"Envoi d’armes à Kiev, la résistance de la Ligue et de Forza Italia." et "Ursula von der Leyen ouvre la possibilité d’utiliser les fonds de l’UE pour construire des murs anti-migrants."
27/01/2023
Italie. Revue de presse.
La presse italienne titre sur l’intensification des bombardements russes en Ukraine, traitée en regard de la polémique née en Italie sur l’intervention vidéo du Président ukrainien au festival de la chanson de Sanremo : « Ukraine, une tempête de missiles » - Moscou accusée d’avoir utilisé ses missiles hypersoniques, Kiev demande maintenant les avions de chasse. Salvini : Zelensky au festival de Sanremo ? J’espère que je n’écouterai que de la musique (Corriere della Sera), « Envoi d’armes à Kiev, la résistance de la Ligue et de FI » - Tensions au sein du gouvernement, Berlusconi et Salvini tentent de prendre leurs distances de l’accord avec l’Otan. Une pluie de missiles russes hypersoniques sur l’Ukraine en représailles à l’envoi de chars lourds par l’Otan (La Stampa), « Salvini et le front rouge-noir : il ne faut pas que Zelensky participe au Festival de Sanremo » (La Repubblica), « Les détracteurs de Zelensky à Sanremo » - La participation du président ukrainien fera un grand bien à tous ceux qui s’y opposent (Foglio). L’entrevue d’hier entre Giorgia Meloni et le ministre de la justice Nordio (Frères d'Italie), à la suite des polémiques sur la réforme de la justice sur les écoutes et la séparation des carrières des juges et des procureurs, est aussi citée « Justice, le dialogue avec les procureurs » - Meloni rencontre Nordio, demande de la prudence sur la séparation des carrières mais soutient la réforme sur les écoutes. Le ministre réaffirme l’indépendance de la magistrature (Il Messaggero). La polémique autour des propos du ministre de l’Education de moduler le salaire des enseignants selon le coût de la vie locale fait la Une de Repubblica « L’école est en révolte » - Le projet du ministre Valditara (Ligue) provoque une levée de boucliers. Le secrétaire de la CGIL Landini qualifie l’idée de « folie » Enfin, la Journée Internationale du Souvenir de l’Holocauste est citée dans les pages intérieures des principaux quotidiens et fait la Une de La Stampa « 27 janvier 2023 : Nous n’oublions pas ». La Repubblica titre aussi, avec couverture photographique en Une, sur les « Les frappes israéliennes sur Gaza - 10 morts et 20 blessés. ».
Giuseppe Valditara
Matteo Salvini
Les JT couvrent essentiellement la Journée Internationale du Souvenir de l’Holocauste, avec notamment la célébration de ce matin au Quirinal, l’intensification des bombardements russes en Ukraine, la rencontre au Palais Chigi entre la Présidente du Conseil et le ministre de la Justice C. Nordio et les suites de l’arrestation du chef mafieux M. Messina Denaro.
COULISSES, Corriere della Sera, M. Guerzoni « La Présidente du Conseil, entre les faucons et les colombes, souhaite ne pas accélérer sur la réforme de la justice » : « Le sens des deux photos diffusées par le Palais Chigi pendant l’entrevue entre G. Meloni et C. Nordio vise à faire taire les mauvaises langues et montrer au monde politique, à la magistrature et aux Italiens que la majorité n’est pas divisée sur la justice comme cela est apparu ces jours-ci. Ainsi, l’entente entre la présidente du Conseil et le ministre de la Justice est « plus forte que jamais ». Le rendez-vous était annoncé depuis des jours, pour clarifier et pour « protéger » le ministre face aux polémiques, éviter un bras-de-fer avec la magistrature et relancer l’agenda. Le plan de Meloni – obligée de trouver un équilibre difficile entre l’âme partisane de la primauté de la présomption d’innocence et l’âme justicialiste de la coalition – prévoit une limitation sur l’usage des écoutes, la lutte contre la criminalité, la dépénalisation des délits admnistratifs et le renforcement de la certitude de la peine. Pour le reste, le terrain est bien glissant et Meloni n’a pas l’intention d’accélérer, comme le souhaiteraient en revanche la Ligue et Forza Italia. Hier, à l’occasion de l’inauguration de l’année judiciaire, le ministre Nordio semble avoir saisi le message, il a baissé d’un ton et tendu la main aux juges en annonçant que « toute réforme sera adoptée après avoir écouté toutes les voix » qui s’expriment au sein du système judiciaire. Il a ainsi freiné sur les écoutes téléphoniques et sur la séparation des carrières entre juges et procureurs. Tandis que Meloni a invité à changer de vitesse sur la criminalité « nous devons avancer rapidement et efficacement car les délits tels que les vols, le trafic de drogue et les cambriolages impactent les gens ordinaires ». »
