"Le bûcher des promesses, Meloni demande des sacrifices à la Ligue et à Forza Italia."
21/11/2022
Italie. Revue de presse.
La presse italienne titre largement sur la finalisation de la loi de finances en vue du conseil des ministres aujourd’hui et notamment sur le débat relatif à certaines mesures qu’elle contiendra. La question de la réforme du revenu de citoyenneté, que Fdi voudrait adopter, fait l’objet de commentaires en raison de l’appel à la prudence de la ministre du Travail : « Meloni lance un appel [aux alliés] : les faux pas sur la loi de finances ne seront pas tolérés» - La proposition d’une prime pour les mariages à l’église proposée par la Ligue suscite les polémiques (Corriere della Sera), « La marche arrière sur la loi de finances » - L’exécutif devrait proposer un budget à hauteur de 32 milliards d’euros malgré les tensions au sein de la majorité pour le peu de marge de manœuvre. Frictions entre Meloni et la ministre Calderone sur le revenu de citoyenneté (La Repubblica), « Réforme des retraites avec le « quota 103 » mais le revenu de citoyenneté alimente les frictions » (La Stampa), « Une augmentation des revenus les plus bas sera possible grâce à la réduction des charges » - Le Conseil des ministres d’aujourd’hui devrait donner le feu vert à la loi de finances (Il Messaggero).
COULISSES, La Repubblica, de T. Ciriaco, « Le bûcher des promesses, Meloni demande des sacrifices à la Ligue et à Forza Italia » : « ‘’Je ne vais pas sacrifier ma crédibilité pour mettre en œuvre maintenant des mesures que nous pourrons faire passer sans difficulté dans six mois. Chaque avancée doit être réfléchie en amont et va de pair avec l’équilibre des comptes’’. Après avoir passé son dimanche au Palais Chigi à travailler sur la Loi de Finances, Giorgia Meloni convoquera aujourd’hui ses alliés. Elle leur demandera de renoncer à plusieurs promesses brandies lors de la campagne électorale. Cette Loi de Finances ne pourra que s’inscrire sous le signe de la transition et la Présidente du Conseil s’en tiendra de façon très rigoureuse aux limites budgétaires dont elle a hérité du précédent gouvernement. Giorgia Meloni fera preuve de prudence dans les comptes et concentrera presque tous ses efforts sur les difficultés liées à la hausse des prix de l’énergie, en totale adhésion avec la règle d’or de l’équilibre budgétaire à chaque poste de dépense. Pour ses alliés, elle manque de courage mais elle est soutenue par son ministre de l’Economie Giancarlo Giorgetti. La vérité est qu’il n’y pas de ressources. Forcer les choses mettrait l’Europe dans la position de tirer les cordons du Plan de Relance. ‘’Notre priorité sont les factures et les familles les plus vulnérables’’. Nous avons cinq ans pour mettre en œuvre le reste de notre programme’’ explique Giorgia Meloni. La nouvelle de la réduction de la TVA sur certains biens de première nécessité est un incident politique et de communication qui alimente les tensions. Matteo Salvini ne voudrait pas y renoncer, malgré les résistances de Fratelli d’Italia. C’est un des éléments d’embarras qui érode la Ligue, contrainte à expliquer l’échec des revendications sur les retraites. Il y a aussi l’agitation de Silvio Berlusconi qui souhaiterait se concentrer ‘’sur le système fiscal plutôt que sur les rave-party’’. Tout cela risque de s’exprimer au Parlement et la Présidente du Conseil est consciente qu’elle devra sûrement faire face à des embuscades parlementaires lors de la présentation de la Loi de Finances. Elle se méfie en particulier des ‘’faucons’’ proches de Silvio Berlusconi qui seront durs sur les impôts bien sûr, mais aussi sur le superbonus et sur le revenu de citoyenneté. Giorgia Meloni est déterminée à ne pas changer d’approche et brandit les derniers sondages qui placent Fratelli d’Italia à 30%. Mais elle craint aussi que, dans les prochains mois, la récession ne frappe l’Italie de plein fouet et sait qu’une politique budgétaire rigoureuse est le seul moyen de limiter les assauts de la spéculation financière et de pouvoir prétendre au soutien de l’Europe, la seule protection qui vaille dans ces cas-là. C’est la ligne sur laquelle elle a eu l’occasion de s’accorder avec Giancarlo Giorgetti lorsqu’ils se sont rendus ensemble au G20 et que le ministre a ensuite présenté à la directrice du FMI. Car l’Italie est toujours sous observation du fait de sa dette et sait que la marge d’action dépend de la rigueur des choix. Le revenu de citoyenneté est le seul point sur lequel Giorgia Meloni envisage une réelle confrontation, prête à affronter une opposition qui partira de certains pans de sa propre majorité, du centre-gauche à la rue et aux syndicats. Elle sait qu’elle perdra en consensus au Sud. Ce sera une bataille dure, le premier défi social pour son gouvernement. »
