"La première souverainiste qui entre dans le Bureau ovale, ainsi Meloni a doublé Orban et Bolsonaro."
29/07/2023
Italie. Revue de presse.
La visite de Giorgia Meloni aux États-Unis fait la Une des différents médias. Dans les quotidiens, l’harmonie affichée avec Biden est mise en avant : « Meloni chez Biden, l’Occident n’a jamais été aussi uni » (Corriere della Sera), « ‘Giorgia et moi sommes amis’ dit Biden ; le plan stratégico-commercial anti-Chine » (La Repubblica), « L’américaine » (La Stampa), « Meloni aux Etats-Unis : ´un lien étroit’ » (Il Messaggero). Plusieurs journaux titrent également sur la révision du Plan national de Relance avec la modification et l’abandon de certains projets initialement prévus, et notamment la coupe de fonds destinés à l’environnement, « PNRR, les coupes sur l’environnement » (La Repubblica), « Les catastrophes environnementales ne figurent plus dans le PNRR » (La Stampa), « Le nouveau PNRR, 144 objectifs changent, 16 milliards d’euros de projets sont abandonnés » (Sole 24 Ore).
Les JT couvrent essentiellement la visite de Giorgia Meloni aux Etats-Unis et sa rencontre avec le Président Joe Biden, les incendies qui se multiplient dans le sud de l’Italie, frappant également les Pouilles et la Sardaigne en plus de la Sicile, la nouvelle vague de chaleur attendue au Sud de la Péninsule alors que les intempéries risquent de se poursuivre au Nord, et la révision du Plan de Relance italien.
ARTICLE, Corriere della Sera, d’E. Marro, « Changements dans le PNRR, transfert de 16 milliards d'euros - Moins pour les communes, plus pour l'énergie » : « Alors que le président de la République, Sergio Mattarella, renouvelle son appel sur le PNRR à ‘’mettre tout le monde au pas’’, car ‘’tout échec serait une défaite pour l'Italie’’, le gouvernement réécrit le Plan de relance et de résilience, modifiant 144 projets sur les 349 restant à réaliser jusqu'en 2026. Le PNRR comprend également le chapitre RepowerEu visant à accélérer la transition verte et l'autonomie énergétique du pays, avec des investissements massifs dans les infrastructures - en s'appuyant sur les filiales publiques Enel, Eni, Terna et Snam - et la mise en place de nouveaux Ecobonus pour les ménages et les entreprises qui investissent dans les économies d'énergie. Le ministre des Affaires européennes, Raffaele Fitto, a expliqué qu’à l'issue de la réunion de la ‘’Cabina di Regia’’ [ndt : réunion entre membres du gouvernement et experts] qui a reformulé le Plan, le gouvernement entend ne plus se retrouver dans la situation de la dernière loi de finances, lorsque sur un budget total de 35 milliards, 21 milliards ont dû être utilisés pour réduire les factures. Les marges de manœuvre pour le prochain budget étant déjà limitées, le gouvernement tente de dégager une partie des ressources précisément dans la réécriture du PNRR. Les maires se plaignent. M. Fitto garantit que le financement sera transféré vers d'autres fonds à plus long terme : les fonds de cohésion et de développement, ainsi que le fonds complémentaire du PNRR, doté de 30,5 milliards. L’idée serait de mettre ces interventions à l'abri du risque de ne pas être financées par l'Europe. Le PNRR, en effet, prévoit des contrôles très stricts et si les interventions prévues dans le plan ne sont pas réalisées, le financement correspondant est perdu. C'est pourquoi, sur la base des difficultés de dépenses rencontrées jusqu'à présent, Fitto estime qu'il est plus sage de déplacer ces interventions vers d'autres fonds, qui ne sont pas soumis à la date butoir de 2026. Toutefois, cette thèse ne convainc pas les oppositions, notamment en ce qui concerne la suppression du financement des mesures de lutte contre l'instabilité hydrogéologique, au moment même où les intempéries causent de graves dommages dans la moitié nord de l'Italie. "Ils ont supprimé 16 milliards de fonds pour l'entretien du territoire, le Sud et les infrastructures. C'est la démonstration de l'incompétence du gouvernement", attaque l'ancien ministre Vincenzo Amendola (PD). Après les décisions d'hier, la balle est maintenant dans le camp de Bruxelles. Le gouvernement soumettra la proposition de révision globale du PNRR à la Commission européenne, qui pourra l'accepter ou demander des modifications. Entre-temps, Rome attend que l'UE débloque le paiement de la troisième tranche du plan de 18,5 milliards et qu'elle approuve les dix corrections demandées pour les objectifs de la quatrième tranche, ce qui lui permettrait de demander le versement de 16,5 milliards au cours de l'année. M. Fitto fera rapport au Parlement mardi. »
