"L’effet Zelensky sur une Italie divisée."
15/05/2023
Italie. Revue de presse.
La tournée européenne du président ukrainien V. Zelensky, sur fond de débat interne autour de l’envoi d’armes et d'incertitudes sur la reconduction de l’accord céréalier en Mer Noire, fait les gros titres « Zelensky à Berlin: Kiev gagnera d’ici la fin de l’année » (Corriere della Sera), « Conte : Meloni investit sur la guerre mais on risque ainsi un conflit nucléaire » (La Stampa), « Tajani : l’interruption de l’accord céréalier pourrait provoquer une crise migratoire » (Il Messaggero), « Le Pape François sermonne Zelensky : les armes mettent en danger la paix » (Fatto Quotidiano). « Elections présidentielles en Turquie, Erdogan contraint à un second tour » (Stampa, Messaggero, Repubblica). « Changements à la RAI : Fazio et Littizzetto s’en vont » (Corriere), « Les martyrs imaginaires : les deux artistes quittent la RAI pour un riche contrat avec Discovery et la gauche évoque l’épuration » (Il Giornale), « La honte pour la RAI, Fazio s’en va après 40 ans » (Stampa).
Volodimir Zelensky et Giorgia Meloni
ENTRETIEN, Corriere della Sera, de Giovanbattista Fazzolari, secrétaire d’Etat à la Présidence du Conseil « Le seul plan de paix existant aujourd’hui est celui des Ukrainiens. Nous ne les abandonnerons pas » par Paola di Caro : « [Avoir été en Ukraine] a été une expérience très forte. Le contraste entre les images de guerre qui semblent arriver de loin et la normalité d’un pays qui, de tout point de vue, est déjà en Europe, est impressionnant. Cela marque en profondeur. Il faut rappeler les trois dirigeants italiens qui ont choisi clairement et sans hésitation de soutenir Kiev : Mattarella, Draghi et Meloni. Dans les partis d’opposition, on remarque des positionnements, parfois peut-être pris pour des raisons de politique interne, du moment où ce gouvernement s’est placé du côté de l’Ukraine. Si Zelensky n’apparait pas favorable à un compromis, c’est sans doute car il est bien conscient de la réalité de la situation. Poutine a déclaré à maintes reprises vouloir revenir aux anciennes frontières historiques de la Russie. Que devraient-ils faire, les Ukrainiens ? Les « pacifistes », ceux qui demandent la « paix » devraient nous expliquer ce qu’ils proposent comme solution alternative, à part se défendre. Se rendre ? Céder une partie ou tout son territoire ? Invoquer aujourd’hui le cessez-le-feu signifie laisser des civils et des enfants à la merci de la violence de Poutine. Le cessez-le-feu est ce que demande aujourd’hui la propagande russe, et ce que répètent les pro-Poutine chez nous, déguisés en pacifistes. La seule voie pour une paix juste est le retrait des troupes d’invasion russe des territoires ukrainiens. Le plan de paix ukrainien est le seul concret, aujourd’hui. Celui de la Chine ne peut même pas être considéré comme un plan. Il ne fait aucune référence aux pays envahis, par ailleurs. Zelensky a remercié Meloni pour son soutien fort, qui n’était pas donné pour acquis puisque l’opinion publique italienne est beaucoup moins déterminée par rapport à d’autres comme le Royaume-Uni, la Pologne, les pays baltiques. C’est une visite extrêmement importante pour l’Italie, d’autant plus si on la considère dans le cadre de celle effectuée en Allemagne. Cela signifie que nous sommes perçus comme un des Etats qui comptent au niveau international. Cela n’a pas toujours été ainsi par le passé. Zelensky demande à l’Italie, comme aux autres pays alliés, le soutien sur le dossier ukrainien et la poursuite des aides humanitaires et militaires, comme nous le faisons en coordination avec l’UE et l’Otan. Nous sommes en train de fournir des réserves d’armements que nous n’utilisons pas et qui ne nous coûtent pas. A ce sujet, les insinuations de certains partis ne sont que de la propagande. Nous sommes favorables à l’entrée rapide de l’Ukraine dans l’UE. Quant à l’entrée dans l’Otan, qui serait une assurance de l’intégrité du pays, c’est une question que nous voulons voir ensemble avec nos alliés. Les opinions publiques occidentales risquent de commencer à penser que ce n’est pas notre guerre, par effet de la propagande russe et d’une ignorance de l’histoire. Cette guerre nous concerne plus que l’on croit. L’Europe vit dans la sécurité et le confort grâce à un équilibre mondial fait de règles et certainement pas de par sa capacité autonome à se défendre. Nous aurions beaucoup à perdre si la loi du plus fort devait s’imposer sur le droit international. Voilà pourquoi c’est aussi notre sécurité qui est en jeu en Ukraine.’’ »
