Affaire d'espionnage impliquant un attaché militaire de l’ambassade de Russie et un militaire italien.
01/04/2021
Italie. Revue de presse.
Dans la presse italienne, c’est l'affaire d'espionnage impliquant un attaché militaire de l’ambassade de Russie et un militaire italien que l’on retrouve massivement en une, affaire ayant conduit hier à la convocation de l’ambassadeur russe par le ministère des affaires étrangères italien et à l’expulsion de deux personnels de l’ambassade de Russie. « Espionnage, tensions avec la Moscou » - Un militaire arrêté, les 007 russes expulsés. Di Maio déplore un acte hostile (Corriere della Sera), « L'espion des Russes » - Un Capitaine de Frégate vendait des documents de l'Otan. Deux agents de Poutine expulsés (La Repubblica), « Un militaire espion vendait des documents de l'Otan aux Russes» (La Stampa).
PREMIER PLAN, Corriere della Sera, de M. Galluzzo « Les mesures - L’Italie sous restrictions (avec des dérogations possibles) ; approbation de Salvini, mais il attaque Speranza » : « Dans le nouveau décret pour endiguer l’épidémie signé par Draghi, les interdictions sont reconduites pour tout le mois d’avril : l’Italie restera confinée, en zone rouge ou orange selon les régions. Après deux jours de bras de fer entre partisans de la réouverture (Ligue, Forza Italia, Italia Viva) et partisans du maintien des fermetures (PD et Liberi e Uguali), un nouveau mécanisme a été conçu, permettant des réouvertures lorsqu’un territoire présente des données encourageantes et qu’il tient le rythme prévu de vaccination. De plus, après les fêtes de Pâques, les plus petits, de la maternelle et de l’école primaire, pourront retourner en classe. L’obligation de se faire vacciner a été introduite également pour les pharmaciens. Pour parvenir à ce terrain d’entente au sein du gouvernement, Matteo Salvini a rencontré le chef de l’exécutif mais aussi le ministre de la Santé Roberto Speranza. Si Forza Italia se dit satisfaite notamment suite à l’adoption de ses propositions concernant l’absence de poursuites pénales pour les personnels vaccinant les usagers, Matteo Salvini ne cache pas une pointe d’irritation envers Speranza, dont il qualifie les ‘’décisions de purement politiques’’. Dario Franceschini (ministre de la culture) se félicite d’une toute autre avancée, concernant l’interdiction pour les paquebots d’accoster à Venise : ils devront désormais stationner hors de la lagune. Les maires expriment quant à eux leur insatisfaction ‘’pour la première fois, nous n’avons été ni consultés, ni informés : cela constitue une rupture de l’usage institutionnel’’, déclare leur représentant. »
ARTICLE, La Stampa, « La loi sur l’homophobie bloquée par les vétos de la Ligue» : « Nous assistons à nouveau à un bras-de-fer contre l’homophobie au sein de l’ « étrange majorité », qui se déchire après la décision du PD, du M5S, d’IV et de Leu de demander l’inscription au calendrier parlementaire du projet de loi Zan, introduisant des mesures sévères contre les discriminations et les actes violents de nature homophobe. Ce souhait a été annoncée par communiqué conjoint et il a inévitablement déclenché la réaction de la Ligue. M. Romeo (Ligue) prévient : ‘’c’est une thématique qui divise, on risque des répercussions sur le gouvernement’’. Or, cette menace ne semble pas être prise au sérieux de la part du centre gauche membre de la majorité. Romeo explique : ‘’La Ligue est totalement contre, c’est une thématique idéologique qui ne fait pas partie de l’agenda politique. Cela risque de compromettre nos relations au sein du Parlement et de nuire au climat de soutien et d’unité national qui s’est créé’’. I. Iezzi, proche de Salvini, souligne que ‘’cela revient à une obstruction des travaux d’une commission importante telle que celle de la justice. Ce gouvernement doit travailler sur des dossiers communs et partagés : Covid, urgence économique... le reste sera fait par le prochain gouvernement’’. Or, le PD et le M5S ne sont pas d’accord. Le promoteur de ce projet de loi, Alessandro Zan (Pd), contre-attaque : ‘’il ne s’agit pas d’une loi du gouvernement mais d’une proposition parlementaire et poursuivre un chantage sur cette loi ‘’néfaste’’ pour la majorité gouvernementale est une grosse erreur’’. Les 5 Étoiles ajoutent pour leur part : ‘’il s’agit d’une ‘loi de civilisation’ que tous les partis devraient soutenir, il faut arrêter cette duperie indigne’’. Après les déclarations de la chanteuse Elodie contre la Ligue, le célèbre rappeur Fedez lui a emboité le pas : ‘’ce n’est pas l’idée que mon fils puisse jouer avec les poupées qui m’inquiète mais plutôt le fait que l’Etat puisse ne pas défendre son droit à la liberté’’. »
