"Les subventions exclusivement pour les voitures de fabrication italienne et les contrôles sur les usines."
25/01/2024
Italie. Revue de presse.
La séance de questions au gouvernement à la Chambre hier avec Giorgia Meloni font les gros titres : « Meloni-Schlein, frictions à la Chambre » (Corriere della Sera, Giornale), « La fiche noire. Chigi attaque Repubblica dans son bulletin adressé aux ministres et parlementaires » (Repubblica), « La santé publique serait en danger avec l’autonomie régionale » (Stampa), « Hôpitaux, voitures, comptes publics, le duel à la Chambre de Meloni » (Messaggero), « Le premier défi Meloni-Schlein » (Mattino).
COMMENTAIRE, Sole 24 Ore, par L. Palmerini « Meloni, l’avertissement de la Ligue et le match avec Schlein et Conte » : « A la session de questions au gouvernement, Meloni a été attaquée sur plusieurs fronts. L’impression était que les dirigeants respectifs du PD et du Mouvement 5 Etoiles s’étaient entendus sur une répartition des thématiques sur lesquelles attaquer. Conte a choisi l’Europe, tandis que Schlein s’est concentrée sur le problème des ressources financières pour le système sanitaire. Nous avons assisté à un premier match où la dirigeante du PD a choisi le terrain sur lequel affronter le gouvernement. Conte a pu, lui, lancer ses critiques contre le nouveau pacte de stabilité, qualifié d’« accord bidon» ramenée de Bruxelles sous les pressions de l’Allemagne. Il est clair que Schlein n’aurait jamais pu employer un tel langage, étant donnée la position européenne de son parti et la présence du commissaire Gentiloni. Il y a des dossiers tabous que la secrétaire démocrate ne peut pas aborder, au prix de provoquer des divisions internes. Conte peut, lui, profiter de l’immense espace qui appartenait jadis à la droite. Il a pu ainsi soulever la question des privatisations ‘’vous qui êtes patriote, vous avez vendu à un prix dérisoire ITA aux Allemands et maintenant vous allez faire de même avec Poste et Ferrovie’’. Ce sont des attaques qui font du mal surtout à Salvini, qui voit ses marges politiques se réduire, érodées d’une part par la Présidente du Conseil et d’autre part par Conte. Salvini montre alors des signes d’impatience. Celui auquel on a assisté hier pourrait être interprété comme un avertissement lancé à Fratelli d’Italia. La Ligue avait en effet présenté un ordre du jour sur l’Ukraine avec des passages évoquant une opinion publique ne supportant plus l’envoi d’armes. Des passages qui avait rencontré le soutien des 5 Etoiles, laissant croire à un retour de flamme entre la Ligue et le M5S. Ce passage a ensuite disparu du nouvel ordre du jour, la Ligue ayant minimisé la chose en dénonçant des exploitations politiques. Il est clair que Meloni a imposé à la Ligue une marche-arrière. Toutefois, la gêne de la Ligue demeure et il pourrait y avoir d’autres épisodes à l’avenir. »
PREMIER PLAN, La Repubblica, de L. De Cicco, « Stellantis finit dans le viseur de Giorgia Meloni, ‘’le gouvernement français est présent dans le conseil d’administration du groupe’’ » : « Lors des questions au gouvernement hier à l’hémicycle, Giorgia Meloni a attaqué à nouveau Stellantis, dont est actionnaire la famille Elkann, également éditeur de ce journal. Mais cette fois, Meloni ne s’en est pas prise directement à Repubblica. Meloni a décrit la naissance de Stellantis comme ‘’une acquisition par la France du groupe italien historique’’, c’est-à-dire FIAT. Elle conteste face au Parlement les choix du groupe jugés ‘’éloignés des intérêts italiens’’, ‘’au sein du conseil d’administration il y a un membre du gouvernement français, ce n’est pas étonnant que les décisions tiennent davantage compte des intérêts français’’ affirme-t-elle. ‘’Nous avons changé les règles, avantageant ceux qui reviennent produire en Italie et décourageant ceux qui voudraient délocaliser la production et qui devront restituer toute aide perçue au cours des dix dernières années’’ prévient-elle. La présidente du Conseil a annoncé l’objectif de produire à nouveau un million de véhicules par an en Italie. Un porte-parole de Stellantis Italia a répondu en affirmant que le groupe fait déjà beaucoup et continue à faire sa part en Italie, ayant investi des milliards et apporté ‘’une forte contribution’’ à la