"Loi de finances : la Ligue présente trois amendements et suscite la colère des alliés."
22/11/2023
Italie. Revue de presse.
Les JT couvrent essentiellement l’affaire du meurtre de la jeune Giulia Cecchettin, et notamment les déclarations du juge chargé de l’enquête, le décret de loi sur la violence de genre devant être adopté aujourd’hui au Sénat, et l'accord entre Israël et le Hamas pour une trêve de quatre jours en échange de la libération de certains otages.
ARTICLE, Corriere della Sera, E. Marro « Loi de finances : la Ligue présente trois amendements et suscite la colère des alliés » : « La Ligue a eu beau expliquer qu’il s’agit de ‘’modifications sans coût’’, les amendements présentés hier à l’insu de leurs alliés ont suscité la colère au sein de la majorité. A la fin, le dirigeant de la Ligue, Salvini, finira par promettre leur retrait. U épisode qui survient au moment où Bruxelles valide avec des réserves la loi de finances qui ‘’n’est pas pleinement en ligne’’ avec les recommandations européennes. Les trois amendements de la Ligue concernent les institutions locales, la justice et les frontaliers. La première réaction a été celle de Forza Italia : au sein du parti il y a de ‘’la surprise et de l’irritation’’ puisque ‘’c’est Salvini lui-même qui avait dit en premier qu’il n’y aurait pas d’amendements’’. Dans la soirée, c’est Meloni qui, irritée elle aussi, contactera téléphoniquement Salvini pour lui demander des explications. ‘’Je n’étais absolument pas au courant’’ assure ce dernier ‘’je les ferai retirer immédiatement’’. Toutefois, la rupture demeure. Le blocus parlementaire, avec 2 650 amendements présentés par les partis d’opposition, entraînera un léger report de la date initialement prévue pour l'examen de la loi de finances au Sénat, qui passera à la Chambre des députés à la mi-décembre. Toutefois, le gouvernement et la majorité restent confiants quant à la conclusion de la loi budgétaire avant Noël, confortés par l'avis de la Commission européenne qui a donné un feu vert conditionnel au texte présenté. Le responsable économique du Parti démocrate, A. Misiani, explique le contenu de leurs amendements : des mesures pour défendre l’emploi, le pouvoir d’achat, le salaire minimum, renforcer les investissements pour la transition écologique des entreprises et la rénovation énergétique des bâtiments publics, renforcer les ressources pour la Santé et le transport public local. ‘’les ressources peuvent être trouvées là où le gouvernement n’a pas le courage de le faire : à travers la lutte contre la fraude fiscale, la révision des dépenses’’ a affirmé Misiani. »
ENTRETIEN Sole 24 Ore, de Carlo Nordio (Frères d'Italie), ministre de la Justice : « La violence faite aux femmes représente un échec pour l’Etat. La prévention est cruciale » : « Nous devons investir dans la prévention de la violence contre les femmes. Tout délit est une défaite de l’Etat, ce genre de délits est une défaite collective. L’histoire de Giulia et de Filippo devrait nous faire réfléchir : Giulia pourrait être la fille de chacun d’entre nous, tout comme Filippo. Si nous voulons que Giulia soit la dernière victime, nous devons nous occuper des filles comme des garçons. Les signaux d’alerte sont multiples et nous les connaissons bien. Avec le guide que nous sommes en train d’élaborer au ministère de la Justice et qui sera diffusé dans les universités, les écoles et les lieux de travail, nous voulons contribuer à une éducation constitutionnelle au respect. L’objectif est d’expliquer avec des mots simples quand il faut s’inquiéter et comment réagir, mais aussi de diffuser la connaissance des termes juridiques. Nous voulons par exemple expliquer quand il s’agit d’harcèlement et pas d’un simple intérêt mais aussi faire comprendre quand certains textos peuvent cacher une obsession pouvant dégénérer en agressivité. Le texte que le Sénat s’apprête à adopter aujourd’hui porte sur une série de normes visant à améliorer le cadre existant en agissant sur les délais et sur le risque : agir rapidement et savoir évaluer le danger réel afin de d’éviter la spirale de violence. Accélérer la réponse de la justice et rendre plus efficace les bracelets électroniques ou les instruments comme les avertissements d’un juge et le renforcement des mesures de prévention. La numérisation est elle aussi fondamentale et pour les cas de violence de genre, j’estime importante la possibilité pour les institutions judiciaires de relever les données statistiques telle la relation entre la victime et l’auteur du délit, cela afin de mieux contrôler le phénomène. »
