"Les équilibres renversés, le PD met le M5S au pied du mur."
28/01/2020
Italie. Revue de presse.
Au lendemain des élections régionales, les médias transalpins se penchent sur les conséquences du résultat et rapportent les réactions politiques. Les observateurs relèvent dans l’ensemble le renversement de poids entre les partis de la majorité, avec la forte baisse de popularité du M5S et la volonté du PD de dicter les priorités de l’agenda politique : « Gouvernement, le PD demande la « Phase deux » » - ‘’Zingaretti demande une alliance électorale avec le M5S, soutenu par Conte mais Crimi dit non’’ (Corriere della Sera), « Le PD à Conte : ‘’modifions l’agenda’’ » - ‘’Conte prévient Franceschini : pas de rétorsions contre le M5S’’ (La Stampa), « L’offre de Conte au PD divise le M5S » - ‘’Conte prône un front contre la droite’’ (Il Messaggero) « Romano Prodi : ‘’ouvrons les horizons du PD’’ » - ‘’Le père de l’ « Olivier » appelle à s’ouvrir au monde civil, notamment aux « sardines »’’ (La Repubblica), « Le gouvernement change de peau » - ‘’Les équilibres renversés, le PD met le M5S au pied du mur’’ (Il Giornale).
ANALYSE, Repubblica, S. Folli, « Les grandes manœuvres du Palais Chigi » : « Sans être le chef de ce Mouvement désorienté, G. Conte considère néanmoins en représenter le point de repère. L’option offerte est naturellement que le gouvernement tienne jusqu’à la fin de la législature : un axe PD-M5S pour sauver ce qui peut être sauvé, construit sur l’idée que le bipolarisme est réapparu au lendemain des élections en Emilie-Romagne. Et puisque le bipolarisme a besoin d’un adversaire bien identifié, Conte a répété son attaque contre Salvini. L’ancien ministre est ainsi « indigne » pour l’histoire de l’interphone. Le Président du Conseil a ainsi fait comprendre que l’accord entre le PD et le M5S existe si lui-même en représente le point d’équilibre, en fonction anti-Salvini. Conte s’est donc dépêché d’élargir le fossé entre la droite et la gauche, étant conscient que c’est seulement de cette manière qu’il peut conserver son rôle ».
COMMENTAIRE Sole 24 Ore L. Palmerini « Le Quirinal et le risque d’un enlisement du gouvernement » : « Malgré le soulagement de G. Conte et de N. Zingaretti après les élections de dimanche, le danger pour l’exécutif est celui de finir dans les sables mouvants. Il a été décidé de tenir le référendum sur la coupe des parlementaires le 29 mars. Mattarella a accepté. Ce référendum représente une sorte d’assurance-vie parfaite : d’ici cette date il n’y aura de place ni pour une crise ni pour la dissolution des Chambres. Une fois la coupe adoptée, avec un Parlement amoindri à 600 élus, les sénateurs et les députés se garderont bien de renoncer à leur siège. Toutefois, la « phase 2 » demandé par Zingaretti à Conte risque de se transformer en un faux départ. Zingaretti devra faire attention à vouloir une redistribution de force au sein du gouvernement sans trop secouer l’arbre du M5S qui pourrait tomber. Du coup, la « relance » pourrait se révéler un « jeu d’équilibre ». »
ANALYSE, Corriere della Sera, M. Breda : « Maintenant, pour le Quirinal le gouvernement ne doit pas ‘’flotter’’ » : « Le Président de la République, Sergio Mattarella, ne se fait aucune illusion : l’épreuve de force de Matteo Salvini n’est pas terminée, malgré sa défaite aux élections régionales en Emilie Romagne. En mai, il y aura d’autres élections régionales et Mattarella sait très bien que Salvini continuera sa campagne électorale permanente, totalement indifférent au risque de maintenir le gouvernement et les institutions sous pression. Le leader de la Ligue ne baissera pas le ton dans ses défis et pour cette raison Mattarella fait attention à préserver la stabilité et surtout à veiller sur l’agenda du gouvernement qui doit maintenant continuer de travailler sur des mesures concrètes : décider, donc, rapidement sur la crise des entreprises italiennes (ILVA et Alitalia), sur les agences fiscales, sur les nominations ainsi que sur un programme économique avec la « relance verte » déjà annoncée ».
