""Bravo Viktor!" De Salvini à Meloni, les droites exultent."
05/04/2022
Italie. Revue de presse.
Le massacre de Boutcha perpétré par l’armée russe et les réactions du monde occidental demandant une enquête internationale font toujours les gros titres des quotidiens italiens. Les commentaires mettent également en exergue les divisions de l’UE sur l’embargo au gaz russe « « Il faut juger Poutine le criminel » » - Biden accuse, Zelensky se rend à Boutcha et qualifie les Russes de « bouchers ». L’Italie est prête à expulser les diplomates russes (Corriere della Sera), « L’abattoir de Poutine » - Des fosses communes, des exécutions, des tortures et des viols : les témoignages se multiplient sur la brutalité de l’envahisseur. Lavrov rejette toute accusation : c’est un mensonge (La Repubblica), « Les martyrs de Boutcha » - Zelensky se rend sur les lieux du drame ; l’Occident tout entier condamne le massacre, Biden promet de nouvelles sanctions (Stampa), « Un procès contre l’horreur » - L’Europe se divise sur le gaz russe, l’Allemagne et l’Autriche s’opposent à l’embargo sur le méthane de Moscou. Draghi insiste sur l’instauration d’un prix-plafond. Berlin et Paris expulsent 70 diplomates (Il Messaggero), « L’horreur, fin aux importations de gaz russe puis le rétropédalage » - L’Europe, hypocrite, menace d’instaurer des sanctions qu’elle ne peut mettre en œuvre (Fatto Quotidiano), « L’Europe divisée, le gaz vaut plus que les morts » - La pierre tombale sur le dialogue, Macron et les « modérés » s’alignent avec Biden (Il Giornale).
ARTICLE, Corriere della Sera, de S Montefiori, « A Paris et Berlin, des diplomates de Poutine deviennent ‘’persona non grata’’ ; l’Italie aussi prépare des expulsions. »
ARTICLE, Il Corriere della Sera, A. Marinelli et G. Olimpio : « Des bombes sur Odessa et les contre-attaques ukrainiennes. Poutine a besoin de nouveaux soldats » : « Le conflit est entré dans une phase de transition, dans l’attente que l’Etat-major russe tente de relancer une offensive. Entretemps, la Russie frappe à coups de canons et de missiles les cibles ennemies, y compris Odessa. Les Ukrainiens répliquent à Tchernihiv. Les unités russes qui se replient au Nord se dirigent vers deux directions : une partie se rend en Biélorussie pour une pause, l’autre se déplace vers le sud-sud-est. Il s’agit d’un « regroupement » pour remettre ensuite la pression. La situation dépendra également beaucoup du sort de Marioupol. Moscou doit prendre la ville pour trois raisons : c’est un symbole, une prise de guerre, une victoire partielle qui permettra à Moscou de déplacer ailleurs ses forces. La conquête de ce bout de terre finalisera la création d’un corridor avec la Crimée et fera naître une continuité « physique » utile au Kremlin aux niveaux militaire et politique. Selon Michael Kofman, Moscou ne peut, en théorie, pas déployer le contingent parce qu’elle n’a pas déclaré « l’état de guerre ». Peut-être Poutine sera-t-il obligé d’appeler « l’opération militaire spéciale » par son vrai nom. Il a besoin de fantassins pour former de nouveaux bataillons et pourrait donc faire les fonds de tiroirs. A ces bataillons devraient s’unir les miliciens de la Wagner et, peut-être, les mercenaires syriens (Damas dit ne pas avoir reçu de demandes) et tous ceux qui se porteront volontaires. Reste à savoir quelle sera la qualité de l’offensive, même si Moscou, selon la tradition, pourrait plutôt miser sur la quantité. »