balance commerciale du pays. L’année dernière plus de 752 000 véhicules ont été produits en Italie, soit +9,6% par rapport à 2022, dont 63% ont ensuite été exportés à l’étranger. Meloni, avant et après son intervention à la Chambre, évite les journalistes. Elle est sur la défensive, y compris lorsqu’elle parle du ‘’Sud jamais trahi’’ après la décision du Sénat sur l’autonomie différenciée des régions, ou sur les privatisations (‘’nous ne bradons rien’’), sur l’indemnisation des familles de victimes des attentats nazi-fascistes (Meloni ne dit que ‘’nazies’’). Sur la politique étrangère, elle admet ‘’ne pas partager la position de Netanyahou’’ et que ‘’l’Italie a toujours affirmé que le peuple palestinien a le droit d’avoir un Etat indépendant, à condition de reconnaître l’Etat hébreu’’. Le duel le plus attendu est celui face à Elly Schlein. La secrétaire démocrate parle de santé, Meloni rejette la faute sur les gouvernements précédents et formule une promesse très vague en déclarant : ‘’nous nous occuperons aussi de cela’’. La réplique de Schlein est imparable - le plafonnement des dépenses sanitaires date de 2009… lorsque Giorgia Meloni était ministre – lui valant un long applaudissement de l’hémicycle, y compris de Giuseppe Conte. Ce dernier a attaqué ensuite la Présidente du Conseil au sujet du MES. »
ARTICLE, La Stampa, par P. Griseri « Stellantis rappelle qu’il a investi des milliards en Italie » : « Est-il possible pour Stellantis de doubler sa production de voitures en Italie ? Cela apparait difficile, même si le gouvernement italien était représenté au sein du Conseil d’administration. En réalité, les différents exécutifs qui se sont succédé à Rome se sont bien gardés de le faire car, le cas échéant, ils auraient provoqué une levée de boucliers de la part des plus libéraux, qui sont aujourd’hui les alliés de Meloni, et de la gauche radicale au sein du Parti Démocrate. S’étonner aujourd’hui d’une disparité entre Rome et Paris au Conseil d’administration de Stellantis risque d’être vu comme la plus évidente des propagandes. En réalité, le groupe de Tavares est engagé dans les établissements italiens mais il ne peut pas, à lui seul, doubler la production en Italie. Il est vrai aussi que le niveau actuel de production pourrait ne pas être suffisant pour rassurer tout le secteur lié indirectement à la production. Voici donc un passage clé de l’intervention de Meloni : ‘’nous voulons produire à nouveau avec ceux qui veulent réellement investir sur l’excellence italienne’’. Le gouvernement serait-il en train de chercher d’autres producteurs qui pourraient concurrencer Stellantis ? Profitera-t-il des rencontres dans les prochains mois prévus par l’agenda du G7 dont Rome assure la présidence jusqu’au 31 décembre pour aller les trouver ? C’est une possibilité. »
ARTICLE, Messaggero, par A.Bassi et F.Malfetano « Les subventions exclusivement pour les voitures de fabrication italienne et les contrôles sur les usines » : « Le plan des mesures de subvention automobile du gouvernement est prêt et il mettra l'accent sur l'italianité. Les primes seront principalement accordées aux voitures produites dans les usines italiennes. Le décret suivra trois axes : mettre au rebut les voitures les plus polluantes, favoriser les acheteurs à revenu moyen-bas, et enfin, encourager l'achat de voitures produites dans les usines du pays. Pendant ce temps, le gouvernement met Stellantis sous les projecteurs : cette semaine auront lieu 5 réunions techniques dans le but d'avoir une vision claire de "ce qu'ils ont l'intention de produire dans chaque usine active en Italie" du groupe ex-Fiat. C'est-à-dire quels modèles, avec quels volumes, quel emploi et quelle relation avec les sous-traitants. L'idée, explique une source autorisée au sein du gouvernement Meloni, est de "vérifier quels sont leurs projets pour l'Italie". Si ceux-ci ne devaient pas correspondre aux orientations du plan lancé pour l'industrie automobile (mise au rebut des voitures les plus polluantes, avec des facilitations principalement destinées aux classes à revenu bas et sur des modèles produits en grande partie en Italie), montrant que Stellantis ne tiendrait donc pas ses engagements sur l'augmentation de la production dans la Péninsule, le groupe perdrait le droit d'accéder aux ressources du fonds automobile (environ 6,3 milliards, dont un pour l'année en cours) au profit des "entreprises qui ont l'intention de réaliser de nouveaux établissements de production dans la filière automobile". »
