Italie : tensions Nord-Sud.
26/07/2009
« En 11 ans, 700 000 migrants du Sud vers le Nord » (Lorenzo Salvia, Corriere della Sera) : « En 2008, 122 000 Italiens ont quittés le Sud pour le Nord à la recherche d’un travail. Ces 11 dernières années, le Sud a perdu 700 000 personnes en faveur du Nord. Et ces chiffres ne concernent pas les migrations ‘pendulaires’ : en 2008, 173 000 personnes ont fait la navette entre leur travail au Nord et leur famille au Sud. Le ‘rapport 2009 sur l’économie du Mezzogiorno’ présenté hier par Svimez prouve que nous en sommes toujours au même point : deux pays en un. Cela préoccupe le chef de l’Etat : ‘le fossé entre Nord et Sud doit être effacé des mentalités’. L’émigration ne résulte pas seulement d’un pays à deux vitesses. Les chiffres de l’emploi sont clairs : en 2008, le nombre d’emplois a crû de 217 000 au Nord et baissé de 34 000 au Sud. Le chômage des 15-24 ans atteint 14,5% au Nord, 33,6% au Sud. Les industriels n’investissent plus au Sud. De 1995 à 2005, ces régions se sont enfoncées dans la pauvreté ; tandis que les régions les plus pauvres des pays européens progressaient de 3% par an, le Mezzogiorno ne progressait que de 0,3%. »
« Bossi : ‘nous n’avons pas besoin de révision politique d’ensemble, mais d’idées’ » (Barbara Fiammeri, Il Sole 24 Ore de dimanche) : « ‘Des idées pour l’avenir’, tel est le message qu’Umberto Bossi lance à Berlusconi de la fête du ‘Rédempteur’ à Venise. Il est contre l’idée de Berlusconi de réunir le conseil des ministres dans les Abruzzes pour ‘consolider le gouvernement’, il veut progresser dans la mise en œuvre du programme, surtout sur le fédéralisme fiscal. Il demande à la majorité d’être prudente dans ses rapports avec le Quirinal et veut faire de Venise la capitale de la ‘Padanie’ avec un maire léghiste. »
« Berlusconi rassure Bossi : ‘il n’y aura pas de deuxième phase’ » (Marco Conti, Il Messaggero) : « Le Senatur ne veut entendre parler ni de ‘vérification’ ni de ‘deuxième phase’ du gouvernement. Il craint qu’on ne veuille remettre en discussion les équilibres de la majorité : ‘le gouvernement n’a pas besoin de discontinuité et il a déjà assez fait pour le Sud’. Malgré les assurances de Berlusconi, Umberto Bossi a peur parce que les rapports avec les parlementaires du Sud sont très tendus, ce qui risque de provoquer des problèmes à la rentrée de septembre. Il a de nouveau haussé le ton en faveur de la Padanie. GF Rotondi, ministre chargé de la mise en œuvre du programme électoral, a tenté de résoudre le problème en proposant une ‘commission Attali’ pour le Sud. »
« Plutôt qu’une autre Ligue, le parti du Sud est pour l’heure une bizarrerrie » (Stefano Folli, Il Sole 24 Ore de samedi) : « Il y a un malaise évident dans les régions au sud de Naples dont le pivot se trouve dans la Sicile de R. Lombardo, leader autonomiste en rupture totale avec Berlusconi. Il existe un second pôle, une sorte de courant sudiste, qui comprend des membres du PdL comme Miccichè, frustrés et revanchards. On ne sait pas très bien encore quel est leur rapport avec Lombardo, mais ils ne veulent pas rompre avec le président du conseil. Le troisième pôle est transversal avec des membres du centre-gauche, comme les présidents de la Calabre et de la Campanie, en difficulté avec le PD, pour lesquels s’associer à Lombardo serait une façon de revenir dans le jeu. Le parti du Sud est une bizarrerie pour trois raisons. Tout d’abord, il n’a pas un centre de gravité, mais trois. Ensuite, on ne peut pas le comparer au parti nordiste, qui procède d’un lien très fort avec le territoire, ce qui n’est pas le cas au sud. Troisièmement, jusqu’à présent, Berlusconi était le seul capable au sein de la majorité de rassembler Nord et Sud. Si le parti du Sud voit le jour, même comme une sorte de courant au sein du PdL, l’équilibre complexe du centre-droit risque de sauter - et avec lui le bipolarisme. Berlusconi va devoir en prendre conscience et agir en conséquence. »
