"Superbonus, fin des primes [pour la rénovation]."
17/02/2023
Italie. Revue de presse.
La presse italienne titre largement sur la décision du gouvernement Meloni de mettre fin au fonds d'aides pour la rénovation énergétique des bâtiments, mesure-phare du M5S, jugée trop onéreuse pour les caisses de l'Etat. « Superbonus, c’est fini selon le gouvernement » - Le ministre Giorgetti (Ligue) met fin à une mesure qualifiée « d'imprudente ». Le secteur du bâtiment s'insurge (Corriere della Sera), « L'opération-éclair contre le suberbonus » - Le gouvernement prend la décision sans préavis, les associations protestent. ‘’Nous avons dû intervenir à cause d'un trou budgétaire important’’ explique Meloni » (La Repubblica), « Le superbonus est mis au placard » (Stampa), « Le gouvernement dit adieu aux aides fiscales » (Sole 24 Ore), « Superbonus, fin des primes [pour la rénovation] » (Il Messaggero). L'ouverture d'une enquête visant le secrétaire d'Etat à la justice suite à la révélation d'informations confidentielles est aussi largement citée : « Delmastro fait l'objet d'une enquête. FdI le défend, le M5S demande sa démission » (Corriere della Sera), « Ouverture d'une enquête visant Delmastro à Rome » (La Repubblica).
PREMIER PLAN, Corriere della Sera, de G. Bianconi, « Delmastro fait l’objet d’une enquête, ‘’les documents concernant Alfredo Cospito étaient classifiés » : « Une enquête pour ‘’violation de la clause de confidentialité’’ a été ouverte visant le secrétaire d’Etat à la Justice, Andrea Delmastro, suite à une reconstitution précise des faits par le parquet de Rome. A l’annonce de son interrogatoire, prévu aujourd’hui, les oppositions ont immédiatement appelé à nouveau à sa démission. Le député (et vice-président du Comité parlementaire pour la sécurité de la République) Giovanni Donzelli, lui aussi membre de Fratelli d’Italia, sera est également entendu dans cette affaire, probablement en qualité de témoin. Toute l’affaire était partie de son audition devant le Parlement sur le cas du détenu anarchiste Alfredo Cospito placé en régime d’isolement strict. Alors qu’il reprochait à des députés du Parti démocrate d’avoir rendu visite au détenu en prison, au point de se demander si ‘’la gauche est plus du côté de l’Etat ou du côté des terroristes et des mafieux’’, Donzelli avait révélé des éléments confidentiels du dossier, qui lui avaient été fournis par son collègue et colocataire Andrea Delmastro. Les juges doivent aujourd’hui déterminer si le secrétaire d’Etat à la Justice pouvait être en possession de ces documents et s’il pouvait en révéler le contenu à un collègue qui en a ensuite fait un usage politique ? Le ministre de la Justice Carlo Nordio a expliqué devant le Parlement que ces documents ne faisaient pas l’objet du ‘’secret d’Etat’’ et que donc rien d’illicite n’avait été commis. Mais pour les juges, le problème du secret professionnel et de la clause de confidentialité qui vaut pour tout fonctionnaire, y compris ceux du ministère de la Justice, demeure. Le contenu des écoutes téléphoniques en partie cité par Donzelli ne relevait pas directement de la fonction de Delmastro et ces informations lui avaient été communiquées parce qu’il en avait fait la demande. Or il n’aurait jamais dû pouvoir accéder au contenu de ces écoutes (ni même être au courant de leur existence) dans lesquelles Cospito évoque avec d’autres détenus concernés par le régime 41 bis, et donc condamnés pour crimes mafieux et/ou terroristes, sa stratégie de grève de la faim pour plaider en faveur de l’abolition de ce régime. Les chefs de groupe au Parlement de Fratelli d’Italia défendent la position de Nordio en soutien à Delmastro, alors que le M5S s’associe au PD à l’opposition pour dénoncer les ‘’graves responsabilités politiques et institutionnelles’’ et demander la démission du Secrétaire d’Etat.»