PREMIER PLAN, La Repubblica, de Gianluca Di Feo, « Aides militaires : dans un parc les Ukrainiens montent les premières armes fournies par l’Italie » : « Les premières images des soldats ukrainiens essayant les mitraillettes envoyées par l’Italie nous sont parvenues. A première vue, les soldats semblent un peu désorientés. Il s’agit de MG 42/59,, connue pour sa capacité de feu et que des unités italiennes avaient utilisé dans les affrontements contre les talibans. Il est toutefois certain que la contribution de guerre italienne ne se distingue pas pour son niveau de technologie. Les militaires ukrainiens préfèrent exhiber les missiles Javelin et Nlaw de dernière génération fournis par les Américains et les Britanniques. L’armée italienne disposerait de missiles encore meilleurs, les Spike, mais le constructeur israélien n’aurait pas autorisé leur envoi à Kiev par le gouvernement Draghi, pour des raisons diplomatiques et de peur qu’ils soient saisis par les Russes. L’opération de soutien à l’Ukraine reste entourée du secret militaire, rendant difficile d’éclaircir ces points. L’Italie a quoi qu’il en soit fourni des missiles terre-air, précieux pour la défense contre les avions de chasse et les hélicoptères de Moscou, ainsi que des roquettes anti-char. Les quantités sont toutefois limitées car depuis la Guerre Froide il y avait moins d’attention pour les armements traditionnels. Un contrat pour l’achat de 1000 nouveaux missiles Panzerfaust efficaces contre les chars russes a été signé le 28 février dernier. D’autres missiles ont également été envoyés, datant de 1993 mais encore efficaces. La question de l’entraînement des soldats ukrainiens à leur usage se pose toutefois. Idem pour les mortiers de 120 millimètres. Autant d’éléments qui n’ont pas enthousiasmé les commandements à Kiev et les armes envoyées par l’Italie n’avaient pas été vues sur le front pendant plusieurs semaines. Mais dans la guerre d’usure qui s’installe, toute arme est désormais bonne à prendre. En réalité, il y a bien un équipement militaire italien très apprécié des Ukrainiens : les véhicules blindés ‘’Lynx’’ que nous ne leur avons pas fourni directement mais qu’ils ont soustrait aux Russes. En 2011, sous le dernier gouvernement Berlusconi, une licence avait été signée avec Moscou pour la construction de près de 1700 exemplaires. Au moins 600 véhicules seraient en service dont certains sont utilisés à Marioupol et dans le Donbass. Une dizaine aurait fini entre les mains des soldats ukrainiens qui les utilisent avec une grande satisfaction pour leur efficacité. »
ARTICLE, Il Corriere della Sera : « Les menaces de mort contre Di Maio » : « « Poutine, envoie quelqu’un pour le tuer ». Le ministre des Affaires étrangères, Luigi di Maio, a été menacé de mort sur les réseaux sociaux et sur certains canaux Telegram. Une partie des profils qui ont émis les messages sont caractérisés par la lettre « Z », symbole de l’invasion russe en Ukraine. Le président du Conseil, Mario Draghi, a fortement condamné ces propos, qualifiés de « menaces horribles », et a exprimé sa solidarité envers le ministre. Des messages de soutien à Di Maio sont arrivés de l’ensemble de la classe politique italienne. Dans la soirée, le ministre a déclaré : « Les menaces ne mettront pas fin à notre action pour condamner la guerre de Poutine » ».
COMMENTAIRE, La Repubblica, S. Folli « Si la guerre finit par rapprocher Conte et Salvini » : « La guerre en Ukraine, avec ses atrocités, continue de creuser l’écart entre les partis politiques en Italie. De vieilles alliances se heurtent à de nouvelles réalités et le résultat final n’est pas complètement prévisible. G. Conte, par exemple, dans un entretien à Repubblica, s’en prend à « un vieil atlantisme quasi-religieux uni par un esprit belliciste ». Acculé par la position clairement atlantiste de son allié Enrico Letta du PD, Conte fait un clin d’œil au sentiment antiaméricain et anti-Otan, tout en gardant son ambiguïté. Salvini aussi se retrouve au pied du mur : si Forza Italia n’effectue pas une action de clarification comme le PD en raison de veilles amitiés – aujourd’hui refroidies – entre Berlusconi et Poutine, Salvini se retrouve néanmoins en position de déclin. A l’instar de Conte. Ils sont tous les deux enlisés dans leur ambiguïté et cela finira tôt ou tard par impacter l’équilibre politique ».