COULISSES, La Stampa, d’I. Lombardo, « Les leaders européens préparent leur retour à Kiev, Meloni ira avec Macron et (peut-être) Scholz » : « La question qu’immédiatement tout le monde se pose est la suivante : y aura-t-il une nouvelle photo des trois leaders dans le train en direction de Kiev ? Probablement pas. Il semblerait que Meloni veuille rester cohérente avec ses attaques adressées à Draghi il y a environ un mois lorsqu’elle avait dit que ‘’pour certains la politique étrangère a consisté à se prendre en photo aux côtés de la France et de l’Allemagne sans décrocher de résultat concret’’. A l’occasion du deuxième anniversaire du début de l’agression russe en Ukraine, les leaders européens devraient se retrouver à Kiev, auprès de V. Zelensky, comme en juin 2022. Toutes les informations émanant du gouvernement italien à ce sujet sont au conditionnel car il y a peu de certitudes et beaucoup de contraintes de sécurité. Meloni se rendra dans la capitale ukrainienne également en tant que présidente du G7, sur fond de polémiques italiennes sur l’envoi des armes et la réduction des soutiens militaires et financiers à Kiev. La présence d’E. Macron serait aussi confirmée alors qu’on attend encore la confirmation d’O. Scholz et celle de la présidente de la Commission U. von der Leyen. Ils réaffirmeront leur soutien à Kiev. Le processus d’adhésion de l’Ukraine à l’UE est engagé, ils espèrent avoir débloqué d’ici là les 50 milliards d’euros promis mais bloqués par le véto de V. Orban. Le 1er février prochain les 27 leaders européens se rencontreront lors d’un conseil extraordinaire exclusivement consacré à ce dossier. Zelensky pourrait y participer en visioconférence et ainsi peser sur les négociations et les décisions finales, vers un compromis acceptable pour Budapest. Zelensky a remercié Olaf Scholz hier pour la hausse de l’aide militaire annuelle à 8 milliards d’euros et l’envoi d’hélicoptères Sea king Mk41. Meloni retournera à Kiev un an après sa première visite, sans avoir les moyens d’offrir une telle aide. La marge budgétaire italienne n’est pas celle de l’Allemagne et les divisions au sein de la majorité ne facilitent pas les choses à la Présidente du Conseil, d’autant plus que son électorat ne se mobilise pas particulièrement pour la cause ukrainienne. C’est pourquoi le corps diplomatique est inquiet en vue de la future conférence sur la reconstruction de l’Ukraine. Meloni a proposé que l’Italie l’accueille en 2025 et pourrait relancer le sujet tout en sachant que les contradictions italiennes pourraient bien tout compromettre. »
ARTICLE, La Repubblica, de G. Foschini, “Groupuscules extrémistes et anti-vaccins, la droite attise les revendications en vue des élections européennes » : « Belgique, Pays-Bas, Slovénie, puis Pologne, France, Allemagne, et désormais également l’Italie, l’Espagne et la Grèce, d’après les services de renseignement européens. ‘’Le ton va inévitablement monter au cours des prochaines semaines, en vue des élections européennes’’ disent-ils. Les manifestations d’agriculteurs, qui secouent toute l’Europe, sont devenues une question de sécurité. Pas seulement à cause du désordre qu’elles génèrent partout – avec déjà deux victimes à ce jour et des dizaines de blessés – mais surtout parce que, si le phénomène se propage aussi vite, c’est que certains l’attisent : un pan de la droite extrême fait levier sur l’anti-européisme et les discours anti-environnement. Sur les routes, on trouve des paysans et des populistes de droite. Sur les canaux Telegram et Facebook, les messages de protestations et les appels à la mobilisation circulent sur les mêmes pages et canaux antisystèmes qui durant la pandémie avaient relayé les messages anti-vaccins, puis l’infox sur l’Ukraine, etc. Dans le cas des « gilets verts », il s’agit de ‘’protester aux côtés des pauvres accablés par les taxes vertes’’. La cible est donc l’écologie et les lois contre les émissions, la promotion de l’électrique, les mesures pour une agriculture plus durable notamment avec le