"Salvini modère ses propos par crainte d’une réaction sur les réseaux sociaux."
03/05/2021
Italie. Revue de presse.
Les JT couvrent la situation pandémique et le nouveau plan de vaccination annoncé par le commissaire spécial F. Figliuolo, le changement de couleurs en fonction du niveau de restrictions pour plusieurs régions italiennes, la disparition de migrants dans les eaux territoriales libyenne et l’affaire Fedez-Salvini.
PREMIER PLAN, Corriere della Sera, de P. Di Caro « L’affaire Fedez agite les partis et on accuse la Rai [de censure] - Chaos au sein de la RAI suite aux propos de Fedez, le Parti démocrate et le M5S s’en prennent à la direction » : « Samedi soir, lors du traditionnel concert du 1er mai rediffusé en direct à la télévision par la RAI, le chanteur Fedez prend la parole pour défendre le projet de loi ‘Zan’ contre l’homophobie, mais il met également en lumière la tentative de censure de la part la chaîne de télévision. En effet, Matteo Salvini, qui s’oppose à cette loi, aurait protesté et menacé de réagir contre cette intervention, que la RAI aurait donc tenté de censurer en amont. L’un des directeurs de la RAI, Fabrizio Salini nie les faits mais, plus tard dans la soirée, le chanteur publie l’enregistrement de sa conversation avec la société de production s’occupant du concert et avec la directrice adjointe de RAI 3, Ilaria Capitani. La polémique a immédiatement suscité la réaction des partis politiques : si Matteo Salvini s’est finalement ‘’défilé’’, le Parti démocrate, le Mouvement 5 Etoiles et LeU prennent parti pour Fedez : du ministre du Travail, Andrea Orlando, à Enrico Letta qui remercie le chanteur d’avoir brisé le tabou sur les droits [des homosexuels] ; de Luigi Di Maio à Giuseppe Conte, qui propose une grande réforme de la RAI afin de la soustraire aux ingérences politiques. A l’inverse, Giorgia Meloni prend ses distances vis-à-vis des propos de Fedez et Forza Italia exclut qu’il y ait eu une censure de la part de la RAI. Le directeur Salini déclare quant à lui qu’il y aura une enquête interne. L’énième division au sein de la majorité ne s’arrête donc pas là. »
ANAYSE, Corriere della Sera, « Pourquoi le centre-droit n'aime pas la loi contre l’homophobie. La question des droits divise les partis » : « Depuis plus de vingt ans, le Parlement tente d'enrayer les discriminations et les violences fondées sur l'orientation sexuelle. La proposition de loi « Zan » contre l'homophobie et la transphobie n'est que la dernière de ces tentatives. Approuvée par la Chambre en novembre dernier, elle est restée bloquée en commission au Sénat en raison de l'obstructionnisme du rapporteur, le leghiste Ostellari. Dix articles pour renforcer la loi qui punit aujourd'hui les discriminations fondées sur la race ou la religion à celles fondées sur le sexe, le genre, l'orientation sexuelle, l'identité de genre ou le handicap. Elle prévoit des sanctions pour ceux qui incitent à la discrimination ou à la violence pour des motifs homophobes et ceux qui organisent ou participent à des associations incitant à la discrimination. Le centre-droit critique les définitions telles que l'"identité de genre" dans le texte et craint que la défense de la famille traditionnelle puisse être qualifiée comme une "discrimination". Toutefois, contrairement au racisme, répondent les partisans du texte, les règles relatives à l'homophobie ne s'appliquent pas au crime d’apologie, mais uniquement à l'incitation à la discrimination ou à la violence. L'article 7, également contesté, instaure une journée nationale contre l'homophobie et la transphobie et prévoit des initiatives pédagogiques dans les écoles. Mais d'autres sujets en discussion divisent également la majorité, à commencer par le droit du sol que le secrétaire du PD Enrico Letta a remis sur le devant de la scène après six ans d'impasse. Approuvé par la Chambre en 2015, le texte donne aux étrangers nés en Italie la possibilité d’obtenir la nationalité italienne lorsque même un seul parent se trouve légalement dans le pays avec un droit de séjour illimité ou avec un permis européen. Soutenue par le PD, la mesure est refusée par la FI et la Lega, tandis que le M5S s'est abstenu sur le texte de la Chambre. La loi se trouve maintenant au Sénat, où elle a été discutée pour la dernière fois en 2017. »
COMMENTAIRE, Il Messaggero, de M. Ajello « La méthode des réseaux sociaux face au ‘’vieux petit monde’’ de la télévision » : « Dans cet affrontement de pouvoirs, on retrouve la vieille Rai face aux réseaux sociaux qui incarnent triomphalement la modernité sans donner toutefois suffisamment d'attention aux règles et aux nuances. C'est le plus fort qui l'a remporté, cette fois-ci. La censure et l'autocensure ont toujours existé. Elles sont parfois bénéfiques et elles peuvent éviter des erreurs et des propos toxiques. Mais sur les réseaux sociaux, l'autocensure n'existe pas. Si tu demandes au roi de ce monde, Fedez, de participer à un événement télévisé à tes conditions, en pratiquant l’autocensure, la modération et le respect d’un service public et pluraliste - du moment où il y a un gouvernement d'unité nationale qui inclut aussi la Ligue (et qu'il ne faut pas offenser) -, tu fais alors une grave erreur. Nous avons assisté à un affrontement entre deux époques différentes de l’histoire.»