ARTICLE, Sole 24 Ore, E. Patta « Réformes, le gouvernement préfère le présidentialisme mais Meloni voudrait plutôt une commission bicamérale » : « Désormais, il n’y a plus de doutes entre le Palais Chigi et le Ministère des réformes sur la méthode à suivre pour entamer le grand chantier de la réforme constitutionnelle annoncée par Meloni et prévue dans le programme commun de la coalition de droite. Ce sera un présidentialisme sur le modèle américain ou un semi-présidentialisme à la française. Le gouvernement peut trouver un soutien également avec un parti d’opposition : le Troisième pôle, comme cela a pu être constaté par la ministre Casellati à la fin d’une série de rencontres avec les groupes parlementaires. A noter toutefois que le PD a déposé une proposition de loi prévoyant une solution sur le modèle allemand : un Chancelier et une motion de défiance constructive. Afin d’associer les oppositions, Meloni souhaite privilégier la voie d’une commission bicamérale. C’est aussi la préférence indiquée par le Président du Sénat Ignazio La Russa, malgré les réserves de Forza Italia et de la Ligue, craignant une dilution des délais. Car, pour instituer une commission bicamérale, il faut adopter une loi constitutionnelle avec une lecture dans les deux Chambres et une pause de trois mois entre les deux scrutins. »
PREMIER PLAN, La Repubblica, « De Giorgetti à Meloni, la mesure-surprise inspirée de Draghi. Colère de Forza Italia : "Un coup porté à nos électeurs" par Emanuele Lauria : « Le ministre de l'économie, pour défendre la règle qui met fin aux crédits d’impôt à la construction, fait référence à la formule de Draghi au Sénat le 22 juillet : "Le problème n'est pas ce « superbonus ». Le problème, avait dit Draghi, ce sont les mécanismes de transfert qui ont été conçus. Ceux qui ont conçu ces mécanismes sans discrimination et sans discernement sont les coupables de cette situation où des milliers d'entreprises attendent des crédits'. En réalité, l'exécutif de Giorgia Meloni fait ce que Draghi n'avait pas réussi à faire, souvent au grand dam de la Ligue et de Forza Italia. Ce n’est que trois quarts d'heure avant le début de la séance du Conseil des ministres que l’on ajoute le sujet bonus à la rénovation des bâtiments à l’ordre du jour. "Nous n'en savions rien, rien du tout", dira plus tard le chef de groupe de Forza Italia à la Chambre des députés, Alessandro Cattaneo : "Je ne sais même pas si la présidente Meloni était au courant....". ". En fait, elle était au courant du contenu de la règle. Et même si elle avait été informée, elle a donné son feu vert au décret. Présidant le conseil en visio depuis chez elle, pour cause de grippe, elle a dit : " Nous devons intervenir, il y a un risque de grand trou dans les comptes ". A savoir 110 milliards d’euros, le montant des crédits d'impôt prévus par la mesure. Giorgetti répète : "Nous risquons de faire exploser les caisses de l'État". Il est soutenu par Guido Crosetto qui rappelle les "conséquences possibles sur les marchés financiers". Tous les membres du conseil des ministres ont la nette impression d'accomplir un acte impopulaire. La consigne du premier ministre est donc de bien expliquer que "la responsabilité de cette situation revient à ceux qui nous ont précédés". Une référence aux M5S de Giuseppe Conte, à ces 'politiques imprudentes' dont Giorgetti parlera ouvertement devant les journalistes. « Il y a quelqu'un qui a dit qu'on pouvait rénover des immeubles gratuitement, un sérieux manque de responsabilité", dit encore Meloni à ses collègues du gouvernement. Pour amortir la colère, on va rencontrer les associations professionnelles. Le vice-président de la Chambre des députés, Giorgio Mulé, déclare : "Ce n'est pas la voie, ce n'est pas la méthode, ce n'est pas bon". Un autre membre éminent de Forza Italia fait circuler les dizaines de messages reçus d'entrepreneurs dans lesquels ils parlent de "tsunami", de "désastre", d'"indécence". »
Giancarlo Giorgetti