débat sur la viande moléculaire. Les images de la préfecture d’Agen en flammes ont été vues des millions de fois. En Italie, au cours des dernières 48 heures, une quarantaine de manifestations ont été relevées, des Abruzzes à l’Emilie-Romagne, de la Sicile à l’Ombrie. Les revendications sont toujours les mêmes – la hausse des aides publiques et européennes, les prix de vente aux industriels et aux distributeurs, le refus de la viande moléculaire et des panneaux photovoltaïques sur les terres cultivables – et toutes légitimes. Mais à côté on voit croître également le reste. Des canaux Telegram n’ayant aucun rapport avec l’agriculture ont commencé à relayer des contenus en lien avec les manifestations, au milieu des milliers de refus de se vacciner ou de payer ses factures. Des influenceurs antisystèmes, comme Pamela Testa en Italie qui défilait en première ligne avec les no-vax, ont récupéré le sujet. Leurs amis de Forza Nuova se sont chargés de transporter sur le terrain ce qu’on voyait sur le web : hier les réseaux du mouvement néofasciste étaient inondés de photos de leurs membres participant aux manifestations d’agriculteurs, avec des déclarations telles que ‘’nous sommes les seuls à leurs côtés, les autres s’alignent tous sur les politiques de Bruxelles’’. Les élections européennes sont loin, mais pas tant que ça. »
ARTICLE, La Stampa, par A. Rossi « La révolte des tracteurs » : « La marche des tracteurs traverse l'Italie contre tout et tous : l'Union européenne, les farines d'insectes et la viande cultivée, la bureaucratie, le diesel cher et les terres bradées, le gouvernement et surtout les syndicats agricoles. Une révolte venue d'en bas, par le bouche à oreille, organisée et éparpillée à la fois, menée par des professionnels du secteur mais animée par des gens qui n'ont jamais manqué un jour de travail. Ils s'appellent le « Cra », pour Comité des agriculteurs trahis. Italien, bien sûr, car cette communauté a un trait commun : la souveraineté alimentaire. À la tête de cette galaxie disparate - du moins dans les intentions - on retrouve trouve Danilo Calvani. Petit paysan de Pontinia, Latina, il a été en 2009 l'un des fondateurs de la Ligue du Latium puis du « Coordinamento 9 dicembre », l'une des âmes des « forconi » (les porteurs de fourches), ce mouvement d'agriculteurs, de camionneurs, de marchands ambulants, de pêcheurs, de chauffeurs de taxi qui ont protesté contre le gouvernement Monti soutenu par des organisations d'extrême-droite (Forza Nuova) et des groupes de supporters ultras organisant des garnisons et des blocages dans les grandes villes. Dans certaines d'entre elles, comme à Turin, les journées ont été tendues : des pierres ont été lancées contre les bâtiments des institutions et les policiers ont retiré leurs casques presque en signe de solidarité. Aujourd'hui, M. Calvani tente à nouveau sa chance : "En 2013, nous avons bloqué le pays. Nous, les agriculteurs, sommes partis et tous les autres ont suivi. Nous ne répéterons pas les erreurs du passé, nous éloignerons ceux qui veulent nous vendre à la politique". On ne sait pas à qui il fait allusion, on sait en tout cas qui sont ses cibles aujourd'hui : le gouvernement, "comme tous ceux qui l'ont précédé, et se prosternent devant l'Europe et les multinationales" et plus encore les syndicats agricoles, "corrompus, vendus, de vulgaires criminels". Le mot d'ordre est donc "luttons jusqu'au bout’’ : Paola Ponzio, coordinatrice piémontaise du Cra, l'explique ainsi : "Cette mobilisation spontanée du Nord au Sud témoigne de la volonté de se battre pour défendre l'agriculture italienne contre les diktats européens qui la détruisent. Ils veulent nous arrêter pour faire place à des produits étrangers". L'Europe est la grande cible : bureaucratie asphyxiante, politiques éloignées des besoins des territoires, modes de production non durables et coûts supérieurs aux recettes. Une liste de maux dont le gouvernement Meloni et les organisations du monde agricole sont considérés comme co-responsables. Cette galaxie est presque insaisissable : elle mêle des tribuns comme Calvani à des milliers d'agriculteurs qui veulent simplement survivre. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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