Giorgia Meloni critique les propos du secrétaire de l’Otan Jens Stoltenberg sur l’utilisation d’armes occidentales pour frapper la Russie et assure qu’elle ne démissionnerait pas si elle perdait le référendum sur le "Premierato".
27/05/2024
Italie. Revue de presse.
La presse titre largement sur l’entretien de la présidente du Conseil Giorgia Meloni sur la chaine RaiTre, notamment ses propos sur les alliances en Europe et sur le référendum du « Premierato » : « Haute tension sur les élections européennes et les réformes » (Corriere della Sera), « Alliances dans l’UE, les conditions de Meloni [qui s’oppose à une alliance avec les socialistes] » (Repubblica), « Premierato, la prudence de Meloni » (La Stampa), « Meloni freine sur les armes de l’Otan ; référendum : « je ne démissionnerai pas en cas de rejet » » (Messaggero). Les réactions aux déclarations du Secrétaire Général de l’Otan sur l’hypothèse d’autoriser Kiev à utiliser les armes occidentales en territoire russe sont aussi citées : « L’Italie freine Stoltenberg » (Corriere della Sera), « Kiev, le Palais Chigi indique sa ligne rouge » (Giornale), « Stoltenberg : les partis italiens sont divisés, Conte (M5S) alerte sur les risques d’une troisième guerre mondiale » (Fatto Quotidiano), « Meloni critique Stoltenberg et Macron » (Domani).
Les JT couvrent essentiellement la situation au Proche-Orient, avec les raids israéliens sur Gaza qui ont fait 40 morts, dont 2 dirigeants du Hamas d’après Tel-Aviv, ainsi que la guerre en Ukraine, où les combats se sont intensifiés dans la région de Kharkiv, et l’entretien de Giorgia Meloni sur Rai 3, où elle a critiqué les propos du secrétaire de l’Otan Jens Stoltenberg sur l’utilisation d’armes occidentales pour frapper la Russie et a assuré qu’elle ne démissionnerait pas si elle perdait le référendum sur le « Premierato ».
COULISSES, La Repubblica, de C. Tito, « ‘’Une alliance en Europe sans les Socialistes’’ : la promesse est une fake news et la Présidente italienne du Conseil pourrait se retrouver isolée » : « Une majorité au Parlement européen composée de partis de centre-droit est tout simplement une ‘’fake news’’. Giorgia Meloni fait campagne en promouvant son rêve d’une alliance à Bruxelles et Strasbourg qui puisse se passer de la gauche, mais ce n’est que de la propagande à l’approche des élections. Son dernier coup pourrait bien isoler l’Italie de la direction de l’UE. Une coalition de centre-droit en mesure d’élire le président de la Commission européenne est en effet politiquement et mathématiquement impossible. D’après les dernières estimations, le PPE (auquel appartient Forza Italia) devrait conquérir 183 sièges, le groupe des Conservateurs (ECR, auquel appartient Fratelli d’Italia) 86 siège et Identité & Démocratie (avec la Ligue, le RN…) 84 sièges, soit 353 sièges au total sur 720 députés européens (la majorité se situe donc à 361 sièges). Il manquerait donc 8 sièges en théorie sauf que le PPE a déclaré clairement qu’il ne pourrait y avoir aucune alliance avec l’extrême-droite (Ligue, Rassemblement National). De nombreux parlementaires de la droite italienne suggèrent de remplacer les 84 sièges d’ID par ceux de Renew, le groupe libéral guidé par Macron, qui devrait obtenir 86 sièges. Mathématiquement, cela ne suffirait toujours pas à former une majorité, mais surtout, sur le plan politique, les libéraux sont absolument contre toute collaboration avec le groupe ECR. Jeudi dernier Sandro Gozi a été très clair sur ce point. Sans compter qu’une part non négligeable du PPE (partis des pays du Nord, Pologne), ne veulent pas entendre parler d’alliance avec la droite conservatrice. Les Socialistes (PSE) devraient confirmer leur place de deuxième groupe au Parlement européen, avec 140 sièges. Il n’existe donc aucune alliance de majorité viable sans le PPE et/ou sans le PSE. D’où la majorité dite ‘’Ursula’’ basée sur les Populaires, les Socialistes et les Libéraux qui