ENTRETIEN, Il Messaggero, d’Antonio Tajani (Forza Italia), vice-président du Conseil et ministre des affaires étrangères, « Il y aura une nouvelle vague de migrants si on bloque la Mer Noire » par Francesco Bechis: « [Le non renouvellement de l’accord sur les céréales] est un scénario que je ne veux même pas envisager : c’est la vie de millions de personnes en condition de pauvreté qui serait mise en danger. Cela provoquerait une crise dans les pays d’Afrique centrale et sub-saharienne qui, ajoutée à la guerre au Soudan, pourrait provoquer une spirale migratoire très dangereuse. J’ai moi-même répété à l’ONU que l’accord pour un corridor en Mer Noire doit rester en place. Nous avons informé Zelensky que ce dossier, avec la situation de la centrale nucléaire de Zaporijjia, sont au centre de nos principales préoccupations. Nous sommes confiants sur la médiation indépendante de la Turquie. Pour nous, la Turquie demeure un interlocuteur fondamental dans l’Otan pour la stabilité de la Méditerranée et nous respecterons la volonté du peuple turc. […] Nous sommes en train de finaliser le dernier décret d’aides militaires à l’Ukraine. Nous évaluerons leurs demandes et quant aux munitions, nous agirons en coordination avec l’UE. Nous sommes en première ligne également sur le plan de la reconstruction. [Avec la France et l’Allemagne] nous sommes des partenaires au même niveau. L’Italie est en train de jouer à nouveau un rôle majeur en Europe. Raison pour laquelle nous rejetons les accusations et les insultes immotivés. Avec mon homologue Colonna, nous nous rencontrerons à la fin du mois à Oslo. Nous voulons de bonnes relations avec tous, à condition qu’il n’y ait pas de rapports de soumission. Nous ne pouvons pas accepter des offenses gratuites pour des raisons de politique interne. Sur le pacte de stabilité, nous construirons des alliances sur la base du bon sens.’’ »
ENTRETIEN, La Stampa, de Giuseppe Conte, dirigeant du Mouvement 5 Etoiles « Une stratégie de guerre qui ne fait que provoquer la destruction » par Andrea Malaguti : « ‘’La médiation du Pape peut ouvrir un chemin de pourparlers constructif, c’est un chemin que l’Europe et l’Italie doivent maintenir ouvert. J’ai remarqué que Mme Meloni a dit vouloir « miser » sur la victoire de l’Ukraine, promettant des fournitures militaires illimitées. Mais de cette manière on finit par accepter la possibilité d’un massacre sans fin et d’une escalade nucléaire. Ce que le ministre Tajani a dit, c’est-à-dire que c’est à l’Ukraine d’indiquer la voie pour un cessez-le-feu, est une attitude totalement erronée. Personne ne met en doute le droit de l’Ukraine à son intégrité territoriale. Ce qui ne signifie pas que nous ne devons pas créer les conditions pour s’assoir à la table des négociations. L’élan avec lequel l’exécutif Meloni investit sur l’envoi d’armes et de munitions semble cacher l’incapacité de pouvoir affronter les urgences des Italiens, allant du coût de la vie, la flambée des crédits fonciers, l’inflation et les contrats précaires. Nous les 5 Etoiles avons le courage de dire que cette stratégie militaire, qui a mis hors-jeu la stratégie de la négociation, ne provoque que la mort et la destruction. Je remarque qu’aujourd’hui l’Italie, en Europe comme à Washington, on est en train de se borner à suivre les indications données par d’autres.’’ »
