"Salvini et "la stratégie du piton". Une étreinte serrée jusqu’aux élections."
29/10/2019
Italie. Revue de presse.
Les tensions au sein de la majorité, après la défaite aux élections régionales d’Ombrie, font les gros titres des médias transalpins. Selon certains observateurs, le Quirinal préfèrerait attendre l’adoption de la loi de finances avant d’envisager la possibilité d’élections anticipées. « Di Maio : stop aux alliances avec le PD » - ‘’Tensions au sein de la majorité. Conte minimise’’ (Corriere della Sera), « Di Maio : je dois garder les 5 Etoiles loin de la gauche » - ‘’Le leader du Mouvement prend les distances après la défaite’’ (La Repubblica), « Conte-Di Maio, bras-de-fer sur le PD » (La Stampa), « Echec de l’alliance, le gouvernement vacille » (Il Messaggero), « Flop de l’alliance, chaos dans le gouvernement » (Il Mattino), « Bye bye Giuseppi » - ‘’Le Président du Conseil doit faire face à une majorité qui implose et à des pépins judiciaires’’ (Il Giornale).
RETROSCENA (coulisses) Corriere della Sera M. Breda « Pour le Quirinal, la loi de finances est le vrai test. En cas de crise, élections anticipées » : « La débâcle de l’alliance de gouvernement aux élections en Ombrie inquiète le Quirinal. Du point de vue de la Constitution, le Président de la République ne peut pas retirer la confiance à un gouvernement en charge. Il ne peut que suivre les faits. L’adoption de la loi de finances sera le baptême de feu. A ceux qu’il a rencontrés récemment, Mattarella a fait savoir qu’en cas de crise, il ne chercherait pas à trouver des alternatives afin de prolonger cette législature tourmentée. Un retour aux urnes aurait lieu, a-t-il fait sévèrement savoir, sans tenir compte des calculs sur lesquels les forces de la Chambre et du Sénat élieront son successeur. Il est probable que le Chef de l’Etat veuille bientôt y voir clair dans les intentions des partis. L’Italie a trop de problèmes qui requièrent le sens de responsabilité ».
COMMENTAIRE Sole 24 Ore L. Palmerini « Le gouvernement otage du déclin du M5S » : « La question qui a été abordée dans toutes les réunions des partis composant la majorité est ‘’combien pourra encore durer le Conte II dans des conditions pareilles ?’’. Ce n’est pas uniquement le pacte entre d’anciens ennemis qui n’a pas marché. La fuite des électeurs du M5S a commencé bien avant et la tendance décroissante fait trembler le gouvernement. Le point est : combien de temps encore le groupe parlementaire 5 Etoiles parviendra-t-il à rester uni et à quel point le risque d’une scission est-il concret ? Par ailleurs, les élections en Ombrie ont mis en évidence qu’une bonne partie de l’électorat 5 Etoiles est passé à la droite de Salvini et Meloni. La loi de finances sera le premier test pour la tenue du Mouvement. Et puis il y a le PD de Zingaretti, pris au piège de son image de ‘’responsable’’, décidée lors de la création du gouvernement, qui ne peut pas s’y soustraire pendant l’adoption du budget ».
COMMENTAIRE, La Repubblica, S. Folli : « Trois questions pour un naufrage » : « Le jour après la débâcle des élections en Ombrie, on peut se poser trois questions : que deviendra le M5S ? Que deviendra le gouvernement Conte ? Et que deviendra l’Emilie-Romagne après les prochaines élections régionales en janvier ? Les trois réponses sont liées. L’histoire des Cinq Etoiles se termine ainsi, et leur ambition de construire un mouvement de lutte et de gouvernement, moitié antisystème et moitié enraciné dans le système - voire au sein du gouvernement, se termine aussi. Le M5S peut décider de devenir un courant externe du PD, en acceptant l’entente stratégique offerte par Dario Franceschini, mais l’Ombrie fait comprendre que les jeux politiques de pouvoir ne sont pas appréciés par les électeurs. Il n’existe plus cette aura magique que Beppe Grillo avait su créer autour du Mouvement, au début de cette aventure, le contrat avec Salvini d’abord, puis le pacte de gouvernement avec le centre gauche, ont produit des effets désastreux. Le résultat des élections en Ombrie, 7 %, ne permet pas au M5S la ‘’ troisième voie ‘’ : redevenir autonome. Conte aussi se trouve dans une position de faiblesse et de fragilité, après ces élections, on se demande comment il peut diriger le gouvernement, faire adopter la prochaine loi de finances et gérer une politique économique pour la croissance. Mais Conte pourra se servir de sa faiblesse précisément parce qu’il n’y a aucune alternative. Une chute du gouvernement ne concernerait pas seulement ‘’ l’avocat du peuple ‘’ mais plutôt toute la coalition, qui n’a jamais eu une vision politique commune. La troisième réponse, celle du résultat des prochaines élections en Emilie-Romagne, est claire : Bologne n’est pas Pérouse, une défaite du centre gauche serait une véritable catastrophe et ouvrirait un scénario sans précédents. Excluant le pacte M5S-PD, la seule voie praticable serait un accord sur le nom de Bonaccini (ndr : actuel président de la Région Emilie-Romagne) entre le PD et le parti de Matteo Renzi. Il ne s’agit pas d’un choix facile mais il est, peut -être, la seule possibilité pour construire un offre politique capable d’affronter le défi ».