COMMENTAIRE, La Repubblica, de F. Bei, « Le climat peut attendre » : « Alors que la rencontre Meloni-Biden était sur le point de commencer, les Présidents américain et italien, Joe Biden et Sergio Mattarella, lançaient, presque au même moment, des alertes semblables. Le changement climatique représente une ‘’menace existentielle’’ a dit le premier, alors que le second qualifiait de ‘’surprenante’’ la remise en question du niveau d’alerte par certains. Et pourtant, le gouvernement italien est inconstant et ses politiques sont contradictoires. En témoigne la révision, hier, du Plan national de Relance qui a abouti au transfert de projets à hauteur de 16 milliards d’euros, pour la plupart liés à l’environnement, à la dégradation hydrogéologique, à la gestion du risque d’inondation, à l’hydrogène, aux espaces verts en ville et en périphérie. Et ce malgré les affirmations de la présidente du Conseil sur la nécessité d’un ‘’vaste plan de prévention hydrogéologique’’. Le ministre Raffaele Fitto s’est bien sûr efforcé d’expliquer que la suppression n’était pas définitive, que les projets en question seraient financés plus tard, par d’autres fonds. Mais nous sommes en Italie : en attendant les coupes ont bien eu lieu et il n’y aucune garantie pour la suite. La Présidente du Conseil, malgré un été de tous les records, ne parvient pas encore à trouver les mots pour prendre une position claire et nette sur la question, à en faire une priorité nationale. Si elle ne veut pas écouter Biden et Mattarella, elle pourrait au moins entendre les présidents des régions Vénétie et Sicile, appartenant à sa majorité, ou son ministre responsable de la Protection civile, Nello Musumeci. Mattarella l’a dit : ‘’un éventuel insuccès ou un résultat même partiel ne serait pas seulement un échec du gouvernement mais de toute l’Italie. C’est ainsi que cela serait interprété hors de nos frontières et ce serait la réalité’’. Le gouvernement doit changer d’approche et cesser de voir le PNNR comme une contrainte imposée par la ‘’méchante’’ Europe, il doit demander à l’opposition une contribution vraie et sincère, entendre les préoccupations des maires à qui revient l’application concrète du Plan. Et cesser de rejeter sur le gouvernement précédent la responsabilité de sa propre inefficacité. »
ARTICLE, La Stampa, U. Magri, « Mattarella : ‘’Le Parlement ne doit pas exercer de manière abusive le rôle de la magistrature’’ » : « La Chambre des députés vient de donner son feu vert à l’institution d’une commission d’enquête parlementaire sur le Covid avec l'intention manifeste de juger les gouvernements de l'époque. Mattarella en fait une question de principe et l’a dit clairement : pas de superposition des champs de compétence : "ce ne sont pas les Chambres qui peuvent vérifier, évaluer, juger de la conformité à la Constitution des lois que le Parlement a lui-même approuvées", précise le président. Sur le changement climatique, Mattarella s’est étonné des "nombreuses discussions sur le les risques" qu’il engendre. Sur la liberté de la presse, sa réponse a été cinglante : "Il serait trompeur d'imaginer que des organismes tiers puissent être nommés "certificateurs" de la légalité des flux d'information". Un décret du secrétaire d’Etat A. Barachini vient d'entrer en vigueur, introduisant pour les agences de presse la figure d'un "garant" externe, chargé de se prémunir contre la diffusion de "fake news". Selon des sources gouvernementales, les doutes du président ont provoqué une concertation immédiate entre le gouvernement et le Quirinal, hier soir, afin de dissiper tout risque de censure. En revanche, il a exprimé sa reconnaissance à Giorgia Meloni pour la manière dont le gouvernement agit en matière d'immigration : travailler pour l'Afrique et chercher des solidarités en Europe au lieu de s'opposer les uns aux autres de manière stérile. ‘’La prise de conscience de devoir gérer le phénomène au niveau européen, a déclaré le président, est une réussite, un point fondamental d'une grande importance. Mieux vaut tard que jamais.’’ »
