"L’affaire Acca Larentia arrive au Parlement UE. Schlein accuse Meloni."
11/01/2024
Italie. Revue de presse.
Le vote d’hier à la Chambre pour prolonger l’envoi d'aides humanitaires et militaires à l’Ukraine fait les gros titres : « Aides militaires à l’Ukraine, le Parti démocrate est divisé » (Stampa), « L’Italie renouvelle son soutien à Kiev mais le PD se divise » (Giornale), « L’Italie a désormais plus envie de paix, les armes divisent le PD et le M5S » (Avvenire). D’autres sujets sont également cités « Elections régionales, haute tension sur les candidatures » (Corriere della Sera), « Justice, [le gouvernement] s’oppose au fonds pour dédommager les parents des victimes du nazisme » (La Repubblica), « Proche Orient, un plan pour la paix à Gaza » (Messaggero).
Les JT couvrent essentiellement le débat au Parlement sur l’affaire Acca Latentia suite à la polémique soulevée par le rassemblement fasciste, la situation au Proche-Orient, avec l’intensification des frappes israéliennes sur Gaza et la mission du Secrétaire d’Etat américain Athony Blinken dans la région, et enfin les tensions en Equateur.
ANALYSE, Corriere della Sera, de N. Pagnoncelli, « Quels sont les leaders qui se lanceront dans la course aux européennes et que risque la droite dans ses choix en vue des élections de juin » : « Ces derniers jours, on parle beaucoup de la candidature ou non des leaders des principaux partis pour les européennes, soulignant notamment que ces candidatures seraient avant tout une opération de communication puisqu’aucun d’entre eux ne pourrait véritablement devenir parlementaire européen. ‘’Les citoyens le savent bien, la démocratie c’est aussi cela’’ a répondu la Présidente du Conseil qui pose comme seule limite que les candidatures éventuelles n’aient pas de retombées négatives sur l’activité du gouvernement. Antonio Tajani (Forza Italia) a exprimé de forts doutes sur l’opportunité de telles candidatures bien qu’il n’y ait pas de contre-indication formelle. Sur le plan politique, le centre-droit risque entre autres que Meloni remporte un important succès, réduisant le résultat de ses alliés. Cela mettrait à mal la stabilité du gouvernement déjà affectée par des divergences au sein de la majorité. Salvini a exclu de se présenter. Les intentions de vote pour la Ligue reculent par rapport aux élections législatives d’octobre 2022 et cela aurait pu le convaincre au contraire de s’engager personnellement pour endiguer les pertes et garantir la cohésion de la direction du parti. Quoi qu’il en soit, le résultat qu’obtiendra la Ligue, assurément bien loin des 34,3% avec lesquels elle avait triomphé aux dernières européennes, sera probablement imputé à Salvini. Pour Tajani, la décision est plus délicate puisque la popularité de Forza Italia recule, notamment suite à l’abstention lors du vote sur le MES qui a un peu affaibli son profil européen et populaire, et qu’il doit justement se mobiliser sur ce terrain. D’un autre côté, il doit lutter pour la cohésion de son parti et dépasser les divisions internes. Il est donc probable que rien ne soit décidé avant le congrès de Forza Italia prévu fin février. A l’opposition, Giuseppe Conte (Mouvement 5 Etoiles) semble bien décidé à ne pas se présenter et pourrait exploiter cette décision pour critiquer ceux qui se lanceront. La secrétaire du Parti démocrate Elly Schlein a annoncé qu’elle déciderait en mai, or ce délai assez long pourrait bien être un avantage pour ses adversaires et elle semble faire face à plusieurs difficultés en interne, notamment les doutes de l’aile réformiste du parti. En plus des européennes, les Italiens devront aussi voter lors des élections régionales et municipales, deux scrutins peu attractifs en général. Le plus important sera donc d’amener ses propres soutiens aux urnes, plus que de conquérir de nouveaux électeurs. La candidature des leaders pourrait donc avoir pour but premier de mobiliser, compte tenu surtout du fort caractère proportionnel du scrutin européen. »
PREMIER PLAN, Repubblica, G. Vitale « L’affaire Acca Larentia arrive au Parlement UE. Schlein accuse Meloni » : « Ce qu'il n'a pas été possible au Parlement italien, un débat dans l'hémicycle sur le rassemblement d’extrême-droite d'Acca Larentia, se tiendra la semaine prochaine au Parlement européen où, à la demande du groupe socialiste, un débat sur la "lutte contre la résurgence du néofascisme en Europe, à partir également du rassemblement qui s'est déroulé à Rome le 7 janvier" sera organisé. L'affaire franchit donc les frontières nationales et pénètre au cœur des institutions européennes. Irrité, le parti Fratelli d'Italia est conscient que l'ouverture d'un "procès" contre eux pourrait nuire aux rêves européens de Meloni. À Rome, la seule chose que les oppositions parviennent à obtenir est une brève intervention du ministre de l'Intérieur, Matteo Piantedosi (Indépendant). La secrétaire du PD, Elly Schlein, l'a interrogé sur cette affaire, présentée comme d'''une gravité sans précédent". "Commémorer la mort tragique de trois jeunes