"L’entente entre Meloni et Giorgetti pour limiter les dépenses des "collègues"."
29/08/2023
Italie. Revue de presse.
L’intervention de Giorgia Meloni sur la loi de finances lors du Conseil des ministres d’hier fait les gros titres : « L’automne de la rigueur budgétaire » (La Repubblica), « Loi de finances : l’avertissement aux alliés » (Corriere della Sera), « Une loi de finances sans gaspillages » (Il Messaggero), « Entente Meloni (Frères d’Italie)-Giorgetti (Ligue) : priorité à la baisse des charges sociales et coupe des dépenses superflues » (Il Sole 24 Ore). L’interview de Volodymyr Zelensky à la télévision ukrainienne évoquant une « solution politique sur la Crimée » et les fortes intempéries dans le nord de l’Italie sont également citées en une.
Les JT couvrent essentiellement l’arrivée du cyclone subtropical méditerranéen dans le sud de la péninsule, le Conseil des ministres qui s’est réuni hier portant notamment sur la loi de finances, avec l’annonce de la priorité donnée aux familles et aux entreprises et le déplacement annoncé de Giorgia Meloni à Caivano, près de Naples.
ARTICLE, Corriere della Sera, M. Galluzzo, “Meloni en Conseil des ministres : faire plus et mieux. Moins de gaspillage. Le Superbonus est une escroquerie” - “Migrants, nous allons dans la bonne direction. La réforme constitutionnelle est prête” : “Meloni fixe aux ministres deux objectifs pour l'année à venir : les élections européennes et le G7 organisé par l'Italie. Le consensus et la stabilité au sein de la majorité d'une part, l'image de l'Italie dans le monde et à l’égard de ses principaux partenaires. Mais le plus important, souligne-t-elle, c'est la loi de finances qui sera rédigée dans les semaines à venir et pour laquelle il faut suivre les indications du ministre de l'économie, "économiser, faire des sacrifices", car de nouvelles ressources sont nécessaires. Le premier choix l'année dernière, a été fait presque à la hâte, sous l'épée de Damoclès des coûts de l'énergie. Aujourd'hui, le contexte est différent, la situation "reste difficile", avec l'héritage des "règles mal écrites sur le Superbonus”. 2024 "doit être l'année des grandes réformes", de la justice à la réforme constitutionnelle, jusqu'à l'autonomie différenciée. En ce qui concerne la réforme constitutionnelle, pour laquelle "la ministre Casellati est prête", elle affirme qu'elle donnera "de la stabilité aux gouvernements et des pouvoirs de décision aux citoyens sur qui doit gouverner". Toutefois, le discours revient sur le budget, avec l’objectif de "soutenir la croissance, aider les plus faibles, le taux de natalité, donner de l'élan à ceux qui produisent et à mettre de l'argent dans les poches des familles et des entreprises". Giorgetti ouvre également à l'hypothèse de nouvelles privatisations, et précise que le montant des ressources disponibles dépendra également des négociations en cours sur le nouveau Pacte de Stabilité, avec "l'hypothèse probable qu'un nouveau Pacte soit adopté d'ici la fin de l'année". Un discours partagé par Meloni : “jusqu'à présent nous avons obtenu des résultats meilleurs que ceux de l'Allemagne et de la France, les marchés ont récompensé nos choix” mais tout cela ne suffit pas. Et se montrer plus sévères à l'égard des migrants irréguliers : "La direction prise est la bonne : des accords avec les pays nord-africains de départ et de transit des migrants irréguliers ont été conclus. Mais il est nécessaire d'ajouter à des accords avec les pays d'Afrique du Nord. Il faut donner des signaux clairs aux trafiquants et nous avons besoin de plus de coordination”.
COULISSES, Corriere della Sera, M. Cremonesi, “L’entente entre Meloni et Giorgetti pour limiter les dépenses des “collègues”” : “Les nuages dans la relation entre Giorgia Meloni et le ministre de l'économie Giancarlo Giorgetti semblent s’être dissipés si l'on en croit le Conseil des ministres d'hier soir. En effet, elle lui a confirmé de manière explicite sa confiance. "Je suis d'accord", a-t-elle dit, sur la demande du ministre Giorgetti d'inviter chaque ministère à vérifier en détail les ressources actuellement disponibles, les chapitres de dépenses, les mesures actuellement financées. "Je dis cela parce que le gaspillage et les inefficacités doivent être réduits et le peu de ressources dont nous disposons doit être dépensé le mieux possible”. En bref, la première ministre a réitéré sa confiance en Giorgetti pour ce qui est de la politique. Giorgetti n’a pas donné de chiffres hier soir, il aurait sinon rappelé la première échéance importante, la présentation de la Note d'actualisation du document économique et financier (Nadef) pour le 27 septembre. Or, peu avant, les 15 et 16 septembre, se tiendra à Saint-Jacques-de-Compostelle une réunion informelle de l’Ecofin. A partir de là, on pourrait avoir des indications sur la possibilité d'ajouter une ou deux décimales au déficit prévu pour l'année prochaine, fixé à 3,7 %, mais les décimales comptent pour des milliards. "Le ministère de l’économie est au travail, nous déciderons ensemble des interventions à privilégier, avec rigueur et en faisant attention à l'équilibre du budget de l'Etat. En résumé : celui qui protestera devra alors traiter directement avec Giorgia Meloni.”