EDITORIAL, Fatto quotidiano, M. Travaglio, – « Pulvis et Ombrie » : « Si les élections régionales en Ombrie tenaient lieu de test national – et elles le sont pour 2% de l’électorat – il faudrait les comparer aux Européennes du 26 mai : on découvrirait que le seul parti qui gagnait des voix est le FdI de Meloni, en les prenant à FI, alors que même la Ligue, triomphante, en perd 17 mille. Salvini avait déjà conquis l’Ombrie en mai et le PD avait perdu tout espoir, après 49 ans de gouvernance ininterrompue. L’effet ‘’char du vainqueur’’ a fait le reste. Le Mouvement 5 étoiles et le PD auraient pu donc donner l’Ombrie pour perdue et aller séparés à l’abattoir, enlevant chacun quelques points de plus, puis raconter que la victoire était le résultat de leur séparation et qu’il fallait s’unir dans des régions à prendre. Mais non, Di Maio, Zingaretti et Conte se sont présentés pour une photo de groupe ».
RETROSCENA Il Messaggero M. Conti « ‘’Système proportionnel ou tout saute’’ : la mine du M5S met en alarme Conte » : « Le Palais Chigi tente de désamorcer les tensions de l’après-élection ‘’je laisse les leaders des partis faire leurs évaluations’’ a dit hier Conte, à l’abri du Palais Chigi en attendant que la tempête se calme. Pour Di Maio, le système électoral proportionnel est la seule voie pour redonner de l’espace au M5S. Il est persuadé que sur ce point la majorité avancera unie. Il sait qu’il peut compter sur Renzi et aussi sur une partie de Forza Italia, qui ne veut pas mourir en souverainiste. Toutefois, au sein du PD, demeure une vocation majoritaire, la tentative étant de nuire à Italia Viva de Renzi. Ceci dit, Conte vise des délais longs (avant les prochaines élections en janvier en Emilie-Romagne) et peut compter sur le soutien du Quirinal ».
RETROSCENA Il Messaggero A. Gentili « Le siège autour de Di Maio commence » : « L’écart entre le président du Conseil et le leader du M5S se creuse. En même temps, le sentiment de rébellion monte au sein du Mouvement. Tous demandent à Di Maio de faire une autocritique et de ne pas déverser les responsabilités sur Conte. Au sein du M5S la majorité semblerait soutenir Conte et l’alliance avec le PD. Quant à Grillo, il avait d’abord posté sur son compte twitter, après le résultat en Ombrie, un ‘’je pensais pire’’. Puis, ce post a été effacé pour être remplacé par un lien pas bien interprétable : la chanson ‘’Black Hole Sun’’ de Soundgarden ».