SONDAGE, La Repubblica, d’I. Diamanti, « Les Italiens et la guerre ; les amis de Poutine minent la confiance, [panorama de l’opinion] sur Kiev comme sur Moscou » : « La politique étrangère influe de plus en plus sur la politique intérieure, source de polémique et de divisions, comme au sujet de la guerre en Ukraine évidemment, mais il y a aussi d’autres sources de discorde. C’est le cas par exemple des flux migratoires en provenance d’Afrique. On observe donc un changement du ‘’regard géopolitique’’ des Italiens. On n’observe pas de changements soudains ou profonds mais plutôt une mutation des points de vue, significative bien que limitée. La confiance et l’empathie vis-à-vis de l’Ukraine semblent retomber, bien que légèrement (de 40 à 36%), alors qu’à l’inverse la confiance envers la Russie est en légère hausse (de 7 à 11%). Cela explique en partie les raisons de la visite de V. Zelensky qui a rencontré en Italie les autorités politiques et religieuses les plus importantes mais été aussi invité de l’émission de télévision italienne ‘’Porta a Porta’’ de Bruno Vespa. En effet, l’opinion publique n’est pas moins importante que les ‘’aides matérielles’’ pour le cours de la guerre. Au-delà de la guerre, la baisse de confiance des Italiens vis-à-vis de l’Allemagne (de 49 à 49%) et de la France (de 39 à 35%) est significative. Il y a une semaine encore, la visite à Paris du ministre Tajani a été annulée et d’autres critiques exprimées par la France au cours des mois précédents ou l’absence de Meloni au dîner à l’Elysée avec Zelensky ont fait que la France apparait plus éloignée aux yeux des Italiens sur le plan de la confiance. Et ce malgré la proximité géographique, mais l’on sait bien que les relations entre ‘’cousins’’ sont toujours compliquées. Du reste, on observe que les distances géographiques ne pèsent que relativement : la Chine et la Hongrie sont perçues comme également ‘’distantes’’ par les Italiens, alors que les Etats-Unis connaissent un regain de confiance comme cela n’arrivait pas depuis des années. C’est donc aussi l’orientation politique et la ‘’fracture’’ provoquée par la guerre en Ukraine qui jouent. La sympathie envers la Russie, bien que limitée, augmente légèrement parmi l’électorat de la Ligue et de Forza Italia, reflétant les liens entre ses leaders, Salvini et Berlusconi, et Poutine. Chez les électeurs de Fratelli d’Italia en revanche c’est la distance vis-à-vis de la France de Macron qui prévaut. Les pays suscitant le plus la confiance aux yeux des Italiens restent l’Allemagne et les Etats-Unis, avec un regain pour ces derniers lié à la guerre en Ukraine et le retour de l’antique menace (la Russie). L’UE reste en revanche un cadre encore incapable d’esquisser un projet et surtout, une entité commune. »
COMMENTAIRE, La Repubblica, de S. Folli, « L’effet Zelensky sur une Italie divisée » : « Lors de la visite de V. Zelensky à Rome, la position de l’Italie a été exprimée avec une clarté et une détermination particulièrement marquées, aussi bien par la Présidente du Conseil que le Président de la République. Une prise de position en faveur du pays envahi ne laissant aucune place au doute. Peut-être parce que ces derniers temps le drame ukrainien commençait à susciter moins d’émotion auprès d’une opinion publique fatiguée et qui commençait peut-être à s’habituer à l’horreur de cette guerre. N’oublions pas qu’un courant philo-russe non-négligeable et transversal est bien présent en Italie, ou si l’on préfère anti-OTAN et anti-américain. Un courant bien plus fort que dans n’importe quel autre pays d’Europe de l’Ouest, particulièrement actif à la télévision, sur les réseaux sociaux et au sein de divers cercles politiques et syndicaux. C’est ce qui explique le ton très net de Giorgia Meloni et de Sergio Mattarella lorsqu’ils ont souligné le rôle de l’Italie dans la défense de l’Ukraine jusqu’à la paix, une paix qui devrait être établie avec l’accord et aux conditions de Kiev. Certains ont voulu voir une preuve d’unité nationale dans le silence ou dans l’absence de certaines figures politiques qui n’adhèrent pas à la cause ukrainienne. Matteo Salvini s’est dérobé à la rencontre avec Zelensky et suit un peu la même voie que Giuseppe Conte lorsqu’il demande de ne pas livrer d’armes à Kiev. Tous deux se préoccupent plutôt de savoir comment ils vont s’accaparer la part d’électeurs qui se fichent du sort de l’Ukraine, de l’OTAN, d’une Italie qui veut rester du côté de l’Occident libéral. Le Palais Chigi et le Quirinal n’ont donc pas commis un geste banal en recevant Zelensky alors que, sur le terrain, l’évolution prochaine de la situation pourrait être déterminante pour l’issue du conflit. L’effort pour s’adresser à l’opinion publique plus distraite ou indifférente était évident. Il s’agit également de ne pas laisser de place à des positions ambiguës en matière de politique étrangère, il en va désormais du prestige de l’Italie à l’international. Le centre-gauche demeure incertain car divisé. A droite, Salvini n’a pas changé d’avis sur les relations avec Moscou et attend seulement un moment plus favorable. Nous saurons cet été qui aura eu raison et quelles seront les réactions en Europe et en Italie. »