COULISSES, Corriere della Sera, de M. Cremonesi « Salvini modère ses propos par crainte d’une réaction sur les réseaux sociaux » : « Certains léghistes parlent d'un "piège qui ne pouvait pas être évité". Matteo Salvini tente de modérer ses propos. Mais il n'y a pas grand-chose à faire : à la force médiatique et perturbatrice de Fedez, samedi soir pour le concert du 1er mai, s'ajoute aussi celle de Barbara D'Urso hier. Ce qui inquiète les partisans de Salvini est surtout le retour très négatif de cette affaire qui vient des réseaux sociaux : les quelque 30 000 commentaires à son post de samedi soir sont enflammés, les supporters semblent être en difficulté et l'ère du hashtag très populaire "Matteo continue comme cela" semble être bien loin. Résultat : le secrétaire de la Ligue tente de baisser d’un ton, invite Fedez à prendre un café pour "parler de liberté et de droits" et écrit sur Facebook : "Pas de polémiques, je préfère les laisser au PD, nous n'avançons que des propositions et des solutions". La référence à la casquette affublant une marque célèbre portée l'autre soir par le rappeur, si elle est toujours présente sur sa page Instagram ("Tant pis pour l'interdiction de publicité sur la Rai..."), disparaît cependant de sa page Facebook. Le problème est que le dénommé "gouvernement de centre-droit" ne pourra probablement pas compter sur l’autre centre-droit (Fratelli d’Italia) lorsqu'il s'agit de la RAI, surtout quand certains des sièges qui devraient aller à l'opposition, et donc au parti de Giorgia Meloni (du comité de surveillance de la RAI à la commission pour la sécurité de la République Copasir) restent jalousement conservés par la majorité.»
ENTRETIEN, Il Messaggero, de Giorgia Meloni, dirigente de Fratelli d’Italia « De l’argent et des pouvoirs spéciaux pour Rome, mon appel à Draghi» : «’’Malgré les efforts de nos alliés, ils sont presque toujours marginalisés dans l'agenda de ce gouvernement. FdI se bat pour donner une voix aux entreprises, aux travailleurs, aux citoyens qui ne se sentent pas écoutés par la majorité actuelle. Encore une fois, le Concert du 1er mai a servi de prétexte à des batailles idéologiques, comme le projet de loi Zan, qui n'ont rien à voir avec le travail et les droits des travailleurs. Le tout aux dépens de la télévision publique et des Italiens. Dans ce contexte, il y a ceux qui utilisent cette occasion pour se faire de la publicité, afin de mieux s’implanter dans les cercles qui comptent. S'il y a quelqu'un qui est pénalisé par la Rai, et en particulier sur Rai3, ce n'est certainement pas la gauche et ses partisans - chanteurs et artistes du Concert du 1er mai inclus - mais l'opposition au gouvernement. [Au sujet de l’attention donnée par le gouvernement à Rome dans le Plan de Relance], les 500 millions d'euros alloués uniquement au patrimoine culturel sont une insulte, il n'y a pas de ressources pour le renforcement des métros ou pour résoudre la question désastreuse des déchets. En ce qui concerne Rome, je veux lancer un défi à Draghi et à la majorité : mettez immédiatement en œuvre le programme prévu et approuvé par la Chambre, qui prévoit le transfert de pouvoirs et de ressources spéciales pour Rome, comme c'est le cas pour les plus grandes capitales européennes. Il suffit d'avoir la volonté politique de le faire. La ville a déjà souffert de la mauvaise gestion de Raggi, elle mérite maintenant un peu de confiance’’. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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