PREMIER PLAN, Sole 24 Ore, « ‘’La suspension des crédits d’impôt pénalise les entreprises et les particuliers’’ alerte l’Association nationale des entreprises du bâtiment » : « ‘’Si le gouvernement confirme la suspension définitive des primes et des aides [à la rénovation] sans proposer de solution pour les dépenses déjà engagées, cela signifierait qu’il a décidé de plomber les entreprises du secteur ainsi que les ménages [ayant déjà entrepris des travaux]’’ déclare la présidente de l’association nationale des entreprises du bâtiment. Elle a exprimé sa profonde inquiétude hier après-midi alors que les rumeurs commençaient à circuler quant aux intentions du gouvernement de mettre fin sans préavis au bonus pour la rénovation énergétique. Federica Brancaccio met en garde contre des conséquences dévastatrices sur le plan économique et social si le gouvernement devait suspendre le rachat de crédits par les organismes publics, alors que ces derniers ‘’tentent d’apporter une solution à une urgence sous-estimée par l’administration centrale’’. Des milliers d’entreprises du secteur comptaient sur ce coup de pouce de l’Etat qui aurait pu être décisif pour relancer le marché. Il va falloir que le gouvernement propose rapidement une solution aux citoyens et aux entreprises car sinon on risque d’avoir une réaction très dure et désespérée. Les mesures approuvées hier en Conseil des ministres ne présagent rien de bon mais le dialogue entre les parties n’est pas totalement rompu. Le ministre de l’Economie Giancarlo Giorgetti a déclaré publiquement qu’il était prêt à ‘’faire tout son possible’’ pour le secteur du bâtiment. Mais la situation qui remonte des territoires est dramatique. »
ENTRETIEN, La Stampa, de Giuseppe Conte, leader du M5S et ancien Président du Conseil, par N. Carratelli, « Les promesses électorales ont été trahies, avec le bonus à 110 % [pour la rénovation des bâtiments], le PIB pouvait décoller » : « Giuseppe Conte n’arrive pas à contrôler sa colère. Non seulement car le fonds d'aides pour la rénovation énergétique des bâtiments était une mesure phare du M5S, voulue par son ancien gouvernement, mais parce qu’il considère que de cette façon ‘’ on porte un coup mortel au secteur du bâtiment, on joue avec la vie des employés et de leurs familles et on se moque des Italiens. Il s’agit d’une trahison organisée, si l’on considère qu’elle a été mise en œuvre tout de suite après les élections régionales. Ce que le ministre Giorgetti définit comme une ‘anomalie’ a permis une hausse de 6.7 % du PIB en 2021 et de 3.9 % en 2021, des chiffres inédits en Italie depuis 35 ans. Grace au ’Superbonus’, 900 000 emplois ont été créés et 979 000 tonnes de CO2 ont été évitées. Nous sommes face à une hypocrisie insupportable de la part des forces de la majorité de gouvernement : Tajani ne peut ne pas savoir que son parti, Forza Italia, a défendu officiellement le fonds à la Chambre des Députés. Comment peuvent-ils continuer à faire partie du gouvernement ? Quelques corrections pouvaient être nécessaires, mais de cette façon on met le pays en déroute, sans avoir imaginé d’alternative. Le gouvernement n’a pas été loyal, si l’on considère que Giorgia Meloni, en campagne électorale promettait de ‘’ protéger les aides et d’améliorer les allégements fiscaux pour le bâtiment. ‘’ Le M5S continuera à soutenir ce secteur, nous ne permettrons pas qu’il revienne en arrière. Delmastro et Donzelli doivent démissionner ; ils ont joué avec des informations réservées sur la mafia et le terrorisme, comme deux adolescents. Et Meloni, en les protégeant, prouve qu’elle préfère mettre son parti avant l’Etat et la lutte contre les mafieux et les terroristes. »
Giuseppe Conte
ARTICLE, Domani, V. Poti « Wang Yi à Rome en quête de soutien afin de rétablir le prestige chinois » : « Dans l’agenda bien chargé de la tournée européenne de Wang Yi, directeur de la commission Affaires étrangères du parti communiste chinois, figure aussi Rome. Le chef de la diplomatie chinoise a rencontré hier le ministre des affaires étrangères A. Tajani et rencontrera aujourd’hui le président de la République S. Mattarella. L’Italie représente l’étape qui vient juste avant celle de Munich. Au-delà des « bonnes manières » et de la rhétorique officielle, cette tournée représente pour la Chine une occasion de relance après la pandémie, les manifestations et des ballons-espions. Wang Yi est en train de chercher en Europe ce prestige que la Chine a tant fait pour construire et qu’elle a en partie perdu aujourd’hui. Lors de ses échanges avec Tajani et Mattarella sur la « Route de la Soie », Wang tente d’obtenir la participation de G. Meloni au troisième forum qui réunit les pays faisant partie du projet, dont l’Italie (depuis le mémorandum de 2019). Ce forum se veut une prémisse à la reconduite du mémorandum d’entente signé par Giuseppe Conte lors de son premier gouvernement. Il y a toutefois deux facteurs pouvant compliquer cet objectif tant convoité par Pékin : la ligne, atlantique et anti-chinoise de Meloni, et le réalignement atlantique de Rome après le départ de G. Conte du Palais Chigi. »