ARTICLE, Il Fatto Quotidiano «Un tandem Conte-Letta à 40%» : « Un mois et demi après son départ du Palais Chigi, la popularité de Giuseppe Conte est encore importante malgré son silence médiatique. Selon les sondages Ipsos présentés hier soir à l‘émission Di Martedi sur La7, l’alliance PD-5 Etoiles serait le meilleur choix pour le centre gauche. Un duo Letta-Conte, à la tête d’une possible alliance, recueillerait 40% des intentions de voix, au-dessus d’un tandem Salvini-Meloni qui se limiterait à 35% des intentions. Selon l’expert Pagnoncelli ‘’ces données sont surprenantes car le centre droit, en termes d’intentions de vote, garde un avantage normalement dans les sondages’’. A la question ‘’qui souhaiteriez-vous voir à la tête de la coalition, Conte devance nettement (39%) le nouveau dirigeant du PD, E. Letta (22%). Sur le front opposé, nous avons là aussi une surprise : Meloni (28%) devance Salvini (23%). L’arrivée des deux nouveaux dirigeants a fait du bien aux deux partis de centre gauche : le PD de Letta est crédité de 20,3% (+1,3 points) alors que le M5S est crédité de 18% (+2,6 points). Les données sont encourageantes pour une association entre Letta et Conte, dont les premières esquisses ont été initiées par leur rencontre la semaine dernière et qui a représenté la première sortie publique de l’ancien Président du Conseil depuis son départ du Palais Chigi. »
COMMENTAIRE, Corriere della Sera, Maurizio Caprara, « Le goulet d’étranglement russe : réagir, temporiser ou laisser passer ? » : « Le cas du capitaine de frégate italien Walter Biot présente deux caractéristiques à ne pas négliger : 1) selon la version des enquêteurs, l'opération a été arrêtée en flagrant délit ; 2) elle s'est déroulée alors que l’arrivée de Joe Biden à la présidence rend les Etats-Unis plus intransigeants envers la Russie. Il n’était pas évident que le ministre des affaires étrangères Luigi Di Maio qualifie publiquement d' "acte hostile" ce qui s’est produit. Et on ne s’attendait pas forcément à ce que l'Italie, après avoir décidé d'expulser les deux diplomates russes, ne leur donne que 24 heures pour quitter notre territoire : un choix politique, un choix froid. L'une des réponses au choix tout aussi politique de la Russie de "cultiver" une source au sein du bureau de la politique militaire de l'état-major de la défense. Une affaire qui peut impacter les relations italo-russes, soit en les dégradant brutalement, soit en leur permettant malgré tout de rester meilleures que celles des autres Etats de l’OTAN avec Moscou. En 2018, le Royaume-Uni avait demandé à ses alliés d'expulser certains diplomates russes après l’affaire Skripal : la France et l'Allemagne en ont renvoyé quatre chacune, l'Italie seulement deux. Moscou a rendu la pareille en expulsant un Italien qui venait d'arriver en Russie et un autre en fin de mission. En 2018, issu de l'opposition, le leghiste Matteo Salvini a déclaré que l'expulsion des diplomates russes était "peu utile pour un avenir de dialogue et de coexistence." Le 17 février, au Sénat, le Premier ministre Mario Draghi a qualifié son gouvernement de "fortement pro-européen et atlantiste" et s'est dit "préoccupé" par la violation des droits des citoyens en Russie. Entre ces deux moments, il y a eu une croissance de l'influence russe en Méditerranée et dans les Balkans occidentaux et le départ de Trump Il est encore un peu tôt pour écrire la fin de cette histoire. »
