"L’épidémie fait aussi peur aux passeurs : les débarquements s’arrêtent."
12/03/2020
Italie. Revue de presse.
Le coronavirus sature toujours l’espace médiatique italien. La presse reporte notamment les dispositions adoptées hier soir par le gouvernement, prévoyant la fermeture de tous les commerces sauf ceux du secteur de la distribution alimentaire et de la santé. Les observateurs rapportent également la déclaration de l’OMS indiquant qu’il s’agit désormais d’une « pandémie » : « Virus, l’Italie est maintenant verrouillée » - ‘’Conte demande d’ultérieurs sacrifices’’ (Corriere della Sera), « L’Italie ferme » - ‘’Restent ouverts les alimentaires, les pharmacies et les kiosques’’ (La Repubblica), « L’Italie ferme les magasins pour battre de virus » (La Stampa), « Virus, l’OMS déclare la pandémie. Conte adopte d’autres restrictions » (Sole 24 Ore), « Fermeture à moitié » - ‘’Conte décrète la fermeture de magasins mais les usines restent ouvertes. En Italie 12 462 infectés et 827 morts’’ (Il Messaggero), « C’est la pandémie, les nouvelles restrictions » - ‘’fermeture des activités non essentielles’’ (Il Mattino), « L’heure la plus sombre » - ‘’Conte cède et l’UE se réveille’’ (Il Giornale).
ARTICLE La Repubblica T. Ciriaco et A. Cuzzocrea « Le décret » : « Le Président du Conseil annonce d’autres restrictions en Italie jusqu’au 25 mars et demande davantage de rigueur aux régions. L’Italie s’arrête entièrement. Ferment les cafés, les restaurants, les marchés à l’extérieur, les centres commerciaux, les coiffeurs. Exception faite pour le transport public : chaque région décidera au cas par cas. Le ministère des transports peut décider de fermer les aéroports, en laissant ouverts quelques-uns et peut décider de réduire les transports ferroviaires interrégionaux. Les usines et les entreprises continueront leur activité sur la base d’accords avec les régions. Toutes les activités commerciales – sauf celle liées à la distribution alimentaire, les supermarchés, les pharmacies, les kiosques, les tabacs – resteront fermées jusqu’au 25 mars. Les services financiers, d’assurance, bancaires et postaux seront assurés. Les cantines où la limite d’un mètre de distance entre deux personnes ne sera pas respectée, seront fermées. Pour toutes les autres activités, bureaux publics ou privés, le télétravail, les congés anticipés et parentaux sont chaudement recommandés. Le Président du Conseil, en lien étroit avec le ministre de la Santé R. Speranza et celui des relations avec les régions, F. Boccia, a pris sa décision après avoir reçu la lettre du président de la région Lombardie A. Fontana (Ligue). La « responsabilité » est le mot clé du discours d’hier soir du Président Conte. Celle qu’il demande à tout citoyen et à tous les partis politiques car les prochaines semaines seront encore plus dures par rapport à aux semaines passées. ‘’Restons distants pour après nous embrasser plus fort. Ensemble, nous y arriverons».
ARTICLE, La Stampa, P. Russo : « L’appel des médecins du Sud : faites vite, il y a peu de places » : « Faites-vite ». L’appel des médecins de soins intensifs du Sud d’Italie résonne, désespéré. 95 % des lits sont déjà occupés et la bombe biologique lancée par tous ceux qui ont fui le Nord explose, les régions du Sud arriveraient à gérer seulement quelques dizaines de cas. Aujourd’hui l’Italie dispose de 5.285 places en soins intensifs, dont 60% sont déjà occupés par des patients graves. Le décret en augmente le nombre de 50% pour arriver à environ 4.700 places réservées au Coronavirus. En tenant compte du rapport d’un cas grave sur dix contaminés, cela veut dire que le système national pourra gérer jusqu’à 45 000 cas. Les hôpitaux de Lombardie transfèrent déjà vers les régions limitrophes les patients non Covid. Si le nombre de contaminés augmente dans le Sud, il ne restera pas beaucoup de marges de manœuvre vu que le Nord est déjà en difficulté. »
COMMENTAIRE, La Stampa, F. Bei : « L’information est un bien stratégique » : « Il faut sauver les kiosques, les laisser ouverts. Dans un moment aussi difficile, que la démocratie a rarement vécu depuis l’après-guerre et où les relations entre les individus et les familles semblent s’effondrer dangereusement, il est fondamental que les sentinelles du territoire restent ouvertes. Le président de la Région Lombardie, Attilio Fontana, a bien fait d’indiquer les kiosques parmi les « activités essentielles pour continuer la vie ordinaire ». Fontana est, tout comme le président du Conseil, confronté à des choix difficiles, parce que prévoir la fermeture totale de tous les commerces est une décision que personne ne voudrait imposer. Au début, tout le monde est d’accord mais, au fil du temps, il est facile de prévoir les risques et la colère de demain. Et donc, le choix de garder les kiosques ouvert est fondamental, confirme que l’information est un bien stratégique, surtout dans un moment de crise. Elle constitue une infrastructure démocratique qui permet à tous de se sentir une communauté et de rester unis. La bonne information repousse celle mauvaise, les good news annulent les fake news, le journal met de l’ordre et rend les citoyens moins seuls, indiquant un but commun. Contre l’anxiété et la peur, pendant les jours noirs de la guerre et de l’occupation, il y avait Radio Londres, que toutes les familles écoutaient ensemble le soir : voilà, les kiosques sont la Radio Londres d’aujourd’hui ».
