13/06/2018
"De la France, un cadeau pour la Ligue."
Italie. Revue de presse.
Italie/France-migrations – Unes : « Haute tension entre Italie et France » - ‘’Macron accuse l’Italie de ‘’cynisme’’, Conte : ‘’hypocrisie’’. Le sommet en doute’’ (Corriere della Sera), « La France attaque Salvini » (La Repubblica), « Aquarius divise l’Europe, querelle Italie-France, sommet en doute » - ‘‘Salvini : nous évaluons avec Berlin comment protéger les frontières’’ (La Stampa), « Migrants, l’insulte de la France » - ‘’La colère de Conte, le sommet vacille. Le ministre allemand avec Rome’’ (Il Messaggero), « Migrants, l’UE perd son cap, la France attaque l’Italie » (Il Mattino).
EDITORIAL, A. Bonanni, Repubblica, « Paris et la peur de la contagion » : « Le mur érigé par Salvini à l’entrée des ports n’a pas arrêté les débarquements. Il a, en revanche, isolé l’Italie grillo-légiste en Méditerranée et en Europe. La Tunisie a été insultée, nous sommes à couteaux tirés avec Malte, l’Espagne menace des ‘’conséquences pénales internationales’’. La réaction de Macron qui nous accuse de cynisme n’est pas un déni du problème migratoire mais un rejet très dur de la méthode de chantage utilisée par Salvini pour soulever une question mettant en cause des innocents. Avec M. Le Pen, alliée de la Ligue, qui l’attaque et remonte dans les sondages, E. Macron ne peut se permettre de laisser gagner l’intimidation et se fait le porte-parole de l’irritation européenne.»
ARTICLE, S. Montefiori, Corriere, « Le changement de Paris sur la méthode du ministère de l’Intérieur italien – L’Elysée avait ouvert les portes au nouveau gouvernement et invité le président du Conseil Conte pour un sommet trilatéral en Europe. Hier la bagarre, puis le porte-parole freine : nous sommes unis » : « Dans le ton sans précédent utilisé par le gouvernement Macron vis-à-vis du gouvernement italien – ‘’cynique’’, ‘’irresponsable’’ -, il y a sans doute de la désillusion, la crainte de ne pas pouvoir être sûr du soutien italien pour changer les choses en Europe après avoir été le premier à manifester son soutien à la solution d’un gouvernement cinq étoiles, en appelant Conte très vite et en l’invitant, vendredi, à Paris. Face à la froideur de Merkel, Macron a besoin de l’Italie et espérait pouvoir compter, en particulier, sur la composante cinq étoiles. Le différend d’hier est donc arrivé par surprise. Des jours de rapprochement et de super travail des ambassades sont maintenant en danger. Les diplomates continuent de préparer un sommet qui a semblé sur le point d’être annulé. Pourquoi cette attaque ouverte de Macron (à travers Griveaux), Philippe, Le Drian et Attal ? Des sources importantes du Quai d’Orsay rappellent que : ‘’la France avait lancé de nombreux signaux de disponibilité pour trouver une nouvelle politique sur les migrants’’, thème prioritaire de la rencontre Macron-Conte du 15 juin. ‘’Mais face à la provocation de Salvini, Macron a réagi. Nous étions déjà d’accord sur la nécessité d’une collaboration plus importante sur les migrants, c’est pourquoi la méthode de Rome est inacceptable pour cette raison’’. »
EDITORIAL, S. Folli, Repubblica, « De la France, un cadeau pour la Ligue » : « Si le président Français voulait toucher le nationalisme italien et enlever sa légitimité à l’axe M5S-Ligue, il a totalement échoué. L’affaire de l’Aquarius qui a offensé tant de consciences avait servi à réveiller une droite endormie. Mais grâce à l’intervention de Macron, encore plus rude avec la sortie du porte-parole d’En Marche, Salvini est le vainqueur absolu. Le problème est qu’à Paris personne ne semble en règle quand il s’agit de solidarité européenne (voir Bardonèche ou Vintimille). Au-delà de certains discours magnifiques, le Président français est – aux yeux des Italiens – un gardien scrupuleux des intérêts nationaux. Macron a montré l’arrogance de celui qui estime que l’Italie est un parent pauvre de la France à qui on enseigne les bonnes manières. Si elle n’aboutit pas à une nouvelle gestion européenne des migrants, cette âpreté aura pour unique effet de compliquer plus encore la vie de ceux qui s’opposent au duopole Salvini-Di Maio. Comme l’a dit Liliana Segre, l’Europe a laissé l’Italie trop seule. »
RETROSCENA (Coulisses) L. Martinelli « L’Elysée compte encore sur le dialogue avec Rome » (La Stampa): « Le silence d’E. Macron (et de la France) sur l’Aquarius aura duré un jour entier. Pendant que tous, autour de la Méditerranée, avaient quelque chose à dire, l’Elysée demeurait muet. Jusqu’au couac avec le gouvernement italien. L’objectif du Président français était de tenir bon afin de développer une relation avec le nouveau président du Conseil Conte en fonction, si possible, anti-Salvini (soit l’ami de Marine Le Pen). Hier, Macron a dû finalement se prononcer, évoquant le ‘’cynisme’’ et l’ ‘’irresponsabilité’’ des autorités italiennes : trop de critiques sur son mutisme, venant de gauche mais aussi d’une partie de son Mouvement. C’est justement sur Salvini que les Français ouvrent un dialogue. Hier, le ministre Collomb, qui est en train de gérer la politique migratoire avec dureté, a invité son homologue à Paris avec leur collègue espagnol. Toujours hier, à l’Elysée, on refusait de répondre à la contrattaque de Conte et on confirmait l’invitation de ce dernier pour vendredi ».