COMMENTAIRE, La Repubblica, Claudio Tito, « Des espions chez nous et les nouveaux équilibres » : « Ce ‘Romagate’ met en lumière le fait que l'Italie est devenue une cible de l'espionnage russe et que les oripeaux du courant populiste peuvent constituer un danger pour la sécurité nationale. Notre pays a toujours été un territoire de l’entre-deux : disposés au dialogue mais heureusement jamais vraiment à mi-chemin entre la Russie et l’Occident. À aucun moment notre position atlantique n'a été remise en question. Ces dernières années, et pour être précis depuis l'été 2018, quelque chose a cependant changé. Le premier gouvernement Conte a modifié notre positionnement vis-à-vis de la Russie et de la Chine, ce qui a transformé le terrain italien en un champ de conquête possible pour Moscou et Pékin. Le résultat de l'improvisation et de la superficialité. Notre proximité physique avec des zones d'action - telles que la Méditerranée - où la Russie et de la Turquie sont engagés aurait nécessité un positionnement différent, car il y a toujours un prix à payer. Et depuis hier, c'est encore plus clair. Mais on l'a aussi compris en septembre 2019 lorsqu'un responsable moscovite a été arrêté à Naples pour espionnage industriel. Ou lorsque la présence de l'armée de Poutine l'année dernière à Bergame pour nous aider face à l’urgence covid s’est avérée pour le moins encombrante. Ces deux derniers cas avaient déjà provoqué une certaine irritation aux États-Unis. Ce qui s’est passé hier inquiète outre-atalantique, d’autant que personne, pour l'instant, ne sait combien et quels documents de l'OTAN ont été transférés aux services de renseignement de Poutine. Des doutes sur lesquels les deux exécutifs de Rome et de Washington s'affrontent, en ces heures, inévitablement. Il est probable que dans l'opération d'arrestation de l'officier italien - sans précédent, du moins dans un passé récent - il y ait eu aussi la collaboration des services américains. Cet ensemble de facteurs marque donc un tournant. Vers une phase post-populiste dans les relations internationales et dans les relations entre services de renseignement alliés. Même si nous avons été infiltré, nous avons montré que nous ne sommes plus le ventre mou de l'Europe et de l'OTAN. Et c'est pour cette raison qu'il est possible que le gouvernement italien puisse revoir certains choix du gouvernement précédent. Sans quoi un pays comme le nôtre risque d'être exclu de tous les principaux terrains d’action internationaux. »
COMMENTAIRE, Corriere della Sera, de Massimo Franco « Une coalition au sein de laquelle les instincts anti-américains perdurent » : « Beppe Grillo a accusé la nouvelle administration américaine de « maccarthysme désastreux » envers la Russie et la Chine et se demande si les ‘’Etats-Unis et l’UE n’ont pas perdu la raison’’. Manque de chance, il formulait ces accusations alors qu’au même moment un officier italien de la Marine était arrêté pour avoir vendu des secrets militaires à un espion russe. Un incident dont les conséquences resteront probablement limitées et ne détérioreront pas spécialement les relations diplomatiques et le dialogue entre Rome et Moscou. Mais le commentaire du ‘’Garant’’ des Cinq étoiles adressé à Biden résonne d’autant plus étrangement au regard de la réaction, assez dure, du ministre des Affaires étrangères, qui appartient lui aussi au Mouvement 5 étoiles et pour qui les faits sont ‘’inacceptables et ne seront pas sans conséquences’’. Ces mots mettent aussi en relief le caractère évasif du commentaire de Matteo Salvini qui dit ne ‘’pas avoir les éléments pour commenter. Je ne suis pas un expert, je me suis arrêté à l’agent 007’’. Mais ce qu’il y a de plus déconcertant dans cette affaire c’est la sensation que certaines forces du gouvernement dirigé par Draghi adhèrent à ses choix en matière de politique étrangère tout en gardant pour eux certaines réserves. Comme si la fidélité exprimée vis-à-vis de l’UE et de l’Alliance atlantique était le fruit non pas d’une conversion sincère mais de choix tactiques : une parenthèse réversible à tout moment. Le discours des ténors du M5S et de la Ligue est déconcertant à ce titre et il est source de méfiance pour qui observe l’Italie depuis l’étranger. Draghi finit par sembler un garant de la politique extérieure entouré d’une majorité brinquebalante et divisée y compris sur ce plan. Ces divisions transparaissent également sur la question des vaccins et en particulier le débat autour du Spoutnik ou encore les polémiques autour des lenteurs de la Commission européenne. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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