Salvini : "Un gouvernement fourre-tout qui, pour survivre, fera des offres de marchand de tapis."
15/01/2021
Italie. Revue de presse.
La crise gouvernementale et notamment la décision de G. Conte de vouloir trouver lundi prochain l’approbation du Parlement, fait les gros titres des médias italiens. « Conte accepte le défi du Parlement» - Il demandera la confiance avec le soutien des « élus ayant le sens des responsabilités» (Corriere della Sera), « Conte compte ses voix (au Parlement) » - Conte cherche des élus prêts à le soutenir chez les socialistes, Forza Italia et Italia Viva (La Repubblica), « Renzi ne cède pas : Conte n'a pas les voix (pour continuer) » (La Stampa), « Conte cherche lundi les voix au Parlement » - Le Spread en hausse, l'UE inquiète (Sole 24 Ore), « Un gouvernement Conte III avec les voix des repentis d'Italia Viva » (Il Messaggero), « Renzi isolé, Conte optimiste » (Il Fatto Quotidiano), « La chasse aux voix des renégats» - Le défi entre deux perdants : Conte et Renzi (Il Giornale).
ARTICLE, Corriere della Sera, de M. T. Meli, « Le plan des démocrates contre Renzi : récupérer ses parlementaires » : « Nicola Zingaretti réunit le bureau politique de son parti en faisant part de ses inquiétudes : ‘’Il faut éviter les élections mais la situation est préoccupante et parfois on arrive aux urnes sans le vouloir ». Zingaretti ne s’oppose pas à la décision de Conte de vouloir trouver un groupe de « responsables » pour remplacer le groupe d’Italia Viva. Mais il pose ses conditions, car le PD ne veut pas payer le prix d’un éventuel échec. Il faut donc que parmi ces « bâtisseurs » figure aussi une partie des sénateurs d’Italia Viva. Sinon cela n’aurait pas de sens. Récupérer la troupe de Renzi aurait en revanche un sens, car cela redonnerait une dignité à ce groupe de « responsables » et mettrait par ailleurs Renzi au pied du mur, car le PD n’a aucune intention de lui faire de cadeau. Le but est donc celui d’arriver à 161 voix au Sénat, soit la majorité absolue, sans l’apport d’Italia Viva ».
COULISSES, La Repubblica, de T. Ciriaco et de C. Lopapa « Conte récupère des voix aux Sénat et s’approche de l’objectif des 161 sénateurs avec les transfuges d’IV et de FI » : « Au Sénat, Conte sent avoir déjà à disposition un nombre suffisant les « bâtisseurs ». Des élus du MAIE lui proposeront même un symbole « Maie/Con – Te » (un jeu de mots signifiant ‘’avec toi’’) en créant un groupe. Conte veut transformer l’épreuve de lundi en un véritable triomphe contre son ancien allié Renzi. Il veut le battre dans l’Hémicycle, mais sans faire trop de polémiques et soulignant plutôt que l’heure est grave, afin de ne pas trop donner d’importance à l’adieu renzien. Si l’euphorie se propage dans les salons du Palais Chigi, c’est un optimisme prudent qui règne au Nazareno, le siège du Parti Démocrate. Il faut ainsi l’apport d’une dizaine de sénateurs pour arriver à la majorité absolue. Un objectif délicat mais le coup d’éclat du fondateur d’Italia Viva aurait poussé 6 renziens à envisager un soutien à un gouvernement Conte pro-européen et anti-souverainiste. Il y aurait aussi 4 de Forza Italia et deux anciens 5 Etoiles. Conte veut clore la crise rapidement, d’ici mardi prochain, le temps de faire naitre les groupes « pro-Conte » afin de contenter le PD, le M5S et en promettant aussi de renoncer à l’intérim sur les services secrets ».