Entretien avec Ignazio La Russa, ministre de la Défense, dans La Stampa – « Il faut davantage de démocratie au PdL » : « I. La Russa répond à l’entretien de Casini d’hier avec La Stampa en lui reprochant son ‘vieux-jeu politique’ ignorant le bipartisme, avant de s’inquiéter pour ce Parti du Sud en train d’ébranler le PdL en Sicile. ‘Il y a un vide organisationnel au PdL. A des problèmes d’organisation, on répond par la réorganisation. Le Parti du Sud est l’expression ultime d’un malaise d’organisation, d’une périphérie qui se sent peu représentée par son centre. Il est porté par des personnes dont le parcours politique est plus derrière elles que devant. Qu’on ne me parle pas de manque d’égards de la part du gouvernement. Personne n’a fait davantage pour le Sud que ce gouvernement. La solution pour le Sud existe déjà et s’appelle PdL. Malgré mes origines siciliennes, je ne suis pas favorable à ce parti du Sud : ce qu’il faut, au contraire, c’est une politique nationale’. »
« Le vrai risque pour Berlusconi est que son image se dégrade peu à peu » (Stefano Folli, Il Sole 24 Ore) : « La popularité de S. Berlusconi monte-t-elle ou baisse-t-elle ? Dans un sondage (Ipr Marketing pour Repubblica) il perd quatre points, passant de 53 à 49 ; dans un autre (Piepoli pour Affaritaliani.it), scénario inverse : popularité en hausse à 53%. Dans un cas, on pense à un début d’impact négatif des révélations sur les soirées au palais Grazioli ; le second suggère au contraire que Berlusconi, après le G8, est plus fort que les scandales. Difficile de dire quelle version est plus proche de la réalité. Jusqu’ici, la campagne du groupe Espresso-Repubblica n’a pas porté de coup fatal, ni prouvé d’incompatibilité lourde entre le comportement privé de Berlusconi et ses devoirs publics – en apportant par exemple la preuve d’un délit commis ou couvert, ou d’une menace à la sécurité nationale. Jusqu’ici, il a suffi au président du Conseil, aidé de ses avocats, de tendre un rideau de silence entre le scandale et lui. Cela étant, les conséquences politiques de l’affaire sont une chose, ses retombées d’ordre psychologique et médiatique en sont une autre. Si nous ne sommes pas face à un Watergate italien, certaines analogies existent avec l’affaire Clinton-Lewinski ; le président des Etats-Unis resta alors en selle, mais fut contraint de traverser un calvaire personnel, avec discours de contrition adressé à la nation. Il en sortit avec une image très affaiblie, et sa chance fut que son épouse Hillary reste à ses côtés, fût-ce par calcul. Voilà ce que risque Berlusconi : la lente dégradation de son image, c’est-à-dire de son charisme et de sa popularité, fondement de son pouvoir personnel depuis 15 ans. La pire issue, d’un certain point de vue, car fragilisant la figure du président du Conseil à l’heure des choix difficiles. »
Entretien avec Raffaele Lombardo, président de la région Sicile dans Il Riformista – « Silvio ne gouverne qu’une seule des deux Italie » : « Ce soir, je rencontre Berlusconi pour lui demander s’il a l’intention de gouverner les deux Italie. Ce n’est pas une opinion : l’Istat et le Svimez travaillent sur des statistiques. L’Italie est coupée en deux, il y a 700 000 cerveaux en fuite : l’absence de compétences est pire que le manque d’infrastructures. La semaine dernière, j’ai signé quelques modifications au plan de dépense des fonds FAS pour compenser les choix faits pas l’Etat. Maintenant, la Sicile attend les fonds. Le Parti du Sud n’existe pas encore, mais on s’y achemine. L’intérêt pour le Sud se réveille peu à peu, dans les Pouilles, en Calabre, en Campanie. C’est bien plus important que de fonder un parti. Sur le texte anti-crise, je ne voterai pas contre Berlusconi, car nous faisons partie de l’alliance qui soutient le gouvernement, mais le groupe parlementaire pourrait s’abstenir. J’attends de Berlusconi qu’il prenne acte d’une situation insoutenable, quoique sans me faire trop d’illusions. »