Giorgia Meloni et Carlo Nordio
COMMENTAIRE, La Repubblica, A. Bonanni « La campagne africaine » : « G. Meloni a découvert une sorte de vocation africaine qui lui vient non pas de ses ancêtres politiques, heureusement, mais de l’ancien résistant et fondateur de l’ENI Enrico Mattei. Demain, la Présidente du Conseil se rendra à Tripoli à l’occasion de la signature par le géant pétrolier ENI d’un contrat de 8 milliards d’euros pour l’exploitation de deux gisements de gaz au large des côtes libyennes. Ce déplacement intervient après sa visite à Alger, qui devient le principal fournisseur de méthane, et du nouveau contrat obtenu par le ministre Tajani au Caire pour de nouveaux achats à hauteur de trois milliards de mètres cubes de gaz. Puisque la guerre en Ukraine a déplacé l’axe de la dépendance énergétique européenne de la Russie à l’Afrique, l’Italie se propose d’assumer le rôle de carrefour par lequel transiterait une grande partie des 400 milliards de mètre cubes de gaz nécessaires par an à l’Europe pour chauffer les bâtiments, alimenter les industries et illuminer les rues. Ce projet est en lui-même prestigieux, à condition qu’il ne cache une sorte de souverainisme ou de nationalisme masqué. Pendant une décennie, du temps de Mattei, qui avait soutenu l’indépendance algérienne, la politique énergétique de l’Italie en Afrique du Nord avait été marquée par une compétition constante avec la France. Au nom de cette rivalité, l’Europe a dû dire adieu à la Libye, qui est désormais en partie contrôlée par la Russie et la Turquie. Comme l’avait bien compris Mario Draghi, si l’Italie veut devenir ce carrefour énergétique de l’Europe, ce genre de compétition doit cesser. Le projet européen « Global Gateway » pour l’Afrique vise notamment à la création de grandes infrastructures pour la production et le transport d’énergie verte, allant de l’électrique à l’hydrogène. Pour que l’Italie puisse revêtir un rôle de prestige, elle lui faut avant tout l’amitié avec les dirigeants européens avant celle des leaders africains. Par ailleurs, la position géographique italienne n’est pas suffisante pour en faire une plateforme énergétique, il y a encore beaucoup à faire du point de vue des infrastructures, comme l’a dit le DG d’ENI, et il faut le faire rapidement car les autres pays européens (Espagne, France, Portugal, Allemagne) sont en train de s’activer plus vite que nous. Enfin, pour que l’énorme investissement que l’Italie et l’Europe sont en train de faire soit rentable, il faut que l’Afrique se montre plus stable et moins imprévisible politiquement par rapport à la Russie de Poutine. Ce qui n’est pas acquis entre les guérillas islamiques, l’influence russe en Libye et au Sahel et l’hégémonie chinoise dans la plupart des économies africaines. Seule l’Europe, à condition qu’elle agisse unie, peut remplir ce vide. L’époque de Mattei et de sa politique antifrançaise est révolue et doit terminer. L’Italie parviendra à devenir une plateforme énergétique uniquement si elle œuvre pour une politique énergétique européenne vraiment unie, à commencer par les achats en commun. »