COULISSES, T. Ciriaco, Repubblica, « ‘’Des excuses ou le sommet saute’’, mais Conte craint l’isolement. Réunion au Quirinal sur la crise » : « ‘’Nous devons nous faire respecter, il faut un signal de Macron. Un appel ou un message sur whatsapp : voilà ce qu’attend Conte. Il réclame des excuses, au moins un geste réparateur. Salvini appelle les ministres mais de Visegrad. Enfin un appel très tendu, avec son homologue français. Il aurait dit : ‘’vous ne pouvez pas nous donner des leçons d’humanité car vous avez bloqué les femmes enceintes à Vintimille’’. Conte jure qu’il frappera du poing sur la table avec la France. Il sera difficile de concilier la pression de Salvini et la ligne européenne traditionnelle pendant l’éventuel déplacement à Paris».
RETROSCENA (Coulisses) I. Lombardo « ‘’Je veux des excuses par téléphone’’, les conditions pour revenir à la table des négociations » (La Stampa): « Le Palais Chigi contrattaque et s’empare de la stratégie de Salvini. La réunion bilatérale de vendredi est en cause. Le Palais Chigi publie une note et laisse filtrer la possibilité que la réunion entre Conte et Macron fixée pour vendredi pourrait être annulée : ‘’nous devons nous faire respecter, il faut un geste de sa part’’. Les canaux diplomatiques avec la France ont été activés : si ce geste n’est pas fait d’ici aujourd’hui, le président du Conseil restera à Rome. Ne pas se présenter à la réunion avec Paris pourrait toutefois être un point de non-retour pour les relations européennes. Raison pour laquelle le Président Mattarella a demandé, préoccupé, à être informé de l’évolution de l’affaire avec les Français. Le Président du Conseil Conte épaule les Etats-Unis pour affaiblir la France et l’Allemagne afin de défendre ses intérêts en Libye. Selon les 5 Etoiles et les légistes, Macron aurait profité du vide de la crise politique italienne pour entrer en compétition sur le terrain libyen, historiquement crucial pour le gouvernement et les entreprises italiennes ».
ARTICLE Sole 24 Ore M. Ludovico « Sur les migrants, Paris attaque Rome. ‘’Irritation’’ du Palais Chigi » : « Le ministre de l’Intérieur M. Salvini se rendra bientôt à Tripoli pour renouveler les accords entre Rome et al-Sarraj ainsi que les accords visant à contenir les débarquements. La France est prise de court par un possible nouveau rôle de l’OTAN en Afrique du Nord, discuté le 8 juin dernier à Bruxelles. La diplomatie italienne, à commencer par le ministre des Affaires Etrangères Moavero Milanesi, est en train de travailler pour recomposer la fracture qui pourtant est profonde. Interviewé à l’émission de La7 Otto e Mezzo, Le Ministre Salvini a rappelé ‘’ Les Français s’étaient engagés à relocaliser chez eux 9 816 migrants, ils n’en ont pris que 640’’».