ENTRETIEN, il Giornale, G.Massolo, « Le conflit et les tensions dureront encore. A long-terme, j’imagine un scénario à la coréenne » : Giampero Masso, ex-ambassadeur et président de l’Institut pour les études de politique internationale, s’exprime sur les avancées du dialogue italo-ukrainien et donne son avis quant à l’issue du conflit avec la Russie. ‘’L’engagement italien pour la résolution du conflit en Ukraine reflète avant tout la cohérence de la politique extérieure italienne, marquée par l’unité de ses institutions et de toutes ses forces politiques. La visite du président ukrainien Volodimir Zelensky à Rome va dans le sens d’un renforcement du dialogue entre les deux pays. Face à face, les deux chefs d’États ont échangé librement, sans l’aide d’interprètes, ce qui est le signe de la transparence de l’engagement de Meloni, décidée a réitérer son soutien à l’Ukraine. Du côté du Vatican, la gestion du dossier ukrainien apparaît plus délicate. Le pape souhaite en effet que l’Ukraine emprunte la voie de la médiation afin de mettre un terme au ‘’massacre de civils’’ qui a lieu dans son pays, une position à laquelle ce dernier ne peut absolument pas se résoudre puisqu’une trêve serait synonyme d’environ 20% de perte de son territoire au profit de l’envahisseur russe. Si le ‘’plan de paix’’ du Saint-Siège peut sembler ainsi déconnecté de la réalité géostratégique, son aide pourrait toutefois s’avérer précieuse quant à la suite des hostilités, notamment au regard du soutien humanitaire que le Vatican pourrait apporter aux enfants et aux prisonniers de guerre ukrainiens. ‘’La guerre durera encore et même si elle s’interrompt, elle ne prendra jamais fin’’. La trêve n’étant pas une option envisageable au vue des pertes occasionnées, nous saurons d’ici le printemps si la contre-offensive ukrainienne ouvre la place à une médiation entre les deux pays. Pour l’heure, il apparaît probable que la situation débouche sur un ‘’scénario de type coréen’’ dans lequel les deux parties mettent un terme au combat sans que cela ne soit pour autant synonyme de fin définitive des conflits. Il s’agira alors pour l’Europe d’appréhender avec lucidité cette nouvelle phase de coopération, sous la menace d’un retour imminent au conflit. La perspective d’adhésion de l’Ukraine à l’Union Européenne avance sur la bonne voie, même si la procédure s’annonce longue car le pays ne remplit pas encore les conditions d’adhésion nécessaires prévues par les critères de Copenhague. En revanche, l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN semble bien plus délicate, puisque l’Occident a toujours refusé d’admettre qu’il était en conflit direct avec Moscou. Toute la difficulté réside dans l’incompatibilité de cette demande d’adhésion, qui ne doit pas pour autant remettre en cause les efforts des pays membres de l’organisation pour protéger Kiev d’une éventuelle escalade des tensions. »
COULISSES, La Stampa, F. Grignetti : « Les Samp/T à Kiev » : « Le système sophistiqué de défense antiaérienne Samp/T de fabrication franco-italienne est arrivé en Ukraine et sera confié à 20 experts locaux. Il s'agit maintenant de le rendre opérationnel. Après des mois de discussions et de préparations, la défense antiaérienne ukrainienne est sur le point de faire un bond en avant considérable. Et bien que l'Italie et la France n'aient pu envoyer qu'une seule batterie de missiles, le système est tellement avancé qu'il peut garantir la protection du ciel d’une grande partie de territoire, ou bien d'une grande ville. Même si la nouvelle a été maintenue réservée, lors de sa visite à Rome, le président V. Zelensky a remercié les gouvernements italien et français pour la décision d’aider Kiev avec ces technologies. Giorgia Meloni part pour l'Islande, où se tiendra le Conseil de