ENTRETIEN, La Repubblica, de Guido Crosetto (Frères d’Italie), Ministre de la défense, « Il faut changer le pacte de stabilité, c’est une épée de Damoclès sur le budget italien" par Giuseppe Colombo : « "Dans les journaux, je lis des calculs effectués sur le Document économique et financier (Def), qui font état d'un manque de 20 milliards, mais le budget se construit à partir de la note de mise à jour du Def. J'attendrais plutôt cette dernière pour comprendre les besoins réels en matière de politique économique. La question n’est pas de demander à faire plus de déficit à Bruxelles. L'épée de Damoclès, pour 2024, c'est le retour aux règles originelles du pacte de stabilité. En période de crise économique et industrielle, je crois qu'il est impossible de soumettre à nouveau le budget des États aux règles classiques. Il faut changer la nature du débat : le monde a changé. D'énormes changements sont en cours : la transition écologique, la pénurie de matières premières et l'avancée des Brics obligent à redéfinir les paramètres du pacte de stabilité à partir d'un raisonnement purement technique. Nous avons besoin d'une vision de politique macroéconomique qui se projette au moins sur les 10-15 prochaines années. Nous avons besoin d'un mélange de solutions. Si nous voulons attirer des investissements dans certains secteurs cruciaux pour l'avenir de l'Europe, comme la transition industrielle et numérique ou d'autres dépenses, nous devons exclure ces investissements du pacte de stabilité. Il n'est plus temps de dire "on a toujours fait comme ça". Nous avons besoin d'une approche responsable, pas d'une approche à courte vue". S’agissant de la France [comme potentiel allié sur la réforme du pacte et les différences d’approche sur le Niger], « je n'ai jamais dit qu'il fallait trouver une voie diplomatique avec les putschistes. Au contraire. J'ai demandé et reçu des informations sur les dangers possibles pour le contingent militaire italien, ma première préoccupation, et j'ai demandé si leur attitude [à notre égard] était belliqueuse ou tolérante : elle était tolérante. De toute façon, la décision sur ce qu'il faut faire au Niger doit être prise en commun et au niveau européen, elle ne peut pas être décidée par un seul pays. Il n'y a pas de difficulté avec la France, il y a une approche différente de la politique étrangère entre deux pays". Concernant les règles du pacte, “la question intéresse également la France. Si nous parvenons à rassembler davantage de pays, nous pourrons définir une ligne plus forte et espérer qu'elle devienne celle de l'ensemble de l'Europe. Mais pour arriver à 27 pays, il faut commencer par un, puis deux, trois, et ainsi de suite". Concernant les propositions sur le budget, la direction est donnée par le président du Conseil en accord avec le ministre de l'économie. Les propositions sont faites par tous les ministres, puis il faut une synthèse, que l'on retrouve dans en Conseil des ministres où le premier ministre est le primus inter pares. Il ne s'agit pas seulement de se concentrer sur les ressources à trouver : l'action du gouvernement doit porter sur la construction d'un cadre économique pour pousser les investissements et faire croître le PIB". “La taxe sur les banques a une logique contingente. Nous vivons dans un pays où le secteur a enregistré des profits sans précédent, plus élevés que prévu, et où les familles paient des taux d’intérêt sur les emprunts sans précédent : un transfert s'impose. Il ne s'agit pas d'une diabolisation des profits, mais d'une intervention, limitée dans le temps". "Dans une phase de crise économique et sociale, comme celle que traverse ce gouvernement, le premier devoir est de mettre en sécurité la partie du pays qui est en danger de mort. Si je n'ai pas d'argent pour tout le monde et que j'ai une famille de cinq enfants, je choisis d'aider les plus faibles". [Concernant l’affaire Vannacci], avec la présidente du Conseil, “Nous nous sommes parlé à plusieurs reprises pour diverses raisons. Une intervention publique de sa part n'était pas nécessaire". »
