"Draghi : je ne gouvernerai pas sans le M5S."
01/07/2022
Italie. Revue de presse.
Les déclarations de M. Draghi en conférence de presse hier, réaffirmant que le gouvernement tiendra seulement avec le M5S en son sein, et les coulisses de sa rencontre avec le Président S. Mattarella, font les gros titres de la presse italienne. « Draghi : je ne gouvernerai pas sans le M5S » - Le Président du Conseil, après avoir consulté Mattarella, met fin à « l’affaire Grillo » (Corriere della Sera), « Mattarella verrouille le gouvernement » - Le Quirinal obtient l’engagement de G. Conte qu’il ne sortira pas de la majorité. Draghi exclut toute autre majorité pouvant le soutenir (La Repubblica), « Draghi met en sécurité le gouvernement : j’irai de l’avant exclusivement avec les 5 Etoiles. Mattarella parvient à désamorcer la crise (La Stampa), « Draghi neutralise Conte » - L’assaut au gouvernement a été déjoué, Draghi a mis Conte devant ses responsabilités (Il Giornale). L’annonce de nouvelles mesures contre la flambée du prix de l’énergie est aussi citée : « Le gouvernement annonce 7 milliards pour freiner la hausse des prix de l’énergie sur les factures et le stockage de gaz » (Sole 24 Ore).
PREMIER PLAN, Il Foglio, « L’Italie s’arme en vue de la contre-offensive en Ukraine » : « […] Le gouvernement italien affirme être en mesure de remplir à 90% les réservoirs de gaz d’ici novembre mais serait surtout prêt à faire passer une mesure d’urgence pour l’ ‘’extraction d’une partie des 90 milliards de mètres cube de gaz se trouvant dans l’Adriatique’’, une mesure très largement approuvée, hormis par le M5S. […] »
COULISSES, La Repubblica, T. Ciriaco et C. Vecchio : « Draghi et Mattarella prennent Conte en étau pour empêcher un saut dans l’inconnu » : « Avec le chef de l’Etat, Draghi choisit la seule stratégie possible de dissuasion contre le délitement déjà en marche : après le gouvernement actuel, le seul choix restant serait des élections. ‘’Je n’accepterai pas de conduire un ’autre gouvernement que celui-ci’’ déclare-t-il. Le Quirinal approuve. Draghi doit rendre ce message public de manière à laisser à Conte tout le poids de sa décision éventuelle [de quitter la majorité] sur les épaules : le Mouvement est trop important pour envisager de le laisser sortir. Traduction : si tu provoques la rupture, tu le fais contre un pacte d’unité nationale, contre l’Europe, contre les alliés engagés dans une guerre. La forme est aimable, mais le fond est sans pitié. Draghi est plus qu’irrité : il est furieux. Il a dû quitter un Sommet de l’OTAN historique pour une polémique née d’un coup de téléphone auquel un sociologue a fait allusion et qui est remonté jusqu’au Quirinal. Draghi a tenu Mattarella au courant de l’issue des Sommets et de l’agenda des prochains mois, donnant ainsi l’impression de vouloir poursuivre son engagement – à ses propres conditions. Et c’est le message qu’entend transmettre le chef de l’Etat au monde politique : il n’y a pas d’autres solutions envisageables. L’isolement de Conte devient une perspective politique : une crise de gouvernement et un appui seulement extérieur à la majorité signifierait la fin de l’alliance avec le PD. Le retrait du M5S est, en outre, inacceptable pour Draghi car Matteo Salvini profiterait de l’occasion pour marquer aussi sa différence. Si Draghi affiche une image d’assurance, personne ne pense que l’histoire ne s’arrêtera là. Le bruit court que le leader du M5S pourrait décider de quitter la majorité malgré tout. Deux moments seront particulièrement périlleux : le décret interministériel sur les armes des prochains jours et l’arrivée du décret sur les aides à la Chambre. L’alerte reste élevée : pour voter en octobre, il faudrait consommer la rupture d’ici début août. »
COULISSES, Il Corriere della Sera, M. T. Meli : « Letta parle à Conte : si vous partez, on va tout de suite au vote et c’est chacun pour soi » : « Aucun doute pour Enrico Letta : dans la querelle Draghi-Conte, il prend parti pour le premier et critique le second. Cela fait un moment que les relations entre le PD et le M5S ne sont plus idylliques, elles sont encore plus distendues ces jours-ci. Letta est agacé par les sorties de l’ancien Premier ministre et il le lui a dit. « Les rapports entre Draghi et Conte se sont détériorés et les Cinq-Etoiles pourraient avoir la tentation de sortir du gouvernement en septembre » disent, inquiets, les membres du PD. C’est la raison pour laquelle Letta a expliqué au leader du M5S que « parler d’appui extérieur est inopportun et absurde ». Puis, il