture. Toutefois, les émissaires du dialogue entre le PD et le M5S continuent de donner Conte comme une solution possible, surtout si cela Mattarella devait approuver. L’hypothèse d’un troc se fait jour : la nomination de l’ancien dirigeant démocrate Enrico Letta au poste de Commissaire européen. Et, en cas de désaccord sur le nom du candidat président du Conseil, c’est le nom de Raffaele Cantone (ancien responsable de l’autorité anticorruption) et celui d’Enrico Giovannini (ancien président de l’Istat) qui sont évoqués ».
ENTRETIEN de Andrea Marcucci, Chef de groupe PD au Sénat, La Stampa : « Entente seulement si crédible et à long terme. Nous n’avons pas peur des élections » : « ‘’ Nous avons apprécié l’intervention de Conte, mais notre jugement sur son gouvernement est extrêmement critique. Nous sommes heureux que ce gouvernement se soit conclu et qu’à partir de demain s’ouvre un nouveau chapitre qui passe par le Parlement. Nous sommes conscients des difficultés au sujet d’un possible accord avec le M5S. Si les conditions existent, il faudra tenter cela dans l’intérêt du pays. Sinon, les élections ne nous font pas peur ’’ ».
ARTICLE, La Repubblica, F. Ceccarelli : « Harakiri d’un leader » : « ‘’ Qui trop embrasse mal étreint ‘’. Et ainsi Salvini, comme Berlusconi et Renzi, après avoir atteint le sommet, est devenu ennemi de lui-même. En quelques jours, le leader de la Ligue a commis toutes les erreurs possibles, avec un véritable délire d’omnipotence. ‘’La Bête’’ souverainiste a totalement sous-estimé les devises de la sagesse populaire, pas du tout favorables au déclenchement d’une crise de gouvernement en plein mois d’août depuis la plage. Erreur fatale pour Salvini qui s’est retrouvé les mains vides ».
ENTRETIEN de Nick Romaniuk, chef de la mission de SOS Méditerranée » : « ‘’L’Europe doit arrêter de nous ignorer ’’ » (La Repubblica) : « ‘‘ Nous sommes bloqués depuis douze jours, après avoir sauvé 350 personnes. Nous ne pouvons pas résister à l’infini, quelqu’un doit décider de nous donner un port sûr, ce n’est pas notre travail, nous sommes ici pour sauver des vies de migrants en Méditerranée et nous ne pouvons pas décider où les faire débarquer. Il est absurde que personne ne donne de réponses en Europe, que personne ne coordonne la situation et ne prenne ses responsabilités. Nous sommes disposés à amener les gens dans n’importe quel port, sauf en Libye. Les pays européens ne sont pas en train de respecter les conventions internationales qu’ils ont signées et qui les obligent au sauvetage des personnes en mer ‘’ ».
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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