"Les Américains ne veulent pas de Salvini dans le prochain gouvernement."
16/09/2022
Italie. Revue de presse.
La presse italienne titre largement sur le débat politique italien autour du rapport adopté par le Parlement Européen sur le respect des valeurs démocratiques par la Hongrie, et au sujet duquel les députés de FdI et de la Ligue ont voté contre, alors que Forza Italia a voté en faveur : « Le défi sur Orban et l’argent russe » - La droite se divise sur la Hongrie. Berlusconi prévient : il faut garder une posture pro-européenne autrement Forza Italia ne participera pas au prochain gouvernement. Blinken à Draghi: l’Italie n’est pas impliquée dans l’affaire des financements russes (Corriere della Sera), « La droite se divise sur Orban » - Le Parlement Européen adopte un rapport qualifiant la Hongrie d’autocratie, Fdi et Ligue votent contre. Berlusconi : avec des alliés anti-européens, nous n’entrerons pas dans le gouvernement (La Repubblica), « Letta : c’est une honte, Meloni et Salvini soutiennent Orban » - Entretien du dirigent du PD. L’UE interrompt les fonds à la Hongrie « ce n’est plus une démocratie ». Berlusconi prévient ses alliés : l’alliance est en danger (Stampa). L’adoption du décret sur les aides pour les ménages et les entreprises face à la hausse des prix énergétiques est aussi citée « Le bonus énergie sera élargi à plusieurs familles » - Le gouvernement alloue 14 milliards d’euros, élargissant la mesure à 600 000 nouveaux foyers (Messaggero). Enfin, la rencontre entre les présidents russe et chinois à Samarcande est elle-aussi citée avec couverture photographique en Une, sur le ton d’un échange jugé plus froid : « A présent l’Ukraine inquiète la Chine » (Repubblica).
Sur Twitter, le hashtag #Orban, en référence au débat au sujet des droits humains et de l’IVG en Hongrie, fait tendance.
ARTICLE, La Repubblica, S. Folli « Les Américains ne veulent pas de Salvini dans le prochain gouvernement » : « L’entretien téléphonique du Secrétaire d’Etat Blinken à Draghi a rendu encore plus clair le scénario où se situent les élections italiennes du 25 septembre. Il explique aussi le vrai sens des indiscrétions sur les financements russes en Occident. Tout est lié : la guerre en Ukraine, la détermination américaine et celle de l’Union (voir le discours de von der Leyen), le rôle de Draghi dans l’Otan et aux yeux de Washington. Et surtout, les inconnues du prochain gouvernement. Derrière l’activisme et le jeu des demi-mots, il y a des avertissements, cela ne fait nul doute. Et ils ne sont pas génériques : l’allié est en train de nous dire que la présence au sein du gouvernement d’une personnalité telle que Salvini, interprète numéro un de la ligne pro-russe, est inacceptable. Il y aurait aussi les positions de Conte et de Grillo, mais les sondages placent le M5S loin d’une possible majorité et la question n’est pas urgente. Salvini apparait comme une personnalité étant en mesure de conditionner la politique étrangère de la coalition de droite. Cela est encore plus vrai si c’est une jeune dirigeante inexpérimentée qui s’apprête à aller au Palais Chigi, outre le fait d’être à tête d’un parti qui n’a pas de lettres de créances impeccables au niveau international. Il serait injuste de dire que Blinken n’a pas fait de distinctions entre Salvini et Meloni. Il les a faites. L’objectif de cette campagne est donc le chef de la Ligue. Bref, l’action de Blinken et les éloges faits à Draghi sont aussi une façon d’informer Meloni que l’on ne peut pas se permettre d’avoir une Italie des contradictions, elle doit être atlantique et européenne. »
EDITORIAL, Il Foglio, de C. Cerasa, « L’ennui des Frères de Russie » : « Les alliés de Matteo Salvini semblent être les premiers à avoir des doutes sur la relation entre la Ligue et la Russie. Le leader de la Ligue s’est pour le moins indigné ces derniers jours des soupçons suscités par les révélations de la diplomatie américaine sur les rapports et les financements de partis politiques occidentaux par Moscou. Mais alors que Salvini se défendait de ces soupçons et revendiquait avoir joué les pro-Poutine toutes ces années à titre gratuit, centre-droit s’est retrouvé dans une situation intéressante. Chacun affirme n’avoir jamais reçu un centime de la Russie mais aucun n’est prêt à en dire autant de ses alliés. Le 10 mars dernier, à moins d’un moins du début de la guerre en Ukraine, le Parlement européen a voté une motion contre les ingérences étrangères dans la vie politique des pays de l’UE. C’est la Russie qui est