lui a exposé ce raisonnement : si vous optez pour devenir un « appui extérieur » à la majorité, on va tout droit aux élections, et chacun pour soi. Letta a annoncé que le PD n’appuiera pas d’autres gouvernements que l’actuel tandis que Draghi se dit indisponible pour guider une autre majorité que celle-ci. Les deux discours se superposent et montrent que le temps où les Démocrates couraient après les Cinq-Etoiles est fini. Cela ne veut pas dire que le PD ne s’alliera plus avec le M5S mais il le fera à ses conditions – et uniquement si le système électoral ne change pas. En privé, Letta explique : ‘’La proportionnelle favoriserait toutes les forces dans l’action politique’’. »
COMMENTAIRE, La Repubblica, S. Folli « Une guérilla sans issue » : « La stratégie de Giuseppe Conte est la suivante : maintenir un haut niveau de tension sans jamais arriver à un point de rupture, mais les modalités et les résultats de ce schéma sont assez prévisibles. Conte avait besoin d’un « accident » pour sortir de l’impasse où il se trouvait en raison de l’effritement du Mouvement 5 Etoiles et pour répondre à l’hostilité évidente de Beppe Grillo. L’opération a été conçue pour créer un maximum de désordre possible : au moment où le Président du Conseil se trouvait à l’étranger aux prises avec la réorganisation de l’Otan en période de guerre. Il faut reconnaitre toutefois qu’il s’agissait d’une tempête dans un verre d’eau. La majorité a tendance à s’effriter en raison non seulement des difficultés intérieures du M5S mais aussi à cause de la crise de leadership de Matteo Salvini au sein de la Ligue. Ces deux tensions risquent de se cumuler et de s’alimenter réciproquement. Quant au retour anticipé de M. Draghi du sommet de l’Otan, on doit le lire comme un geste d’attention envers ces partis pour lesquels il avait gardé jusque-là une certaine distance. Il s’agit aussi un message adressé à l’étranger : il est le seul à pouvoir garder sous contrôle cette politique italienne en ébullition. Aujourd’hui comme hier, Draghi et Mattarella sont la meilleure garantie aux yeux des partenaires étrangers. »
ENTRETIEN, La Nazione, d’Enrico Letta, dirigent du Parti démocrate « Pour nous, ce gouvernement est le dernier de la mandature » : « ‘’Je ne vois pas de gros risques pour le gouvernement. Je vois plutôt la nécessité de comprendre comment nous parviendrons à imprimer un tournant social nécessaire à l’Italie pour les prochains mois qui s’annoncent difficiles du point de vue économique pour les ménages et les entreprises. Le gouvernement est né avec cette équipe et avec cette majorité. Pour nous, la mandature se terminera avec cet exécutif et cette équipe. Draghi lui-même a dit qu’il n’était pas intéressé par d’autres majorités. En même temps, il est fondamental que les partis ne superposent pas leurs propres batailles à l’agenda de gouvernement. Quant à l’ultimatum de la Ligue sur le « Ius Scholae » autorisant l’accès à la citoyenneté pour les étrangers ayant étudié en Italie, c’est un geste tout-à-fait déplacé. Les thématiques sociales relèvent de l’agenda parlementaire. Du reste, quand la Ligue a torpillé la loi Zan [contre la transhomophobie, ndt.], nous n’avons pas fait tomber le gouvernement.’’ »
ENTRETIEN, La Stampa, de Riccardo Molinari, chef de groupe de la Ligue à la Chambre « La gauche garde une posture suicidaire. En agissant ainsi, le PD finira par faire tomber le gouvernement » : « ‘’La gauche veut proposer au Parlement deux textes clivants sur le cannabis et sur le Ius Scholae, qui sont inconciliables avec les positions de la Ligue. Cela va contre le pacte qui nous permet ensemble de soutenir un gouvernement d’unité nationale pour affronter les urgences. Si les textes devaient être adoptés, cela constituerait un problème politique. Par ailleurs, il est faux de dire qu’un mineur étranger à moins de droits qu’un citoyen italien. En temps normal, le gouvernement est assuré de passer l’été sans crise, or, dans le contexte actuel, on risque d’aller vers l’irréparable. Si cela devait se produire, la gauche devra en assumer la responsabilité.’’ »
PREMIER PLAN, Il Messaggero, de M. Evangelisti, « La lutte contre le Covid ; les hospitalisations sont en hausse ; contre la nouvelle vague, le port du masque FFP2 à nouveau recommandé au travail. »
ARTICLE, Corriere della Sera, S. Montefiori « Sur les terroristes, Macron est aux côtés de l’Italie : il faut vérifier la possibilité d’un recours. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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