ENTRETIEN, La Stampa, de D. Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne, ‘’L’UE continuera à surveiller les comptes de l’Italie, nous sommes prêts à lancer une procédure [pour déficit excessif] au printemps prochain » : « La Loi de finances de l’Italie n’est pas pleinement conforme aux indications budgétaires concernant la hausse des dépenses primaires nettes qui seront plus élevées que les recommandations pour 2024. Il y a aussi les mesures censées contenir la hausse des prix de l'énergie. La Loi de finances italienne prévoit bien une réduction des dépenses mais en même temps, les dépenses publiques augmentent, ce qui signifie qu'en 2024, les économies réalisées ne sont pas utilisées pour réduire le déficit, comme nous l'avions demandé, mais pour financer d'autres dépenses. Nous continuerons donc à surveiller la politique budgétaire et, comme nous l'avons fait avec tous les autres pays qui ne se conforment pas pleinement à nos recommandations, nous demanderons de prendre les mesures nécessaires. Nous avons appelé à une réduction progressive des mesures d’aide face aux prix de l'énergie, mais en même temps nous avons donné plus de flexibilité sur les aides publiques, ce sont des sphères bien distinctes. Il existe par ailleurs des fonds européens pour aider les États membres à relever ces défis (RepowerEU, Plan de relance). La mise en œuvre du Plan de Relance italien se poursuit à un bon rythme et, en fait, l'Italie a déjà soumis sa quatrième demande de paiement, ce qui n'est pas le cas de beaucoup d'États. Il est important de ne pas perdre d'élan concernant les réformes et les investissements après les changements de calendrier. La Commission a l'intention d'ouvrir les procédures pour déficit excessif au cours du cycle semestriel européen 2024 sur la base des chiffres définitifs de 2023. Si elle est finalisée au plus tard au printemps, la réforme du Pacte sera la base juridique du cycle semestriel européen 2024 et des lignes budgétaires que nous fournirons aux États pour préparer les manœuvres de 2025. Pour la Commission, l’important est de se concentrer sur le moyen terme, faire une analyse basée sur le risque afin de déterminer les plans budgétaires structurels, et enfin laisser une plus grande marge de manœuvre aux Etats pour définir leur trajectoire budgétaire. Bien sûr, cela implique une transparence totale et un traitement équitable des États. Je suis globalement optimiste quant à la possibilité de finaliser ces négociations car il y a un engagement constructif de la part de tous les Etats et une prise de conscience sur la nécessité de réformer les règles de notre gouvernance économique afin de pouvoir les appliquer de manière plus flexible, mais aussi plus rigoureuse".
COMMENTAIRE, La Repubblica, de S. Folli, « Où amène le pacte entre Rome et Berlin » : « Le ‘’Pacte d’action’’ entre l’Italie et l’Allemagne signé aujourd’hui à Berlin par les deux chefs de gouvernement, Scholz et Meloni, est une étape significative. D’ailleurs, il aura aussi des retombées sur le débat de politique intérieure qui peine à se libérer d’un certain provincialisme. D’abord, pour ce qui est des choix de ce gouvernement de centre-droit vis-à-vis de l’Europe, il est évident que cette entente avec l’Allemagne découle du gouvernement Draghi. Dès le début, la politique étrangère de l’actuel gouvernement s’est inscrite dans le cadre classique promu par Mario Draghi, en partie dans le but de faire oublier la période Giuseppe Conte. On pense notamment au soutien à l’Ukraine puis à Israël. Le pacte qui sera signé aujourd’hui a aussi été préparé par la relation construite entre Meloni et von der Leyen, bien que Fratelli d’Italia n’avait pas voté pour elle comme présidente de la Commission. L’idée de fond est que l’Occident se réalise dans la communauté euro-atlantique, soir l’UE et l’OTAN, mais aussi dans l’appartenance à des valeurs démocratiques communes. Lorsqu’elle était à l’opposition, Giorgia Meloni était froide vis-à-vis de ces principes et une certaine froideur demeure, pourtant, malgré certaines contradictions qui persistent, elle a largement édulcoré son souverainisme. C’est une question de réalisme et de convergence des intérêts. Scholz n’aurait jamais signé un tel pacte avec un gouvernement sur la ligne de l’AfD, de même que la Meloni de l’opposition se serait bien gardée d’avoir l’Allemagne comme interlocuteur privilégié en Europe. Matteo Salvini doit être bien amer, alors que la Ligue reste fidèle au vieil euroscepticisme et cultive ses relations avec le parti AfD, adversaire de Bruxelles. Attention, l’accord d’aujourd’hui ne marque pas la fin de la campagne en vue des européennes de juin pour lesquelles Fratelli d’Italia et la Ligue seront formellement ensemble pour s’opposer aux libéraux et aux socio-démocrates. Toutefois un champ d’intérêts communs a émergé, comme sur les migrants, on l’a vu avec l’accord avec l’Albanie que les Allemands suivent avec intérêt. Un nouveau chapitre des relations européennes s’ouvre, dont la Présidence italienne du Conseil profitera alors que Salvini reste un partenaire mineur qui tentera de prendre sa revanche sur d’autres aspects politiques. Au centre-gauche, la droite de Meloni cesse d’être ‘’imprésentable’’ et n’est plus isolée en Europe. Les difficultés et l’attention de Bruxelles persistent, mais elle s’est normalisée. C’est à l’opposition de revoir sa politique européenne. Meloni devra réussir à ne pas se contredire et à se montrer à l’aise avec un ‘’européisme critique’’ qui ne soit pas destructeur. »
(Traducteur : ambassade de France à Rome)
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