ARTICLE, La Stampa, F. Grignetti « Salvini et ‘‘la stratégie du piton’’. Une étreinte serrée jusqu’aux élections » : « Ce ne sera pas un Salvini déchaîné. La stratégie du Capitano prévoit des temps assez longs et il en a besoin pour faire cuire bien à point la majorité jaune-rouge. Il est convaincu que, désormais, plus personne n’arrêtera la vague léguiste. ‘’Prenez l’affluence de vote : 15% en plus par rapport à 2015, c’est un signal d’une envie de démocratie’’. Son plan pour conquérir le Palais Chigi prévoit un siège lent, en conquérant une région à la fois, jusqu’à ce que la majorité implose toute seule. Le coup de poing définitif pourrait être une victoire en Émilie-Romagne, qu’il considère maintenant possible. »
ENTRETIEN, Corriere della Sera, de Luigi Di Maio, leader du Mouvement 5 Etoiles, « Nous devons devenir autonomes, j’étais perplexe sur l’alliance » : « ‘’Je crois qu’il faut être humble, repartir sans attentes particulières et affronter les élections régionales ou locales avec l’esprit de ceux qui veulent offrir une opportunité aux citoyens de participer. Il n’y avait pas de mystère sur le fait que j’étais perplexe sur la formation du gouvernement mais l’approbation de la coupe des parlementaires, la prison pour les grands fraudeurs du fisc et le décret stabilisant les enseignants précaires me font croire que nous sommes en train de faire des choses justes pour les Italiens et il est juste d’aller de l’avant. Participer seuls aux élections locales a toujours été la position du M5S. Celle en Ombrie n’était qu’une tentative. Elle n’a pas marché, nous allons de l’avant. J’ai eu au téléphone Franceschini, j’aurai bientôt Zingaretti : on travaille bien avec eux (le PD), mieux qu’avec la Ligue. Dans les prochaines heures, je contacterai nos élus en Calabre et en Emilie-Romagne pour commencer un parcours. Les mesures que nous adopterons dans la loi de finances seront cruciales pour les Italiens. Les exit poll non’’. »
ENTRETIEN de Giorgia Meloni, leader de Fratelli d’Italia, « C’était un vote de confiance, ils ont perdu. Si nous gagnons en Emilie, les élections seront inévitables » : « ‘’Le succès en Ombrie montre un centre droit en pleine santé. C’est un paradoxe : plus le gouvernement reste en charge, plus il s’effondre dans les sondages. Mais le centre droit a le devoir et le droit de mettre en place un projet unifié et alternatif pour gouverner. Je ne peux pas donner de conseils au Chef de l’Etat mais il est clair qu’une réflexion s’impose de manière naturelle. Les électeurs nous ont primé car nous sommes unis et crédibles’’ ».
REPORTAGE, La Stampa, N. Zancan: « L’Émilie devient décisive. Le Pd local courtise les renziens » : « Ceux de gauche sont plutôt traumatisés. Les 5 étoiles se portent encore pire. La Ligue est en train de choisir son siège dans la périphérie de Bologne, pour lancer la campagne électorale de la sénatrice Lucia Bergonzoni. Tous savent parfaitement que le défi électoral pour la région Émilie-Romagne du 26 janvier 2020 sera décisif. C’est un jour d’inquiétude pour Bologne ‘’la rouge’’. Mais aussi pour le M5S. Aux dernières élections politiques de 2018 le résultat était 27.5% : premier parti. Le confronter aujourd’hui avec le 8% de l’Ombrie fait peur. ‘’Reproposer l’alliance avec le PD est impensable’’ fait filtrer le porte-parole régional M5S Massimiliano Patasso. Le gouverneur PD sortant et candidat aux prochaines élections régionales, Stefano Bonaccini, n’est pas du même avis : ‘’ Il y a un centre gauche ample qui s’ouvre au civisme. S’il y a accord, il sera sur les contenus et sur le projet’’. Il cherche aussi à ne pas perdre l’ami, plutôt défilé, Renzi qui lui a annoncé son soutien avant la grande défaite. ‘’La victoire en Ombrie est une prémice extraordinaire’’ dit la sénatrice candidate pour la Ligue, Lucia Bergonzoni. ‘’Le 26 janvier la Ligue peut gagner, l’Émilie-Romagne peut devenir la Bavière d’Italie. ’’ »
ARTICLE, La Repubblica, A. Ziniti : « Ocean Viking, dixième jour en mer. Appel à l’Europe : faites-les descendre » : « Les ONG SOS Méditerranée et Médecins sans frontières (MSF) ont lancé lundi un appel aux dirigeants européens pour qu'ils autorisent le débarquement des 104 personnes secourues par leur navire Ocean Viking au large de la Libye et bloquées en mer depuis 10 jours. L'Ocean Viking a pris contact avec les autorités maritimes italienne et maltaise, les deux pays les plus proches, pour trouver un "port sûr". Le dixième jour est passé et l’attente moyenne de la période où Salvini était au Viminal a été dépassée. Roberto Saviano a déclaré que de la part du gouvernement il n’y a aucun changement ni aucune discontinuité ».
EDITORIAL, Piero Sansonetti, directeur du Riformista (ndr : paru entre 2002 et 2012, alors sous la direction d’A. Polito (actuel directeur du Corriere rédaction de Rome), ressort ce 29/10) – « Ocean viking abandonné – Naufragés : s’il n’y a plus Salvini, il est inutile de les sauver » : « Maintenant que Salvini n’est plus ministre de l’Intérieur, le sort des naufragés n’intéresse plus personne semble-t-il. Le soupçon est légitime après onze jours entre Malte et Lampedusa avec 104 personnes à bord pour l’Ocean Viking : alors c’était uniquement une question politique et pas une conviction morale ou un élan humanitaire ? 90 autres sur l’Alan Kurdi. Silence ou distraction ? Ou l’émotion anti-xénophobe était seulement une mise-en-scène ? La ministre de l’Intérieur actuelle peut-elle nous répondre ? ».
(Traduction : ambassade de France à Rome)
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