"Libération du Capitaine du Sea Watch III."
03/07/2019
Italie. Revue de presse.
Les nominations européennes font les gros titres des médias transalpins. La presse écrite revient sur l’accord de principe des partis européens sur U. von der Leyen et C. Lagarde, retenues respectivement pour les postes de président de la Commission et de président de la BCE. Les observateurs parlent d’une Italie « isolée » (Corriere) face au « flop » (Stampa) des attentes et soulignent dans l’ensemble une victoire franco-allemande (Corriere, Sole, Messaggero). Un éditorial du Messaggero déplore « le retour des ‘’rigoristes’’ ». A ce stade, Rome mise sur l’obtention d’une vice-présidence à la Commission, voire un poste de commissaire à la concurrence (qui irait vraisemblablement à la Ligue) : « Deux femmes à la tête de l’Europe » - ‘’La ligne de Merkel s’impose, l’Italie perd les postes importants’’ (Corriere della Sera, La Stampa), « Europe, deux dames de fer au pouvoir » - ‘’L’Italie reste les mains vides’’ (La Repubblica), « Deux femmes pour la Commission et la BCE » (Sole 24 Ore), « Les femmes de l’axe franco-allemand » - ‘’L’Italie mains vides’’ (Il Messaggero), « Les deux ladies de la rigueur au volant de l’Europe » (Il Mattino), « L’UE des femmes » (Avvenire).
La libération de la capitaine du Sea Watch III, Carola Rackete, est aussi largement reprise avec couverture photographique en Une. La juge d’Agrigente a rejeté les accusations du Parquet - ‘’résistance avec violence envers un navire de guerre’’ et ‘’obstruction à la force publique’’ - contre la Capitaine allemande pour être entrée dans les eaux italiennes. « Migrants, Carola libre. Le Juge : elle a sauvé des vies’’ » (Corriere della Sera), « Carola libre, Salvini en colère » (La Repubblica), « Le juge libère Carola. Salvini décide son expulsion » (La Stampa), « Carola libérée, Salvini critique les juges » (Il Messaggero).
Journaux télévisés : La procédure d’infraction, les nominations européennes et la libération du Capitaine du Sea Watch III dominent.
Réseaux sociaux : La tendance les plus suivies sont #3Luglio et #Libia (suite au bombardement d’un camp de réfugiés). A noter aussi la tendance #bacioni (ironie sur les deux défaites d’hier de Salvini : les nominations européennes et la libération du capitaine de la Sea Watch).
ANALYSE La Repubblica A. Bonanni « Macron et Merkel mettent en échec les souverainistes » : « Grâce à sa stratégie géniale, le chef du gouvernement italien se retrouve avec une Allemande, la dauphine de Merkel, à la tête de la Commission européenne, une Française à la tête de la BCE, un libéral belge très ami de Berlin et de Paris à la présidence du Conseil européen et un socialiste espagnol au timon de la diplomatie européenne. Salvini, le grand tisseur de fil de la stratégie italienne (à son tour manœuvré par Orban), ne peut que se consoler et dire ‘’plus que les noms, l’important est que les règles changent en Europe’’. Quant au choix sur l’Allemande Von der Leyen, cela confirme que la Défense sera le prochain match européen à l’affiche. Là aussi nous sommes absents. L’Italie sort ridiculisée de cette longue négociation qui a vu le triomphe de l’opération d’A. Merkel. La seule femme qui compte en Europe a réussi à placer deux femmes aux postes les plus importants de l’UE. La méthode du spitzenkandidat, embryon de méthode démocratique qui confiait aux groupes politiques la désignation du président de la Commission, est de fait morte. Les souverainistes de l’Est en sortent eux aussi plutôt mal ».