plus particulièrement visée, dénonçant notamment la désinformation et la manipulation de l’information ‘’dans le but d’interférer les processus démocratiques de l’UE’’ dans le cadre d’une ‘’guerre hybride’’. La résolution évoque ensuite les ‘’financements occultes d’activités politiques par des acteurs et des donateurs étrangers’’. Le texte mentionne alors explicitement la Ligue parmi les partis européens avec lesquels la Russie cherche à établir des contacts afin de ‘’légitimer ses positions, alléger les sanctions, limiter les conséquences de son isolement international’’. Le Rassemblement National est également cité. Tous deux ont signé des accords de coopération avec le parti de Poutine Russie unie. Cette motion, qui a pour but d’empêcher la Russie d’exploiter toutes les occasions pour encourager la déstabilisation de l’UE (Brexit, séparatistes catalans…), a été votée à 552 voix. Il y a eu 81 votes contre, venant de la Ligue ou encore de l’AfD et 60 abstentions. Mais parmi ceux qui ont voté favorablement on trouve deux surprises : le groupe parlementaire dirigé par Giorgia Meloni (ECR) et le groupe auquel appartient Forza Italia, le PPE. Des parlemantaires de Fratelli d’Italia et de Forza Italia, comme Raffaele Fitto et Antonio Tajani, ont voté pour. Les alliés de Salvini estiment que son parti a de nombreux points à éclaircir. Le 6 avril dernier le Président du Conseil Mario Draghi intervenait au COPASIR et avertissait tous les partis : ‘’si vous avez des relations avec la Russie, dites-le. Nous finirons de toutes façons par le savoir.’’ Il apparait donc que les premiers à avoir des soupçons sur les relations de Salvini avec la Russie ne sont pas ses ennemis mais bien ses alliés. »
COULISSES, Corriere della Sera, de G. Sarcina et F. Sarzanini, « La stratégie du Président du Conseil et le mail des Etats-unis qui clôt pour le moment le dossier » : « Mario Draghi pourrait confirmer dès aujourd’hui en Conférence de presse que l’Italie ne figure pas dans le dossier américain des 300 millions de dollars que la Russie a distribué à 20 Etats du monde. Le Président du Conseil aurait téléphoné directement à Antony Blinken, le secrétaire d’Etat américain, pour faire le point sur le contenu du dossier. Sa réponse aurait explicite ‘’il n’y a rien sur vous’’. Le rapport doit être interprété comme une ‘’alerte globale’’, il ne mentionne pas des pays ni de forces politiques ou de leaders en particulier. Le département d’Etat explique par mail aux gouvernements qu’ils ‘’n’entrent pas dans le détail’’ mais qu’il s’agit avant tout d’exprimer clairement leur inquiétude quant aux interférences de la Russie avec le processus démocratique dans différents pays du monde : ‘’nous continuerons à travailler avec nos partenaires pour mettre en lumière ces tentatives d’influence’’. C’est le même message qui avait été passé à Adolfo Urso, président FDI du COPASIR en visite aux Etats-Unis cette semaine après une série de rencontres au Département d’Etat et avec le Président de la Commission du renseignement au Sénat. Tous l’ont rassuré sur le fait que l’Italie n’était pas citée. Reste toutefois le doute que le dossier fasse références à des sources déjà connues et des informations déjà publiées. On peut voir derrière ces informations qui ont filtré un avertissement au prochain gouvernement italien et ce ne pourrait être qu’un début. Le ministre des Affaires étrangères Luigi Di Maio affirme être en contact avec les Américains pour suivre toutes les évolutions du dossier, ce qui indique que de nombreux rapports sont en cours. Il n’est donc en rien exclu qu’au cours des prochaines semaines d’autres documents émergent mentionnant cette fois les Italiens. Ce dossier suscite des craintes et cela est confirmé par le dernier décret d’aides qui prévoit le maintien du COPASIR sous sa forme actuelle. »
COULISSES, La Repubblica, de C. Tito, « Bruxelles craint la contamination, ‘’l’ultra-droite risque de se propager à travers le continent’’ » : « Les institutions européennes craignent que ‘’l’Italie ne crée un précédent’’ et provoque un effet domino dévastateur. Hier à Strasbourg, la Ligue et Fratelli d’Italia ont voté en faveur de la Hongrie, prenant ainsi leurs distances y compris avec les populaires du PPE. Ils ont relancé ainsi les suspicions vis-à-vis d’un parti qui, dans les instances européennes est simplement qualifié de ‘’post-fasciste’’. Avec Giorgia Meloni, ce serait la première fois qu’un pays d’extrême-droite gouvernerait un des pays fondateurs de l’UE. C’est ça, au fond, qui