ARTICLE, Corriere della Sera « Isoler ou négocier ? La victoire d’Orban met dans l’embarras l’UE alors que Poutine s’en réjouit » : « Le score avec lequel V. Orban a remporté les élections, 53% des voix, a choqué l’Europe. Et les remerciements dans la nuit ont ajouté le désarroi : il a dit qu’il a gagné aussi contre Zelensky, au moment même où l’on découvrait les horreurs de Boutcha. Comment peut-on maintenant s’associer, en Europe, avec un Premier ministre qui triomphe sur la base de politiques liberticides, contre l’UE et avec une position sur l’Ukraine appréciée par Poutine ? Sanctionner davantage Orban signifie sanctionner les Hongrois qui ont voté pour lui. L’expérience en 2000 contre l’Autriche d’Haider est parlante. S’agit-il d’une exception hongroise ou bien d’un phénomène qui peut se reproduire auprès d’autres électorats préférant se tenir à l’écart de la guerre en Ukraine ? Il est difficile de répondre. Les élections en France nous diront probablement quelque chose à cet égard. »
ARTICLE, La Repubblica, de C. Vecchio, «‘’Bravo Viktor!’’ De Salvini à Meloni, les droites exultent » : « [Suite à la réélection de Viktor Orban] les souverainistes italiens font la course à qui félicitera en premier l’autocrate reconfirmé à Budapest. Matteo Salvini poste immédiatement une photo d’eux deux, comme il l’avait fait pour Trump et Poutine. Le secrétaire de la Ligue lui dédie deux publications sur les réseaux sociaux, alors qu’il ne fait aucun commentaire sur les horreurs de Boutcha. Giorgia Meloni souligne quant à elle ‘’une extraordinaire victoire’’. Simone Pillon, sénateur léghiste connu pour son opposition à la Loi Zan, et l’eurodéputée no-vax Francesca Donato ont eux aussi exprimé leur satisfaction. Carlo Calenda compare quant à lui ces réactions à celle du Kremlin et s’indigne de la présence de la Hongrie au sein du l’UE alors qu’elle est pour lui ‘’la cinquième colonne de la Russie’’. »
ARTICLE, Il Messaggero, F. Pierantozzi : « L’ombre du vote pro-Poutine atteint la France. Le Pen menace Macron » : « Les élections de Vucic en Serbie et d’Orban en Hongrie montrent que le front anti-Poutine n’est pas aussi compact que le voudraient les principaux leaders européens. A cinq jours du premier tour des élections présidentielles françaises, les sondages annoncent un duel entre Macron et Le Pen au second tour, crédités chacun de 47% et 45% des intentions de vote : une fourchette qui entre dans la marge d’erreur. Le Pen n’a jamais été aussi près de l’Elysée. Cependant, comme le fait remarquer le think tank Terranova, « si Marine Le Pen était élue, la Présidente de la République française serait quelqu’un qui dépendrait financièrement de l’entourage de Poutine pour toute la durée du mandat ». Sa campagne est, en effet, financée par des fonds russes et hongrois. Le remboursement d’une dette de 8 millions d’euros à la société russe Aviazapchast (qui avait racheté le prêt du RN à la banque russe FCRB) a été gentiment repoussé à 2028. Tandis que pour la campagne actuelle, Le Pen s’est adressée à « la banque hongroise MKB, de laquelle elle a obtenu un prêt de 10.6 millions d’euros ». La banque est dirigée par l’oligarque hongrois Loring Mészàros, ami d’enfance de V. Orban. Selon Terranova, si Marine Le Pen était élue en avril, elle « serait encore fortement endettée envers les Russes et les Hongrois ». Sans compter que, si la position du RN envers Poutine a changé en paroles, le programme de défense de Marine Le Pen propose toujours « une alliance avec la Russie sur certains sujets de fond : la sûreté européenne, la lutte contre le terrorisme, (…) la Méditerranée orientale, l’Afrique du Nord et centrale, les pays du Golf et le Moyen-Orient ».
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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