ARTICLE, La Stampa, M. Bresolin : « Merkel accepte l’accord de Macron » : « Après avoir fait sauter la candidature de Frans Timmermans ‘’ parce que c’était le résultat d’un accord franco-allemand ‘’, le Conseil européen a trouvé l’accord sur les nominations UE résultat d’une entente ‘’ franco-allemande ‘’. Et oui, parce que le choix de miser sur Ursula Von der Leyen est né précisément d’une proposition d’Emmanuel Macron à Angela Merkel. Même situation pour le nom de Christine Lagarde à la BCE. Donc une victoire franco-allemande, mais le véritable gagnant de ce jeu politique a été le Président français. Macron a débloqué l’impasse, a placé une Française à la présidence de la BCE et un libéral ami au Conseil, en affaiblissant la position de Merkel et en renforçant son leadership européen ».
ANALYSE Sole 24 Ore G. Chiellino « Les gouvernements s’imposent encore, victoire de Macron et de Merkel » : « La méthode du spitzenkandidat pour la Commission, où c’était la Chambre européenne qui menait les jeux, est morte. Cela représente une défaite pour le Parlement Européen et confirme le poids prépondérant des gouvernements dans les décisions européennes. Les pays du bloc de Visegrad, auquel s’est ajoutée l’Italie, sont tombés dans le piège et après avoir dit non au socialiste Timmermans, ils n’ont pas pu s’opposer à la candidate de Merkel. Le changement des institutions européennes a commencé mais ce ne sont pas les partis populistes à le diriger ».
EDITORIAL Il Messaggero L. Zanatta « Opération léopard, le retour des ‘’rigoristes’’ » : « S’agissait-il seulement d’une question institutionnelle ? Certainement pas. C’est notre avenir qui est en jeu et la première chose qui saute aux yeux est la continuité aux sommets du Parlement, à en voir le profil d’austérité de la nouvelle présidente de la Commission. Une tentative de maintenir les équilibres de toujours. L’axe franco-allemand est loin d’être affaibli, il est au contraire rénové et bien vivant. Voir l’Italie absente des tables de négociation, où les pays fondateurs donnaient pour acquis l’isolement politique et le déclin économique de l’Italie, laisse une drôle d’impression. Quant à l’attitude de l’Italie, plus que de l’inaptitude, on peut y voir une stratégie de nos dirigeants : celle de se mettre hors du jeu eux-mêmes, en sortant pour ne pas perdre ».
EDITORIAL, La Stampa, M. Zatterin : « Maintenant l’Italie compte moins » : « Les souverainistes et les populistes se sont trompés, le vote du 26 mai n’a pas du tout effacé la ‘’ vieille Europe ‘’, au contraire. C’est une alliance qui place, enfin, à la tête de l’Union, deux femmes importantes désignées par une entente alimentée par l’habituelle et inévitable coopération franco-allemande, et avec la collaboration des quatre ‘’ rebelles ‘’ présumés de Višegrad. L’Espagne a gagné des points, l’Italie en a perdu et elle est restée hors-jeu comme, malheureusement, il fallait s’y attendre. L’Italie a été isolée et, à ce stade, la contradictoire stratégie italienne mise maintenant sur l’obtention d’une vice-présidence à la Commission, voire un poste de commissaire à la concurrence (qui irait vraisemblablement à la Ligue), un résultat minimum pour un pays fondateur avec 60 millions de citoyens ».
RETROSCENA (Coulisses), La Stampa, A. La Mattina, F. Schianchi : « ‘’ Obtenu le maximum ‘’ Conte cache le « flop » et vise à la Concurrence » : « Conte et Salvini sont satisfaits des nominations UE, le pire a été évité et le président du Conseil a souligné que l’Italie a contribué aux nominations, sans en faire une question de nationalité. Il a ajouté, qu’à ce stade, il existe un accord pour l’obtention d’une vice-présidence à la Commission, voire un poste de commissaire à la Concurrence qui, grâce aux résultats de dernières élections européennes, ira vraisemblablement à la Ligue. Donc, le nom du ministre des Affaires Etrangères, Enzo Moavero, est improbable tandis que le nom le plus probable au sein de la Ligue est celui de Giancarlo Giorgetti, mais dont Salvini peut difficilement se passer ».