avait élu U. von der Leyen en 2019 et qui remporteraient en juin prochain 409 sièges. Quiconque brigue la présidence de la Commission européenne devra compter sur une coalition entre le PPE, le PSE et Renew, et quelques députés supplémentaires. Le PPE et la présidente sortante candidate à sa réélection ne voudraient impliquer que les parlementaires de Fratelli d’Italia, pas le reste du groupe ECR. Les Socialistes voudraient quant à eux élargir la coalition aux Verts, qui pourraient remporter 48 sièges. L’objectif revendiqué hier par Meloni apparait donc impossible à moins de revirements électoraux peu probables. C’est donc un coup trompeur de la part de la Présidente du Conseil qui pourrait, après le 10 juin devoir livrer ‘’gratuitement’’ ses parlementaires pour l’élection du Président de la Commission, ne pas faire officiellement partie de l’alliance mais ne pas en être exclue non plus. Sa ligne ‘’jamais avec la gauche’’ pourrait isoler l’Italie. Le gouvernement italien nous a déjà habitués à ce paradoxe, la Présidence du Conseil donne son accord mais Fratelli d’Italia refuse ensuite de s’associer à la décision. »
ARTICLE, Corriere della Sera, M. Guerzoni « La stratégie du Palais Chigi afin d’éviter que l’opposition ne resserre ses rangs » : « Giorgia Meloni veut gouverner au moins jusqu’en 2027 et ne présentera pas sa démission si le référendum sur ‘’la mère de toute les réformes’’ devait être rejeté. Car cette hypothèse avait plané pendant deux jours jusqu’à ce que la Présidente du Conseil n’ait balayé tous les espoirs de ses adversaires, outre les craintes et les doutes au sein même de sa majorité. Et si le référendum devait ne pas passer ? ‘’Tant pis’’, fait-elle savoir. C’est ce qu’elle a dit dimanche à l’émission « in mezz’ora » de Rai Tre, alors qu’au forum de l’Economie de Trente de vendredi elle avait pris de court tout le monde en affirmant ‘’je joue là mon va-tout ‘’, semblant ainsi suivre l’exemple de Renzi et évaluer la possibilité d’une démission en cas d’échec. Or, Meloni n’a aucune intention de jeter l’éponge. Plusieurs personnes lui ont demandé si elle voulait vraiment transformer le référendum sur le Premierato en plébiscite sur sa personne. Elle a répondu ‘’les espoirs de la gauche que je m’en aille avant, en imaginant des scénarii absurdes, sont à la fois amusants et inutiles’’. ‘’Je ferai toutes les réformes nécessaires, puis les Italiens me jugeront à l’issue de ces cinq années de gouvernement’’. La stratégie du Palais Chigi est donc de ne pas transformer le référendum constitutionnel en bataille des batailles, car cela pourrait avoir des retombées graves et favoriser un renforcement des partis d’opposition. Le Palais Chigi doit encore décider si associer ou pas ce référendum aux élections législatives de 2027 ou le faire avant ou après. Meloni doit d’abord remporter les élections européennes. Les choix et les déclarations de ces derniers jours ont laisser filtrer un mélange de confiance et de peur. L’écart entre FdI et le PD se réduit et Meloni fera tout son possible pour que son score lors des élections européennes atteigne les 26% de 2022. Sans le dire ouvertement, elle pense même pouvoir atteindre la barre des 28%. »
Giorgia Meloni
ARTICLE, La Repubblica, G. Colombo « Les coupes prévues pour les municipalités, Giorgetti (Ligue) tente de résister à l’opposition de Fitto (Frères d’Italie) » : « Selon Giorgetti (Ligue), il faut dire les choses telles qu’elles sont car ‘’l’économie est en train de traverser des temps difficiles’’ raison pour laquelle ‘’tout le monde doit faire des sacrifices’’. C’est le bain de réalité que le ministre de l’Economie répète à huis clos au moment où le PD attaque le gouvernement sur ses coupes budgétaires contre les municipalités qui ont reçu plus de fonds du PNRR. C’est, selon le ministre de l’Economie, le seul remède afin d’éviter des coupes sèches. Giorgetti n’a aucune intention de revoir toute la structure