fait vraiment peur au Parlement européen, c’est ce que presque tous mes collègues me disent’’ déclare Sandro Gozi, eurodéputé Renew. Le ‘’cordon sanitaire’’ serait rompu partout ailleurs, en Suède, en Espagne, et surtout en France où le modèle-miroir de Meloni existe déjà à travers Marine Le Pen. Comment pourrait-on encore affirmer, la prochaine fois, que le Front National ne peut pas gouverner ? Même discours pour l’Allemagne face à la montée constante de l’Afd. Ce n’est pas un hasard si cette fois le PPE, malgré le pacte avec les conservateurs d’ECR, ne les a pas suivis sur ce chemin. En réalité, les populaires européens, dirigés par les allemands, ne peuvent se permettre de franchir cette limite. Dimanche prochain la Commission européenne approuvera la suspension d’une partie des fonds européens, probablement 20%, destinés à la Hongrie s’appuyant sur le mécanisme de conditionnalité liée à l’état de droit. Il est vrai toutefois que face à l’éventuel gouvernement de droite en Italie le comportement hostile du Parlement européen est accompagné d’une prudence apeurée de la Commission et du Conseil qui veulent que le futur gouvernement de Rome fasse ses preuves. L’affaire autour de la Hongrie peut devenir le premier véritable test pour mesurer la loyauté vis-à-vis de l’Europe de Giorgia Meloni. Le vote se fera à la majorité qualifiée et d’ici le 18 octobre, quand le gouvernement Draghi aura cédé la place au nouveau. L’Italie pour alors s’avérer décisive alors que la Pologne défendra très probablement Budapest. On verra alors les positions de chaque selon une ligne bien nette. »
COMMENTAIRE, Corriere della Sera, M. Franco « Le problème d’une Italie attirée par le souverainisme » : « Les positions de Fdi et de la Ligue au Parlement européen à l’égard de la Hongrie d’Orban risquent d’avoir des retombées au niveau continental. Il est difficile toutefois qu’elles aient des conséquences sur la campagne électorale. Il est probable qu’une large partie de l’électorat qui s’apprête à voter le 25 septembre n’estime pas qu’il s’agisse d’un problème grave pouvant les toucher de près. Or, le choix fait hier risque d'alimenter la méfiance envers une Italie dirigée par le centre-droit. Combiné à l'appel à une renégociation du plan de relance approuvé par Mario Draghi, il pourrait devenir l'un des arguments permettant de raviver un préjugé anti-italien, aussi instrumental soit-il. En effet, une harmonie est constatée entre Meloni, Salvini et Orbán qui n'est pas seulement politique mais aussi culturelle. Elle s'enracine dans le partage des valeurs les plus traditionalistes. Elle se répercute sur la défense des droits et l'éducation. Et c'est pour cette raison qu'elle inquiète et agite les grandes familles politiques européennes. Meloni n'était pas d'accord avec Orbán sur l'Ukraine. Mais le choix d'hier des représentants du FdI et de la Ligue propose à nouveau un conflit avec les institutions de Bruxelles, qui risque de s'aggraver et d'impliquer aussi Rome après le 25 septembre. »
ARTICLE, La Stampa, A. Di Matteo « La prise de distance de Berlusconi face à ses alliés » : « Aux micros du TG3, le « Cavaliere » va droit au but ‘’si ces messieurs nos alliés, dont j’ai confiance et que je respecte – devaient aller et partir pour d’autres directions, nous de Forza Italia nous ne resterons pas une minute au sein du gouvernement’’. A ce stade, les deux intéressés, Salvini et Meloni, n’ont pas fait de commentaire sur les propos de leur allié Berlusconi. Les différences de vues entre le chef de la Ligue et la dirigeante de Fratelli d’Italia, notamment sur le recours à la dette, enlèvent le sommeil au PPE et aux partis européens. Comment lire donc le message de Berlusconi ? C’est son proche G. Mulè qui nous explique ‘’il s’agit d’une sorte d’assurance vie, la continuation d’une ligne claire, des valeurs qui continueront à être notre phare’’. Derrière les déclarations de Berlusconi, il y aurait aussi une certaine préoccupation diffusée au sein de son parti Forza Italia sur le fait que le 25 septembre puisse de révéler une victoire à la Pyrrhus. Une source anonyme du parti assure ‘’Il y a le risque que le gouvernement dure seulement six ou neuf mois. Et Meloni risque de subir l’effet d’ivresse qu’avait eue Salvini en son temps’’. »
PREMIER PLAN, Il Messaggero, d’A. Bassi, « Le bonus énergie est étendu à 600 000 familles et il y aura davantage de réductions pour les entreprises. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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