ARTICLE, Il Foglio, « Meloni reste au sol. Le voyage franco-allemand aux États-Unis et les hésitations du gouvernement souverainiste sur l’IRA » par Valerio Valentini : « Certains se souviennent du voyage en train vers Kiev ; d'autres suggéreront la comparaison inconfortable avec son prédécesseur, lorsque c'était lui, le Premier ministre italien, qui s'envolait vers l'Amérique au nom de l'Europe. A présent, est-ce l'Italie qui se tient à l'écart et regarde ? Au palais Chigi, on dit que tout est sous contrôle, car le lieu où aborder la discussion sera le prochain Conseil européen. Mais à Bruxelles, le 9 février, la France et l'Allemagne arriveront avec une position unie sur l'Inflation Reduction Act (Ira). C'est pourquoi, dans les prochains jours, le ministre Bruno Le Maire et le vice-chancelier Robert Habeck, s'envoleront ensemble pour Washington. Et, avec eux, il y aura aussi des fonctionnaires de la Commission d'Ursula von der Leyen : car il est clair que le sens de la mission est européen. Dans ce cas, il est inutile de protester, car la volonté franco-allemande a été alimentée par l'absence italienne, par l'incapacité du gouvernement patriote à exprimer une ligne, à formuler une proposition, bref, à dire quelque chose qui ne se limite pas à contester l'hypothèse d'un relâchement des contraintes sur les aides d'État. Lors du dernier Ecofin, alors que Le Maire défendait un "plan industriel européen", et que Christian Lindner, plaisantait avec les journalistes "même si je ne parle pas français, je sais que je partage parfaitement les objectifs de mon ami Bruno, puisqu'on en parle depuis longtemps", Giancarlo Giorgetti (Ligue) a dû esquiver les questions sur la ratification du MES. Il est peut-être vrai, comme on le reproche à Chigi, qu'il existe un parti pris anti-mélonien dans la presse européenne, en particulier en Allemagne, mais au fond, dans ces cent premiers jours de gouvernement, on voit l'incapacité du Premier ministre à intercepter les priorités stratégiques partagées par Macron et Scholz. Au lieu de cela, Meloni a presque semblé justifier son isolationnisme ("Le traité du Quirinal avec la France ? Je ne l'ai pas lu"), sauf lorsqu'elle a pris conscience des risques que cette stratégie comportait. Ainsi, le 3 février, quand elle ira à Berlin, elle tentera de faire marche arrière en récupérant ce "plan d'action" avec l'Allemagne sur lequel Draghi avait travaillé si dur, et qu'elle avait mis de côté. Ces derniers jours, par exemple, la direction économique du Spd a officiellement déclaré que la situation européenne exige bien que les fonds européens réagissent à l’IRA américaine. C'est un indicateur du succès de la ligne expansionniste indiquée par Macron. C'est un tournant possible qui devrait rendre Meloni heureuse. Pourtant, aucune réaction. À Berlin, certains font donc pression pour que les subventions aux entreprises soient financées par les fonds non dépensés du Next Generation Eu : il y a donc une certaine harmonie avec les plaintes du gouvernement sur l'impossibilité d'utiliser tous les fonds du Pnrr. Pourtant, Raffaele Fitto, occupé par la bagarre sur les concessions balnéaires, ne s'est pas fait entendre. Adolfo Urso n'a pas non plus pris la parole, alors que la mission américaine de Habeck et Le Maire a pour objectif fondamental de protéger un secteur européen, celui de l'automobile, cher au ministre du Made in Italy, des menaces du protectionnisme américain. »
COULISSES, La Stampa, F. Olivo « Le gouvernement en armes » : « Si le dirigeant de la Ligue veut empêcher la diffusion au Festival de Sanremo du message du président ukrainien, auquel sont gouvernement est en train d’envoyer des armes, l’affaire prend une tournure qui va au-delà d’un simple concours de la chanson. C’est une question typiquement politique que le Palais Chigi lui-même est en train de se poser. Salvini abandonne pour un instant son rôle de ministre des infrastructures pour lancer sur les plateaux de La7 : ‘’C’est Zelensky qui sait s’il a le temps ou non d’aller à la cérémonie des Oscars ou au Festival de Sanremo. Tous ces événements méritent du sérieux, même Sanremo. Je me demande toutefois s’il est approprié que le festival de la chanson italienne ait un moment pour la guerre et les morts, je n’ai pas l’impression que les deux choses aillent bien ensemble’’. Un ton dur donc à l’égard du dirigeant ukrainien à qui Meloni s’apprête à rendre visite dans les prochains jours. Les fibrillations des actionnaires minoritaires au sein de la coalition avaient été prises en compte au Palais Chigi, toutefois ce qui inquiète est que la Ligue ait choisi la guerre en Ukraine comme sujet pour se démarquer. Si elle l’a fait, c’est pour les sondages. Les Italiens sont de plus en plus angoissés par le conflit, notamment