du décret co-signé avec son collègue Piantedosi (Indépendant). Pour sa part, le ministre pour le Sud et le PNRR Raffaele Fitto a promis une rencontre avec les municipalités. C’est une tentative cachée pour tenter de modifier ou de raboter le schéma du décret. Par ailleurs, Fitto n’était pas au courant de ces coupes et il l’a appris en lisant les journaux il y a tout juste deux jours. Il doit ainsi se mettre à l’abri et éviter de perdre des points de popularité obtenus avec la révision du PNRR, qu’il a sauvé en trouvant des fonds alternatifs. Les propos de Giorgetti s’adressaient aussi à Fratelli d’Italia. Giorgia Meloni est restée silencieuse, gardant ses distances par rapport aux troubles entre ses ministres après l’imbroglio autour du « redditometro » du vice-ministre de l'Economie Maurizio Leo. Ce dernier a souligné hier que la révision des dépenses était traitée par "un autre secteur du ministère", et non par le sien. Les collègues de FdI, quant à eux, ont nié l'existence des coupes. Une polémique qui serait d’après eux ‘’inventée de toutes pièces par les partis d’opposition pour récolter des voix ", comme l’a déclaré le chef de groupe à la Chambre, Tommaso Foti. Mais les coupes sont pourtant bien là. Il est vrai que les coupes des fonds du PNRR ne concernent pas les infrastructures, c'est-à-dire la construction des crèches, mais elles affectent néanmoins les dépenses courantes que les municipalités ont dû nécessairement augmenter pour couvrir les coûts des services nécessaires au fonctionnement de ces crèches. A treize jours des élections européennes et municipales, une partie de la majorité affiche son opposition à ces coupes. Certains maires de centre-droit ont commencé à faire entendre leur voix auprès des référents nationaux de leurs partis respectifs. Ils craignent des retombées en vue des 8 et 9 juin. Il est assez difficile de convaincre les électeurs de voter pour ceux qui sont en train de demander des sacrifices. »
ENTRETIEN, Corriere della Sera, d’Elly Schlein, secrétaire du Parti démocrate, par M. T. Meli « De cette façon nous risquons de nous retrouver sans ressources ; alerte sur le système sanitaire » : « Le gouvernement de Giorgia Meloni multiplie les coupes budgétaires, cette réduction des ressources publiques à hauteur de 250 millions est gravissime. Proportionnellement, ce sont les communes qui subissent le plus ces coupes, alors mêmes que ce sont elles qui investissent davantage de ressources du Plan de Relance. Les communes risquent réellement de manquer de ressources afin de mener les projets jusqu’au bout, par exemple pour embaucher les personnels nécessaires dans les crèches, les structures d’accueil, le système sanitaire… Giorgia Meloni ment lorsqu’elle affirme que les dépenses sanitaires n’ont pas diminué, ce ne sont pas les valeurs absolues qui comptent mais les investissements en proportion du PIB. Les dépenses de santé devraient atteindre les 6,2% du PIB en 2027, ce qui serait un minimum de ces 20 dernières années. Depuis son arrivée à la Présidence du Conseil, les dépenses de santé ont retrouvé le niveau d’avant la pandémie. Nous voulons amener progressivement les dépenses sanitaires à la moyenne européenne de 7,5% du PIB, et débloquer les embauches dans ce secteur, bloquées depuis 2009 par un gouvernement dont G. Meloni faisait partie. La seule chose concrète qu’elle ait fait est d’ouvrir les cliniques gynécologiques aux associations anti-avortement. Le PD poursuit la bataille sur le salaire minimum car il existe une directive européenne mais l’Italie n’a toujours pas de loi. Un récent rapport de l’ISTAT montre que l’inflation a augmenté de 17% ces trois dernières années et les salaires réels de 4,7%. Pour ma part, je fais tout mon possible pour aller à la rencontre des travailleurs. En Italie, il faut introduire le salaire minimum et lutter contre la précarité que Meloni a fait augmenter et qui touche surtout les femmes. L’autre