COMMENTAIRE, Il Messaggero M. Ajello « Paris généreuse avec l’argent des autres et la mauvaise habitude italienne de faire les louanges aux étrangers » : « Cela ressemble au coup de tête de Zidane. Un geste enragé venant du gouvernement français à l’égard de l’Italie. C’est triste de se voir précipiter dans ce derby, déclenché par la peur de Paris de ne plus avoir une Italie qui accueille, également pour elle. La France préfère la position confortable de celui qui produit des scènes interdites, allant des champs de réfugiés aux désespérés à la frontière de Vintimille. Toutefois, les Français ont le mérite de maintenir un sens patriotique et font un travail d’équipe. En Italie, en revanche, on attend une critique venant de l’étranger pour en profiter et attaquer ses ennemis internes ».
ENTRETIEN, Gabriel Attal, porte-parole de En Marche, Repubblica, « J’ai parlé de « ligne à vomir » parce qu’on ne joue pas avec les vies » : « Je n’ai rien contre l’Italie, j’ai utilisé sans doute un mot erroné mais c’était une réaction à chaud, en voyant ce qui était en train de se passer. Je voudrais remettre ma phrase dans le contexte, c’était lors d’un entretien en direct. J’ai parlé en pensant surtout aux personnes à bord de l’Aquarius et en entendant qu’un ministre avait crié victoire devant une grave situation humanitaire. Il est irresponsable d’instrumentaliser politiquement la destinée d’un bateau de migrants. Nous sommes à un moment de tensions fortes. Le problème ne se résoudra pas en une journée. Nous ne pourrons trouver une solution que si nous restons unis. Macron a fait des propositions de reforme européenne pour aider l’Italie. L’Italie doit être aidée, mais une solution sur le thème de l’immigration ne peut être qu’européenne ».
ENTRETIEN, Matteo Salvini, ministre de l’Intérieur Italien, Corriere, « Un axe avec les Allemands est en train de naître » : « ‘’J’ai parlé avec le ministre allemand Seehofer et je peux dire qu’un axe italo-allemand basé sur le mot d’ordre « défendre les frontières extérieures » est en train de naître. J’ai aussi parlé avec les ministres français et hongrois et la semaine prochaine j’appellerai les ministres hollandais et autrichien. Et je crois que l’Italie est devenue centrale, dans les faits, je ne vois donc pas pourquoi nous devrions changer de ligne. Les Français jouent les malins mais ils ont repoussé plus de dix mille personnes à la frontière avec l’Italie, dont des femmes et des enfants. Je me permets de rappeler que la région italienne qui a accueilli le plus est la Lombardie. Juste pour souligner que toute accusation de racisme est ridicule. J’ajoute qu’en Afrique du nord nous payons hélas l’instabilité portée en Libye par les Français ».
ENTRETIEN de Josep Borrell, ministre des Affaires Etrangères espagnol « Nous ouvrons nos ports mais Salvini n’a pas gagné » (Corriere della Sera): « Notre acte est symbolique, il faut que l’Union Européenne fasse plus. C’est une victoire pour les personnes qui se trouvent sur l’Aquarius. Sans l’Espagne, elles seraient toujours sur le navire. Je ne veux pas faire de polémique avec l’Italie. Je n’aime pas le programme de Salvini, mais il a été élu par les électeurs’’ ».
ARTICLE, Corriere della Sera F. Sarzanini « Libye, 50 000 en attente de partir, nouvelles négociations avec les services de renseignement » : « Les négociations ont été renouées et la requête est explicite : patrouiller à la frontière libyenne avec la Tunisie. Après les centaines de débarquements de ces derniers jours, l’Italie demande à Tripoli le respect des accords. Cela en montrant sa disponibilité envers d’autres éventuelles demandes. Les négociations se font par les canaux des services de renseignement et de la diplomatie pour un effet levier, pour obtenir la collaboration du gouvernement d’al-Sarraj mais aussi de la part du Général Haftar ».
ARTICLE, Il Messaggero V. Errante « Les Libyens renchérissent sur le stop aux débarquements, l’Intérieur veut négocier avec les tribus » : « Le ministre Salvini tente de renouer les négociations avec la Libye afin de renouveler les accords de son prédécesseur Minniti qui avait réussi à réduire les flux migratoires de 78%. Les négociations sont ouvertes à tous et l’Italie est disposée à donner davantage. Ce sont les services de renseignement qui dictent la ligne du ‘’dialoguer avec tous’’. En Cyrénaïque, à Tripoli, avec les maires et les milices. Assurer des aides, des investissements et des fonds ».
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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