en termes d’impact sur l’économie. La Ligue tente ainsi d’exploiter cette gêne et de récupérer des voix aux dépens de Fratelli d’Italia. L’Ukraine est en effet le seul sujet non pleinement soutenu par la majorité de l’électorat de Meloni. Il s’agit donc d’une marge dont la Ligue peut profiter. Tout en faisant attention à ne pas apparaitre comme un allié indiscipliné, Salvini a demandé avec insistance ‘’l’ouverture d’un dialogue de paix’’. Son chef de groupe au Sénat, Massimiliano Romeo, a été plus direct ‘’il faudrait parler un peu moins d’armes et faire un peu plus pour la paix’’ en ajoutant qu’‘’il faudrait un peu moins d’atlantisme absolu et un peu plus d’atlantisme modéré’’. C’est là une prise de position qui se démarque assez clairement de la ligne de l’Exécutif. Cette attitude n’a pas plu et un représentant du gouvernement a expliqué : ‘’si les Etats-Unis avaient voulu humilier la Russie, ils l’auraient fait depuis longtemps, ce qui veut dire que la position de la Ligue est fictive’’. Et si du côté de Forza Italia le point de vue de Berlusconi est bien connu : ‘’notre solidarité n’est pas en question mais je suis inquiet que personne, à part le Pape, ne semble avoir de solution de paix pour un conflit pour lequel nous sommes en train de payer un prix intolérable’’. Et puis il y a un sénateur qui est plus explicite que son chef, Maurizio Gasparri : ‘’l’escalade des Etats-Unis et de l’Allemagne est préoccupante’’. Une réflexion qu’il a faite avant de critiquer la participation de Zelensky à Sanremo. »
ARTICLE, Repubblica, M. Pucciarelli, « De Salvini à Grillo, le front qui ne veut pas voir Zelensky a Sanremo » : « C’est un front étrange et transversal, qui rassemble un peu de tout, de vieilles et de nouvelles pulsions anti-système qui pour une fois sont d’accord, cette fois-ci pour s’opposer à la participation de Volodymir Zelensky au Festival de Sanremo. Matteo Salvini, Beppe Grillo, Alessandro di Battista, Carlo Freccero, Maurizio Gasparri, Vauro Senesi, Fabio Volo sont ses visages les plus connus. Le leader de la Ligue déclare : "je me demande dans quelle mesure il est opportun que le Festival de la chanson italienne ait un moment sur la guerre et les morts. Il ne me semble pas que les choses aillent de pair". Comme lorsqu’il déclarait préférer le dessin animé Masha et Mishka au discours de fin d’année du président Matarella, il assure maintenant : "si j’ai dix minutes pour voir le festival de Sanremo je regarderai les chansons, pas Zelensky". Beppe Grillo publie quant à lui sur son site internet une longue analyse de l’ancien ambassadeur Torquato Cardilli, qui écrit au sujet du président ukrainien que "peut-être quelqu’un devrait lui conseiller de commencer un chapelet de prières vu la fin qu’ont eu les autres chefs d’État qui ont fait des apparitions analogues dans le passé (Saddam Hussein, Khaddafi)". Une déclaration reprise par Europa Verde, qui l’a insérée dans son dossier pour la presse étrangère préparé à l’occasion de l’entrée du M5S dans le groupe parlementaire des Verts. Di Battista ajoute sur Facebook : "j’attends avec impatience qu’au moins une fois au festival on parle de ce qui se déroule en Palestine". Une manifestation est prévue à Sanremo, contre la guerre bien sûr mais aussi pour dénoncer "le côté ridiculement tragique et le profond irrespect pour cette grande partie de l’opinion qui ne se reconnaît pas dans les politiques militaires des gouvernements Draghi et Meloni." Et à Zelensky : "le drame en cours dans son pays n’est que n’est que l’épilogue d’un conflit bien plus long dans le Donbass, que la majorité des États de l’OTAN ont contribué à fomenter". »
Beppe Grillo
