"Les responsables européens se montrent très critiques concernant un possible déplacement de Matteo Salvini à Moscou."
01/06/2022
Italie. Revue de presse.
Le dernier rapport sur l’économie italienne faisant état d'une hausse de l’inflation et les déclarations du gouverneur de la Banque d’Italie, Ignazio Visco, font la une de la presse italienne. Son appel à ne pas indexer les salaires sur le niveau des prix est particulièrement repris. « L’inflation atteint 6,9%, Visco prévient ‘’il faut éviter une course vaine entre les salaires et les prix’’ » (Corriere della Sera), « La poussée de l’inflation - Le nouveau plan d’aides de Mario Draghi, un milliard d’euros par mois pour contenir les prix de l’essence » (La Repubblica), « Pour Visco ‘’les augmentations de salaires doivent rester exceptionnelles’’ » (La Stampa), « Visco dit ‘non à une course effrénée entre les prix et les salaires et à l’augmentation de la dette mais veut un ‘’Plan de relance permanent’’ » (Sole 24 Ore)
Les efforts diplomatiques européens face à la guerre en Ukraine sont largement cités, notamment les sanctions contre la Russie et les pistes pour débloquer les denrées alimentaires. « Le premier oui de Bruxelles pour un plafonnement des prix du gaz – ‘’Les sanctions seront efficaces cet été’’ affirme Mario Draghi après l’accord en Europe. À l’attention de Salvini, il rappelle l’ancrage de l’Italie à l’UE et au G7 » (Corriere della Sera), « La ville de Severodonetsk en grande partie contrôlée par les troupes russes - La gestion de la Turquie pour débloquer le blé » (La Repubblica), « Une flotte de l’ONU pour escorter les cargaisons de blé - ‘’Le plafonnement des prix du gaz en UE est une victoire pour nous’’ déclare Draghi, qui demande à Salvini de la transparence en cas de voyage à Moscou », « Biden fait marche arrière et autorise l’envoi de missiles de moyenne portée à Kiev, ‘’à condition de ne pas frapper la Russie’’ insiste la Maison Blanche » (La Stampa), « Gaz, un plafonnement contre la spéculation » (Il Messaggero), « Sanctions de l’UE sur le pétrole russe à partir de 2023 - les premières ouvertures pour un plafonnement des prix du gaz » (Sole 24 Ore).
Les JT couvrent essentiellement l’issue du Conseil européen extraordinaire ayant abouti à un 6ème paquet de sanctions et notamment un embargo sur le pétrole russe, le satisfecit de l’Italie sur le plafond aux prix du gaz. La bataille de Severodonetsk ainsi que les frappes russes sur un dépôt d’acide nitrique sont également abondamment relayées. Les déclarations de Kiev selon lesquelles Poutine voudrait conquérir complètement le Donbass d’ici au 1er juillet ainsi que l’annonce d’un nouvel envoi de missiles américains en Ukraine font également l’objet de sujets.
PREMIER PLAN, Il Corriere della Sera, M. Galluzzo : « Plafond aux prix du gaz : nous sommes satisfaits. Entre tous les grands pays, nous sommes les seuls à vouloir l’Ukraine dans l’UE » : « Lundi, les leaders ont fait une nuit blanche mais, selon Mario Draghi, « l’embargo sur le pétrole est un succès complet et l’Italie n’en sort pas pénalisée ». Certes, il n’est pas question encore d’un embargo sur le gaz et le Premier ministre reconnaît que continuer à acheter de l’énergie russe finance directement la guerre « mais il est impossible de faire autrement. C’est une situation frustrante, qui nous met dans l’embarras et qui sera résolue ». L’Italie remporte quelques avancées sur la mise en place d’un plafond aux prix du gaz, au moins en cas de flambée. Tous les Etats membres ont donné leur accord, même l’Allemagne et les Pays-Bas. La crise alimentaire est désormais un dossier « géré par les Nations Unies » même si « nous aussi, nous pouvons proposer une contribution avec notre Marine militaire ». « Si nous perdons la guerre de la sécurité alimentaire, nous perdons un bout d’Afrique qui, pour le moment, n’a pas pris parti pour l’Occident. » « Le statut de candidat [de l’Ukraine, ndr] rencontre des oppositions de la quasi-totalité des grands Etats de l’UE, à l’exclusion de l’Italie. Il faut imaginer un parcours rapide vers ce statut. La Commission présentera un rapport à la fin du mois. » Sur ce point, comme sur la défense européenne, les progrès à faire sont encore nombreux : « L’UE importe 60% de ses armements », « le choix des armes et des fournisseurs est national et c’est une prérogative jalousement gardée par les généraux. Il faut donc que ces derniers fassent un effort pour plus se parler. »