ANALYSE, La Repubblica, de S. Folli, « Un Président du Conseil dans la pénombre » : « ‘’Peut-être bien que ça ira pour lui’’ : Romano Prodi n’est malgré tout pas très rassurant alors qu’il encourage Conte à se présenter devant le Parlement afin de vérifier qu’il a le soutien de sa majorité. Cette phrase résume pourtant très bien la situation actuelle. Le Président du Conseil espère trouver parmi les « responsables » les voix dont Italia Viva l’a privé. Mais les chiffres sont encore incertains et sa marge est très courte, surtout au Sénat. On cherche donc les fameux membres d’un futur groupe de « Constructeurs », terme employé par Mattarella. Dario Franceschini appelle à ce que cela se fasse ouvertement. Pourtant, les soutiens s’obtiennent dans l’ombre et cela ne fait qu’affaiblir le Président du Conseil qui a choisi la voie du bras de fer au Parlement et a peu de temps devant lui pour identifier ses réels soutiens. Le Quirinal veut un véritable groupe parlementaire, solide, puisqu’il sera ensuite en charge du Plan de relance national. Il devra aussi se montrer convaincant aux yeux de l’UE, qui s’inquiète pour le moment de la situation politique italienne en pleine pandémie. Mais selon certains observateurs étrangers, la crise pourrait se révéler bénéfique si elle permettait de corriger certaines tendances à l’auto-sabordage et permettait un meilleur usage des fonds européens que celui initialement prévu par Conte, fondé sur des ‘’calculs politiques et du clientélisme’’, d’après un quotidien allemand. La question est de savoir si un sauvetage du gouvernement Conte II renverrait bien un message positif à l’Europe et aux marchés financiers. Quoi qu’il en soit, le parcours sera difficile pour le Président du Conseil et son équipe. »
ENTRETIEN, La Stampa, de Matteo Renzi, fondateur et dirigeant d’Italia Viva « Conte n’a pas les voix au Sénat » : « ’’Je n’ai pas l’impression que Conte aura les voix suffisantes au Sénat. Je lui souhaite tous mes vœux. La démocratie est sacrée. Reste toutefois une condition : s’il n’a pas 161 voix, ce sera un gouvernement mais sans Giuseppe Conte. Je perdrai peut-être quelques sénateurs mais à leur place j’attendrais mardi avant de se réjouir. J’ai soulevé une série de questions sur le fond (vaccins, Santé, investissements) alors que Conte répond en parlant de personnes, d’un groupe de « responsables ». Ils auront peut-être une victoire numérique mais moi j’ai choisi la voie de la politique. Conte a fait le choix de faire un pari. Personnellement, je m’abstiendrai lors du vote. On m’accuse d'être déloyal mais selon moi la personne déloyale est celle qui, face au nombre de victimes du Covid, n’utilise pas le MES. Il parait que je serais fou ? Celui qui pense pouvoir dépenser 200 milliards de l’UE sans même lire le document [qui explique comment ils seront dépensés] est le véritable fou. Nous, nous l’avons lu et avons demandé à le modifier. J'ai voulu aider Conte en lui évitant de faire une erreur monumentale sur le Plan de relance, mais il m’a attaqué. Mario Draghi comme ministre ? Ce serait très beau mais une solution limitée. Mais ne tirons pas Draghi par la manche. Italia Viva serait disposée à entrer dans la majorité si le gouvernement décidait de recourir au MES, si les chantiers étaient débloqués et si l’on accélérerait sur lignes ferroviaires à grande vitesse. Mais nous ne participerons jamais à un gouvernement composé de membres de partis eurosceptiques et souverainistes. L’ancien pacte avec Forza Italia était un accord institutionnel et pas un gouvernement unifié. Zingaretti a eu en privé des mots bien plus durs que moi contre Conte, même s’il dit l’inverse publiquement’’ ».
ENTRETIEN, Il Messaggero, d’Enzo Amendola, ministre des Affaires européennes « La crise inquiète l’Europe. Les « responsables » ? Renzi en a profité lui aussi » : « ‘’Malheureusement, c’est Matteo Renzi qui a choisi de quitter la table de la médiation, balayant tout ce qui avait été construit jusque-là. Nous devons tout faire pour que le gouvernement avance et puisse donner les réponses nécessaires à nos concitoyens. Le cas échéant, le gouvernement devra continuer sans Italia Viva, la fracture est définitive. Cette crise n’a pas de sens : nous nous sommes réjouis ensemble de la victoire de Joe Biden et maintenant les proches de Renzi permettent à la droite souverainiste de revenir en piste. Il faut « parlementiser » la crise : je suis contre une majorité faite de miettes récupérées ici et là, mais si un nouveau groupe parlementaire venait à se former en soutien à Conte, je ne m’en formaliserais pas. Au Parti démocrate, nous restons déterminés à soutenir le chef du gouvernement Giuseppe Conte, mais aucun scénario n’est exclu, pas même les élections. Nous faisons également confiance à la sagesse politique du Président Mattarella pour superviser la crise. Tous les journaux étrangers témoignent de l’inquiétude de l’Europe face à cette crise, alors même que Conte était parvenu à améliorer notre image. Italia Viva entrave le processus du Plan de relance mais il est arrivé jusqu’au Parlement. Nous suivrons les indications données par l’UE et nous atteindrons notre objectif’’. »
ENTRETIEN, Corriere della Sera, de Matteo Salvini, dirigeant de la Ligue : « Un gouvernement fourre-tout qui, pour survivre, fera des offres de marchand de tapis » : « ‘’Je rappelle ce que Mattarella m’a dit ainsi qu’à l’intégralité du centre-droit : je vous confierai la charge de former un gouvernement si vous parvenez à me fournir des vrais chiffres de soutien, des chiffres sérieux, pour un gouvernement véritable, et sérieux. Pas ceux de trois individus venus d’univers disparates. Je ne crois pas que des voix du centre-droit rejoindront les « responsabili » (parlementaires d’opposition partis prêts à soutenir Conte). Nous nous réunirons encore aujourd’hui pour suivre la situation et c’est positif, car pour les Italiens, il y a une force qui est prête à gouverner le pays. Un gouvernement fourre-tout en pleine épidémie est pire que d’aller aux élections pendant celle-ci, [en dépit des risques]. Comme à l’été 2019, demander leur avis aux Italiens serait la solution la plus appropriée. Et aujourd’hui comme à l’époque, les élections permettraient de porter au pouvoir un centre-droit modéré et libéral, défenseur de la famille et plus efficace qu’un gouvernement au temps compté’’. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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