ENTRETIEN, Sole 24 Ore, de Giancarlo Giorgetti, Ministre de l’Economie, « Factures, les nouvelles aides seront reconduites » : « Q. Les réformes sont indispensables pour le Pnrr et le pays. Mais y a-t-il la volonté politique et les ressources pour le faire ? Il y a des ressources et même importantes. Le projet est très ambitieux, la vraie difficulté est de le réaliser concrètement. Il suffit de penser à la réforme du code des passations de marché, qui est fondamental pour les infrastructures et œuvres publiques mais pas seulement. C’est ce qui nous permettrait de dépenser effectivement la puissance de feu de 200 milliards que nous devons dépenser dans les prochaines cinq années, même un peu moins car du temps s’est déjà écoulé. Ainsi ce défi est-il décisif : sans un allègement des procédures et une flexibilité opérative, que nous demandons aussi au niveau européen, tout devient difficile. Q. Quelles marges y a-t-il avec l’UE pour modifier les projets du Pnrr ? En Europe il y a un grand débat, qui est lancé et culminera au Conseil européen début février sur les nouvelles aides d’Etat, en particulier en ce qui regarde la réponse au défi posé par les Etats-Unis avec l’Inflation Reduction Act. Dans cette discussion seront aussi évalués les instruments avec lesquels l’Europe doit se rendre plus efficace, pour répondre aux exigences de la relance post-pandémie et post-crise de l’énergie. Q. L’Europe est-elle en mesure d’être compétitive vis-à-vis des USA sur les aides d‘Etat aux entreprises ? Où en sommes-nous ? L’Europe a un système de règles qui ont été construites au nom de la concurrence et du marché unique interne. Ces règles peuvent, et probablement doivent, être revues pour permettre aux entreprises européennes de répondre à la concurrence des entreprises non seulement américaines mais aussi à la concurrence chinoise et de tout l’Orient. C’est pour cela qu’il faut intervenir avec des procédures de révision, qui présentent toutefois des risques pour l’Italie. Je souligne le risque que la fragmentation du marché unique avantage les pays avec des marges de manœuvre fiscales, c’est-à-dire l’Allemagne et la France, qui n’ont pas autant de contraintes sur leurs finances publiques que l’Italie. Ainsi ils auraient la possibilité de financer bien plus leurs entreprises, en créant des difficultés de compétitivité supplémentaires aux nôtres. Donc c’est une matière à gérer avec précaution et ce sera une négociation assez compliquée pour trouver une médiation. Bien entendu, je le répète, l’Europe doit renouveler les règles en fonction de la croissance. Et cela doit intervenir en lien avec la réforme de la gouvernance économique européenne, le nouveau Pacte de stabilité et de croissance qui devrait entrer en application l’année prochaine et ne peut pas pénaliser les investissements. Parce qu’en traitant les dépenses d’investissements en dépense courantes on comment une grave erreur. Q. Y a-t-il un espace pour que les choix européens aient lieu dans le cadre d’un grand accord avec les Etats-Unis ? Je pense qu’il y a un espace et il doit y en avoir un, parce que dans la période historique que nous sommes en train de vivre, et la coalition internationale en défense des principes de liberté dans le conflit russo-ukrainien en témoigne, nous devons agir de manière concertée. Ce n’est absolument pas le moment de rompre le front occidental. On ne peut déclencher une guerre économique et de compétitivité déloyale entre les Etats-Unis et l’Europe, et une à l’intérieur e l’Europe. Il reste une donnée de fait : l’Italie est grevée par la dette publique. Q. Comment sortir de cette situation de faiblesse structurelle ? Dans ces conditions nous n’avons pas d’autonomie et d’indépendance, ni capacité de manœuvre effective. Avant d’être pessimistes essayons de faire quelque chose. Je pense qu’en termes stratégiques la masse de dette peut être gérée simplement à travers la croissance, en libérant les énergies positives et entrepreneuriales du pays. C’est la voie royale pour réduire la dette. Dans le même temps, il faut une conduite économique, et aussi budgétaire, inspiré par des principes de responsabilité et de prudence. Aussi parce que la Banque centrale européenne est en train de réduire ses achats et donc nous devons être prudents, responsables, et faire preuve de grande responsabilité. L’Europe nous a demandé, et obtenu, la ratification du Mes. Y a-t-il des espaces pour sa réforme ? L’Italie a posé le thème du rôle que peut avoir le Mes dans le domaine des grandes réformes qui mûrissent en Europe aussi bien sur les aides d’État, sur la gouvernance et sur le Pacte de stabilité, que sur les formes d’éventuels fonds souverains