Lampedusa.
30/03/2011
« A Lampedusa et en Europe, l’Italie en quête de ‘leadership’. » (Stefano Folli, Il Sole 24 Ore) : « Il est très opportun que le président du Conseil aille aujourd’hui à Lampedusa. Il aurait même dû le faire plus tôt. L’excès de silence est un luxe dont un chef de l’exécutif ne doit pas abuser. Au reste, le psychodrame des migrants n’est qu’une des deux faces de la crise internationale qu’affronte l’Italie sans savoir comment en sortir. L’autre concerne la gestion du dossier libyen et les rapports avec les alliés. Donnons acte à Frattini de ses efforts. Mais le peu de poids de l’Italie sur la scène internationale saute aux yeux, malgré quelques succès mineurs (commandement naval du blocus, réunion prochaine à Rome du ‘groupe de contact’). Moins notre gouvernement pèse politiquement, plus il est dur de rester au cœur des décisions, d’empêcher que d’autres décident pour nous ou laissent nos demandes sans réponse – comme à propos des migrants, encore évoqués par Frattini à Londres. Le problème, double, est de ‘leadership’ et de crédibilité. A Lampedusa comme en Europe, il s’agit d’abord de démontrer à l’opinion et aux partenaires qu’à Rome il y a une direction politique solide malgré les soucis judiciaires du président du Conseil. A propos d’immigration, il a régné ces jours-ci trop de confusion, hormis les propos fermes et clairs de Napolitano ; la Ligue exprime deux lignes : l’une responsable (Maroni demandant l’aide des régions), l’autre électoraliste (Bossi attaquant les migrants en dialecte milanais). A ce stade, Berlusconi se doit de retrouver un ‘leadership’ convaincant. Tel est l’enjeu de sa visite à Lampedusa, après quoi l’Italie pourra se consacrer à retrouver de la crédibilité en Europe. Là encore, l’absence de Berlusconi a pesé, et c’est de là qu’il faut repartir – en renouant avec les partenaires, après les incompréhensions des derniers jours. La tension ne peut que nuire au pays et aggraver son isolement. Renouer les fils est une mission délicate que Berlusconi devra accomplir en personne. »
« La Ligue du Nord rêve d’un coup pour clarifier une image brouillée » (Massimo Franco, Corriere della Sera) : « Quand Bossi a déclaré qu’il fallait d’abord ‘ramener les immigrés chez eux’, ce n’était pas qu’une menace. Le n°1 de la Ligue a indiqué que Maroni, ministre de l’Intérieur, allait bientôt lancer un signal fort. L’image de Berlusconi visitant Lampedusa pour y vérifier l’implosion des infrastructures pourrait donc se superposer à une autre : celle de la police mettant les Tunisiens sur six bateaux et se préparant à les ramener au Maghreb – le ‘rapatriement forcé’ dont parlait hier La Padania. Berlusconi et son ministre montreraient alors deux visages complémentaires de la lutte contre une urgence inattendue qui fait peur à la Ligue, s’agissant d’un thème sur lequel elle a bâti une large part de son succès électoral. La Ligue se rend compte qu’elle donne une impression d’impuissance, comme les autres partis politiques, face à ce problème qui souligne la solitude de l’Italie en Europe et les dangers d’une ‘invasion’ maghrébine. Lampedusa devient la métaphore du cauchemar italien et continental. Un problème que les ‘léghistes’ mettent en exergue afin qu’on agisse au plus vite, sans quoi même la Ligue passera pour impuissante face à cette marée humaine. Bien que l’opération apparaisse audacieuse et risquée dans son impact international, la seule alternative consiste à continuer de gérer seuls les suites des débarquements. En théorie, la décision de répartir les migrants dans les régions est prise, mais quand Bossi dit qu’‘aucune région du Nord n’est contente d’accueillir les immigrés’, il provoque les régions du Sud (Sicile, Pouilles) déjà éprouvées. L’objectif principal de la Ligue est de ‘stopper la fuite vers le Nord’, vers la frontière française car les immigrés se retrouveraient alors bloqués en Italie. Depuis New York, Napolitano appelle les Italiens à ne pas donner ‘un spectacle d’indécision et de division’ et à montrer ‘cohésion et solidarité’. Mais le gouvernement est tenté par l’épreuve de force, avant tout pour défier l’indifférence européenne. Reste à savoir à quel prix. »
(Traduction : ambassade de France à Rome).
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