PREMIER PLAN, La Repubblica, d’E. Lauria, “Les responsable européens sur le voyage à Moscou, ‘’il veut aider Poutine’’ ; au sein de la Ligue c’est le règlement de comptes suite au vote » : « Les responsables européens se montrent très critiques concernant un possible déplacement de Matteo Salvini à Moscou. Le vice-président de la Commission Margaritis Schinas est cinglant, rappelant l’épisode du déplacement en Pologne et du tee-shirt à l’effigie de Poutine. Le commissaire européen au budget Johannes Hahn affirme que ‘’les tentatives pour rétablir la paix entre la Russie et l’Ukraine doivent être menées entre les gouvernements’’. A Bruxelles, Salvini est perçu comme une menace, parfois une expression de la propagande velléitaire. Certains rappellent ses liens d’amitié avec Poutine, pour d’autres ça n’a pas d’importance mais il ne sera de toute façon pas un bon négociateur. En Italie aussi, certains soutiens prennent leurs distances, ‘’je ne sais rien de l’initiative du leader de la Ligue. Ce qui est sûr c’est que des actions de ce type doivent être concertées avec le gouvernement italien et le reste de l’Europe’’ déclare Silvio Berlusconi. Au sein de la Ligue, Salvini ne manque pas de soutien, notamment de la part des chefs de groupe au Sénat et à la Chambre, alors que d’autres prennent leurs distances, comme Giorgetti, ou évitent tout commentaire, comme Zaia et Fedriga. On s’attend à un règlement de compte dès le lendemain des élections administratives. »
ENTRETIEN, Il Corriere della Sera, d’Antonio Capuano [conseiller de Matteo Salvini], par C. Zapperi : « ‘’L’ambassadeur a compris que Matteo [Salvini] voulait faire œuvre utile et il l’a invité à faire d’autres pas en avant’’ » : « Le moment décisif s’est produit le 19 mai : l’intervention de Matteo Salvini au Sénat a été appréciée par les Russes qui ont reconnu sa volonté de faire quelque chose de sérieux pour mettre fin à la guerre. Ils ont compris que Salvini voulait faire œuvre utile et l’ont invité à poursuivre son action. Le secrétaire de la Ligue a expliqué son projet en quatre points à l’ambassadeur [Razov] ; les Russes lui ont accordé leur confiance préalable. La condition sine qua non [posée par Salvini] était le cessez-le-feu. La réponse a été : nous sommes prêts à en parler, nous pouvons suivre ce chemin. La rencontre devait advenir à Moscou mais le résultat était à portée de main. Pour la première fois, une trêve était possible. Puis, nous avons essayé d’impliquer un garant moral. Ce n’est pas un hasard si nous avons été reçus au Vatican. Il ne nous a pas donné sa bénédiction. Au moment opportun, nous aurions informé le Premier ministre et la Ligue. Salvini n’aurait doublé personne. Certaines opérations ne peuvent simplement pas être rendues publiques. »
ARTICLE, La Repubblica, « Salvini et Capuano : la visite éclair du 19 mai à l'ambassade de Russie pour doubler Draghi », par Emanuele Lauria Conchita Sannino : « Il a vu au moins 4 fois l’ambassadeur russe depuis le début de la guerre. "Oui. C'était la séquence, plus ou moins, nous l'avons construite petit à petit", confirme l'avocat Antonio Capuano. Le premier rendez-vous tombe le jour où le Premier ministre déclare devant les Chambres : "Nous ne nous serons pas indifférents face à l’agression russe ». Une autre, la plus importante, au quatre-vingt-cinquième jour du conflit, intervient après que le chef du gouvernement a lancé au Sénat : "Nous devons amener Moscou à la table des négociations immédiatement". Et ce bien que Draghi répète que la ligne d'aide militaire ne change pas, que l'exécutif "continuera à avancer dans le sillon de cette résolution". Draghi, depuis Bruxelles hier, s'est contenté de mettre de l'ordre dans les fondamentaux et a appelé à la "transparence". “Le gouvernement est fermement attaché à l'Union européenne et à la relation transatlantique historique. J'ai été très clair à ce sujet". Alors que le Copasir a annoncé avoir entamé "les procédures d'information habituelles" sur le mystérieux activisme de l'ancien député Capuano "en relation avec certaines représentations diplomatiques dans notre pays sur des questions relatives à la sécurité nationale". Et donc, que se passe-t-il le 19 mai ? Salvini avait bien travaillé pour le retrait de la candidature de Moscou à l'Expo. « Il est clair qu'il n'y a pas eu d'accord, mais nous sommes allés à la réunion quelques heures après le discours du premier ministre au Sénat. C'est à partir de ce moment que l'idée d'un plan en quatre points, tel que nous l'avions imaginé, a vraiment commencé à prendre son envol" déclare Capuano. Le fait que le Premier ministre n'ait pas du tout été informé ? "Mais nous l'aurions fait. Il est clair que s'il n'avait pas accepté, nous ne serions jamais allés à Moscou. Et il est clair que nous aurions écrit le Plan à six mains". Comment : à six mains ? "Nous trois. Lui, Draghi et Salvini“. Un récit à mi-chemin entre la science-fiction et le grotesque. Pourtant, l'ancien député FI a cultivé avec le leader de la Ligue le "projet" de la mission de paix avec Moscou, qui devait se transformer en voyage dimanche dernier. "Puis, quelqu'un divulgue la nouvelle et tout tombe à l’eau. Certains soupçonnent que c'est précisément des rangs de la Ligue que la torpille est partie pour les frapper dans le dos. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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