« L’identité du PdL sous la pression des poussées localistes » (Massimo Franco, Corriere della Sera) : « Le président du Conseil est inquiet d’une dérive qui, au-delà du ‘parti du Sud’, tendrait à remplacer la stratégie berlusconienne d’amalgame des deux Italie par une politique fondée sur la situation géographique au nord ou au sud du Pô. Le phénomène a commencé avec la Sicile de R. Lombardo avant de s’étendre à la Campanie et à la Calabre. Il semble que Berlusconi cherche à l’exorciser, y voyant la fin de la politique engagée en 1994 et de l’originalité du PdL comme force politique présente sur tout le territoire et apte à réunir des intérêts différents. Le phénomène se développe en opposition à la Ligue qui s’est récemment étendue à l’Emilie-Romagne et à la Toscane. Face à cette dérive, Berlusconi pourrait utiliser les conflits internes à son camp pour se renforcer : un parti du Sud en rébellion contre le Palais Chigi pourrait devenir une arme dans ses négociations avec la Ligue qui revendique des régions aux prochaines élections. Berlusconi assure que dans trois ans il sera encore là. C’est fort probable. Son problème : comment neutraliser les caciques locaux et parvenir à juguler une éventuelle régression ‘léghiste’ au sein du PdL. »
« Ironie de Berlusconi sur l’affaire ‘escorts’ : ‘les Italiens ne sont pas idiots’ » (Paolo Foschi, Corriere della Sera) : « Hier matin, à l’inauguration du chantier ferroviaire Brescia-Bergame-Milan, puis dans l’après-midi, devant la direction du PdL réunie à la Chambre, Berlusconi a ironisé : ‘je ne suis pas un saint, tout le monde l’a compris et j’espère que Repubblica fera de même … Chez moi j’ai aussi reçu des chefs d’Etat, pas seulement des starlettes : je suis un homme de culture, de bon goût, élégant. Qu’on n’aille pas dire qu’il se passe chez moi des choses inconvenantes. On utilise les ragots contre moi parce qu’on n’a aucune critique à me faire’. Puis il a parlé du parti du Sud auquel il ne croit pas, ayant déjà beaucoup fait pour cette région. ‘Ma popularité est à 68%, mon gouvernement à 56%, je suis très fier de mon équipe et dans les Abruzzes nous avons fait des miracles’. Il a encouragé les étudiants à s’inscrire à ‘l’université des libertés’ qui verra bientôt le jour, puis à ‘entrer dans la magistrature, aujourd’hui aux mains de la gauche’. ‘J’ai demandé pardon à la Libye au nom de l’Italie, Kadhafi est un personnage original mais nos entreprises auront des marchés’. »
« Frattini : ‘les accusations contre Berlusconi sont fausses. Les ‘escorts’ ont été payées par les journaux’ » (Dino Martirano, Corriere della Sera) : « Franco Frattini répond à la BBC sur les dernières révélations qui se sont abattues sur Berlusconi : ‘rien n’est vrai, certains journalistes ont payé cette fille, cette prostituée pour faire des déclarations contre le Premier ministre ; c’est immoral’. Selon Frattini, ces ‘accusations sexuelles’ reposent sur des trucages. P. D’Addario réagit immédiatement en annonçant qu’elle réagirait aux calomnies devant les tribunaux. Berlusconi, de son côté, a juste dit ‘je cèderai pas au chantage’. Pour D. Franceschini, secrétaire du PD, c’est le juste retour des choses pour un Berlusconi qui a voulu mélanger politique et vie privée. Selon l’avocat de Berlusconi, si ces enregistrements avaient vraiment été réalisés, ils seraient illégaux et toute forme de publication serait interdite. »
(Traductions : ambassade de France à Rome.)
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