André Glucksmann : « Allemagne, le coin que Poutine enfonce en Europe ».
06/04/2010
« L’Union européenne se trouve aujourd’hui en plein chaos. L’époque du fameux ‘couple franco-allemand’ est dépassée. Désormais, ‘la locomotive’ fait des embardées si elle ne déraille pas complètement. Les gouvernements allemand et français acceptent que s’instaure entre eux une concurrence coûteuse et acharnée. L’Allemagne ne limite pas ses ambitions aux frontières de l’Euroland, elle nourrit de plus vastes desseins. Il ne faut pas attribuer uniquement le tropisme russe à la cupidité du socialiste Schröder qui, en trente jours, s’est vu propulsé de la Chancellerie allemande au conseil d’administration poutinien de Gazprom. L’austère Angela Merkel n’a pas voulu, ou pas pu, empêcher l’entente toujours plus étroite entre Moscou et Berlin. Les industriels allemands ont le regard vissé sur le lucratif ‘Far East’ où s’annonce une gigantesque modernisation, de Kaliningrad à Vladivostok. Les manières fortes de Poutine ne suscitent pas la même réprobation chez les allemands que la guerre de Bush en Irak. La Russie bénéficie en Allemagne d’une extraordinaire extraterritorialité morale en partie due aux complexes de culpabilité et de remords post-hitlériens et pour l’autre, par respect de la force et du souvenir cuisant de l’échec de Stalingrad. Adieu Paris, bonjour Moscou. A Berlin l’intendance, à Paris les beaux discours vains. Les experts russes qui n’ont jamais cru possible une ‘communauté européenne’ crient victoire. »
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(Traduction : ambassade de France à Rome)
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