"La Ligue et le M5S ont entamé ensemble l'opération de désengagement du gouvernement."
30/06/2022
Italie. Revue de presse.
La presse italienne titre largement sur les tensions au sein de la majorité, alors que Giuseppe Conte aurait accusé Mario Draghi de s’immiscer dans les affaires internes au M5S : « Gouvernement, haute tension » - Draghi anticipe son retour du sommet de l’OTAN pour convoquer un Conseil des ministres extraordinaire. Conte déplore un complot contre lui mais le Palais Chigi dément toute pression (Corriere della Sera), « Le gouvernement est assiégé » - Conte se rend au Quirinal et accuse Draghi d'avoir fait pression sur Grillo pour le chasser mais le Palais Chigi dément. Salvini s'oppose aux réformes sur le cannabis et le droit de citoyenneté pour les étrangers ayant étudié en Italie (La Repubblica), « Le bras-de-fer entre Draghi et Conte met le gouvernement en danger » - Salvini menace de sortir de la majorité si la réforme du droit de citoyenneté devait être adoptée (Stampa), « Draghi a demandé à Grillo d'isoler Conte et de suivre Di Maio » - Après le scoop de notre quotidien, Conte se rend chez Mattarella et déplore de graves interférences (Fatto Quotidiano). La décision de la Cour d'appel de Paris rejetant les demandes d'extradition de dix brigadistes italiens est aussi largement citée en Une et en pages intérieures, les commentaires évoquant en général un « affront » aux familles des victimes ainsi qu'une décision « inattendue » : « La France s'oppose à l'extradition de Piersanti et de 9 brigadistes » (Corriere), « Années de plomb, l'affront de la France à l'Italie » (Repubblica), « L'affront aux familles des victimes » (Il Messaggero),« Les 10 terroristes sauvés et l'humiliation des Italiens » (Il Giornale).
PREMIER PLAN, Il Corriere della Sera, C. Zapperi : « Conte contre Draghi. Un coup de téléphone et le leader du M5S se rend au Quirinal » : « Les pressions présumées de Mario Draghi sur le fondateur du M5S, Beppe Grillo, pour faire en sorte que ce dernier évince l’ancien Premier ministre, G. Conte, révélées au sociologue De Masi et à divers parlementaires par Grillo lui-même, ont été à l’origine d’une des journées les plus agitées de la relation entre Draghi et Conte. Dans la soirée, Conte s’est rendu au Quirinal pour un dialogue de plus d’une heure avec le Président Mattarella. L’ancien Premier ministre, après avoir précisé ne pas vouloir mettre à risque le gouvernement, a exposé ses préoccupations au chef de l’Etat. « Je trouve sincèrement grave qu’un Premier ministre technicien (…) s’entremette dans la vie des forces politiques qui le soutiennent ». La journée a été fatigante parce que les « révélations » sur Conte se sont entremêlées avec la présence, à Rome, de Grillo et ses rencontres frénétiques avec les parlementaires. Il y a deux dilemmes à résoudre : celui du soutien au gouvernement et celui de la limite des deux mandats. Conte a répété qu’aucun changement de stratégie n’est prévu vis-à-vis du gouvernement : une ligne partagée par la ministre Fabiana Dadone et Grillo lui-même, bien que ses révélations sur les pressions présumées de Draghi aient créé une sorte de court-circuit. Quant à la question de la dérogation à la limite du double mandat, Grillo a fini par l’empêcher. C’est le sous-secrétaire aux Infrastructures, Giancarlo Cancelleri, qui, le premier, en a fait les frais. »