hommes tués par une violence politique criminelle ne peut en aucun cas justifier l'apologie du fascisme, qui est un crime". En se référant à la loi « Scelba » et à la Constitution, Schlein demande au gouvernement non seulement quelles initiatives il compte prendre pour éviter que ces faits ne se reproduisent, mais surtout de dissoudre les groupes néo-fascistes. "Aucun gouvernement, même de gauche, n'a jamais pris de telles initiatives", répond Piantedosi sèchement. Sous-entendu : n’imaginez pas que le gouvernement actuel puisse le faire, alors qu’il est dirigé par un parti dont le symbole est la flamme qui brûle sur la tombe de Mussolini. Les enquêtes en cours sur Acca Larentia ont déjà permis d'identifier 150 personnes, la préfecture de police de Rome a envoyé au parquet un premier rapport "contestant le délit d'apologie du fascisme à l'encontre de cinq membres de CasaPound, identifiés parmi les participants". Mais la véritable cible de Schlein est Giorgia Meloni qui "a parlé pendant trois heures la semaine dernière, mais n’a pas trouvé 10 secondes pour se déclarer antifasciste, comme la Constitution sur laquelle elle a juré", attaque la secrétaire du PD. "Elle reste l'otage de son passé, avec lequel elle continue à ne pas vouloir prendre ses distances". Le M5S arrive en renfort : "Il est grave d'avoir une Présidente du Conseil qui, comme toujours, fait la politique de l’autruche et ne dit pas que les gestes fascistes ne sont pas permis", affirme Giuseppe Conte (M5S)". »
COMMENTAIRE, Corriere della Sera, M. Franco « Le problème identitaire qui demeure au sein du PD sur l’Ukraine » : « Giuseppe Conte (M5S) ne parvient pas à cacher sa satisfaction, et pour cause. Le vote contre à l’envoi d’aides militaires à l’Ukraine n’a rassemblé qu’une minorité de voix au Parlement, mais a divisé le PD. Le parti d’Elly Schlein se retrouve d’un coup dans une position subalterne aux 5 Etoiles sur une thématique clivante : la politique étrangère. Le résultat est qu’il donne l’image d’avoir une position encore plus ambiguë et floue à l’égard de l’agression russe en Ukraine. La direction du parti a tenté de minimiser l’importance de ce choix. En revanche, ceux qui ont décidé de voter pour la résolution présentée par la majorité l’ont souligné de manière négative : il s’agissait d’un acte nécessaire dans une phase où Poutine semble miser sur la fatigue sous-jacente parmi les alliés occidentaux et dans certains milieux américains. La décision du PD de s’abstenir a un goût de fracture identitaire, qui jette une ombre sur la cohérence qui a jusque-là caractérisé le PD comme parti fidèle aux alliances dans l’UE et dans l’Otan. Surtout, le PD entretient la confusion avec un pacifisme idéologique que Conte décline sans scrupules, dans une rhétorique anti-américaine en invoquant une trêve tactique face à la stratégie du Kremlin. Le vote pour de certains représentants du PD du calibre de Guerini, Quartapelle, Madia et de l’ancien président de la Chambre Casini traduit une gêne jusque-là cachée sur d’autres sujets qui font parler d’une « dérive 5 Etoiles » au sein du PD. Entretemps, le parti de Schlein s’apprête à se réunir pour définir la campagne électorale pour les européennes de juin. Or, ce rassemblement du PD se tiendra alors que des sondages donnent le M5S de plus en plus proche, et que des doutes subsistent sur l’agenda de la direction. Le problème identitaire du PD demeure et le parti semble de plus en plus attiré par l’orbite populiste. »
ARTICLE, Avvenire, I. Liverani « L’Italie a désormais plus envie de paix » : « Un dernier sondage SWG diffusé hier nous dit qu’environ 9 Italiens sur 10 souhaiteraient que l’Italie abandonne les politiques d’intervention militaire. Toujours hier, le ministre de la Défense Guido Crosetto lors de son audition au Parlement a dit que ‘’nous devons poursuivre les aides à Kiev mais maintenant il faut plus de diplomatie’’. Selon ce sondage, 87% des Italiens se disent opposés aux politiques d’intervention et contre la participation aux missions militaires et sous l’égide de l’Otan. C’est une tendance croissante depuis une quinzaine d’année mais qui a marqué toutefois un record. Ceux qui se disent favorables ne sont que 13%, soit en forte baisse par rapport à 2020 quand ils étaient 25%. Selon SWG, cette tendance souligne le grand écart entre l’opinion publique et les positions actives dans le domaine militaire. Parmi les thématiques considérées comme prioritaires, on retrouve « la paix et la sécurité globale » (75%), « le dérèglement climatique » (67%) et « la croissance de l’économie » (56%). Si la majorité des Italiens refuse les thèses militaristes, pourquoi les partis politiques n’en tiennent-ils pas compte ? Car les électeurs, à priori, votent sans penser à la politique étrangère. C’est un aspect secondaire en Italie : on voit d’ailleurs que pendant la conférence de presse de la Présidente du Conseil, le sujet a pratiquement été absent. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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