ARTICLE, Il Messaggero, A. Gentili « Le Quirinal et Tajani (Forza Italia) font pression sur Pékin pour favoriser les négociations de paix » : « Au menu du dîner d’hier à la Farnesina avec Antonio Tajani et de la visite au Quirinal de ce matin avec Sergio Mattarella, on avait la paix en Ukraine et les rapports commerciaux. Le ministre chinois Wang Yi est arrivé dans la Capitale avec un objectif prioritaire : convaincre l’Italie de renouveler en 2024 le mémorandum d’entente signé en mars 2019. D’après ce que le Palais Chigi laisse entendre, Giorgia Meloni serait très prudente à cet égard. Dans les sphères diplomatiques on évoque même un « soft facing out », un renoncement graduel et poli afin de ne pas remettre en cause les rapports commerciaux avec Pékin. La partie jouée par Tajani et Mattarella n’est pas facile. L’Italie est le seul pays de l’UE à avoir adhéré au mémorandum d’entente sur les Routes de la Soie. Il n’est pas simple de fermer la porte au nez de Pékin sans en subir des conséquences économiques. Toutefois, l’approche est très prudente, comme le confirment les propos de Tajani ‘’il est aujourd’hui prématuré de parler de l’accord sur la Route de la Soie’’ car ‘’il y a d’autres priorités et urgences’’. D’après des sources diplomatiques, la Farnesina et le Quirinal ‘’poussent avec force la Chine à assumer la responsabilité d’une action continue en faveur de la paix’’. Comme l’a expliqué Tajani hier soir pendant le dîner, ‘’la Chine doit jouer un rôle majeur pour pousser vers une paix juste. Je suis sûr que Pékin est prêt à s’engager afin de convaincre la Russie à négocier’’. Si la posture chinoise est en apparence neutre, elle est en réalité caractérisée par de fortes tendances pro-russes, accentuées après l’affaire des ballons-espions avec les Etats-Unis. »
ARTICLE, Il Messaggero, M. Ajello « Metsola arrive à Rome : un pacte avec l’Italie sur les migrants et contre la hausse des prix énergétiques » : « En raison d’une forte grippe, la rencontre au Palais Chigi entre la Présidente du Parlement Européen et la Présidente du Conseil a été annulée. Toutefois, Metsola et Meloni ont déjà eu un entretien téléphonique. Metsola nous dit qu’elle entretient une relation « ouverte et franche » avec Meloni. « Je faire comprendre aux citoyens italiens que je comprends leurs craintes sur la hausse des factures et l’impact des nouvelles lois européennes sur certains secteurs de l’industrie : le Parlement européen est à leurs côtés ». Metsola est convaincue du rôle central de l’Italie dans les politiques européennes, du plein soutien de Rome à l’Ukraine (malgré les propos de Berlusconi qui ont fortement irrité les populaires, dont la présidente du Parlement européen fait partie). Elle fait des concessions à notre gouvernement sur la question migratoire et des frontières méridionales de l’Europe en la qualifiant de « problème communautaire et pas uniquement national ». Et puis il y a la bataille commune contre la hausse des prix énergétiques. Voici donc le sens de la visite de Metsola, porteuse de « messages positifs » aux autorités italiennes. En arrière-plan, il y a aussi la stratégie qui lie Metsola à Meloni et qui concerne le rendez-vous européen de 2024. Meloni veut à tout prix pousser les conservateurs européens, dont elle est la présidente, vers une grande famille de droite atlantiste et réformatrice (rien à voir donc avec Marine Le Pen) pouvant s’allier avec le PPE et pouvant favoriser l’élection de Metsola à la succession de von der Leyen. C’est un projet ambitieux, qui est cher à Meloni, et qui vise à chambouler l’alliance historique entre le PPE et le PSE afin de marginaliser les libéraux et isoler Macron, qui se verrait ainsi affaibli dans son axe franco-allemand. Cela expliquerait aussi, selon le gouvernement, la rancune du Président français envers l’Italie melonienne. Ce sont ainsi deux visions différentes et divergentes sur les équilibres futurs de l’Union. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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