ARTICLE, La Repubblica, F. Bei « La réaction de la Ligue et du M5S, les grands perdants des élections » : « La réaction des perdants des élections locales est arrivée avant l'heure. Et l'on s'étonne de la symétrie avec laquelle la Ligue et le Mouvement 5 étoiles, qui sont sortis meurtris des élections municipales, ont entamé ensemble - bien qu'avec des motivations différentes - l'opération de désengagement du gouvernement Draghi. Nous avons donc plongé dans une situation de tension interne à la majorité sans précédent depuis seize mois, au point d'avoir obligé le Président du Conseil à avancer précipitamment son retour à Rome, quittant le sommet de l'OTAN un jour plus tôt, après avoir appris que Conte était monté au Quirinal. C’est une journée à oublier, où le vacarme des querelles italiennes est venu couvrir les résultats du sommet de Madrid. C'est comme si, en fin de mandature, les deux populistes qui se sont unis en mariage en 2018, donnant naissance à l'un des pires gouvernements depuis l'après-guerre, se retrouvaient encore ensemble pour faire tomber Draghi. Et peut-être qu'ils y parviendront. Comme dans le conte de Swift, les Lilliputiens ont réussi à ligoter Gulliver pendant son sommeil, et maintenant ils veulent le condamner à mort. Malgré le fait que le géant ait éteint le feu dans le palais royal. »
ARTICLE, La Stampa, M. Sorgi « La tempête qui peut provoquer une crise » : « Que les relations entre Draghi et son prédécesseur n'étaient pas bonnes, on le savait déjà et on a pu le constater il y a un an et demi, lors des consultations que le Président du Conseil avait tenues avant de lever la réserve. Conte avait refusé de rejoindre le gouvernement en tant que ministre des affaires étrangères et n'avait pas caché qu'il s’était senti blessé par la façon dont il avait été expulsé du Palais Chigi (le fameux "Conticide"). Conte, contrairement à l'aile la plus radicale de ses députés, n'a pas l'intention d'ouvrir une crise. Mais il a besoin de visibilité et de pouvoir dire qu'il a persuadé/forcé Draghi à faire des concessions. Les négociations, annoncées par le président du Conseil, qui reprendront aujourd'hui entre les deux, donnent au leader du Mouvement 5 étoiles un avantage. Si Draghi ne le rejoint pas à mi-chemin sur les armes à l'Ukraine et l'usine d’incinération de déchets à Rome, sujets sur lesquels les groupes parlementaires 5 Etoiles sont toujours en ébullition, Conte pourra justifier le départ de son parti du gouvernement, tout en accusant Draghi de ne pas tenir compte des besoins de son parti, voire d'avoir manigancé pour pousser Di Maio à la scission. Quand il parle d'"interférence" de la part du "Président du Conseil technique", Conte veut dire exactement cela. Surtout, pour Draghi, le temps où il pouvait se passer de l'avocat du peuple, après les révélations de Grillo, est révolu : maintenant, soit il peut trouver un compromis avec Conte, soit il risque une rupture avec ce qui reste du Mouvement 5 étoiles. »
ARTICLE, La Stampa, de D. Ceccarelli, « Une gifle assénée à l’Italie » : « A l’annonce de la sentence de la Cour d’Appel de Paris hier, les dix anciens terroristes rouges laissent éclater leur joie. Le souvenir des arrestations menées au mois d’avril 2021 dans la capitale lors de l’opération ‘’Ombres rouges’’ est encore fort et après des mois de renvois, ils vont retourner à leurs vies de tous les jours. Pour les autres, c’est une défaite inattendue. Le député léghiste Daniele Belotti venu avec une délégation et certains représentants de l’Association des Carabiniers de Bergame dit toute son indignation, accusant la France de continuer à défendre ces assassins terroristes avec une sentence honteuse. Un recours en Cassation du Procureur reste toutefois possible, souligne un des avocats de la défense. Pour lui, il y a une évidente ‘’volonté politique de la part de l’Italie et de la France pour que l’extradition ait lieu mais la justice française a montré son indépendance’’. L’avocate Irène Terrel explique elle aussi que c’est la ‘’justice qui fait obstacle à la raison d’Etat’’ et qu’il n’y a aucun recours possible selon elle. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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