bataille concerne les investissements communs en Europe, alors que Meloni s’affiche en Europe avec les ennemis de nos intérêts nationaux qui scandaient ‘’pas un centime pour l’Italie’’ alors que son parti s’abstenait sur le Next Generation UE. L’Italie a besoin d’une Europe qui continue à investir pour l’innovation numérique et pour accompagner les entreprises et les agriculteurs vers la transition écologique. La droite fait preuve de ‘’deux poids deux mesures’’ lorsque des enquêtes visent des hommes politiques en fonction. Le président de la région Ligurie, G. Toti devrait démissionner, par correction politique. Meloni confirme son peut de respect pour les institutions. Concernant l’Ukraine, nous soutenons le droit de Kiev à se défendre face à l’invasion criminelle de Poutine qui bombarde sans scrupule des objectifs civils sur le sol ukrainien. Mais cela ne peut se traduire par une entrée en guerre de l’UE contre la Russie. L’UE doit conserver son autonomie stratégique et nous devons concentrer nos efforts sur la conférence de paix qui se déroulera en Suisse à la mi-juin, pas à créer une nouvelle escalade du conflit. »
ENTRETIEN, Il Mattino, d’Antonio Tajani, vice-président du Conseil, ministre des Affaires étrangères et coordinateur de Forza Italia, « [L’Italie fournira] à Kiev les armes pour se défendre, pas pour être utilisées contre Moscou »
ARTICLE, Corriere della Sera, A. Logroscino « Armes, Rome dit « non » à Stoltenberg et appelle à plus de prudence » : « 24 heures après les propos du Secrétaire Général de l’Otan sur la nécessité d’envisager de lever l’interdiction d’utiliser les armes occidentales contre des objectifs russes, Giorgia Meloni se démarque. ‘’Je ne sais pas pourquoi Stoltenberg dit des choses pareilles. Je recommande plus de prudence. L’Otan ne doit pas donner de signes de relâchement et doit maintenir son soutien à l'Ukraine pour qu'elle parvienne à la paix’’. Elle s’alarme aussi sur "d'autres déclarations hasardeuses", avec une référence explicite au président français Macron : "Cela me semble contre-productif", déclare Meloni, "cette histoire alarmante selon laquelle l'Europe est au bord d'un conflit plus large. C’est un jeu irresponsable pour récolter quelques voix de plus". Elle lance ensuite des piques à certains partis italiens, comme son allié de la Ligue ou le M5S, qui en font une bannière électorale. ‘’ Si nous commençons à parler d'une voie diplomatique", explique M. Meloni, à l’émission « In mezz'ora » sur Rai3, "c'est parce que nous avons aidé l'Ukraine. Si nous avions permis la guerre impérialiste russe, alors oui, le conflit se serait rapproché de nous". Les propos de Stoltenberg sont considérés comme "une accélération imprudente" par Deborah Bergamini de FI et provoquent une protestation que la Ligue s'apprête à formaliser : le sénateur Claudio Borghi annonce qu'il proposera une séquence dédiée ou déposera une question parlementaire pour "censurer les propos belliqueux" du secrétaire général de l'OTAN. Son chef Matteo Salvini donne trois possibilités à Stoltenberg : "Soit il se rétracte, soit il s'excuse, soit il démissionne". Puis, comme d'habitude, il simplifie : "Il ne peut pas parler d'utiliser les bombes, les missiles ou les armes italiennes que nous avons envoyées à l'Ukraine pour se défendre, pour frapper et tuer en dehors de ses frontières. Pas en mon nom, pas au nom du peuple italien. Nous devons défendre l'Ukraine attaquée, mais nous ne sommes en guerre avec personne". Le Secrétaire d’Etat à la défense Matteo Perego (FI) confirme la position de son ministre ‘il faut éviter les fuites en avant, avec le risque que le conflit ne s’élargisse. Les décisions pour d’autres actions dans le conflit ne doivent pas être prises unilatéralement, comme le propose Stoltenberg, mais par les pays membres de l’alliance, selon un accord commun’’. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
Les commentaires sont fermés.