l'Europe à Reykjavík, les 16 et 17 mai, qui se focalise sur le thème des dommages de guerre subis par l'Ukraine et sur l’utilisation des biens gelés aux oligarques russes en Occident pour dédommager Kiev. " Dans ce cadre, le Registre international des dommages, qui sera présenté lors du sommet, constituera une étape importante", précise le Palazzo Chigi. L'ambassadeur ukrainien en Italie, Yaroslav Melnyk, revient sur les Samp/T dans une interview au Corriere della Sera : "L'Italie a déjà complété sa partie, nous attendons que les Français fassent de même. Il n'y a pas encore de date précise pour leur intervention sur le terrain, mais cela semble très proche". Les Italiens ont déjà conclu le stage de formation de vingt spécialistes ukrainiens. Les "leçons" avaient commencé il y a deux mois à Sabaudia, où se trouve le commandement de l'artillerie antiaérienne de l'armée de terre. La formation de la part des Français semble en revanche avoir pris du retard ; les Ukrainiens devraient aller s'entraîner sur la base aérienne d'Avord, où se trouve le 1er régiment d'artillerie aérienne de l'armée de l'air française. Les Ukrainiens misent beaucoup sur l’utilisation de ce système d'armes pour défendre les villes contre les Russes. L'OTAN n'autorise pas les soldats occidentaux à entrer en Ukraine, car il existe un risque d'incident direct avec la Fédération de Russie. L’utilisation du système antiaérien est donc entièrement confiée à la gestion ukrainienne, même si les munitions et les pièces de rechange devront arriver de France et d'Italie, les seuls pays qui disposent de ce type de matériel. »
PREMIER PLAN, La Repubblica, de C. Vecchio, « L’obsession des réseaux sociaux pour le salaire et les invités [de l’émission de Fabio Fazio], le présentateur haï par l’algorithme de Salvini » : « Le présentateur télévisé était devenu un temps une sorte d’obsession pour Matteo Salvini qui en avait fait une cible presque systématique qu’il invoquait partout où il allait. Salvini attaquait Fazio sur son salaire (‘’payé par les Italiens !’’) et surtout pour les personnes qu’il invitait sur son plateau : des humoristes raillant la droite, des intellectuels de gauche (Roberto Saviano), la militante Carola Rackete… Il réfrénait mal son mécontentement pour n’avoir lui-même jamais été invité. Giorgia Meloni s’était elle-même plainte de cette absence d’invitation (‘’il n’interviewe jamais quelqu’un de droite’’). Parce que Fabio Fazio était très demandé, il faisait des audiences record (et on verra si celui qui le remplacera saura faire aussi bien) et ses interviewes n’étaient pas agressives. Avec Fabio Fazio, c’est l’homme qui cristallisait toute la rancœur de la droite, toute la haine du politiquement correct et du mainstream que le nouveau directeur de la RAI, le mélonien Giampaolo Rossi, n’a pas manqué de décrire avec mépris. De nombreux proches de l’actuel gouvernement, dont l’ambitieux président de la commission culture à la Chambre, n’avaient pas manqué de s’en prendre à Fazio. En somme, Salvini était loin d’être le seul. Giorgia Meloni n’était pas en reste et lorsqu’il avait interviewait Emmanuel Macron, la leader de Fratelli d’Italia, à l’époque à l’opposition, avait même lancé : ‘’qu’il se fasse payer son salaire par l’Elysée !’’. N’oublions pas non plus que pendant des années Fazio avait aussi été dans le viseur du Mouvement 5 Etoiles ‘’anti-castes’’, avant qu’ils n’accèdent eux aussi au pouvoir. En chassant Fabio Fazio, Meloni est déjà entrée dans l’histoire. Cette affaire confirme que, dans un vieux pays comme le nôtre, la télévision modèle encore l’opinion commune. La RAI, du reste, a toujours été proche du gouvernement, promouvant le pouvoir en place. Toutefois, les précédents gouvernements savaient qu’ils devaient savoir s’adresser à une société pluraliste souvent plus radicale que le pouvoir. Aujourd’hui c’est le pouvoir qui est plus radical que la société. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
Giorgia Meloni à Udine, pour célébrer le 94e Rassemblement national des Alpini.
Giorgia Meloni et le ministre de la Défense nationale Guido Crosetto
Guido Crosetto et le président du Sénat Ignazio Larussa
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