ARTICLE, Corriere della Sera, de M. Galluzzo, « De l'Afrique à la guerre, la présidente du Conseil, après des débuts difficiles, est devenue l’amie des Etats-Unis. Le gouvernement américain ne tarit pas d'éloges sur son rôle en Méditerranée » : « Il y a dix mois à peine, Joe Biden laissait échapper une phrase peu diplomatique. Giorgia Meloni venait d'être élue, il a dit sans ambages ‘’Avez-vous vu ce qui s'est passé en Italie ?’’ - comme pour dire mauvaise nouvelle, c'est une victoire qui ne nous plaît pas, une droite qui ne nous convainc pas. On se croirait à une autre époque, car hier après-midi, à peine assis dans les fauteuils du bureau ovale, il a corrigé son jugement : ‘’Nous sommes devenus amis’’. Le président des États-Unis offre à G. Meloni la reconnaissance qu’elle recherchait, en soulignant l'alignement parfait des relations transatlantiques, la position commune sur Kiev, les progrès presque parallèles dans les relations avec la Chine, l'appréciation, et même la promesse de soutien, pour ‘’l'excellent et surprenant travail que le gouvernement italien est en train de faire en Méditerranée et en direction de l'Afrique’’. Lorsque Meloni est entrée à la Maison Blanche, elle sortait tout juste de ses réunions au Congrès. Là aussi, il y a eu une reconnaissance, en l'occurrence bipartisane, de certains traits qui allaient bien au-delà des attentes. Le leader républicain Kevin McCarthy, en visite à Rome il y a quelques semaines, l’a fait même rougir en lui disant qu'elle est ‘’une leader capable de regarder vers l'avenir’’. Et elle rend hommage à ses propos en appelant le Congrès ‘’le temple de la démocratie’’, donnant la sensation d'avoir franchi un cap supplémentaire, après dix mois de politique étrangère et des dizaines de sommets, de réunions internationales, de présentations. Le Washington Post souligne que Meloni est, parmi les dirigeants de droite, l’une des rares à entrer à la Maison Blanche, ce qui n’est pas le cas de Bolsonaro ou Orbán. Trois ou quatre points sont considérés comme stratégiques dans la discussion entre Meloni et Bident : le contenu du sommet du G7 à Rome l'année prochaine sera partagé et évalué ensemble, étape par étape ; la position vis-à-vis de la Chine ; l'investissement dans les chaînes industrielles qui sont stratégiques parce qu'elles sont nécessaires pour que l'Occident retrouve une autonomie économique, perdue ces dernières années en hommage à la mondialisation ; la position commune sur la guerre ; le dépassement américain des perplexités sur le premier dossier de la diplomatie italienne. C'est-à-dire le rapport avec l'Afrique, une plus grande implication de l'OTAN et de l'administration américaine dans cette région du monde également. Tant pour arrêter les flux migratoires que pour ne plus laisser d'espace à la Chine et à la Russie dans cette région du monde. M. Biden le mentionne explicitement, même devant les caméras, et c'est ce que le Palais Chigi avait demandé lors de la préparation de la visite. Pour notre gouvernement et notre diplomatie, il s'agit d'un signal important, significatif d'un tournant qui n'était pas acquis d'avance. »
COMMENTAIRE, La Stampa, A. Simoni : « La première souverainiste qui entre dans le Bureau ovale, ainsi Meloni a doublé Orban et Bolsonaro » : « Le déjeuner en l'honneur de Giorgia Meloni au Capitole, que Kevin McCarthy a offert aux membres du Congrès américain, montre l’essence du lien fort entre les États-Unis et l'Italie. Le Speaker de la Chambre affirme que la Présidente du Conseil "est l'un des dirigeants qui ont le plus impressionné les États-Unis ‘’, et il s’agit d’une opinion qui est transversale à la politique américaine. Meloni, qui se rendra ce matin au cimetière d'Arlington pour déposer une gerbe en l'honneur des soldats tombés au combat, a revendiqué, lors d'une conférence de presse, sa proximité avec le Parti républicain, expliquant que son identité conservatrice reste toutefois en arrière-plan lorsqu'il s'agit de protéger et de défendre les intérêts italiens et qu'elle "a une très bonne relation avec Biden". Et, après la rencontre bilatérale avec Biden, le sentiment d'harmonie et d'alignement sur les grands dossiers est confirmé. La collaboration avec Biden est forte, comme le prouve le document commun publié par la Maison Blanche dans la soirée : un long résumé des dossiers - de l'OTAN à l'agenda du prochain G7, du partenariat hi-tech au green deal - sur lesquels Rome et Washington se trouvent d’accord. Biden apprécie le "soutien clair et sans équivoque à l'Ukraine" manifesté par Meloni et a rappelé "les efforts italiens pour l'assistance humanitaire et la protection de plus de 170 000 Ukrainiens". Depuis des mois, Washington observe les mouvements italiens sur la "route de la soie" chinoise, mais comme