ENTRETIEN, Il Messaggero, d’Antonio Tajani, vice-président de Forza Italia et ancien président du Parlement Européen : « Conte commence à suivre notre ligne » : « ‘’Oui, cette nouvelle restriction est en ligne avec ce que Forza Italia et la droite sont en train de demander depuis longtemps. Si l’épidémie devait arriver au Centre et au Sud de l’Italie, nous risquerions une situation encore plus grave car les structures sanitaires au Mezzogiorno ne sont pas comparables à celles du Nord. Il est juste d’adopter des mesures encore plus rigoureuses. Il est préférable de fermer ou réduire l’activité pendant 15 jours en plaçant en sécurité le capital humain. Il sera ainsi possible de repartir avec plus de force. Le choix sur un commissaire extraordinaire pour la Santé est positif. Certes, la fumée noire sur Bertolaso a été une occasion manquée. L’Union Européenne s’est réveillée tard. J’avais lancé l’alarme le 12 février à Strasbourg sur le fait que le Coronavirus était un problème explosif’’ »
ENTRETIEN d’Attilio Fontana (Ligue), président de la Région Lombardie : « ‘’ Blinder les régions, c’est la seule solution qui peut nous sauver ‘’ » (La Stampa) : « ‘’ L’OMS a déclaré la pandémie, l’Italie est maintenant verrouillée comme la Lombardie qui était, en fait, déjà verrouillée. Le président du Conseil a accueilli nos propositions, nous ne voulons pas que ce qui est arrivé en Lombardie arrive aussi au reste de l’Italie. Notre structure sanitaire est en train de faire de miracles, mais les miracles pourraient ne plus suffire, il faut récupérer le temps perdu et augmenter notre capacité hospitalière pour les nouveaux contaminés. J’ai demandé que les kiosques restent ouverts parce qu’ils garantissent le droit démocratique et institutionnel de s’informer. Il y a deux autres foyers dans la zone de Bergame et de Brescia et nous avons besoin de davantage de médecins et d’infirmiers ainsi que de matériel médical indispensable. Les secteurs de la distribution alimentaire et de la santé resteront ouvert et continueront de travailler pour tous les citoyens ‘’ ».
EDITORIAL, Corriere, F. Fubini, « Le parachute de l’Europe » - « La BCE prépare le bazooka. Rome et Paris poussent mais le Nord reste froid » : « {Par rapport à la crise financière de 2008}, les paroles de Merkel sur le fait que le pacte de stabilité a ‘’une flexibilité suffisante pour des situations extraordinaires’’ sous-entendent que ces règles s’appliquent de toute façon à l’Italie : pas de déficit au-dessus de 3% du PIB (quasiment impossible à respecter en 2020) et des interventions précises et limitées. Et quand elle précise qu’elle ‘’fera le nécessaire’’, c’est bien différent du ‘’tout ce qui servira’’ de Draghi à l’époque et l’Italie avec Macron à la place de Sarkozy voudraient le transformer en une approche commune des gouvernements face à la récession qui menace. Avant-hier, seules l’Italie, la France et l’Espagne ont demandé un plan commun de relance de l’économie. Il faut un paquet de centaines de milliards. Merkel n’a pas dit grand-chose pour sa part mais on a compris qu’elle se prépare surtout à demander une suspension des règles sur les aides d’Etat qui lui permettra de régler les questions ouvertes en Allemagne. Elle compte sur le fait que son pays a la disponibilité de places en thérapie intensive la plus élevée d’Europe (29 pour cent mille habitants), le double de la France et trois fois plus que l’Italie. La Hollande et les Scandinaves sont pour leur part encore moins disponibles aux propositions de Conte, Sanchez et Macron. On l’a vu hier à Bruxelles où sur le calendrier du prochain sommet européen des 26 et 27 mars, inchangé, et où était ajoutée à la fin la pandémie la plus importante de ce dernier demi-siècle. Lagarde insiste pour réagir tous ensemble, et il n’est pas dit que, avec la Chancelière, elle soit plus convaincante que Sarkozy ».
ARTICLE, Corriere della Sera, P. Valentino, « Le parachute de l’Europe », « Merkel : il faut agir ou le virus sera partout. Vienne ferme les frontières avec l’Italie » : « Merkel s’est exprimée, ouvrant entre autres à une flexibilité majeure dans la zone euro. Sa sortie a mis sous pression également le Président français, critiqué en France pour ne pas avoir assez fait, et qui a annoncé un discours à la Nation. Sa porte-parole, cependant, en répondant à une question a dit que l’Italie a commis des erreurs dans certaines réponses à la crise ».
ARTICLE, La Stampa, F. Grignetti : « L’épidémie fait aussi peur aux passeurs : les débarquements s’arrêtent » : « Depuis deux semaines il n’y a eu aucun départ de migrants depuis la Libye, la Tunisie et l’Algérie. Le dernier débarquement important est du 27 février, quand 194 personnes arrivèrent à Messine.Depuis, avec la multiplication des mauvaises nouvelles, entre contaminations, hospitalisations et morts en Italie, le flux de clandestins s’est magiquement arrêté. Les navires humanitaires restent loin des côtes italiennes. Il est compréhensible que la décision de la ministre de l’Intérieur Luciana Lamorgese, qui impose une quarantaine de 14 jours pour les volontaires qui devraient rester confinés dans le port ne leur fasse pas plaisir. La présidente de l’Ong « Mediterranea Saving Human » considère que l’imposer seulement aux navires humanitaires et pas aux navires commerciaux est une discrimination. Les précautions servent à protéger aussi ceux qui travaillent dans les centres de premier accueil. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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