EDITORIAL, Stampa, S. Lepri, « L’UE attend de Conte la réduction de la dette publique » : « Si les marchés financiers ont réagi avec soulagement au résultat électoral en Emilie-Romagne, ce n’est certainement pas par sympathie politique. C’est parce que, en perspective, que M. Salvini se rapproche du pouvoir les inquiète : ses promesses trop nombreuses mettrait la soutenabilité de la dette italienne à dure épreuve. Pour les mêmes raisons ce résultat est apprécié en Europe. Le gouvernement Conte 2 est traité avec bienveillance non pas parce qu’on le croit capable de trouver des remèdes durables aux maux de l’économie italienne, mais parce que l’on espère qu’au moins il ne les aggrave pas, ce qu’avait fait le Conte 1. »
ARTICLE Il Messaggero C. Fusco « Les sardines préparent l’assaut : maintenant un vrai parti pour survivre » : « Le rideau tombe sur les Sardines, pour le moment. Toutefois, pour ne pas se disperser dans la mer de la politique, elles tentent le grand bond. Dans une note interne qui est aussi un manifeste, les fondateurs annoncent ‘’depuis dimanche, les Sardines sont entrées dans une nouvelle phase. On travaille pour créer, à partir de Naples, une structure capillaire, coordonnée et unie vers une direction claire et partagée’’. L’intention, donc, est d’éviter les caméras pour ‘’avoir plus de temps pour parler entre nous et nous coordonner, sans avoir hâte et en pouvant se concentrer sur les initiatives, sur le renforcement des groupes locaux et sur l’implication des personnes qui voient dans les Sardines un possible point d’atterrissage’’. L’objectif est d’arriver préparés à la rencontre nationale de Scampia (Naples) des 14 et 15 mars et élaborer l’expérience lancée avec les élections en Emilie-Romagne »
ANALYSE Il Messaggero « En Calabre, 1 bénéficiaire sur 3 du revenu de citoyenneté a préféré ne pas voter pour le M5S » : « En 2018 le M5S, en promettant le revenu de citoyenneté à hauteur de 780€ par mois pour tous les chômeurs, avait obtenu 43,4% des voix. Or, les résultats des élections de dimanche ont été une véritable surprise. Sur les environ 70 000 bénéficiaires du revenu de citoyenneté, les 5 Etoiles ont remporté uniquement 48 784 voix. Du coup la réforme qui représentait le drapeau des « Grillini » n’a plus d’attrait, cela aussi en raison d’une distance entre ce qu’ils ont promis et la réalité ».
COMMENTAIRE, La Stampa, M. Sorgi : « Les 5 étoiles sont à un croisement, entre autonomie et un futur d’alliés » : « Le silence de Di Maio, qui en vain avait suggéré d’éviter de se présenter à ces élections, l’embarras, les phrases à moitié, le commentaire prudent du chef régent Crimi, laissent comprendre que le travail des M5S continue. »
ENTRETIEN de Graziano Delrio, chef de groupe du Pd à la Chambre des députés : « ‘’ Ne reportons plus les problèmes. Commençons par les décrets-sécurité‘’ », La Stampa, C. Bertini : « ‘’Stefano Bonaccini a gagné avec le Pd, cette histoire d’une contraposition est ridicule. Le message qui arrive au gouvernement est que si les problèmes ne sont pas reportés mais résolus, les gens reprennent confiance. Cette victoire n’a pas été de tout repos, il faut reconnaître l’honneur des armes à Salvini, nous devons reconnaître aussi l’apport décisif des Sardines. Je ne pense pas que le M5S soit en voie d’extinction ; une contamination est possible sur beaucoup de thèmes. Un parti unique n’est pas envisageable mais une alliance oui. Les thèmes de l’emploi, de la croissance des investissements et du soutien aux familles doivent être affrontés avec courage ‘’. »
ENTRETIEN, La Repubblica, de Romano Prodi, ancien président du Conseil : « ‘’La leçon est claire : les démocrates doivent s’ouvrir à la société, stop au parti des abonnés’’ » : « ‘’C’est l’esprit d’équipe qui a gagné. Bonaccini [le candidat du centre gauche pour la présidence de la Région de l’Emilie-Romagne, ndt.] a bénéficié de son travail, du soutien inconditionné du parti et du changement de climat que les Sardines ont amené. Celles-ci ont eu un double effet : elles ont créé un nouveau climat et elles ont remplis les rues, laissant à la Ligue le rôle de numéro 2. Quant aux bruits selon lesquels je serais derrière à ce mouvement, quelle fantaisie ! Non, malheureusement non. Le résultat en Emilie-Romagne renforce l’exécutif mais la résistance d’un gouvernement dépend surtout des équilibres internes aux partis. Dans les moments de crise, tu dois ouvrir les portes, il faut que Zingaretti favorise la rencontre entre intelligences, propositions et personnalités’’ ».
ENTRETIEN, de Matteo Renzi, leader d’Italia Viva et ancien Président du Conseil : « ‘’ Le Pd a une opportunité, il doit nous suivre sur les thèmes réformistes, assez de populisme pro M5S‘’ », La Stampa, F. Bei : « ‘’ Conte doit absolument aller de l’avant. Mais il faut qu’il augmente le taux de réformisme du gouvernement, sinon nous ferons un grand cadeau à Salvini. La législature tiendra, où voulez-vous qu’aillent les parlementaires M5S ? Je ne crois pas qu’ils aient hâte de rentrer chez eux. Forza Italia a touché un score très bas, cela ouvre pour nous des scénarios merveilleux, nous avons des prairies devant nous. Il ne faut pas dormir tranquille, Salvini est encore très fort et le sous-estimer serait une erreur grave. ‘’ »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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