pour aider les investissements stratégique en Europe. Dans ce cadre, et c’est un raisonnement qui nous avons comme gouvernement italien, il y a de l’espace pour un rôle différent du Mes par rapport à celui pour lequel il est né. Les mesures contre le prix de l’énergie expirent au printemps. Seront-elles renouvelées ? Nous sommes en train d’étudier des mécanismes qui sont peut-être plus efficaces en terme d’aides, plus flexible par rapport à l’évolution des consommations et qui orientent, notamment pour ce qui concerne les familles, vers des comportements vertueux en termes d’économie d’énergie. Avant leur expiration en avril le gouvernement italien d’une façon ou d’une autre interviendra pour prolonger les mesures d’atténuation des prix pour les familles et les entreprises, probablement sous une forme différente par rapport à celle que nous avons vue jusqu’à aujourd’hui, et qui était fille de l’urgence. »
Giancarlo Giorgetti
PREMIER PLAN, Corriere della Sera, de F. Fubini et M. Galluzzo, « Le dégel entre l’Italie et la France ; la rencontre bilatérale pour des accords en matière de Défense » : « Les relations entre les gouvernements français et italien restent froides suites aux incompréhensions initiales entre Giorgia Meloni et Emmanuel Macron dans l’affaire de l’Ocean Viking. Mais tout ne va pas si mal, au contraire : dans certains domaines, l’entente est de plus en plus étroite. Preuve en est la visite aujourd’hui du ministre de la Défense Sébastien Lecornu qui rencontrera à Rome son collègue italien Guido Crosetto. Le ministre français rend ainsi la pareille à son homologue après une rencontre à Toulon. Il ne s’agit toutefois pas d’une simple visite de courtoisie mais bien d’une réunion de travail au programme long et structuré, pour laquelle les ministres se sont entourés d’acteurs clefs, à la fois militaires et civils. Ils ne parleront pas tant d’Ukraine que d’activités conjointes en Méditerranée, notamment pour sa surveillance, de coordination des politiques de défense de la Méditerranée élargie (ce qui inclut potentiellement le Moyen-Orient), d’exercices conjoints (navals et terrestres), ainsi qu’une présence commune et des activités de lutte contre le terrorisme au Sahel et d’autres zones à haut risque. La collaboration entre la France et l’Italie dans les domaines de la Défense et de l’aérospatial est donc de plus en plus étroite en dépit des tensions entre les deux leaders. Malgré leur échange à Rome, cela n’avait pas fonctionné entre Giorgia Meloni et Emmanuel Macron, en tous cas pas au début. Mais l’intégration entre les deux pays reste forte comme le montre des échanges constants entre ministres. Le Traité du Quirinal, signé entre les deux pays et qui entrera en vigueur dans quatre jours, n’est pas un accord purement formel et a déjà donné lieu à des applications très concrètes, notamment dans le domaine militaire justement. Nous verrons dans les prochaines semaines si cette approche constructive continuera à prévaloir sur les tensions initiales. En attendant, Giorgia Meloni continue à dérouler son agenda pour se rapprocher des partenaires du Sud : après Alger, elle sera demain à Tripoli et à Benghazi accompagnée de plusieurs ministres et du président général d’ENI. Outre les accords qui doivent être signés en matière d’énergie, ce sera également l’occasion d’aborder la stabilisation du pays et les flux migratoires. »
ENCADRE, La Stampa « L’Italie et la France s’apprêtent à trouver un accord sur le système de défense Samp-T » : « L’accord technique entre l’Italie et la France pour fournir l’Ukraine du système antiaérien Sampt-T contre les attaques par missiles de la Russie serait imminent. C’est ce que font savoir des sources diplomatiques. Aujourd’hui, le ministre de la défense Crosetto rencontrera son homologue français Sébastien Lecornu et à l’occasion de cette entrevue, la définition des détails de cette entente devrait être évoquée. Une source diplomatique explique ‘’Une décision politique a été prise. Maintenant, il s’agit de définir les détails techniques car il s’agit d’un système compliqué’’, ajoutant que l’on s’attend à ce que le président Macron et la Présidente du Conseil Meloni rendent officielle cette décision. »