ARTICLE, La Stampa, F. Amabile : « Sur les migrants, la présidente du Conseil court-circuite les ministres. Mantovano désigné pour gérer la crise » : « L’été record des débarquements entraîne un premier changement de direction de la part du gouvernement dans la gestion des arrivés de migrants. La présidente Meloni admet les difficultés : ‘’ L’Italie subit une pression migratoire inédite depuis des années, suite aussi aux événements récents, et moins récents, au Sahel. En ouvrant le premier Conseil des ministres après la pause estivale, elle a annoncé un changement avec la centralisation des pouvoirs sur la gestion des migrants autour d’un nouvel organisme, qui redimensionne dans les faits le rôle des ministres Piantedosi (Indépendant), Salvini (Ligue) et Tajani (Forza Italia). ‘’ Nous faisons beaucoup mais il est essentiel que les ministres puissent mieux se coordonner entre eux. Le Comité interministériel pour la sécurité de la République est l’organisme qui peut assurer cette coordination, il est désormais convoqué de façon permanente, avec la présence de tous les ministres concernés par le sujet de l’immigration. Notre objectif est de faire face au problème de façon pragmatique, avec des décisions rapides et coordonnées. Le secrétaire d’Etat à la Présidence du Conseil, Alfredo Mantovano (Indépendant, autrefois Alliance Nationale), est chargé de la gestion du Comité. Le ministre Piantedosi tente de se justifier : ‘’ Il y a des signaux encourageants, la courbe a baissé, la collaboration avec la Tunisie n’est pas encore suffisante, mais 171% de départs supplémentaires ont été évités grâce à Tunis par rapport à l’année dernière : on parle de 43.126 personnes à la date du 22 août contre 15.925 l’année dernière. ‘’ Les arrivés de migrants non accompagnés sont en hausse ; hier, une petite fille de sept ans venant du Nigeria a débarqué seule. »
Alfredo Mantovano
ARTICLE, La Stampa, M. Bresolin, « Le refus de solidarité européenne sur l’immigration par les pays du groupe de Visegrad » : « Le mécanisme de solidarité pour aider les pays les plus exposés aux flux migratoires ne fonctionne pas en période normale, pas plus dans les “situations de crise”, c’est-à-dire quand un Etat est exposé à une forte hausse des arrivées de migrants, comme c’est le cas en ce moment à Lampedusa. Les gouvernements polonais et hongrois restent intransigeants sur la réforme des règles européennes sur l’asile, tout comme sur le dernier règlement visant à compléter le puzzle du Pacte européen sur l’immigration, et celui définissant les règles à appliquer et les dérogations à introduire en situation de crise. L’Autriche et la République tchèque y sont également fortement opposées, le premier ministre tchèque Pietr Fiala étant pourtant un des plus solides alliés de Giorgia Meloni au sein des Conservateurs. Lors de la dernière réunion du Conseil, il n’avait pas été possible d’arriver à un accord à cause de l’abstention de l’Allemagne et des Pays-Bas, sceptiques sur la possibilité d’étendre les dérogations à des cas d’“instrumentalisation” des migrants par des pays tiers. Désormais l’Espagne, qui assure la présidence du Conseil de l’UE, devra mettre sur la table un nouveau compromis, mais l’opposition du bloc de l’Est est nette. Trouver un accord entre les gouvernements sur ce règlement est fondamental car cela risque autrement de bloquer l’ensemble du processus de négociation avec le Parlement européen sur les autres propositions législatives du Pacte, celles approuvées par le Conseil en juin, qui d’une part introduisent la “solidarité obligatoire” et de l’autre imposent plus de contraintes en termes d’enregistrement pour les pays de débarquement. L’Italie voudrait par exemple assouplir ces contraintes en cas de flux importants. La motivation est simple : face à une forte hausse des arrivées, les structures ne sont pas en mesure de garantir un enregistrement rapide. Pour cela, le gouvernement italien espère obtenir une dérogation sur la “procédure de frontière”, le nouveau système d’examen accéléré des demandes (12 semaines maximum) qui devra s’appliquer obligatoirement pour tous les demandeurs d’asile provenant d’un pays dont le taux de reconnaissance des demandes d’asile est inférieur à 20 %. Pas question pour les gouvernements autrichien, polonais, et hongrois, qui s’opposent à l’extension de la période maximale au cours de laquelle s’effectuent les enregistrements car craignant la création de “mouvements migratoires secondaires”. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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