l'a déclaré à La Stampa un porte-parole du département d'État, " la décision sur quand sortir de l’accord appartient uniquement au gouvernement italien ", en précisant que personne ne s'attendait à des accélérations sur ce sujet au cours de la bilatérale. Lors de la conversation avec les délégations dans le bureau ovale, Meloni a réitéré ce qui, depuis des mois, dans d'autres contextes internationaux et dans les contacts téléphoniques, a été abordé et discuté avec les émissaires américains, à savoir qu'il est dans l'intérêt de l'Italie d'abandonner l'accord signé à la fin de l'année. Une alternative à la Route de la Soie existe déjà. Il s’agit du Partenariat pour des investissements et des infrastructures mondiaux (PGII) qui a été annoncé l’année dernière au G7 en Bavière. »
Giorgia Meloni er Joe Biden
ARTICLE, Corriere della Sera, L. Cremonesi, « Kiev gagne du terrain. Vladimir Poutine promet du blé à l’Afrique » : « Il semble que, près de deux mois après son début, la contre-offensive ukrainienne soit passée de la phase préliminaire du test des défenses russes à une phase beaucoup plus affirmée. Surtout dans le secteur plus oriental, au nord de Marioupol, où les troupes ukrainiennes se sont emparées du village de Staromaiorske dans la région de Donetsk. Ce serait la victoire la plus importante depuis plus d’un mois. Vladimir Poutine lui-même, qui était hier à Saint-Pétersbourg pour le sommet Russie-Afrique, a admis que « les échanges de tir se sont intensifiés de manière significative ». Poutine cherche entre-temps à marquer des points auprès des pays africains après le mécontentement de la communauté internationale sur son choix de boycotter l’accord sur le blé ukrainien. Au sommet de Saint-Pétersbourg, où seuls 17 dirigeants africains étaient présents, contre 43 en 2019, il a promis d’envoyer gratuitement 50000 tonnes de blé au Burkina Faso, au Zimbabwe, au Mali, en Somalie, en Érythrée et en République centrafricaine au cours des trois prochains mois. Son but avoué est de lancer des initiatives d’assistance pour ouvrir la voie à des contrats permettant à la Russie d’éliminer la concurrence ukrainienne. « J’ai déjà dit que nous pouvons remplacer le blé ukrainien, notamment parce que la récolte russe a été excellente cette année », a expliqué le président russe. La présence officieuse au sommet de Evgueni Prigojine, le chef putschiste de la milice mercenaire Wagner, qui rassure des pays clients comme le Mali et la République centrafricaine, a été remarquée.»
SONDAGES, La Repubblica, d’I. Diamanti, « Les Italiens et Poutine, le ‘’tsar’’ est plus faible, oui aux sanctions mais division sur l’envoi d’armes » : « Face à la guerre en Ukraine qui dure sans qu’aucune solution claire n’émerge, l’opinion publique italienne n’évolue pas. Une sensation d’habitude, voire de résignation semble prévaloir, alors que l’opinion négative vis-à-vis de Poutine croît. La peur de la guerre persiste et 9 personnes sur 10 se disent inquiètes, dont 48% très inquiètes. Pour plus de 6 Italiens sur 10, il est opportun de maintenir les sanctions contre la Russie, une opinion en légère hausse ces derniers mois mais moins diffuse qu’au début de la guerre. Environ la moitié des personnes interrogées approuvent les aides militaires à l’Ukraine, un chiffre constant depuis l’automne dernier. Les sanctions contre la Russie sont donc jugées utiles, la livraison d’armes à l’Ukraine un peu moins. 62% jugent que le leadership du Président russe s’est affaibli. Seuls 13% pensent qu’il s’est renforcé mais cet avis n’est partagé que par 4% de l’électorat du Parti démocrate alors qu’il atteint 31% parmi l’électorat de la Ligue et 23% des électeurs de Forza Italia. Des chiffres que l’on peut probablement expliquer par la relation de ‘’confiance’’ de leurs leaders respectifs avec le Président russe. Pour 15% des électeurs de Fratelli d’Italia de même que du M5S, Poutine s’est renforcé depuis le début de la guerre contre 56 et 59% estimant qu’il s’est affaibli. Dans l’ensemble, le sondage confirme que la distance géopolitique de l’Italie vis-à-vis de la Russie se creuse et qu’elle se cristallise autour de la figure de Poutine. Pour autant, cela ne va pas forcément de pair avec un sentiment de proximité avec l’Ukraine, bien que la guerre soit toute proche. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
Lors de sa visite aux États-Unis, Giorgia Meloni a rencontré Henry Kissinger.
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