ARTICLE, Stampa, M. Bresolin, « Migrants : le plan Ursula » : « Ursula von der Leyen ouvre la possibilité d’utiliser les fonds de l’UE pour construire des murs anti-migrants. Ce revirement est confirmé par la lettre que la présidente de la Commission européenne a envoyée hier soir à tous les dirigeants de l’UE en prévision du sommet extraordinaire des 9 et 10 février. Von der Leyen présente un plan en 15 points, dont le premier prévoit de "renforcer les frontières externes à travers des mesures ciblées de la part de l’UE", parmi elles la "mobilisation de fonds UE pour aider les États membres à renforcer les infrastructures pour le contrôle des frontières". Le mot "infrastructures", qui désigne réellement la construction de murs et de barrières, n’était pas présent dans la précédente version, mais a été inséré après une longue journée de négociation et à la lumière de la rencontre entre les 27 ministres de l’Intérieur qui se sont réunis à Stockholm. La Commission rompt un nouveau tabou, et change radicalement sa position par rapport aux années précédentes. Pour lutter contre les flux le long de la route balkanique, l’Autriche a demandé de financer avec des fonds européens (2 milliards) la construction d’une barrière entre la Bulgarie et la Turquie. Frontière qui selon von der Leyen doit être "une priorité absolue". La présidente de la Commission propose aussi d’augmenter "le soutien pour l’équipement et la formation" pour la Tunisie, l’Égypte et la Libye, pour qu’elles "renforcent leurs capacités de recherche et de secours" en Méditerranée. Traduction : plus de bateaux pour surveiller leurs eaux territoriales et ramener à terre les migrants interceptés. Il y a aussi l’idée de lancer des partenariats avec la Tunisie et l’Egypte pour lutter contre la traite d’êtres humains à travers des patrouilles conjointes composées de policiers et de magistrats européens. La présence de Frontex sera renforcée dans les Balkans, et un autre projet pilote sera lancé dans la première moitié de 2023, pour créer des "hotspots" dans lesquels effectuer les "procédures de frontière", avec un examen accéléré des demandes d’asile, et un rapatriement rapide pour qui n’y a pas droit. Von der Leyen veut trouver des accords avec les pays d’origine, en utilisant le levier des visas et des accords commerciaux, pour les contraindre à reprendre leurs nationaux. Mais en même temps elle dit qu’il faut intensifier les corridors humanitaires et mettre en place des projets pour "attirer les travailleurs qualifiés". A Stockholm, le ministre Piantedosi a proposé d’introduire une troisième voie entre les renvois forcés et ceux volontaires assistés : les "renvois forcés accompagnés", c’est-à-dire une "opération de retour" des migrants "associée à une "perspective de réintégration". Un des quatre chapitres du plan est dédié à l’équilibre entre solidarité et responsabilité, thème d’affrontement entre les pays de première entrée et ceux du Nord. Von der Leyen demande d’accélérer sur le plan pour la redistribution des demandeurs d’asile, de manière à aider les pays de première entrée comme l’Italie qui subissent plus que les autres la pression des débarquements. Mais en parallèle il faudra un suivi des mouvements secondaires et de l’application correcte des transferts des dublinés dans les pays de première entrée, en collaboration avec l’Agence européenne pour l’asile. Cette dernière devra faire régulièrement des rapports sur les conditions des demandeurs d’asile dans les centres d’accueil. La question migratoire est "un des principaux défis de notre époque" écrit la présidente de la Commission dans sa lettre, et elle est « en haut de la liste des questions sur lesquelles les citoyens attendent une réponse forte de la part de l’UE". La voie royale reste l’adoption du Pacte sur les migrations et l’asile, mais "l’impératif d’une solution structurelle ne signifie pas que nous ne pouvons pas agir dès maintenant". Et cette fois l’Europe a décidé de commencer avec la construction de murs financés par l’UE. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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