ARTICLE Sole 24 Ore G. Pelosi « L’Italie espère maintenant en une vice-présidence » : « Le Président du Conseil G. Conte tente de construire une narration sur la négociation des nominations européennes qui ne trouve pas pour autant des correspondances dans les déclarations des autres chefs d’Etat et de gouvernement ou des hautes sphères des institutions de Bruxelles. Le duopole franco-allemand (celui que Conte se leurrait de contrer avec les pays de Visegrad) reste au centre du jeu européen. Et quand Conte salue le nom de Lagarde, il oublie qu’en 2011 c’était elle qui avait proposé l’envoi de la troïka en Italie - alors que dans la salle d’à côté Berlusconi répétait qu’il n’y avait pas de crise en Italie malgré le spread à hauteur de 500 pts. Si Tusk laisse comprendre qu’une vice-présidence pourrait aller à l’Italie, ce ne sera certainement pas une des plus importantes, celles-ci étant déjà destinées à Timmermans et à Vestager ».
COMMENTAIRE, La Stampa, F. Bei : « L’antipathie a un prix » : « Est-ce que le gouvernement italien est en train de mettre en cause les équilibres d’une société ouverte et libérale comme la nôtre ? A Salzbourg, quelques dizaines de jeunes ont manifesté en faveur de la ‘’ capitaine Carola ‘’, symbole de l’accueil des migrants, en contestant le Président de la République Mattarella, en tant que représentant de l’Italie qui emprisonne ceux qui sauvent les migrants en mer. Il faut faire attention, parce que l’Italie semble glisser imperceptiblement dans l’échelle de la réputation européenne et cette manifestation contre Mattarella en est la sonnette d’alarme, exactement comme les critiques et les attaques des pays amis et alliés, France et Allemagne, et du président allemand Steinmeier, qui s’est exprimé contre l’Italie pour la façon dont elle traite les ONG. La décision de la juge d’Agrigente, qui a rejeté les accusations du Parquet et qui a libéré Carola, montre que la magistrature n’obéit pas au gouvernement mais que l’Italie est en train de devenir un pays antipathique et arrogant, qui semble plus proche de la Hongrie que de l’Europe occidentale, grâce surtout aux actions du ministre de l’Intérieur, Salvini, qui pousse sa campagne politique contre les associations humanitaires au-delà des limites et qui est en train de dessiner un cordon sanitaire autour de l’Italie ».
COMMENTAIRE La Repubblica G. Lerner « Carola, la victoire du cœur » : « La juge a reconnu que la jeune capitaine avait été cohérente dans l’accomplissement d’un devoir : sauver des vies humaines, soulignant que les conventions du droit de mer et donc que Lampedusa était le port le plus proche. Certainement pas la Libye, où les migrants sont détenus de manière illégale, ni la Tunisie, qui n’applique pas les lois internationales de l’asile politique ».
ARTICLE La Repubblica L. d’Albergo, « Et les touristes prennent des photos des monticules d’ordures. ‘’Une capitale comme ça, c’est du jamais vu‘’ » : « L’étonnement des étrangers : ‘’Des rats dans la rue. On souhaite ne pas les croiser‘’. Les Françaises déçues : ‘’nous espérions que tout ce qu’on avait lu dans vos journaux était faux‘’. L’Ukrainien Denis : ‘’à Kiev nous avons des problèmes avec les déchets, mais rien de ce genre. Ce n’est pas une bonne publicité pour Rome‘’. Hala et Kholoud Azoulay, Français de troisième génération, prennent des photos des déchets. ‘’La ville est en situation d’urgence à cause des déchets. Mais le gouvernement italien que fait-il ? ‘’ ».
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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