PREMIER PLAN, Corriere della Sera, de F. Savelli, « Comptes, chiffres et derniers assauts ; l’étroit parcours pour la Loi de Finances » : « La revalorisation des retraites, la réduction des taxes sur l’essence à partir du 1er janvier, la réduction progressive du revenu de citoyenneté après 18 mois, la suppression de la TVA sur les biens alimentaires de première nécessité, autant de questions ouvertes et qui font l’objet de sensibilités différentes au sein du gouvernement. Les discussions se poursuivent et les frictions ne manquent pas mais le pré-conseil est enfin prévu pour ce matin. Dernier passage pour finaliser la loi de Finances avant présentation en Conseil des ministres en fin d’après-midi. Des sources proches du gouvernement affirment qu’il n’y aura aucun délai. Il pourrait toutefois y avoir des surprises, même si le vice-président du Conseil Matteo Salvini affirme qu’il y a ‘’un accord sur tout’’ tout en confessant qu’il a fallu revoir certaines ambitions à la baisse. La totalité du surplus de 21 milliards est consacrée à alléger les effets de la hausse des coûts de l’énergie. Mais le Trésor public cherche la formule afin de réduire progressivement la remise de 30 centimes sur l’essence. En cas de besoin, une autre piste serait d’abaisser encore l’indexation des retraites sur l’inflation. La hausse des prix, qui atteint 11,8% en octobre, est trop forte et risque de faire exploser les dépenses. Même raisonnement sur le revenu de citoyenneté, si c’est la ligne souple du léghiste Claudio Durigon, secrétaire d’Etat au Travail, l’économie pourrait ne pas dépasser le milliard d’euros. Il envisage en effet une baisse progressive du revenu après 18 mois alors que Giorgia Meloni aurait souhaité une coupe beaucoup plus nette. Il semble toutefois qu’elle soit désormais favorable à une phase de transition. La suppression symbolique de la TVA sur le lait et le pain coûterait 470 millions d’euros aux caisses de l’Etat mais qui aiderait les familles les plus pauvres qui ont une alimentation moins variée. »
ENTRETIEN, Foglio, de Guido Crosetto, ministre de la Défense et cofondateur de Fratelli d’Italia « Pour la Défense, l’objectif est le 2 % » : « ‘’Poutine est désormais indifférent à toute sorte de pression externe et c’est là sa ligne personnelle. Il est allé trop loin pour reconnaitre son erreur. Par conséquent, il profitera de l’hiver pour continuer les bombardements sur les villes et mettre à l’épreuve l’opinion publique européenne en déclenchant un exode de masse. Avec le même cynisme, Poutine pourrait utiliser l’autre couloir qu’il contrôle au Sud. Ce n’est pas un hasard si, malgré les difficultés sur le terrain, Moscou n’ait pas rappelé la brigade Wagner déployée en Afrique du Nord. Pour Poutine c’est un front stratégique pour plusieurs raisons, dont celle du contrôle des flux migratoires. Concernant le décret pour l’envoi d’arme à Kiev, notre soutien loyal et convaincu aux choix de nos alliés et à l’Ukraine continuera. Je vais proposer à l’UE de ne pas inclure les dépenses pour les investissements dans le secteur de la Défense du calcul du déficit. J’en ai déjà parlé au Commissaire Gentiloni et à certain de mes collègues. J’adresserai une lettre à ces derniers pour que chacun puisse dire ce qu’il en pense et pourquoi. Par ailleurs, l’objectif des 2% est ce qui a été concordé avec nos alliés américains dans le cadre de l’Otan. Concernant la Chine, l’ouverture faite par Xi, qui a invité Meloni à Pékin, est un fait positif. Toutefois, concernant la Voie de la soie, le mémorandum ne sera pas reconduit en 2024. Je n'ai jamais eu aucun problème à dénoncer une certaine attitude objectivement prédatrice de certaines grandes entreprises françaises à notre égard. Notamment parce qu'il n'y a pas de relation réciproque : je me souviens, pour n'en citer qu'un, de tous les pièges posés à l'acquisition de Stx, qui était en fait une société en faillite, par notre Fincantieri. Et puis, de manière générale, je crois que certains secteurs doivent être protégés de l'ingérence étrangère, même de celle des pays amis. Le secteur du crédit, le secteur des assurances : comment peut-on penser qu'il est normal que l'épargne des Italiens finisse sous le contrôle de consortiums étrangers qui préfèrent ensuite peut-être accorder des prêts aux entreprises de leur pays d'origine ? Sans parler de ce que font les Français dans le secteur aérospatial, trahissant un engagement pris avec le gouvernement Draghi et le ministre Vittorio Colao, qui concernait une collaboration loyale entre Ariane et Avio pour les lanceurs. Mais nous devons absolument nous entendre avec la France en Europe. Il n'y a pas d'hésitation à ce sujet. La France est sans doute le pays avec lequel nous collaborons mieux que d'autres sur les grands dossiers. Mais nous devons mener cette coopération privilégiée avec le plus grand respect et poursuivre nos intérêts stratégiques même lorsqu'ils ne coïncident pas parfaitement avec les leurs. L’affaire Ocean Viking ? Il était nécessaire de poser clairement la question d'une réforme structurelle des politiques d'accueil au niveau européen. Cela a donc conduit à une tension franchement inattendue avec la France, avec laquelle, cependant, il me semble que nous pouvons et devons nous réconcilier rapidement. Mais le problème demeure, il faut le dire. Pour l'avenir, nous devons développer une politique sérieuse d'investissement et de coopération avec l'Afrique, si nous ne voulons pas être dépassés par les événements dans les prochaines décennies. Et entre-temps, l'objectif doit être une gestion coordonnée de l'immigration, qui n'incombe pas seulement aux pays du sud : c’est là une nécessité ressentie non seulement par Chypre, mais aussi par Malte et la Grèce, qui ont signé avec nous un document commun. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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